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Décision n° 10-00082 du 27/052010, Cour d'appel de Reims

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Juridiction : Cour d'appel de Reims - Chambre des appels correctionnels

Date de la décision : 27 mai 2010

Référence : 10-00082


Faits :

Le prévenu, locataire d'un domaine de 400 hectares sur lequel il possède le droit de chasse, comparait pour avoir notamment organiser des battues au sanglier au mois de mars, en dehors de la période d'ouverture de la chasse sans autorisation préfectorale.

Discussion :

Relaxé en 1ère instance par jugement du tribunal correctionnel de Troyes en date du 20 février 2009, le prévenu soutient devant la cour d'appel que le parc dont il est locataire doit être considéré comme un enclos cynégétique au sens du I de l'article L.424-3 du code de l'environnement. Dès lors, il considère qu'il doit bénéficier de l'exception prévu audit article permettant au propriétaire de l'enclos d'y chasser le gibier à poil toute l'année.

Aux termes de l'article L.424-3, l'enclos doit être attenant à une habitation et entourées d'une clôture continue et constante faisant obstacle à toute communication avec les héritages voisins et empêchant complètement le passage de ce gibier et celui de l'homme.

Pour démontrer que le rendez-vous de chasse constitue bien une habitation, le prévenu s'appuie principalement sur un constat d'huissier en date du 4 décembre 2008, détaillant l'installation comme une bâtisse « en dur », avec extension de chaque côté par des panneaux isolants entourant la structure d'origine, et par ailleurs équipée de l'électricité par un groupe électrogène diesel, disposant d'un chauffage central, de cinq radiateurs en fonte, d'une cuisine, d'un réfrigérateur, d'un vaisselier, d'un séjour dans lequel se trouvent plusieurs grandes tables avec chaises et d'un coin chambre avec canapé clic-clac et poêle à gaz.

En ce qui concerne la clôture, il fonde pareillement ses prétentions sur un procès-verbal de constat d'huissier exposant que le franchissement de la clôture, compte tenu de sa hauteur, est difficile voire impossible par le grand gibier. Le ministère public et la fédération départementale des chasseurs de l'Aube, à l'inverse, se basent pour contester l'étanchéité de la clôture, sur un procès-verbal de constat d'huissier faisant état de plusieurs passages d'animaux sous celle-ci et soulignant que ces animaux, pour la contourner, creusent sous les piquets de bois jusqu'à les dégager complètement et les déstabiliser.

Sur le fait d'avoir organiser des battues au sanglier au mois de mars, sans autorisation administrative, le prévenu, ayant envoyé une demande d'autorisation accompagnée d'un avis favorable du maire à la fédération des chasseurs, argue de sa bonne foi.

Décision :

Le prévenu est déclaré coupable de l'infraction reprochée. La cour d'appel, rappelant que l'habitation doit s'entendre d'une construction destinée à être habitée de façon suffisamment durable, peu importe qu'elle soit ou non actuellement habitée, considère que le rendez-vous de chasse, même s'il est équipé de façon rudimentaire, peut être considéré comme une habitation.

S'agissant de la clôture en revanche, les constats d'huissier produits révélant une absence d'étanchéité de cette dernière pour le petit gibier à poil, la cour considère que le parc ne peut être considéré comme un enclos répondant aux critères fixés par l'article L.424-3 du code de l'environnement. Le prévenu aurait donc dû obtenir une autorisation préfectorale pour tirer le sanglier au-delà de la période d'ouverture générale de la chasse. Le juge exclut ici la bonne foi du prévenu qui ne pouvait ignorer que seule l'autorité administrative a le pouvoir de délivrer une telle autorisation.

Commentaire concernant la notion de domicile :

Contrairement à l'arrêt rendu le 6 mai 2002 par la chambre criminelle de la Cour de cassation (n° 01-85565), l'équipement de raccordement autonome en énergie (un groupe électrogène en l'espèce et des panneaux solaires dans l'arrêt rendu le 6 mai 2002) est ici admis à titre de raccordement en énergie, critère matériel essentiel à la qualification du domicile (même si en l'espèce, la protection pénale accordée au domicile n'était pas en jeu). La cour d'appel réaffirme la prédominance du critère matériel sur le critère intentionnel, par le fait de mentionner qu'il importe peu que l'installation soit actuellement habitée, dés l'instant qu'elle est destinée à être habitée de façon suffisamment durable et, qu'elle est, par voie de conséquence, aménagée à cet effet.

Le caractère habitable d'un lieu permet donc de présumer l'intention du propriétaire de destiner ce lieu à l'habitation.

Textes :

Code de l'environnement :
- article L.424-2
- article L.424-3
- article L.428-5

Mots-clés :
- enclos cynégétique attenant à une habitation
- domicile
- parc de chasse
- fermeture / clôture de la chasse


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