(BOMEDD n° 8/2006 du 30 avril 2006)
NOR : DEVO0650134C
Le ministre de lécologie et du développement durable à Mesdames et Messieurs les préfets.
Références du ou des documents source : directive 2000/60/CE du 23 octobre 2000 du Parlement et du Conseil établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de leau ; loi n° 2004-338 du 21 avril 2004 ; décret n° 2005-475 du 16 mai 2005.
PLAN DE DIFFUSION |
Pour exécution |
Pour information |
Destinataires |
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Destinataires |
Ex. |
Préfets coordonnateurs de bassin (métropole et DOM) |
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Préfets de région DIREN Offices de leau DOM Ministère chargé de lintérieur |
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Préfets de département |
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Ministère chargé de lindustrie Ministère chargé de léquipement |
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DIREN de bassin (métropole et DOM) |
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Ministère chargé de lagriculture Ministère chargé de la santé Ministère de loutre-mer |
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Directeurs des agences de leau |
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Ministère des affaires étrangères D4E DPPR Direction de leau : DE/SDDCP, DE/SDMAGE, DE/SDDEAGF DGAFAI/SDAJ Conseil supérieur de la pêche BRGM CEMAGREF IFREMER INERIS |
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La circulaire n° 2004/10 du 22 avril 2004 précise le calendrier de mise à jour du schéma directeur daménagement et de gestion des eaux (SDAGE) en application de directive 2000/60/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2000 établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de leau et transposée par la loi n° 2004-338 du 21 avril 2004.
Le SDAGE mis à jour arrêtera notamment les objectifs environnementaux des masses deau.
En application de la directive-cadre, un objectif adapté, le bon potentiel écologique, est prescrit pour 2015, sous réserve dexemptions de report de délais ou dobjectifs moins stricts, pour des masses deau de surface (cours deau, canaux, lacs, estuaires et littoral) désignées comme masses deau fortement modifiées ou comme artificielles en application de larticle 11 du décret n° 2005-475 du 16 mai 2005.
La désignation de ces masses deau constitue donc lune des premières étapes de cette mise à jour des SDAGE. Elle sera réexaminée lors de chaque mise à jour suivante du SDAGE.
La présente circulaire rappelle la méthode de désignation. Elle a été soumise à la mission interministérielle de leau lors de sa réunion du 13 décembre 2005.
Les états des lieux adoptés par les comités de bassin fin 2004 identifient la liste des masses deau susceptibles dêtre désignées comme fortement modifiées ou comme artificielles, en application de la circulaire DCE n° 2003/04 pour ce qui concerne les eaux intérieures. Lun des critères principaux ayant conduit à létablissement de cette liste est lidentification dun risque de non-atteinte du bon état écologique en raison de modifications hydromorphologiques substantielles des caractéristiques de la masse deau.
Des modifications substantielles de lhydromorphologie des masses deau, comme celles liées à la chenalisation de cours deau, au dragage de chenaux de navigation en estuaire, aux ouvrages de protection du trait de côte, aux lacs réservoirs, nempêchent pas nécessairement la réalisation dun objectif de bon état écologique. Une définition provisoire du bon état ayant depuis été précisée, ce risque de non-atteinte du bon état écologique doit être confirmé avant dengager la procédure de désignation. Pour les masses deau où des incertitudes demeurent, les hypothèses ayant servi de base aux tests de désignation pourront être vérifiées début 2007 au vu de lavancement des travaux dinter-étalonnage et des éléments publiés par la Commission.
Cette vérification du risque de non-atteinte du bon état étant faite, il convient ensuite de respecter strictement la procédure et de motiver la désignation pour chaque masse deau concernée afin déviter des contentieux ultérieurs sur les objectifs environnementaux du SDAGE. Le public devra pouvoir accéder, à sa demande, aux documents de référence et aux études techniques réalisées dans le cadre de ces travaux.
Les objectifs assignés à une masse deau ne préjugent en rien des objectifs assignés aux masses deau contiguës. En effet, les caractéristiques décrivant le « bon état » tiennent compte de la typologie des masses deau, les références à partir desquelles se définissent le bon état ou le bon potentiel étant fonction de chaque type de masses deau.
