(circulaires.legifrance.gouv.fr et BO du MEDDE-MLETR n°2015/22 du 10 décembre 2015)


NOR : DEVT1526413C

La ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie et le secrétaire d’Etat chargé des transports, de la mer et de la pêche,

à

Pour exécution
Préfets de départements

Pour information
Préfets coordonnateurs des itinéraires routiers
Présidents de société concessionnaire d’autoroute et d’ouvrage d’art

Résumé : Des mesures de limitation de vitesse peuvent être édictées selon des considérations de qualité de l’air. Sur les autoroutes, ces mesures peuvent être prises par le préfet de département
dans le cadre de plan de protection de l’atmosphère ou en cas de pic de pollution. En dehors de ces situations, les limitations de vitesse sur autoroute peuvent être prises par le préfet sur le fondement
de son pouvoir de police de la circulation et sur la base d’études circonstanciées.
Catégorie : directive adressée par le ministre aux préfets chargés de leur application, sous réserve, le cas échéant, de l’examen particulier des situations individuelles

Domaine : Transport

 

 

Type : Instruction du gouvernement          et /ou            Instruction aux services déconcentrés

                                                                             

Mots clés liste fermée […] Mots clés libres : vitesse, autoroute, qualité de
l’air
Texte (s) de référence : code général des collectivités territoriales (notamment articles L.2213-1, L.3221-4), code de la route (notamment articles R.411-9 , R.413-2 et R.413-3), code de l’environnement (notamment articles L.222-4, L.222-6, L.223-1)
Circulaire(s) abrogée(s) : néant
Date de mise en application : immédiate
Pièce(s) annexe(s) : néant
N° d’homologation Cerfa : néant
Publication BO     Circulaires.gouv.fr         

La présente circulaire a pour objet de rappeler la répartition des compétences entre les différentes autorités titulaires du pouvoir de police de la circulation et de dégager les règles d’édiction des mesures de limitation de vitesse selon des considérations de qualité de l’air.

1. L’exercice du pouvoir de police de la circulation

La fixation des limitations de vitesse relève de la compétence de l’autorité de police de la circulation, qui vise à assurer la sécurité et la commodité de passage sur les voies publiques. Elle relève du code de la route et du code général des collectivités territoriales (CGCT). La police de la circulation est partie intégrante de la police de l'ordre public.

Les autorités compétentes pour exercer le pouvoir de police de la circulation varient selon le type de voie concernée et selon la localisation (en agglomération ou hors agglomération).
1.1. Le préfet exerce le pouvoir de police sur les routes nationales hors agglomération et sur les autoroutes concédées ou non (R.411-9 du code de la route). Il convient de préciser que, par principe, les autoroutes ne sont pas situées en agglomération et que, d’ailleurs, aucun panneau d’entrée et de sortie d’agglomération n’y est dès lors apposé.
1.2. Le président du conseil départemental détient les pouvoirs de police de la circulation sur les routes départementales hors agglomération (L.3221-4 du CGCT).
1.3. Le maire exerce la police de la circulation sur les routes communales ainsi que sur l’ensemble des routes, quelle que soit leur domanialité (route nationale, départementale) dans les limites de l’agglomération (1) (L.2213-1 du CGCT).

Les pouvoirs conférés au maire par le CGCT ne s’appliquent donc pas sur les autoroutes, même les autoroutes traversant des zones urbaines denses, étant rappelé que l’expression « autoroute urbaine » ne correspond pas à un type particulier d’infrastructure autoroutière soumise à des règles spécifiques.

Les vitesses maximales autorisées en fonction des différents types de voies sont fixées par le code de la route (2). L’article R.411-8 autorise l’autorité de police de la circulation à édicter des mesures de limitation de vitesse plus rigoureuses « dès lors que la sécurité de la circulation routière l’exige » (3).

Le code de la route n’a pas explicitement prévu de motif lié à la qualité de l’air pour justifier une dérogation permanente aux vitesses maximales autorisées aux articles R.413-2 et R.413-3.

L’article R.411-19 du code de la route vous donne cependant le pouvoir de définir des mesures de restriction ou de suspension de circulation pour des motifs de qualité de l’air, mais uniquement en cas d’épisode de pollution (4).

