(BO du MEEDDAT n° 16 du 30 août 2008)


NOR : DEVP0817358C

Texte abrogé par la circulaire du 10 mai 2010  (BO du MEEDDM n° 2010/12 du 10 juillet 2010)

Le ministre d’Etat, ministre de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de l’aménagement du territoire

A Mesdames et Messieurs les Préfets.

La loi du 30 juillet 2003, codifiée au livre V du code de l’environnement, ainsi que les textes pris en son application, en particulier l’arrêté ministériel du 10 mai 2000 modifié et l’arrêté ministériel du 29 septembre 2005, ont introduit l’obligation de produire des études de dangers décrivant la probabilité, l’intensité, la cinétique et la gravité des phénomènes dangereux et accidents susceptibles de se produire sur les sites industriels soumis à la législation des installations classées. L’approfondissement récent de cette nouvelle méthodologie, en particulier dans le cadre de l’élaboration des PPRT, m’amène à vous préciser des points méthodologiques tirés de l’expérience, relatifs aux rejets toxiques accidentels.

1) Phénomènes dangereux

Des phénomènes dangereux pouvant présenter des distances d’effets toxiques très importantes ont récemment soulevé des questions, il s’agit des fuites de longue durée sur des équipements de grande capacité (réservoir de stockage de produits toxiques par exemple) ou leurs équipements connexes (tuyauterie, flexible par exemple). Précédemment à la loi du 30 juillet 2003, il était usuellement admis que les fuites alimentées se produisant sur de tels équipements pouvaient être forfaitairement considérées comme prenant fin au bout d’un délai de trente minutes, sans considérer le scénario, très improbable de l’échec de toutes les stratégies de l’exploitant pour mettre fin à la fuite (dispositifs de détection et d’actionnement mécanique, interventions humaines avec protection individuelle…)

Au regard de la nouvelle méthodologie d’élaboration des études de dangers, un tel raisonnement forfaitaire n’est plus adapté. En particulier, tous les scénarios devront être décrits dans les études de dangers, et plus spécifiquement ceux concernant la défaillance des différentes mesures de maîtrise des risques mises en place par l’exploitant, qu’elles soient techniques ou basées sur une intervention humaine, dès lors qu’elle est physiquement possible.

Les dispositions de ma circulaire du 29 septembre 2005 (dite circulaire " MMR ") et les textes relatifs aux plans de prévention des risques technologiques, notamment ma circulaire du 3 octobre 2005 sont applicables.

Cette dernière circulaire relative aux plans de prévention des risques technologiques (PPRT) prévoit néanmoins que certains phénomènes dangereux particulièrement improbables peuvent ne pas être retenus pour l’élaboration de ces plans après validation par la Direction Générale de la Prévention des Risques suite à une saisine préfectorale. Ainsi, s’agissant des longues fuites alimentées, c’est-à-dire au titre de la présente instruction les fuites d’une durée supérieure à trente minutes, je vous invite à accepter leur exclusion dans l’élaboration du PPRT, même si les règles usuelles d’exclusion ne sont pas validées (présence d’une mesure de maîtrise des risques passive ou existence de deux mesures de maîtrise des risques techniques et conditions sur la probabilité des phénomènes dangereux) sous les conditions suivantes :

Premièrement, l’exploitant (ou le pétitionnaire) doit avoir démontré que la probabilité du phénomène dangereux est très faible, à savoir une classe de probabilité E au titre de la législation sur les installations classées.

Deuxièmement, l’exploitant doit avoir mis en place a minima une mesure technique de maîtrise des risques pour faire cesser la fuite longue (par exemple chaîne de détection – traitement – fermeture de vanne) en agissant directement sur l’installation source de la fuite ou de l’émission.

Troisièmement, l’exploitant doit présenter une stratégie (décrite dans le Plan d’Opérations Internes et/ou le Système de Gestion de la Sécurité lorsqu’ils existent) permettant l’arrêt de la fuite ou de l’émission en cas de défaillance de la mesure précédemment citée. Il doit démontrer l’efficacité de la stratégie proposée (existence des moyens techniques correctement dimensionnés, personnel suffisamment formé et équipé de façon à pouvoir se rendre sur le lieu de ces actions, garantie de la fin d’émission si l’action à mener est correctement conduite) et la possibilité de la mettre en œuvre dans un délai inférieur à trente minutes, quel que soit le moment de survenance de l’incident. L’exploitant doit en particulier s’attacher à démontrer avec soin, si cette stratégie implique une intervention humaine, que les capacités d’intervention des équipes ne seront pas altérées par l’existence de la fuite ou par la période de survenance (nuit par exemple).

Quatrièmement, que la classe de probabilité de chacun des scénarios menant à ce phénomène dangereux reste en E même lorsque la probabilité de défaillance de la mesure de maîtrise des risques de plus haut niveau de confiance s’opposant à ce scénario est portée à 1.

