QU’EST-CE QU’UNE TOUR AEROREFRIGERANTE ?

Une tour aéroréfrigérante humide est un échangeur de chaleur "air/eau", dans lequel l’eau à refroidir est en contact direct avec l’air ambiant. L’eau chaude est pulvérisée en partie haute de la tour aéroréfrigérante et ruisselle sur le corps d’échange. L’air traverse le système de ruissellement et est rejeté dans l’atmosphère. Le refroidissement s’effectue principalement par évaporation de l’eau ; l’efficacité du système est liée à la conception et à l’entretien de la tour aéroréfrigérante ainsi qu’aux conditions atmosphériques (température et humidité).

Un des modes de contamination avéré est la dissémination dans l’atmosphère de légionelles par des systèmes de refroidissement à voie humide fonctionnant sur le principe de la dispersion de l’eau dans l’air, également appelées tours aéroréfrigérantes. On distingue les tours à circuit ouvert et à circuit fermé.

L’air saturé de vapeur d’eau crée un nuage visible à la sortie des tours aéroréfrigérantes par voie humide. Ce nuage appelé "panache" est constitué :

  • de vapeur d’eau : c’est la quantité d’eau évaporée pour assurer le refroidissement. Elle est fonction de la chaleur éliminée.
  • de gouttes entraînées : fines particules d’eau issues du circuit de refroidissement entraînées dans l’atmosphère par la circulation de l’air dans la tour. Contrairement à l’eau évaporée, les gouttelettes entraînées sont susceptibles de véhiculer des bactéries.

ÉLÉMENTS TECHNIQUES

Les principaux éléments constitutifs d’une tour de refroidissement classique sont :

  • un système de distribution d’eau dont le rôle est de disperser de manière uniforme l’eau sous forme de gouttelettes,
  • le corps d’échange ou garnissage encore appelé "packing", dispositif au travers duquel se fait le transfert thermique entre l’air et l’eau,
  • le pare gouttelettes ou séparateur de gouttes (ensemble de chicanes) installé en sortie d’air de la tour aéroréfrigérante, conçu pour empêcher l’entraînement vésiculaire,
  • la (ou les) trappe(s) de visite, ouverture sur le corps de la tour aéroréfrigérante permettant l’accès à l’intérieur et le contrôle visuel des différentes parties constitutives,
  • le bassin situé en partie basse de la tour servant à récupérer l’eau refroidie,
  • le ventilateur qui assure un écoulement continu d’air. Il peut être situé en partie haute ou basse de la tour aéroréfrigérante,
  • éventuellement un ou plusieurs échangeurs et une pompe assurant la circulation de l’eau, pour les tours de refroidissement à double circuit ou pour les tours hybrides.

Tout exploitant d’une installation industrielle, d’un établissement recevant du public (centre commercial, hôpital, ...), d’un immeuble de bureaux, d’un immeuble de logements collectifs, etc. peut exploiter une tour de refroidissement de ce type. Celles-ci sont principalement utilisées pour la climatisation des locaux de taille importante, des salles informatiques, ou le refroidissement de procédés industriels dégageant de la chaleur.

ATTENTION : ces tours ne doivent pas être confondues avec des installations de climatisation à voie sèche, sans pulvérisation d’eau, qui ne présentent pas de risques légionellose (telles que des climatisations de voiture ou de logements individuels).