(1) R.110-2 du code de la route « agglomération : espace sur lequel sont groupés des immeubles bâtis rapprochés et dont l'entrée et la sortie sont signalées par des panneaux placés à cet effet le long de la route qui le traverse ou qui le borde ; »
R.411-2 du code de la route : « Les limites des agglomérations sont fixées par arrêté du maire. ».
(2) R.413-2 : « I. - Hors agglomération, la vitesse des véhicules est limitée à : 1° 130 km/h sur les autoroutes ; […] ».
(3) R.411-8 : « Les dispositions du présent code ne font pas obstacle au droit conféré par les lois et règlements aux préfets, au président du Conseil exécutif de Corse, aux présidents de conseil départemental et aux maires de prescrire, dans la limite de leurs pouvoirs, des mesures plus rigoureuses dès lors que la sécurité de la circulation routière l'exige. Pour ce qui les concerne, les préfets et les maires peuvent également fonder leurs décisions sur l'intérêt de l'ordre public... ».

(4) R.411-19 : « Pour les mesures propres à limiter l'ampleur et les effets des pointes de pollution sur la population, le préfet définit le périmètre des zones concernées, les mesures de suspension ou de restriction de la circulation qu'il est susceptible de prendre et les modalités de publicité et d'information préalables des usagers en cas de mise en oeuvre de ces mesures ».

2. Les mesures de limitation de vitesse dans une recherche d’amélioration de la qualité de l’air

2.1. Les compétences du maire en agglomération :

Au regard de la qualité de l’air, le maire détient des pouvoirs en termes de police municipale (article L.2212-1 du CGCT) qu’il peut mettre en oeuvre pour des motifs de « bon ordre, [...] sûreté, [...] sécurité et [...] salubrité publiques. ».

Si la qualité de l’air peut être regardée comme faisant partie de la salubrité publique, le maire ne peut cependant, au titre de ses pouvoirs de police générale, limiter la vitesse des véhicules.

Le maire détient également des pouvoirs spécifiques susceptibles d’être motivés par des considérations environnementales (5) et notamment de qualité de l’air. Les mesures prises sur ce fondement lui permettent de prendre des mesures d’interdiction d’accès et seulement sur certaines voies ou sections de voies communales.

Depuis la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, le maire peut également désormais « fixer pour tout ou partie des voies de l'agglomération ouvertes à la circulation publique une vitesse maximale autorisée inférieure à celle prévue par le code de la route eu égard à une nécessité de sécurité et de circulation routières, de mobilité ou de protection de l'environnement. » (article L.2213-1-1 nouveau).

(5) L. 2213-2 du CGCT « par arrêté motivé, eu égard aux nécessités de la circulation et de la protection de l'environnement d’interdire à certaines heures l'accès de certaines voies de l'agglomération ou de certaines portions de voie ou réserver cet accès, à certaines heures, à diverses catégories d'usagers ou de véhicules (…) » et L. 2213-4 du même code : « Le maire peut, par arrêté motivé, interdire l'accès de certaines voies ou de certaines portions de voies ou de certains secteurs de la commune aux véhicules dont la circulation sur ces voies ou dans ces secteurs est de nature à compromettre soit la tranquillité publique, soit la qualité de l'air, [...]. »

2.2. La réduction de la vitesse maximale autorisée dans le cadre des plans de protection de l’atmosphère ou en cas de pic de pollution

La loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte comporte par ailleurs des dispositions spécifiques sur la limitation de vitesse, dans le cadre des plans de protection de l’atmosphère ou en cas de pic de pollution (article 48 II) :

- pour atteindre les objectifs définis par les plans de protection de l’atmosphère (PPA) des mesures de réduction des vitesses maximales autorisées pourront désormais être édictées par les autorités de police de la circulation (article L.222-6 du code de l’environnement modifié).

- en cas de pic de pollution, le code de l’environnement vous donne compétence pour prendre des mesures propres à limiter l'ampleur et les effets de la pointe de pollution sur la population notamment par la réduction des vitesses maximales autorisées (article L.223-1 du code de l’environnement modifié).

