(BOMEDD n° 23/2005 du 15 décembre 2005)

Le ministre de l'Environnement

à Mmes et MM. les préfets :

La mise en oeuvre du programme de maîtrise des pollutions d'origine agricole dans les élevages nécessite de bien apprécier leurs rejets.

Il est apparu que les références établies en 1988 ne correspondaient plus aux conditions d'élevage actuelles et qu'il convenait de les actualiser.

Le CORPEN a réalisé un travail pour mieux apprécier les rejets des élevages de porcs face à une diversité de situations qui ira en augmentant. Il a associé l'ensemble des partenaires professionnels, scientifiques et techniques.

Le document complet établi par le CORPEN présentant l'ensemble des bases scientifiques et techniques du travail réalisé est bientôt disponible et vous sera adressé.

Vous trouverez ci-joints les éléments définissant l'évolution des références du CORPEN, leur condition d'utilisation et la présentation d'une méthode permettant d'apprécier dans toutes les situations les rejets des élevages.

Il vous est possible de les utiliser dès maintenant pour toutes les procédures nécessitant une estimation des rejets des élevages de porcs dans le cadre du programme de maîtrise des pollutions d'origine agricole.

Pour les départements qui ont identifié des zones d'excédent structurel lié aux élevages, vous vérifierez que les hypothèses retenues pour l'élaboration des programmes de résorption sont effectivement accessibles. Vous noterez que les références proposées ici pour l'alimentation biphasé correspondent à des taux de protéines n'entraînant pas d'augmentation du coût des matières premières utilisées (cf. annexe) . Une plus grande réduction des rejets est techniquement accessible et l'opportunité économique des autres éléments du programme de résorption doit être évaluée en comparaison avec le coût de cette réduction supplémentaire.

Annexe : Estimation des rejets d'azote et de phosphore des élevages de porcs

Une référence est constituée par un résultat assorti de ses conditions de validité.

Elle ne se résume donc pas à un chiffre pour évaluer un rejet, mais est également définie par ses conditions d'obtention : les conditions d'élevage pour lesquelles elle est valide.

Les quantités moyennes d'azote et de phosphore produites par les animaux après stockage indiquées en 1988 étaient les suivantes:

  kg N kg P2O5
Truie ou verrat présent 17,5 15,0
Porc charcutier produit (1) après post-sevrage (2) 3,5 3,0
Porcelet produit (3) en post-sevrage 0,7 0,6
(1) Le nombre de bandes de porcs charcutiers par an est souvent voisin de 2,5.
(2) Les catégories "porc charcutier après post-sevrage" et "porcelet en post-sevrage" correspondent aux cas pour lesquels il y a
achat ou vente de porcelets à 20-25 kg.
(3) Il y a, en moyenne, 18 porcelets/truie/an.

Ces références étaient fondées sur certaines hypothèses définissant leur domaine de validité (productivité, poids des animaux, nombre de bandes par an) dont elles sont indissociables.

Depuis 1988, les performances d'élevage ont considérablement évolué et les hypothèses sur lesquelles étaient fondées ces références ne correspondent plus à la situation actuelle. Cela a eu pour conséquences d'une part la réduction des rejets d'azote et de phosphore par porc produit et d'autre part l'augmentation du nombre de porcs produits par place et par an.

Les travaux du CORPEN permettent aujourd'hui de proposer des références actualisées et de nouvelles références pour tenir compte des modifications de conduite alimentaire.

Ce document du CORPEN fournit les éléments pour évaluer les rejets pour des gains de poids vif et des indices de consommation s'éloignant notablement des hypothèses retenues ici.