Il est demandé de ne pas procéder au redécoupage de masses deau au cours de la procédure de désignation. Les masses deau identifiées comme susceptibles dêtre désignées, et non retenues au terme du processus de désignation, pourront être regroupées avec des masses deau voisines, sous réserve du respect des typologies des masses deau.
Un guide technique disponible sur le site Internet du ministère présente la méthode de désignation et les principales données économiques nécessaires. Il a été établi sur la base des documents guides adoptés au plan européen et à lissue de tests conduits par des agences de leau associant des services de lEtat et des acteurs institutionnels concernés.
Le guide propose de retenir les évaluations disponibles des coûts environnementaux comme des indicateurs, des évaluations locales étant nécessaires si ces données napparaissent pas applicables aux sites considérés. Un guide pour la rédaction des cahiers des charges de ces études a été élaboré par la Direction des études économiques et de lévaluation environnementale et est disponible sur le site Internet du ministère.
votre attention sur les points suivants :
- Les analyses techniques, environnementales et économiques à réaliser :
Conformément à larticle 4.3 de la directive n° 2000/60/CE et à larticle 11 du décret n° 2005-475 du 16 mai 2005, la première étape de la désignation consiste à évaluer si les mesures pour atteindre le « bon état » ont une incidence négative significative sur les activités ou les intérêts identifiés par ces articles. Comme précisé dans le guide technique, limpact de la réalisation du bon état écologique sur les activités à lorigine des modifications hydromorphologiques devra être évalué, même lorsque la désignation en masse deau fortement modifiée va de soi.
La suite de la procédure de désignation consiste à identifier sil existe dautres moyens réalistes pour remédier à la perte dactivité, et si tel est le cas, à évaluer les bilans environnementaux de lalternative puis, lorsque nécessaire, le coût de mise en uvre de ces autres moyens au regard des avantages liés à la restauration du bon état écologique. Ces étapes sont présentées dans le guide technique (cf. diagramme p. 16 du guide).
Labsence danalyse environnementale des alternatives possibles et, lorsque nécessaire, danalyse de leurs coûts de mise en uvre pourrait être source de contentieux.
Ce nest quaprès désignation (ou absence de désignation), que la connaissance des coûts des travaux de réalisation du bon potentiel écologique (ou du bon état) est nécessaire pour justifier, le cas échéant, une exemption à la réalisation de lobjectif en 2015.
- La nécessaire implication des acteurs locaux :
La désignation des masses deau fortement modifiées étant liée aux modifications hydromorphologiques de la masse deau réalisées pour des activités économiques ou des intérêts mentionnés à larticle 4.3 de la directive (point II de lart. 11 du décret n° 2005-475 du 16 mai 2005), il convient de veiller à limplication des acteurs locaux concernés.
Je demande aux préfets coordonnateurs de bassin de se mettre en rapport avec les présidents de comités de bassin afin de préciser lorganisation des travaux en veillant à lorganisation de réunions techniques au plan local. Dans les départements doutre-mer, loffice de leau sera associé aux travaux.
Les secrétariats techniques de bassin veilleront à préparer les réunions locales avec lappui des services départementaux de police de leau et des services de lEtat concernés qui mettront à disposition les données disponibles sur les ouvrages et les actes administratifs correspondants. Les secrétariats techniques de bassin mettront à disposition des groupes de travail locaux les données disponibles ainsi que les hypothèses ayant servi de base à lévaluation des impacts environnementaux.
- Lincidence sur les activités économiques liées aux ouvrages de stockage deau :
La présence dun ouvrage de stockage deau, notamment pour la production dhydroélectricité, la navigation, lalimentation en eau, lirrigation,... nimplique pas une impossibilité systématique de réaliser un objectif de bon état pour la masse deau considérée dans son ensemble.
Par ailleurs, en aval dun barrage de production dhydroélectricité, la pratique déclusées ne constitue pas, à elle seule, un motif de désignation en masse deau fortement modifiée. Si un report de délais ou un objectif dérogatoire apparaissent nécessaires dans de tels cas, ils seront respectivement motivés en application de larticle 15 et, en dernier ressort, de larticle 16 du décret n° 2005-475. Compte tenu de lutilisation des mêmes données et des liens amont-aval, les études et les concertations liées à lapplication respective de larticle 11 pour la retenue et des articles 15 ou 16 pour laval, seront alors conduites simultanément.
