Cette instruction rappelle les règles de la TVA applicables au service de collecte et de traitement des ordures ménagères et apporte des précisions sur les conditions de récupération de la TVA grevant la construction d'une déchetterie ou d'une usine d'incinération des ordures ménagères comprenant une unité de valorisation énergétique.
Section I : Présentation des modes de financement du service de collecte et de traitement des ordures ménagères
Les communes ou leurs groupements peuvent financer le service de collecte et de traitement des ordures ménagères par :
- leur budget général;
- la taxe d'enlèvement des ordures ménagères (TEOM) régie par les articles 1520 à 1526 et 1609 bis à 1609 nonies D du CGI;
- la redevance pour enlèvement des ordures ménagères (REOM) prévue à l'article L.2333-76 du Code général des collectivités territoriales (CGCT).
Par ailleurs, depuis le 1er janvier 1993, les collectivités qui n'ont pas institué la REOM ont l'obligation de percevoir une redevance spéciale afin d'assurer l'élimination des déchets industriels banals (DIB) des commerçants et artisans (art. L.2333-78 du CGCT ). Il s'agit des déchets qui peuvent être collectés et traités sans sujétion technique particulière.
Toutes les autres sommes perçues par les collectivités à raison du dépôt de déchets par des personnes ne résidant pas sur leur territoire ou à raison du dépôt de certaines catégories de déchets (déchets volumineux, déchets spéciaux, déchets de certaines professions, ...) doivent s'analyser comme des redevances spécifiques qui ne relèvent pas du service de collecte et de traitement des ordures ménagères. Tel est le cas des sommes perçues, le cas échéant, à raison de dépôts volontaires réalisés par les commerçants et les artisans dans les déchetteries.
Section II : Règles générales de TVA applicables au service de collecte et de traitement des ordures ménagères
1. Lorsque la collectivité a choisi de financer ce service par l'impôt (budget général ou TEOM), elle exerce une activité située hors du champ d'application de la TVA (CGI, art. 256 B ) et ne peut donc soumettre à la TVA, de plein droit ou sur option, ni la TEOM, ni la redevance spéciale obligatoirement perçue.
Elle ne peut alors pas récupérer par la voie fiscale la TVA grevant les dépenses d'investissement et de fonctionnement afférentes à l'activité de collecte et de traitement des ordures ménagères, qu'elle assume elle-même la collecte ou le traitement ou qu'elle confie ces opérations à un prestataire.
Elle reste néanmoins redevable de la TVA, sous réserve du bénéfice de la franchise en base, à raison des ventes de produits ou de sous-produits issus de la valorisation des déchets. De même, les redevances spécifiques qu'elle perçoit le cas échéant sont soumises de plein droit à la TVA.
La collectivité bénéfice alors d'un droit à déduction partiel déterminé selon les règles prévues pour les assujettis partiels à la TVA (cf. infra section 3, sous-section 2, AII ).
2. En revanche, lorsque la collectivité a choisi d'instituer la REOM et qu'elle a opté pour l'assujettissement à la TVA de ce service (CGI, article 260 A ), elle peut déduire la TVA grevant les dépenses de fonctionnement et d'investissement y afférentes dans les conditions de droit commun.
3. Dans tous les cas, les entreprises prestataires des collectivités doivent soumettre à la TVA leur rémunération.
4. Il en va en principe de même des prestations rendues par un groupement intercommunal.
Les communes peuvent en effet continuer à assurer la collecte des ordures ménagères mais confier à un groupement intercommunal la construction et l'exploitation d'une déchetterie ou d'une usine d'incinération.
Dans cette situation les communes restent titulaires du service de collecte et de traitement des ordures ménagères, lequel est financé au moyen, soit de la TEOM, soit de la REOM, l'une et l'autre étant perçues auprès des usagers. Le syndicat, quant à lui, agit en qualité de prestataire de services des communes (cf. BOI 3 D-7-86 ).
Dès lors qu'aucune des collectivités membres du groupement n'est assujettie à la TVA pour le service d'enlèvement des ordures, le groupement peut bénéficier pour les prestations de traitement des ordures ménagères qu'il leur rend de l'exonération admise par la décision ministérielle du 25 octobre 1983 commentée par l'instruction du 31 janvier 1984 publiée au BOI 3 A-4-84.
Les sommes reçues des collectivités locales pour cette activité ne sont alors pas soumises à la TVA, quelle que soit leur dénomination.