Pour les élevages ayant une conduite alimentaire standard, ne recherchant pas une diminution des rejets, les hypothèses de performances retenues et les références assorties sont les suivantes :

  Indice de
consommation
Gain de poids vif Bandes par an kg N kg P2O5
Truie ou verrat présent, par an       17,50 15,00
Porc charcutier produit après post-sevrage 2,93 80 kg (28 à 108) 3,0 3,25 2,10
Porcelet produit en post sevrage 1,80 20 kg (8 à 28) 6,5 0,44 0,28

Pour les élevages ayant une conduite alimentaire visant une réduction spécifique des rejets par la baisse des teneurs en protéines ou en phosphore des aliments et l'utilisation de plusieurs aliments (alimentation biphasé), les hypothèses de performances retenues sont identiques aux précédentes.

Les hypothèses teneurs en protéines ou en phosphore et les références assorties sont les suivantes :

  Aliment 1 Aliment 2 kg N kg P2O5
  Truie en gestation Truie en lactation    
Truie ou verrat présent, par an ou à 14,0 % MAT
ou à 0,50 % P
En croissance
ou à 16,5 % MAT
ou à 0,65 % P
En finition
14,50 11,80
Porc charcutier produit après post-sevrage ou à 16,5 % MAT
ou à 0,52 % P
En premier âge
ou à 15,0 % MAT ou à 60 % du total de l'aliment consommé ou à 0,45 % P
En deuxième âge
2,70

1,45

Porcelet produit en post sevrage ou à 20 % MAT
ou à 0,85 % P
ou à 18 % MAT
ou à 0,70 % P
0,40 0,25

L'estimation des rejets de l'élevage est réalisée en appliquant ces références aux effectifs présents et produits par l'élevage après s'être assuré que les aliments utilisés correspondent aux hypothèses accompagnant ces références. Les teneurs en protéines et en phosphore sont des teneurs moyennes pondérées par les quantités d'aliment consommées sur la période d'estimation des rejets de l'élevage.

On peut réduire encore plus les rejets d'azote ou de phosphore.

Cela est possible avec des teneurs en protéines ou en phosphore plus faibles ou en adoptant une alimentation multiphase en engraissement. Des performances techniques meilleures que celles des hypothèses retenues ici permettent aussi de réduire les rejets des animaux produits.

Pour les élevages réduisant de manière importante leurs rejets, ces derniers peuvent être estimés en réalisant un bilan simplifié entrées-sorties d'azote et de phosphore au niveau de l'élevage. Ce bilan simplifié est réalisé à partir d'enregistrements techniques.

La méthode utilisée est décrite dans le document du CORPEN.

A titre d'exemples, avec les performances techniques précédentes, il est possible de réduire :

  • les rejets d'azote à 2,28 kg N par porc charcutier produit après post-sevrage en adoptant une alimentation biphasé avec des aliments à plus faible teneur en protéines (15,5 % puis 13,0 %);
  • les rejets de phosphore à 1,18 kg P2O5 par porc charcutier produit après post-sevrage en adoptant une alimentation biphasé avec des aliments à plus faible teneur en phosphore (0,47 % puis 0,40 %, avec additions de 500 UP/kg d'aliment de phytase microbienne).

Diminution des rejets d'azote par la voie alimentaire en biphasé et incidence actuelle (1995) sur le coût des matières premières alimentaires par porc engraissé.

Recommandation du 16 janvier 1996 Corpen Min. Agr. et Env.

Le stockage au champ des fumiers compacts pailleux.

La réglementation des installations classées pour la protection de l'environnement prévoit (bovins, porcins) la possibilité de stocker au champ des fumiers compacts pailleux à l'issue d'un stockage de 2 mois dans l'installation, dans des conditions précisées par le préfet.

Le stockage dans l'installation peut se faire sous les animaux eux-mêmes par l'intermédiaire d'aire paillée accumulée ou sur une plate-forme.

Propositions de recommandations

L'étude des travaux de recherche et des suivis de l'évolution du tas au champ montre que le stockage au champ des fumiers compacts pailleux ne constitue pas un risque de pollution pour le milieu, si certaines conditions élémentaires sont respectées.

En particulier, on ne doit pas observer d'écoulement latéral des jus issus du produit en dehors du tas. Des précautions doivent également être prises au cours du transport du tas au champ pour éviter les pertes de produit.