Les directions régionales de lindustrie et de lenvironnement concernées devront être associées par le secrétariat technique de bassin à la définition et au suivi des études spécifiques portant sur les ouvrages de production hydroélectrique de leur circonscription.
Les données ainsi rassemblées contribueront à établir, en application de larticle 2-1 de la loi du 16 octobre 1919, la synthèse des conséquences des dispositions du SDAGE au regard des objectifs nationaux de réduction des émissions de gaz contribuant au renforcement de leffet de serre et de développement de la production délectricité dorigine renouvelable.
Larticle L. 212-1 (III) du code de lenvironnement demande par ailleurs dévaluer par zone géographique le potentiel de développement de lhydroélectricité en application de larticle 6 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de lélectricité. Réalisée par les directions régionales de lindustrie et de lenvironnement concernées, lévaluation de ce potentiel sera à présenter au comité de bassin début 2007 afin que le projet de SDAGE à soumettre à la consultation du public fin 2007 puisse la prendre en compte. Le projet de SDAGE sera ensuite transmis pour avis par le président du comité de bassin au Conseil supérieur de lénergie et du gaz en application de larticle 7 (5e alinéa) du décret n° 2005-475 du 16 mai 2005.
- La prise en compte de la continuité écologique des cours deau :
La continuité écologique des cours deau se définit par la libre circulation des espèces biologiques et par le bon déroulement du transport naturel des sédiments : ces deux éléments doivent être examinés à léchelle de plusieurs masses deau le long du même cours deau (notion de continuum).
A léchelle de la rivière, il est indispensable dassurer cette continuité écologique afin que le bon état ou le bon potentiel puissent être atteints (§ 1.2.1 et 1.2.5 de lannexe V de la directive).
La désignation dune masse deau comme « fortement modifiée » ne dispense pas de mettre en uvre les mesures nécessaires pour assurer cette continuité dautant plus que, sur un cours deau, il peut y avoir une succession de masses deau de statut différent (masse deau « naturelle », masse deau « fortement modifiée »).
En définissant les objectifs détat des eaux, et leur échéance de réalisation, le SDAGE arrêtera par là même un objectif de restauration de la continuité écologique de la rivière permettant datteindre les valeurs pour les éléments de qualité biologique caractérisant le bon état.
La réalisation dobjectifs de gestion des ressources piscicoles pourra nécessiter la restauration de grands migrateurs sur les axes hydrauliques concernés. Le SDAGE arrêtera en ce domaine les objectifs à atteindre à terme. Ces objectifs seront à réévaluer lors de chaque mise à jour ultérieure du SDAGE.
Le premier programme de mesures identifiera ainsi les améliorations de la continuité écologique des cours deau pouvant être apportées dici à 2015, en tenant compte de la faisabilité technique, des coûts, des dommages et des bénéfices environnementaux.
- La définition de schémas daménagement et de gestion des eaux :
Un objectif environnemental est à définir pour toutes les masses deau, afin de servir de référence à lexercice de la police de lenvironnement.
Pour quelques masses deau soumises à la procédure de désignation comme « fortement modifiées », il est probable que, même si de premières améliorations sont possibles, des incertitudes demeureront sur lobjectif environnemental réalisable à terme.
Dans de tels cas, et sur la base des critères énumérés à larticle 15 du décret n° 2005-475, le SDAGE pourra reporter léchéance de réalisation de lobjectif, cet objectif étant alors obligatoirement réexaminé lors de la prochaine mise à jour du SDAGE prévue pour 2015. Le programme de mesures 2010-2015 identifiera les actions permettant de premières améliorations ainsi que les études et les concertations éventuellement nécessaires en préalable au réexamen de cet objectif.
En application de lalinéa X de larticle L. 212-1 du code de lenvironnement, le SDAGE peut alors demander aux acteurs locaux délaborer ou de mettre à jour un schéma daménagement et de gestion des eaux (SAGE), et en fixer le délai afin de pouvoir le prendre en compte lors de la mise à jour suivante du SDAGE. Ces demandes éventuelles seront à identifier le plus tôt possible, en concertation avec les acteurs locaux, afin de pouvoir engager les études et démarches nécessaires au plan local sans attendre lapprobation du SDAGE.
