Avec la loi du 13 juillet 1992 modifiant la loi du 15 juillet 1975 relative à l'élimination des déchets et à la récupération des matériaux la France a décidé de moderniser la gestion de ses déchets dans une approche que Ie Iégislateur a voulu pragmatique.

La réduction de la production de déchets, le développement de la valorisation par recyclage par compostage ou sous forme d'énergie et la suppression à terme des décharges brutes sont les grandes lignes de la nouvelle stratégie en matière de gestion de nos déchets. La présente circulaire a pour objet de vous faire part des réflexions tirées de l'examen des premiers plans départementaux adaptés.

I. Les enjeux des plans départementaux

Pour les déchets ménagers, Ies plans départementaux, prévus à I'article 10-2 de Ia loi du 15 juillet 1975, constituent l'outil privilégié pour faire évoluer la gestion de ces déchets.

Leur objet, orienter et coordonner l'ensemble des actions à mener, Ieur mode d'élaboration, rassemblant tous Ies acteurs publics et privés concernés, et la consultation de la population avant leur adoption doivent aussi permettre une optimisation sociale, technique et économique de Ia gestion et de l'élimination des déchets ménagers.

Il est clair que la modernisation des pratiques à l'égard des ordures ménagères a mobilisé et va continuer à mobiliser beaucoup d'efforts.

Il n'y a pas en effet de voie unique ni de solution miracle il faut à la fois :

- réduire la production de déchets,

- promouvoir les collectes séparées et le tri,

- mieux valoriser les matières qui ont des débouchés rentables,

- démontrer que les décharges qui resteront nécessaires pour Ies déchets ultimes peuvent être exploitées sans nuisances,

- assurer que les usines d'incinération n'entraînent pas de pollution atmosphérique.

La difficulté de l'élaboration des plans réside d'abord dans la prise en compte de l'ensemble des composantes du système de gestion. sans négliger aucune d'entre elles : dans chaque département, il faut conjuguer les collectes séparées, le tri, la valorisation, le compostage, I'incinération et le stockage sans nuisances.

Il convient également de rester très attentif aux questions économiques que posent cette évolution indispensable : elle ne sera pas gratuite pour le citoyen et Ies collectivités et il faut donc à la fois éviter les gaspillages et assurer la clarté et la transparence de tous les comptes.

Enfin, la mise en application de ces plans doit se faire en respectant scrupuleusement la réglementation en vigueur pour assurer effectivement la prévention des nuisances de toute nature.

II. Le retour d'expérience des plans adoptés

L'analyse des premiers plans départementaux adoptés et les constats qu'ils permettent de faire me conduisent à formuler des remarques et des recommandations sur les trois axes majeurs qu'ils doivent développer:

- Ia réduction de la production des déchets;

- la valorisation de leur fraction "utile"

- le traitement de leur fraction "non utile".

1) Ia réduction de la production des déchets

Les plans adoptés se basent en général sur taux de croissance moyen de la production d'ordures ménagères. Situé Ie plus souvent entre 1 et 2 %, ce taux correspond à la fourchette indiquée dans le guide publié en 1993 par l'ADEME et mes services à défaut d'informations locales. Il conviendrait de s'appuyer sur des données et des évaluations plus spécifiques.

Peu d'actions de réduction de la production de déchets sont envisagées dans ces plans. Bien au contraire, la croissance de cette production apparaît souvent comme un fait établi sur lequel les pouvoirs publics et Ies organismes privés n'auraient aucun moyen possible d'intervention et d'action.

Pourtant, cette croissance n'est pas une fatalité et des initiatives locales, associant les acteurs publics et privés et la population, peuvent être facilement, et à peu de frais développées, comme par exemple :

- la réduction concertée de la diffusion des prospectus, et journaux publicitaires,

- Ie réemploi des emballages de transport;

- Ie compostage individuel en zone pavillonnaire.

2) la valorisation de la fraction "utile" des déchets

Les plans étudiés affichent un objectif moyen de quasi quadruplement des proportions de déchets valorisés par recyclage et compostage sur la période 1995-2002.

Pour réaliser cet objectif, les collectivités locales mettent en place des collectes séparatives de déchets triés par les habitants, en combinant selon les circonstances, I'apport volontaire à des conteneurs ou des déchetteries et le ramassage porte à porte.

Sur la période 1995-2002, Ie nombre de centres de tri devrait également être multiplié par six et pour Ies déchetteries, centres de transfert et unités de compostage par deux.

Ainsi, la proportion moyenne de déchets ménagers valorisés évolue :

- de 2% en 1995 à 19% en 2002 pour le recyclage matière,

- de 6% à 8% sur la même période pour le compostage.

Si les avancées sont significatives, elles restent toutefois très prudentes. Bien évidemment, il serait inenvisageable de considérer que l'intégralité de la fraction valorisable des déchets ménagers sera récupérée et recyclée ou compostée car les limites de la collecte séparative, du tri et de la valorisation sont réelles et nombreuses :

- comportement de la population,

- coût des opérations de collecte et de tri,

- existence et économie des filières de valorisation,

- réalité et contraintes urbanistiques : habitat dispersé, habitat vertical, ....