Pour maîtriser ces risques, quelques recommandations sur la qualité du produit et la confection du tas peuvent être formulées.

Tous les produits qui ne répondent pas aux critères ci-dessous doivent obligatoirement être stockés au minimum 4 mois. Il en est de même lorsqu'il y a mélange entre des produits qui ne répondent pas tous à ces critères.

Que stocker ?

Pour un stockage au champ, il faut un fumier qui tienne naturellement en tas et qui n'émette pas de produits d'égouttage lors de sa reprise à l'hydrofourche, ce qui exige un niveau de paillage suffisant, en fonction du type de logement, du type d'animaux, de la qualité de la paille, ...

Le produit à stocker peut donc être caractérisé à partir du type de logement des animaux.

Bovins

Conditions d'obtention de fumier compact pailleux pour les élevages bovins

Bâtiment Intervalle entre deux curages Mise en plate-forme obligatoire pour égouttage Mise en tas directe au champ
Litière accumulée 2 mois
1 mois
NON
OUI
OUI
NON
Pente paillée OUI NON
Etable entravée OUI NON
Logettes fortement paillées (> 4 kg par animal et par jour) OUI NON

Porcins

Le stockage direct au champ pour les fumiers d'origine porcine n'est envisageable que pour les produits issus de bâtiments sur litière paillée (accumulée ou biomaîtrisée), curés au bout de 2 mois au minimum.

Dans tous les cas le fumier doit pouvoir être extrait du bâtiment à l'hydrofourche (tout système de raclage est à exclure).

Où ?

- Se conformer à la réglementation sur les distances concernant les épandages (installations classées, RSD) par rapport aux cours d'eau, points d'alimentation en eau, locaux occupés par des tiers, ... Le stockage au champ ne peut pas se faire aux endroits où l'épandage est exclu.

- Exclure le dépôt sur :

* les sols à forte pente,

* les parcelles inondables,

* les zones en cuvette,

* les sols où la nappe phréatique est susceptible de remonter en surface,

* les zones d'infiltration préférentielles (failles, bétoires,...).

- Eviter le dépôt sur sol filtrant.

Si le dépôt ne peut être réalisé que sur sol filtrant, concevoir le stockage en tenant compte du type de produit à stocker et de la perméabilité du sol et le constituer sur un lit de végétaux à fort pouvoir absorbant (paille, fougères, ...).

- Changer l'emplacement du tas sur la parcelle chaque année.

Quand ?

Eviter de réaliser le dépôt lors de conditions météorologiques défavorables (pluie).

Durée ?

L'étude des données disponibles montre que les fuites par infiltration sont réduites et ont lieu au cours des premières semaines de la mise en dépôt. Elles sont globalement moindres pour un fumier stocké au champ au cours de l'hiver puis épandu au printemps avant labour que pour le même fumier épandu à l'automne.

- Le dépôt au champ constitue cependant une étape intermédiaire avant l'épandage.

- Le stockage prolongé ne présente pas de risques significatifs d'infiltrations. Il a l'intérêt de provoquer une évolution du produit qui facilite son épandage et améliore la qualité de sa répartition.

- La durée de stockage ne doit en conséquence pas être supérieure à 10 mois.

Quelle quantité ?

Le volume du dépôt de fumier compact pailleux sera adapté à la fertilisation équilibrée des parcelles avoisinantes qui le recevront.

Comment ?

- Il faut constituer un tas continu pour limiter les infiltrations d'eau et disposer d'un produit homogène.

- Le contenu de chaque remorque doit être adossé au précédent sans manipulation.

- Ne pas couvrir le tas.

Remarques :

- Les participants au groupe de travail, notamment les représentants des agences de l'eau, souhaitent que les zones d'exclusion de dépôt au champ soient précisées dans le "projet d'amélioration" des éleveurs qui intègrent le programme de maîtrise des pollutions d'origine agricole.

- Par ailleurs, les travaux du groupe nous conduisent à suggérer une réflexion du CORPEN sur le thème du compostage.

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