En revanche, si le groupement n'applique pas la décision ministérielle ou si l'une des collectivités membres est assujettie à la TVA au titre du service des ordures ménagères, il doit soumettre à la TVA la totalité de ses recettes d'exploitation, y compris les versements de toute nature provenant des collectivités locales.
Section III : Déchetterie - Usine d'incinération
Les déchetteries sont des installations classées qui permettent le dépôt de plusieurs types de déchets ayant vocation à être recyclés (papiers-cartons, verre, matières plastiques, huiles usagées, piles, gravats, débris de jardin ...).
Les déchetteries comprennent en règle générale un ou plusieurs quais d'accès, des bennes, un local d'accueil et de gardiennage et une clôture.
Les déchetteries comme les usines d'incinération font partie intégrante du service de collecte et de traitement des ordures ménagères dont le régime de TVA dépend du mode de financement (cf supra ).
Sous-section I : Règles de TVA applicables pendant la phase de construction de la déchetterie ou de l'usine d'incinération des ordures ménagères
A - Livraison à soi-même de la déchetterie ou de l'usine d'incinération
- Dès lors que la collectivité utilisera la déchetterie ou l'usine d'incinération pour effectuer des opérations imposables ouvrant droit à déduction de la TVA (perception de redevances spécifiques au niveau de la déchetterie, valorisation énergétique au niveau de l'usine d'incinération, elle devra procéder à l'imposition de la livraison à soi-même de l'ouvrage (déchetterie ou usine) lors de son achèvement ou de sa première utilisation (CGI, article 257-7°, DB 8 A 1122 et 8 A122 ).
La livraison à soi-même, ou LASM, doit porter sur la totalité de l'ouvrage : elle s'applique au prix de revient total du bien.
Le prix de revient s'entend de tous les éléments constitutifs du coût de la construction de la déchetterie ou de l'usine (DB 8 A 1212 ), sans qu'il y ait lieu de distinguer selon l'origine des fonds ayant assuré son financement.
Bien entendu, lorsque la collectivité réalise simultanément différents ouvrages (exemple : une usine d'incinération et plusieurs déchetteries), chacun de ces ouvrages doit faire l'objet d'une LASM dès lors qu'il constitue un immeuble distinct.
B - Déduction de la TVA afférente aux travaux de construction de la déchetterie ou de l'usine d'incinération
- En raison de l'imposition de la LASM, la TVA afférente aux travaux engagés pour la réalisation de la construction de la déchetterie ou de l'usine d'incinération peut être déduite intégralement au fur et à mesure de leur avancement. L'exercice de ce droit à déduction peut donner lieu, le cas échéant, à des remboursements de crédits de TVA.
Sous-section II : Déduction fiscale de la TVA due au titre de la LASM de la déchetterie ou de l'usine d'incinération
A - La collectivité qui a construit et qui exploite la déchetterie ou l'usine d'incinération est titulaire du service de collecte et de traitement des ordures ménagères
- La collectivité exerce une activité située hors du champ d'application de la TVA dès lors qu'elle assure le financement du service par la TEOM ou son budget général.
En revanche, lorsqu'elle a institué la REOM, elle peut opter pour l'assujettissement à la TVA du service (cf section 2 ).
I - Le service de collecte et de traitement des ordures ménagères est soumis à la TVA
La collectivité, redevable de la TVA sur l'ensemble des opérations qu'elle réalise, peut déduire la totalité de la TVA afférente à la LASM. Ultérieurement, elle peut aussi déduire, sous réserve des limitations de droit commun, la TVA grevant les dépenses d'investissement et de fonctionnement exposées pour les besoins de la réalisation de ces opérations.
II - Le service est placé hors du champ d'application de la TVA
- La collectivité effectue à partir d'équipements communs une activité située hors du champ d'application de la TVA et une activité située dans le champ et, sous réserve de l'application de la franchise en base, imposée à la TVA (vente d'énergie, perception de redevances spécifiques).
LA TVA qui se rapporte à des biens et des services utilisés concurremment pour la réalisation d'opérations imposées et d'opérations situées hors du champ d'application de la TVA n'est déductible qu'en proportion de l'utilisation de ces biens et services aux opérations imposées (CGI, annexe II, article 207 bis ).
Pour ce qui concerne la TVA due au titre de la LASM de la déchetterie ou de l'usine d'incinération, la collectivité détermine une clef de répartition afin de calculer la proportion de l'utilisation de la déchetterie ou de l'usine pour les besoins des opérations imposées à la TVA.
Compte tenu de la nature de ces investissements, une clef de répartition fondée sur les surfaces est inopérante.