J’attire toutefois votre attention sur le fait que quelle que soit la durée d’émission étudiée dans une étude de dangers, c’est à la lumière de la durée d’exposition des personnes exposées au nuage que s’établissent les distances d’effets et les zonages réglementaires. Concernant cette durée d'exposition, les éléments techniques que l'INERIS a rassemblés à ma demande indiquent que pour un nuage alimenté par une émission de longue durée (par exemple trente minutes mais valable aussi pour une durée plus longue), la considération d'une exposition des cibles pendant cette même durée (dans le cas de l’exemple, elle aussi égale à trente minutes) permet de déterminer de façon satisfaisante les zones d'effets du phénomène dangereux.

Les présentes orientations sont également applicables au titre de la mise en œuvre de ma circulaire du 4 mai 2007 vous indiquant les règles à prendre en compte pour le porter-à-connaissance.

Je vous rappelle enfin que les présentes conditions et propositions ne sont applicables qu’aux choix relatifs à la maîtrise de l’urbanisation, et que les phénomènes dangereux et accidents concernés doivent en tout état de cause être décrits dans l’étude de dangers, de façon à vous permettre d’apprécier la démarche de maîtrise du risque à la source et à élaborer les éventuels plans d’urgence externes.

2) Choix des seuils toxicologiques de référence

Par ailleurs, comme indiqué dans l’arrêté du 29 septembre 2005 relatif à l’évaluation et à la prise en compte de la probabilité d’occurrence, de la cinétique, de l’intensité des effets et de la gravité des conséquences des accidents potentiels dans les études de dangers des installations classées soumises à autorisation, mon ministère publie régulièrement, pour les substances les plus courantes, des valeurs françaises pour les seuils toxicologiques (1).

En l’absence de telles valeurs pour les substances que vous êtes amenés à considérer dans les études de dangers, la détermination de seuils en utilisant la méthodologie française doit être privilégiée (2). A défaut, vous inviterez les exploitants à utiliser le guide de choix (3). Ce guide de choix propose deux méthodes d’élaboration de seuils provisoires suivant les connaissances en toxicologie disponibles. Le pétitionnaire peut vous proposer de retravailler les valeurs internationales reconnues (AEGL (4), ERPG (5) par exemple) en se basant sur certains passages de la méthodologie française. Si la démonstration ne vous paraît pas convaincante, je vous invite par défaut à utiliser les valeurs internationales reconnues selon le tableau suivant :

text4634.PNG (15881 octets)

(1) Ces seuils sont disponibles aux adresses suivantes :
http://www.ineris.fr/index.php?module=cms&action=getContent&id_heading_object=4 et http://www.ecologie.gouv.fr/Seuils-de-toxicite-aigue-de.html
(2) Méthodologie de détermination des seuils de toxicité aiguë, INERIS, décembre 2007. Disponible à l’adresse suivante : http://www.ineris.fr/index.php?module=cms&action=getContent&id_heading_object=107
(3) " Guide pratique de choix des valeurs seuils de toxicité aiguës en cas d'absence de valeurs françaises ", INERIS, mai 2008. Disponible à l’adresse suivante : sur le site de l’INERIS www.ineris.fr
(4) AEGL : valeurs américaines disponibles sous http://www.epa.gov/oppt/aegl/pubs/chemlist.htm
(5) ERPG : valeurs américaines disponibles sous http://www.aiha.org/content/insideaiha/volunteer+groups/erpcomm.htm

Vous noterez qu’il n’existe pas dans les banques de données disponibles d’équivalent au seuil des effets létaux significatifs (SELS). En l’absence de donnée, celui-ci doit être pris égal au seuil des premiers effets létaux (SPEL).

De même, lorsque la durée d’exposition est inférieure aux plus petites durées d’exposition faisant l’objet d’un renseignement des valeurs toxicologiques, on ne cherchera pas à extrapoler la valeur apparaissant pour la plus petite durée d’exposition mais on utilisera cette valeur telle quelle.

A ce titre, mes courriers du 17 juillet 1996, du 22 février 2001 et du 16 juillet 2002 qui préconisaient l’utilisation brute de l’IDLH en l’absence de données sont abrogés par ces nouvelles précisions.

3) Fumées en hauteur – Devenir du panache toxique

Enfin, concernant les fumées en hauteur, l’étude de dangers doit décrire le devenir du panache toxique (distance, concentrations…).

Dans le cas où il est avancé que le panache s’élève (par exemple en raison d’une température de fumées élevée), l’étude de dangers peut conclure à une absence d’effet toxique " au sol " mais doit alors décrire les distances d’effets toxiques en hauteur à proximité du site (i.e. dans l’axe du panache), de manière à pouvoir prévoir des restrictions par exemple sur les immeubles de grande hauteur dans le cadre de la maîtrise de l’urbanisation future.

Je vous invite à me faire part, des éventuelles difficultés que vous pourriez connaître dans l’application des présentes instructions.

Pour le ministre et par délégation,
Le directeur de la prévention des pollutions et des risques, délégué aux risques majeurs,
Laurent MICHEL

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