- Cas des districts internationaux et des cours deau transfrontaliers :
Si la désignation des masses deau fortement modifiées et la définition des objectifs environnementaux sont de la responsabilité de chaque Etat membre, une coordination est nécessaire pour les cours deau internationaux afin de définir en commun les objectifs pour les drains principaux du bassin international et assurer la cohérence des objectifs détat et de continuité écologique pour lensemble des masses deau de part et dautre de la frontière.
Il appartiendra aux préfets coordonnateurs de bassin dinformer les autorités compétentes des pays concernés du déroulement des travaux et de demander, en tant que de besoin, linscription des points imposant une coordination à lordre du jour des réunions des commissions internationales ou des groupes de travail concernés.
Je demande aux préfets coordonnateurs de bassin et aux préfets de département de veiller tout particulièrement à lexamen de limpact des objectifs environnementaux qui seront ainsi définis sur les actes administratifs relatifs aux ouvrages et aménagements concernés.
En effet, ladoption du SDAGE et son approbation par lautorité administrative auront pour effet de fonder juridiquement la mise en compatibilité obligatoire. Il convient donc de se mettre dès maintenant dans la logique de définition et de réalisation des objectifs environnementaux de la directive-cadre.
La cohérence entre les objectifs environnementaux du SDAGE, les échéances souscrites et les dispositions réglementaires du programme de mesure relatives aux ouvrages existants constitueront des points clefs à examiner par les services concernés de lEtat avant de soumettre à lapprobation du préfet coordonnateur de bassin le programme de mesures et, pour la France continentale et les départements doutre-mer, le SDAGE mis à jour adopté par le comité de bassin.
Je demande à Monsieur le préfet coordonnateur de bassin de la Corse dinformer la collectivité territoriale de Corse de la présente circulaire et, au fur et à mesure de lavancement des travaux, de porter à la connaissance du comité de bassin les actes administratifs relatifs aux activités à lorigine des modifications hydromorphologiques des masses deau susceptibles dêtre désignées.
Vous voudrez bien me faire part des difficultés éventuelles dapplication de la présente circulaire.
Le directeur de leau,
Pascal Berteaud
Sommaire
A. Pourquoi définir des masses deau fortement modifiées ?
B. La transposition de la directive
C. Les documents dorientation existants pour lidentification et la désignation des MEFM et MEA
1. Le document guide européen
2. Les produits de formation DCE : « West Project »
3. La circulaire DCE 2003/04 relative à lidentification prévisionnelle des MEFM et des MEA
D. La méthode de désignation dune masse deau comme artificielle ou fortement modifiée
1. Compléter/affiner lidentification prévisionnelle
2. Réalisation de tests du processus de désignation
2.1. Présentation des tests
2.2. Les résultats des tests
2.3. Les réponses aux questions soulevées lors des tests
a) Impliquer les acteurs locaux
b) Veiller au pragmatisme et à la progressivité de lanalyse
c) Intégrer les approches techniques et économiques dès le début du processus pour mettre à disposition des acteurs locaux les données nécessaires
d) Objectif adapté en désignant des MEFM et des MEA et objectif moins strict (art. 4.5)
e) Quel objectif environnemental pour les cours deau à grands migrateurs en amont de masses deau désignées comme fortement modifiées ?
f) Le stockage deau pour la production hydroélectrique implique-t-il automatiquement le classement en MEFM ?
3. La méthode de désignation
3.1. Caractérisation des activités
a) Quelles sont les masses deau concernées ?
b) Quelle échelle danalyse ?
c) Comment décrire les activités et les intérêts liés aux modifications hydromorphologiques de la masse deau ?
3.2. Identifier des mesures supplémentaires nécessaires pour atteindre le bon état de la masse deau
a) Comment définir lobjectif de bon état écologique à atteindre ?
Cas dune masse deau prédésignée comme MEFM
Cas dune masse deau prédésignée comme MEA
b) Quels sont les changements hydromorphologiques indispensables pour atteindre le bon état écologique ?