CONTEXTE RÉGLEMENTAIRE

En 2004, suite à plusieurs cas de légionelloses liés à la prolifération et à la dispersion de légionelles par les systèmes de refroidissement évaporatifs par dispersion d’eau dans un flux d’air (ou tour aéroréfrigérante), la rubrique 2921 de la nomenclature ICPE a été créée. La réglementation a été révisée en 2013 et est entrée en vigueur au cours de l’année 2014. Dans le cadre de cette rubrique sont soumis :

  • à enregistrement, les systèmes de refroidissement évaporatifs par dispersion d’eau dans un flux d’air de puissance supérieure ou égale à 3 000 kW
  • à déclaration avec contrôle, les systèmes de refroidissement évaporatifs par dispersion d’eau dans un flux d’air de puissance inférieure à 3 000 kW

LES MOYENS DE GESTION DU RISQUE LIÉ AUX LÉGIONELLES

Des mesures d’entretien préventif doivent être mises en œuvre, à l’initiative de l’exploitant, de façon à maintenir en permanence la concentration des légionella pneumophila dans l’eau à une concentration inférieure à 1 000 unités formant colonies par litre (UFC/L).

Pour cela un plan d’entretien préventif et un plan de surveillance doivent être définis à partir d’une analyse méthodique des risques (AMR) de prolifération des légionelles, en prenant en compte la conception et l’implantation de l’installation ainsi que ses conditions de fonctionnement normales et exceptionnelles. Une révision périodique de l’AMR est imposée par la réglementation en vigueur relative aux tours aéro-réfrigérantes (TAR) afin de prendre en compte les évolutions de l’installation ou des techniques et des connaissances concernant les modalités de gestion du risque de prolifération et de dispersion des légionelles.

En cas de changement de stratégie de traitement, ou de modification significative de l’installation, l’analyse méthodique des risques doit également être revue par l’exploitant, pour s’assurer que tous les facteurs de risque liés à l’installation sont bien pris en compte.

Le plan d’entretien préventif comprend la mise en place de traitements de l’eau dont l’exploitant doit avoir démontré l’efficacité sur le biofilm et/ou les légionelles. Les mesures d’entretien préventif comprennent :

  • Les opérations de nettoyage, dont le but est de réduire au maximum le biofilm dans l’installation soit par une action mécanique sur les parties accessibles soit par un traitement chimique sur l’ensemble des parois.
  • Les opérations de traitement de l’eau, dont le but est de réduire la concentration de légionelles accessibles dans l’eau. Pour cela il existe plusieurs procédés de traitement : les procédés chimiques (biocides oxydants ou non oxydants) et les procédés physiques (choc thermique, irradiation UV, filtration, ultrasons électrolyse cuivre/argent). Ces derniers sont pour l’instant peu développés pour le cas des installations de refroidissement.
  • Dans les arrêtés ministériels du 14 décembre 2013 relatifs aux prescriptions générales applicables aux installations relevant de la rubrique n°2921, il est demandé à l’exploitant de justifier :
    • le choix des produits de traitements utilisés,
    • les caractéristiques et modalités d’utilisation de ces produits (fréquence, quantités), au regard des paramètres propres à l’installation.
  • Il est nécessaire d’optimiser la stratégie de traitement afin de maîtriser les rejets liquides (cf. arrêtés ministériels du 14 décembre 2013 ; Directive cadre eau/RSDE). En particulier, les biocides non oxydants ne doivent être utilisés qu’en traitement curatif. Pour une utilisation en traitement préventif, l’exploitant devra avoir démontré qu’aucune stratégie alternative n’est possible.
  • En cas de changement de stratégie de traitement (notamment le changement des produits biocides ou biodispersant, le changement du mode d’injection des biocides ou du biodispersant, la mise en place/arrêt d’un biodispersant, le remplacement d’un biocide non oxydant par un biocide oxydant (et inverse)....), l’exploitant doit informer l’IIC en justifiant de l’efficacité du traitement sur la gestion du risque « légionelles » : l’exploitant démontre l’efficacité du traitement par la réalisation d’analyses hebdomadaires pendant 2 mois et jusqu’à obtenir des résultats < 1 000UFC/L en legionella pneumophila.

Le plan d’entretien est accompagné d’un plan de surveillance destiné à s’assurer de l’efficacité des mesures d’entretien. L’exploitant identifie dans ce plan de surveillance les indicateurs de suivi propres à son installation (ex : pH, chlore résiduel etc.), la fréquence de suivi de ces indicateurs, les valeurs d’alerte et d’action associées à chaque indicateur et les mesures correctives correspondantes (à mettre en œuvre dès que les seuils d’action ou les valeurs critiques de certains paramètres sont dépassés).