À titre de règle pratique, la clef de répartition peut être calculée en fonction de la quote-part des recettes soumises à la TVA par rapport aux ressources totales du service.
Pour ce qui concerne les dépenses autres que celles qui sont visées ci-dessus et que la collectivité supporte dans le cadre de l'exploitation du service de collecte et de traitement des ordures ménagères, il convient de mettre en oeuvre les règles exposées dans l'instruction du 8 septembre 1994 publiée au bulletin officiel des impôts sous la référence 3 CA 94 (nos 86 et s. ).
B - La collectivité qui a construit et qui est chargée de l'exploitation de la déchetterie ou de l'usine d'incinération est un groupement qui est prestataire des collectivités qu'il regroupe
- Le groupement est en principe soumis à la TVA sous réserve de l'exonération précitée admise par la décision ministérielle du 25 octobre 1983 (cf section 2 ).
Les sommes perçues directement auprès de certains utilisateurs (redevances spécifiques) et les ventes d'énergie et de sous-produits sont soumises, sous réserve de l'application de la franchise en base, à la TVA (1) au taux normal.
Deux situations sont à envisager :
I - Le groupement demande à bénéficier de la décision ministérielle du 25 octobre 1983
1. Déduction de la TVA due au titre de la LASM et de la TVA afférente aux autres dépenses d'investissement.
Les opérations réalisées avec les communes membres sont alors exonérées de TVA et le groupement se trouve, sous réserve de l'application de la franchise en base, dans la situation d'un redevable partiel dès lors qu'il réalise, outre ces opérations exonérées n'ouvrant pas droit à déduction, des opérations obligatoirement imposées à la taxe (perception de redevances spécifiques au niveau de la déchetterie, ventes d'énergie au niveau de l'usine d'incinération).
Par voie de conséquence, une partie seulement de la taxe se rapportant à la LASM relative à la construction de la déchetterie ou de l'usine d'incinération, et aux autres dépenses d'investissement est admise en déduction.
Le montant de la taxe déductible par le groupement se détermine selon la règle du prorata (CGI, annexe II, art. 212 ).
Le pourcentage de déduction résulte du rapport existant entre le montant total annuel du chiffre d'affaires propre aux opérations imposées et le montant du chiffre d'affaires annuel afférent à l'ensemble des opérations réalisées par le groupement que celles-ci soient exonérées de TVA ou imposées à cette taxe.
Les subventions allouées le cas échéant au groupement et qui ne sont pas imposables à la TVA doivent être en principe inscrites au seul dénominateur du pourcentage de déduction (cf. Instruction du 4 avril 1997; BOI 3 D-4-97 ).
Toutefois, les aides versées au groupement pour financer précisément l'opération de construction de la déchetterie ou de l'usine d'incinération peuvent, sous réserve d'en remplir les conditions, suivre le régime particulier des subventions d'équipement (BOI 3 CA-94, nos 150 et 151 ).
2. déduction de la TVA grevant les dépenses de fonctionnement.
La déduction de la TVA ayant grevé les biens ne constituant pas des immobilisations et de celles ayant grevé les services est opérée selon le principe de l'affectation de ces biens et services (CGI, annexe II, article 219 ).
a) la taxe ayant grevé les biens et services qui concourent exclusivement à la réalisation d'une opération ouvrant droit à déduction est entièrement déductible;
b) la taxe ayant grevé les biens et services qui concourent exclusivement à la réalisation d'une opération n'ouvrant pas droit à déduction, n'est pas déductible;
c) la taxe ayant grevé les biens et services dont l'utilisation permet concurremment la réalisation d'opérations dont les unes ouvrent droit à déduction et les autres non, est en partie déductible. La fraction déductible est déterminée en appliquant à la taxe en cause le pourcentage de déduction du groupement tel qu'il est défini ci-dessus.
Par dérogation à la règle de l'affectation, le groupement peut être autorisé par l'administration à déterminer pour l'ensemble des biens ne constituant pas des immobilisations et pour l'ensemble des services, le montant de son droit à déduction en retenant le pourcentage général de déduction qui s'applique alors à l'ensemble de ses acquisitions de biens et de services (CGI, annexe II, article 220 ).
II - Le groupement n'applique pas la décision ministérielle du 25 octobre 1983
Les prestations de services rendues aux communes sont alors soumises à la TVA.
En contrepartie, le groupement, qui est redevable de la TVA sur l'ensemble des opérations qu'il réalise, peut déduire la totalité de la TVA afférente à la LASM de l'usine d'incinération ou de la déchetterie. Ultérieurement, il peut aussi déduire, sous réserve des limitations de droit commun, la TVA grevant les dépenses d'investissement et de fonctionnement exposées pour les besoins de la réalisation de ces opérations.