3.3. Identification simplifiée des impacts et des alternatives (« tamis A »)
Evaluer si ces mesures ont des effets négatifs significatifs sur lactivité à lorigine des modifications hydromorphologiques de la masse deau
3.4. Evaluation simplifiée du bilan environnemental et des coûts des alternatives possibles (« tamis B »)
a) Préciser si ces modifications hydromorphologiques nécessaires à la réalisation du bon état écologique ont des effets négatifs significatifs sur dautres activités ou intérêts, y compris sur lenvironnement au sens large
Quelles sont les données disponibles pour évaluer ces effets négatifs sur les activités ou sur lenvironnement ?
b) Identifier et évaluer les solutions alternatives
Quelles autres solutions techniques permettent-elles dassurer la même fonction économique ?
Lexistence dune concession douvrages implique-t-elle automatiquement le classement en MEFM ?
Comment apprécier la faisabilité technique des autres solutions identifiées pour assurer la même fonction économique ?
Quelles données pour évaluer si ces alternatives constituent une meilleure option environnementale ?
c) Comment évaluer si ces alternatives sont (ne sont pas) dun coût disproportionné ?
Quelles sont les données disponibles pour évaluer les bénéfices environnementaux liés à la réalisation du bon état ?
3.5. Réalisation, au plan local, dune évaluation des coûts environnementaux et dune étude approfondie des pertes dactivité et des alternatives (« tamis C »)
4. Les outils
E. Le calendrier de mise en uvre
F. Annexes
I. Exemple de fiche de synthèse
II. Evaluation des bénéfices liés à la réalisation du bon état
II. Désignation au titre de lhydroélectricité
III. Désignation au titre de la navigation
IV. Désignation au titre de la protection contre les inondations et le drainage des terres
A. Pourquoi définir des masses deau fortement modifiées ?
La directive-cadre européenne sur leau promeut une utilisation durable et équilibrée des eaux, inscrivant au plan européen le principe de gestion intégrée défini par la loi sur leau du 3 janvier 1992 comme alliant la protection des milieux aquatiques, éléments du patrimoine national, et le développement des activités économiques dans une logique de développement durable.
Pour concilier protection des milieux et activités humaines durables, la directive fixe des objectifs environnementaux à atteindre et ouvre la possibilité de retenir un objectif adapté, notamment le bon potentiel sur les masses deau où certaines activités humaines existantes précisées dans larticle 4.3 de la DCE (navigation, stockage deau pour lapprovisionnement en eau potable, pour la production délectricité ou pour lirrigation, protection contre les inondations, autres activités de développement humain durable tout aussi importantes) entraînent nécessairement des modifications hydromorphologiques préjudiciables à la réalisation du bon état écologique des eaux.
En Europe, de nombreux milieux aquatiques ont subi des aménagements majeurs pour permettre toute une gamme dutilisations des eaux qui a évolué au cours du temps.
Avec la procédure de désignation des masses deau fortement modifiées et des masses deau artificielles, la directive demande notamment didentifier les masses deau où la réalisation du bon état écologique est aujourdhui impossible en raison de modifications physiques substantielles liées à certaines activités existantes mentionnées par la DCE. En demandant dexaminer les alternatives possibles pour maintenir les bénéfices rendus par les activités à lorigine des aménagements des milieux (cours deau, plans deau, eaux côtières), la directive invite à rappeler clairement les éléments de décision daménagement du territoire ayant conduit à développer ces activités. Elle vise ainsi à approfondir les éléments de choix et à renforcer la transparence sur les justifications et les conséquences des décisions prises en matière daménagement du territoire, en se plaçant dans une logique de développement durable.
Dans nombre de cas, les choix seront évidents : par exemple, le stockage de leau, la production hydroélectrique est essentielle pour assurer des besoins de pointe (on ne supprimera pas Serre-Ponçon, le port du Havre ne sera pas abandonné). Ces évidences soulignent que la démarche doit être réaliste et pragmatique : la décision de classement doit être prise dès que les acteurs intéressés conviennent que les éléments rassemblés sont suffisamment probants. Lexistence des comités de bassin est ici un gage de transparence et defficacité dans la démarche. Lorganisation de la concertation avec les acteurs de leau, tout au long de la démarche, représentera une approche importante à ne pas négliger, car à même de compléter les éléments dévaluation rassemblés par les études techniques et économiques, qui, en létat des connaissances actuelles, resteront probablement incomplètes.