RÉGLEMENTATION

Décret n°2013-1205 du 14 décembre 2013 modifiant la rubrique 2921 de la nomenclature des installations classées

Arrêté du 14 décembre 2013 relatif aux prescriptions générales applicables aux installations relevant du régime de la déclaration au titre de la rubrique n° 2921

Arrêté du 14 décembre 2013 relatif aux prescriptions générales applicables aux installations relevant du régime de l’enregistrement au titre de la rubrique n° 2921

Circulaire du 28 septembre 2006 concernant les mesures compensatoires en cas d’impossibilité technique ou économique de réaliser l’arrêt annuel de l’installation pour nettoyage et désinfection.

Décret n° 2021-976 du 21/07/2021 modifiant la nomenclature des installations classées pour la protection de l'environnement

ÉVOLUTION RÉGLEMENTAIRE

La modification de la réglementation en 2013 a permis de tenir compte du retour d’expérience acquis depuis la création de la rubrique 2921.

Le retour d’expérience a permis d’établir que :

  • le niveau de risque de prolifération de légionelle dans les circuits ouverts et les circuits fermés est comparable. La distinction entre les deux types de circuits a donc été supprimée ;
  • plus la puissance de l’installation est importante, plus l’entrainement de gouttelettes dans le panache est important, d’où la distinction réalisée en fonction de la puissance de l’installation ;
  • la fréquence d’analyse de la concentration en légionelle dans l’eau doit être réalisée à un rythme adaptée à la vie de l’exploitation, a minima tous les deux mois pour les installations soumises à déclaration et tous les mois pour les installations soumises à enregistrement ;
  • l’analyse méthodique de risque doit être réalisée avec attention et la stratégie de traitement et le plan de surveillance doivent être proportionnées aux risques et justifiées de façon à limiter les impacts environnementaux (limiter les rejets de substances néfastes dans le milieu aquatique) ;
  • l’efficacité de la stratégie de traitement doit être démontrée par la réalisation d’analyses hebdomadaires a minima pendant 2 mois et jusqu’à obtenir 3 analyses successives inférieures à 1 000 UFC/L.
  • la formation des personnes impliquées dans la gestion du risque légionelle doit être renouvelée tous les cinq ans ;
  • la recherche des causes des dérives en légionelles est essentielle pour la gestion de son exploitation et doit servir pour éviter d’autres dérives. Pour cela, l’AMR doit être révisée de manière systématique après des dépassements successifs en légionelles ou des dépassements importants.

Afin de suivre l’avis de l’ANSES, l’exploitant doit mettre en place des actions en fonction de la concentration en legionella pneumophila (contre legionella species précédemment).

En 2021, la rubrique a été de nouveau modifiée pour y intégrer les condenseurs à voir humide (Installations de récupération de la chaleur par dispersion d'eau dans des fumées émises à l'atmosphère)

GUIDES TECHNIQUES

Au-delà de l’aspect réglementaire, il importe de sensibiliser les exploitants au risque de légionellose lié aux tours aéroréfrigérantes.

  • Le Guide de formation à la gestion du risque de prolifération des légionelles dans les installations de refroidissement par dispersion d’eau dans un flux d’air => document à venir

DOCUMENTATION

Rapport d’étude d’aide pour l’élaboration d’un plan de surveillance(2006, Inéris) des installations de refroidissement par dispersion d’eau dans un flux d’air (rubrique 2921) pour le risque de prolifération des légionnelles.

Rapport d’étude : Études des analyses méthodiques des risques (2009, Kosamti) lors de dépassement du seuil en légionnelles de 105 UFCL dans les installations de refroidissement par dispersion d’eau dans un flux d’air.