Sous-section III : Usine d'incinération. Dotation du fonds de compensation pour la TVA (FCTVA)
Une circulaire interministérielle du 23 septembre 1994 relative au fonds de compensation pour la TVA (FCTVA) a décrit les modalités d'attribution du fonds dans le cas de la construction par une collectivité locale titulaire du service de collecte et de traitement des ordures ménagères d'une usine d'incinération des ordures ménagères comprenant une unité de valorisation énergétique.
S'agissant d'un équipement mixte, c'est-à-dire utilisé concurremment pour la réalisation d'opérations situées hors du champ d'application de la TVA (service de collecte et de traitement financé directement par la taxe d'enlèvement des ordures ménagères) et d'opérations situées dans le champ (production de vapeur ou vente de divers sous-produits), il ne peut pas être accordé une attribution du FCTVA dès lors que la TVA qui grève ce bien peut, en principe, être déduite fiscalement en proportion de son utilisation à des opérations imposées (CGI, article 271 et son annexe II, article 207 bis; cf. supra ).
La circulaire interministérielle précitée indique que dans la mesure où un tel équipement n'est utilisé qu'à titre accessoire pour les besoins de l'activité soumise à la TVA une attribution du FCTVA peut être accordée à hauteur de la fraction pour laquelle la TVA n'a pas été déduite fiscalement.
Une circulaire du ministère de l'Intérieur du 2 février 1996 a étendu cette dérogation aux groupements de communes qui, chargés du traitement des ordures ménagères, construisent une usine d'incinération de ces ordures.
L'attribution du FCTVA est accordée à hauteur de la fraction du montant de la TVA due au titre de la LASM de l'usine d'incinération qui ne peut être déduite fiscalement du fait soit de l'application de la clef de répartition (section 3, sous-section 2, B ) soit de l'application du pourcentage de déduction (section 3, sous-section 2, A ).
Pour bénéficier de l'attribution du fonds au titre de cet investissement, la collectivité adresse au service compétent de la préfecture, en même temps que sa demande d'attribution, une copie de sa déclaration de taxe sur le chiffre d'affaires sur laquelle elle mentionne expressément, dans le cadre réservé à la correspondance, le rapport déterminant soit la clef de répartition soit le pourcentage de déduction et les modalités de calcul qui y conduisent. À défaut, il est prévu qu'aucune attribution du fond ne sera autorisée.
La variation de ce rapport dans le temps - en raison notamment du développement de l'activité taxée - ne donne lieu à aucune régularisation, la déduction fiscale et l'attribution du FCTVA ayant compensé la TVA supportée par la collectivité locale.
Il est, en revanche, procédé à des correctifs d'attribution du fonds en cas de modification de ce rapport résultant d'un contrôle effectué par les services fiscaux.
Par ailleurs, en cas de transfert de propriété, d'apport ou de cession de l'immeuble, les régularisations prévues tant en matière fiscale qu'en matière de FCTVA sont exigibles (cf BOI 3 CA-94, et circulaire interministérielle du 23 septembre 1994 relative au FCTVA n° 2232 ).
Précisions
Pour les groupements qui doivent calculer un pourcentage de déduction afin de déterminer la TVA déductible fiscalement, les précisions suivantes sont apportées.
En principe, le pourcentage de déduction est fixé provisoirement en fonction des recettes prévisionnelles de l'année en cours (CGI, annexe II, article 214). Le montant définitif de la taxe déductible au titre de l'année considérée doit être arrêté d'après le pourcentage de déduction résultant des recettes réalisées durant cette même année, les régularisations à ce titre devant intervenir au plus tard le 25 avril de l'année suivant celle à laquelle le pourcentage se rapporte (ou, en application de l'article 225 de l'annexe II au même Code, à la fin de l'année qui suit celle de l'assujettissement à la TVA en cas de commencement d'une activité imposable).
Compte tenu des difficultés auxquelles se heurte la combinaison de cette règle fiscale et de l'éligibilité partielle de l'équipement au FCTVA, la méthode suivante doit être retenue.
Le groupement estime, lors de la livraison de l'immeuble, ses recettes prévisionnelles soumises à la TVA, comme les règles fiscales l'y obligent. Le pourcentage provisoire ainsi obtenu détermine la part de la taxe due au titre de la LASM qui est déductible par la voie fiscale, la différence étant récupérable par l'intermédiaire du FCTVA.