Les motivations des désignations en masses deau fortement modifiées (ou en masses deau artificielles) seront à soumettre à lavis du public. Le projet de SDAGE devra donc présenter clairement les motifs de la désignation ainsi que les objectifs retenus. La désignation en masse deau fortement modifiée ne signifie par pour autant le statu quo. Elle implique le respect du « bon potentiel » dont le niveau dambition est similaire à celui du « bon état » pour les autres masses deau. A noter que les exigences relatives à létat chimique (substances prioritaires) sont identiques dans les deux cas. En outre, la désignation nexclut pas davoir à réaliser des opérations de restauration hydromorphologiques destinées à accroître les potentialités écologiques des milieux, sans pour autant remettre en cause lactivité à lorigine de la désignation comme masse deau fortement modifiée.
A lissue du processus de désignation, les masses deau désignées comme fortement modifiées seront soumises aux mêmes procédures que les autres masses deau en cas de difficultés de réalisation de lobjectif 2015 (justification dun report de 6 ou 12 ans puis, à terme, objectif moins strict).
Il convient également de rappeler que la directive institue un processus de gestion de projet : mise à jour du plan de gestion tous les six ans, bilan à mi-parcours, identification des écarts aux objectifs, définition de mesures correctrices en cas décart à la feuille de route... Elle admet ainsi une démarche progressive. Lerreur dappréciation est admissible à condition toutefois dassurer la transparence, de corriger lanalyse dès que possible, de prendre les mesures correctrices possibles ou dindiquer les faits pour lesquels elles ne peuvent pas être prises.
La directive demande de revoir la liste des masses deau fortement modifiées tous les six ans lors de chaque mise à jour du plan de gestion. La directive ne met pas de terme à ce processus de mise à jour qui devra se poursuivre au-delà de 2027, facilitant ainsi lintégration des politiques sectorielles et de la politique de leau. On revient ici à lobjectif de vérification de la permanence des activités ou des intérêts ayant motivé la désignation. Cette obligation dune révision périodique du classement impose une obligation périodique dexamen des alternatives possibles constituant une meilleure option environnementale pour réaliser les activités ou les intérêts en cause.
La désignation en masse deau fortement modifiée peut donc être remise en cause lors de chaque mise à jour du plan de gestion au vu dun bilan économique et environnemental, les termes de ce bilan pouvant évoluer en raison du développement de nouvelles techniques ou des changements économiques.
La première désignation des masses deau fortement modifiées, à réaliser pour mi-2007, ne peut sappuyer que sur une première approche de limpact des diverses mesures nécessaires pour restaurer des conditions hydromorphologiques favorables au respect du bon état des eaux. En effet, cette première désignation doit être conduite alors que le niveau de connaissance de létat des milieux est parfois incomplet, quune incertitude sur lefficacité des mesures mises en oeuvre pour favoriser la biodiversité et les habitats écologiques subsiste, et que lévaluation de létat des eaux seffectue sur la base dune définition provisoire du bon état (et du bon potentiel), les valeurs définitives devant être déterminées au plan européen en 2007. Face à ces incertitudes techniques, il serait utile de mettre en oeuvre avec les IXe programmes dintervention des agences de leau des sites « ateliers » permettant dévaluer plus précisément la faisabilité et limpact de mesures de restauration des conditions hydromorphologiques favorables au respect du bon état des eaux. Lévaluation à mi-parcours du programme de mesures sera ainsi facilitée.
Par ailleurs, le délai imparti pour la première désignation (et donc pour le choix du maintien ou non des modifications hydromorphologiques) peut apparaître très ambitieux, les débats sur les améliorations possibles étant parfois déjà engagés depuis plusieurs années au plan local.
Dans de tels cas, et sur la base des critères énumérés à larticle 15 du décret n° 2005-475, le SDAGE pourra reporter léchéance de réalisation de lobjectif après 2015. Cet objectif sera réexaminé lors de la mise à jour suivante du SDAGE. Afin de préparer ce réexamen, le programme de mesures défini pour les années 2010 à 2015 identifiera les premières améliorations possibles ainsi que les études et les procédures de concertation éventuellement nécessaires. En application de la loi de transposition de la directive, le comité de bassin pourra demander, si nécessaire, la définition dun SAGE. Les acteurs locaux pourront ainsi engager dès 2007-2008 une concertation approfondie, le programme de mesures précisant les moyens financiers pour lexpertise et lanimation locale. Des propositions seront alors à transmettre au comité de bassin avant la mise à jour suivante du SDAGE.