Cependant, des marges de progrès existent et une plus grande ambition dans Ies objectifs de valorisation doit être recherchée sans toutefois s'écarter du réalisme.

Pour les plans non encore adoptés et à l'occasion de leur révision pour les plans adoptés, je. vous saurai gré de bien vouloir engager Ie réexamen, autant que faire se peut des objectifs, et donc des actions, de valorisation par recyclage et compostage ainsi d'ailleurs que les. objectifs et les actions de réduction de production des déchets.

3) le traitement de la fraction "non utile" des déchets

Le traitement des déchets par incinération avec valorisation énergétique et par stockage est à l'origine de nombreuses interrogations.

Ces interrogations sont d'autant plus fortes que les objectifs affichés correspondent souvent à un véritable bouleversement de la situation actuelle. Ainsi, dans Ies plans adoptés. on constate un quasi doublement, entre 1995 et 2002 de la proportion de déchets incinérés et une réduction très nette de la proportion de déchets stockés.

a) Les centres de stockage

Une première série d'interrogations concerne les centres de stockage de déchets qui ne pourront recevoir que des déchets ultimes à compter du 1er juillet 2002. Elle est essentiellement liée à la définition même du déchet ultime.

En effet, de façon certainement trop systématique, le déchet ultime a été assimilé aux seuls résidus d'incinération de déchets, incinération qui deviendrait alors un traitement obligé avant mise en décharge. Il est pourtant certain que Ie tri, la valorisation ou le compostage ne peuvent traiter la totalité des déchets. La définition du déchet ultime repose sur des critères multiples, complexes et imbriqués : objectifs de la collecte séparative et du tri, objectif du compostage, type d'urbanisation, et il conviendra de mieux les préciser.

Mais, en tout état de cause, il est clair que des décharges resteront indispensables.

Il faut donc continuer à effacer l'image, encore très présente dans l'esprit de nos citoyens, des décharges brutes telles qu'elles existaient jusqu'au milieu de la décennie précédente et telles qu'il en subsiste encore aujourd'hui, malgré la politique de fermeture et de résorption engagée à la même époque.

Les derniers centres de stockage mis en exploitation n'ont plus rien de commun avec Ies décharges brutes et il faut renforcer cette évolution.

b) L'incinération des déchets ménagers et assimilés

Les autres interrogations concernent l'incinération qui permet de réduire encore Ie volume de déchets à stocker. d'en modifier la nature et de valoriser les déchets sous forme d'énergie, production d'électricité ou de vapeur.

Ces interrogations sont à la fois :

- d'ordre économique : les investissements et les frais d'exploitation constitueront des charges très lourdes pour Ie citoyen et les collectivités;

- d'ordre réglementaire : I'évolution prévue ou prévisible des textes applicables en la matière est source d'incertitude pour les décideurs;

- d'ordre environnemental : les rejets atmosphériques de chlore, de métaux lourds, de dioxines, sont autant de sujets de craintes pour la population.

Sur les interrogations d'ordre réglementaire, il faut distinguer Ie cas des installations nouvelles de celui des installations existantes

b1) Les installations nouvelles

Actuellement, Ies installation d'incinération de déchets ménagers sont soumises aux dispositions d'un arrêté ministériel du 25 janvier 1991, qui transcrit, dans le droit français, deux directives européennes de 1989.

La modification de ces deux directives a été engagée en 1993 et devrait aboutir en 1999/2000. Elle vise surtout des contraintes plus fortes en matière de rejets atmosphériques, contraintes qui deviendraient homogènes avec celles de la directive relative à l'incinération et à Ia coincinération des déchets dangereux, directive transcrite dans le droit français par un arrêté du 10 octobre 1996.

Je suis très attachée à la stabilité des règlements dès lors que ceux-ci fixent clairement les objectifs à atteindre et qu'ils sont respectés par tous. Cette stabilité est indispensable pour éviter les gaspillages économiques.

Aussi, je vous demande que, dès à présent, et par cohérence, les installations nouvelles d'incinération de déchets ménagers soient soumises aux normes de rejet fixées à l'article 11 de l'arrêté du 10 octobre 1996 relatif aux installations d'incinération et de coincinération de déchets dangereux.

b2) les installations existantes

Une enquête récente a montré que près de la moitié des installations existantes ne respectaient pas la réglementation qui leur était applicable au 1er décembre 1996.

Il faut que, cas par cas, les exploitants décident s'ils arrêtent les unités ou Ies mettent en conformité avec la réglementation.

Les difficultés locales ne m'échappent pas et il convient d'agir de manière équilibrée

A l'encontre de ces installations, je vous recommande de mettre en oeuvre les mesures prévues à l'article 23 de la loi du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l'environnement et en particulier la procédure de consignation.

Les sommes consignées correspondant à la mise en conformité seront restituées à l'exploitant soit au moment de l'arrêt de l'installation, soit au moment de la réalisation des équipements nécessaires. Il est important pour la crédibilité de l'action de l'Etat de montrer que les exploitants qui ont pris du retard et ne respectent pas la réglementation n'en tirent pas bénéfice.

Vous voudrez bien me faire part, sous le timbre de la direction de la prévention des pollutions et des risques, des difficultés que vous pourriez rencontrer pour l'application de ces instructions.

 

 

 

 

 

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