Dans le cas d’une autoroute traversant la zone urbaine d’une commune, vous êtes donc fondé à limiter la vitesse pour des motifs de qualité de l’air dans deux situations : lorsque la commune est couverte par un PPA ou lors d’un épisode de pollution (y compris, alors, lorsque la commune n’est pas couverte par un PPA).

2.3. La réduction de la vitesse maximale autorisée dans les communes qui ne sont pas couvertes par un plan de protection de l’atmosphère et en dehors des situations de pic de pollution

Il peut parfois être constaté que le recours à un PPA n’est pas nécessaire pour prendre des mesures de protection, et que, sur la base d’études circonstanciées, des mesures prises dans un autre cadre sont plus efficaces pour respecter les normes de qualité de l’air (art. L.222-4 du code de l’environnement).

Dans ce cadre, des limites de vitesse plus rigoureuses que celles fixées par le code de la route peuvent être édictées sur certaines sections dont les études auront démontré qu’elles sont une source importante de pollution de l’air.

Par ailleurs, l’ordre public, au sens large, peut également justifier l’édiction de mesures de limitation de vitesse plus rigoureuses sur la base de l’article R.411-8 du code de la route. Il apparaît ainsi que des mesures de limitation de vitesse peuvent être prises, par l’autorité de police de la circulation compétente, selon des considérations de qualité de l’air.

Enfin, s’agissant de la mise en oeuvre d’un pouvoir de police, nous vous rappellons que la légalité d'une telle mesure reste subordonnée à la vérification que les atteintes aux intérêts des usagers dont la vitesse est restreinte alors que les caractéristiques de la voie autoroutière sont adaptées à une circulation à vitesse plus élevée, sont concrètement justifiées par le but d'intérêt général poursuivi.

Au surplus, il importe d’apprécier les effets induits que pourrait avoir une mesure de limitation de vitesse sur autoroutes, les usagers pouvant dès lors choisir de se reporter sur un itinéraire local engendrant d’autres types de nuisances et de mécontentements. A cet égard, la mesure de limitation de vitesse sur une section d’autoroute doit être accompagnée d’une réflexion sur la lisibilité des vitesses limites autorisées (VLA) sur l’ensemble des itinéraires de la zone concernée, en cohérence avec les principes de sécurité routière et de circulation.

En pratique, sur demande des maires, l’édiction de toute mesure de limitation de vitesses sur les autoroutes devra être précédée par la réalisation d’une étude environnementale et d’une étude de trafic circonstanciées portant sur la ou les section(s) autoroutière(s) susceptible(s) d’être visée(s) par une limitation de la vitesse. On peut également étendre l’étude à l’ensemble de l’agglomération, à la demande de toute ou partie des élus, afin de dégager une cohérence d’ensemble des mesures qui pourraient être prises. La mise en oeuvre de ces mesures doit donc faire l’objet d’une étude spécifique, non limitée aux limites communales, et tenant compte des enjeux de sécurité routière et de la cohérence des limites de vitesse sur l’axe autoroutier. Le cas échéant, vous veillerez à valoriser les études locales existantes, notamment celles établies par les associations agréées de surveillance de la qualité de l’air.

Les études générales montrent que la vitesse optimale pour minimiser les émissions de polluant par les véhicules légers est de 70 km/h et que ces émissions deviennent particulièrement critiques en situation de congestion. La vitesse optimale pour minimiser les émissions de polluants par les poids-lourds est en général de 90 km/h compte tenu de la conception et du réglage du moteur. Les émissions de polluants des poids-lourds augmentent sensiblement à 80 km/h puis 70 km/h. Elles augmentent significativement à des vitesses pratiquées inférieures à 70 km/h.

Pour les sections autoroutières qui traversent une zone urbanisée, il est donc conseillé, compte tenu de l’importance du trafic de poids lourds en transit, d’éviter de fixer une vitesse maximale autorisée inférieure à 90 km/h.

La présente circulaire sera publiée au Bulletin officiel du ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.

Fait le 24 novembre 2015.

La ministre de l’écologie,du développement durable et de l’énergie,
Ségolène Royal

Le secrétaire d’État chargé des transports, de la mer et de la pêche,
Alain Vidalies

 

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