Là où nécessaire, la concertation au plan local pourra ainsi être renforcée et approfondie pour la définition des objectifs et des actions à engager, contribuant, par là même, à la complémentarité des travaux du comité de bassin et des commissions locales de leau.
B. La transposition de la directive
La directive-cadre a été transposée par la loi n° 2004-338 du 21 avril 2004.
Le point 4.3 de larticle 4 de la directive-cadre relatif aux objectifs environnementaux précise que les Etats membres peuvent désigner une masse deau de surface comme étant artificielle ou fortement modifiée lorsque :
- les modifications à apporter aux caractéristiques hydromorphologiques de cette masse deau pour obtenir un bon état écologique auraient des incidences négatives importantes sur :
- lenvironnement au sens large ;
- la navigation, y compris les installations portuaires, ou les loisirs ;
- les activités aux fins desquelles leau est stockée, telles que lapprovisionnement en eau potable, la production délectricité ou lirrigation ;
- la régularisation des débits, la protection contre les inondations et le drainage des sols ;
- dautres activités de développement humain durable tout aussi importantes ;
- les objectifs bénéfiques poursuivis par les caractéristiques artificielles ou modifiées de la masse deau ne peuvent, pour des raisons de faisabilité technique ou de coûts disproportionnés, être atteints raisonnablement par dautres moyens qui constituent une option environnementale sensiblement meilleure.
Larticle 11 du décret n° 2005-475 du 16 mai 2005 pris en application de la loi du 21 avril 2004 reprend ces dispositions (cf. encart page suivante).
C. Les documents dorientation existants pour lidentification et la désignation des mefm et mea
1. Le document guide européen (1)
(1) Ce document peut être téléchargé en version anglaise intégrale sur le site CIRCA - Communication & Information Resource Centre Administrator http://europa.eu.int/comm/environment/water/water-frame-work/guidance_d…. http://forum.europa.eu.int/Public/irc/env/wfd/library?l=/framework_directive&vm=detailed&sb=Title.
Les Etats membres de lUE, la Norvège, les pays alors engagés dans le processus dadhésion et la Commission européenne ont développé une stratégie commune pour soutenir et permettre une mise en uvre cohérente et harmonieuse de la directive-cadre sur leau. Des documents guides, destinés aux experts engagés dans la mise en uvre de la directive, ont été rédigés sur divers aspects techniques. Bien que non légalement opposables, ces documents dorientation serviront de référence aux services de la Commission en cas de contentieux. Lun dentre eux est consacré à lidentification et à la désignation des masses deau fortement modifiées et des masses deau artificielles. Il a été élaboré par un groupe de travail mis en place en avril 2000 (groupe HMWB 2.2). Le Royaume-Uni et lAllemagne ont assuré le secrétariat et la coordination de ce groupe de travail constitué de représentants de 12 Etats membres et de la Norvège, de plusieurs acteurs socioprofessionnels, de représentants dassociations de protection de lenvironnement, et de pays alors engagés dans le processus dadhésion à lUE.
Définition et objectifs environnementaux des masses deau fortement modifiées et des masses deau artificielles
Loi n° 2004-338 du 21 avril 2004 de transposition de la directive-cadre
Article L. 212-1 du code de lenvironnement
(...)
« IV. Les objectifs de qualité et de quantité des eaux que fixent les schémas directeurs daménagement et de gestion des eaux correspondent :
« 1° Pour les eaux de surface, à lexception des masses deau artificielles ou fortement modifiées par les activités humaines, à un bon état écologique et chimique ;
« 2° Pour les masses deau de surface artificielles ou fortement modifiées par les activités humaines, à un bon potentiel écologique et à un bon état chimique. »
(...)
Décret n° 2005-475 du 16 mai 2005 (art. 11)
Article 11
I. Pour lapplication du 2° du IV de larticle L. 212-1 du code de lenvironnement, le schéma directeur daménagement et de gestion des eaux indique lemplacement des masses deau de surface artificielles ou fortement modifiées par les activités humaines et les motifs pour lesquels ces masses deau ont été ainsi désignées. Cette désignation fait lobjet dun réexamen lors de chacune des mises à jour du schéma.
Le schéma directeur comporte également la liste des projets mentionnés au deuxième alinéa de larticle 7 et indique les raisons des modifications quils apportent à la masse deau affectée.
II. Une masse deau de surface artificielle ou fortement modifiée relève du régime prévu au 2° du IV de larticle L. 212-1 lorsque sont réunies les conditions suivantes :
- Les mesures qui seraient nécessaires, en matière dhydromorphologie, pour obtenir un bon état écologique conformément au 1o du IV du même article L. 212-1 auraient des incidences négatives importantes sur lenvironnement ou sur la navigation, les installations portuaires, les loisirs aquatiques, sur le stockage deau nécessaire à lapprovisionnement en eau potable, à lirrigation ou à la production délectricité, sur la régulation des débits, la protection contre les inondations et le drainage des sols ou sur dautres activités humaines aussi importantes pour le développement durable ;
- Les avantages associés à la création artificielle ou aux fortes modifications de la masse deau ne peuvent être obtenus, pour des motifs dordre technique ou en raison de coûts disproportionnés, par dautres moyens permettant de parvenir à des résultats environnementaux sensiblement meilleurs.
III. Létat dune masse deau artificielle ou fortement modifiée par les activités humaines est défini par la moins bonne des appréciations portées respectivement sur son potentiel écologique et sur son état chimique.
Le potentiel écologique dune masse deau artificielle ou fortement modifiée comprend quatre classes : bon et plus, moyen, médiocre et mauvais, définies par référence aux niveaux de qualité de la catégorie de masse deau de surface naturelle la plus comparable.
En 2001-2002, lors de lélaboration du guide européen, plusieurs tests ont été réalisés par les groupes « milieux fortement modifiés » (HMWB) et économie (WATECO) en vue de préciser les modalités didentification des masses deau fortement modifiées :
- la « boîte à outil » (2) annexée au guide européen présente ces études de cas. Trente-quatre études de cas (3) ont été menées dans différents Etats membres et en Norvège pour préciser les modalités de prédésignation des masses deau artificielles et fortement modifiées, demandée pour 2004. Elles portent principalement sur des cours deau, seulement quelques-unes ayant été effectuées dans le cas deaux côtières, destuaires et de lacs. Ces études ont permis de préciser lidentification des masses deau, dexaminer lutilisation des méthodes dévaluation des pressions, des changements morphologiques et de létat écologique utilisés dans les pays concernés ;
- des tests ont par ailleurs été conduits au cours des travaux du groupe européen économie « WATECO » (HMW Case Haringvliet & Hollandsch Diep ; RIZA - 2001) afin didentifier les besoins de données et les méthodes dévaluation des solutions alternatives.
(2) Disponible sur http://forum.europa.eu.int/Public/irc/env/wfd/library?l=/framework_directive/guidance_documents/modified_guidance&vm=detailed&sb=Title.
(3) Elefteria Kampa, Wenke Hansen, Ecologic Berlin - Heavy Modified Water Bodies, Synthesis of 34 Case Studies in Europe, 2004, XVIII, 322 p., International and European Environmental Policy Series, Springer, Heidelberg, Germany.
2. Les produits de formation DCE : « WEST project »
Réalisés par lOffice international de leau pour la DG Environnement, les documents WEST (4) présentent la démarche de désignation des MEFM en proposant deux étapes :
Etape 1 : les mesures nécessaires pour atteindre le bon état écologique ont-elles un impact significatif sur les activités ou intérêts visés à larticle 4.3 ? Le « significatif » devant être évalué dun point de vue à la fois environnemental et économique ;
Etape 2 :
- Y a-t-il dautres moyens techniquement faisables pour compenser les pertes dactivités ?
- Ces autres moyens constituent-ils des options environnementales significativement meilleures ? La dimension « environnement » devant être estimée dun point de vue global ;
- Les coûts de ces moyens sont-ils disproportionnés ou non ?
Dans cette seconde étape, il convient de rechercher d« autres moyens » dobtenir les mêmes avantages. Il faut ensuite établir si ces « autres moyens » sont techniquement faisables, représentent une option environnementale préférable et nimpliquent pas des coûts disproportionnés. En cas de réponse négative à lune de ces questions, une masse deau peut alors être considérée comme fortement modifiée. Le guide européen précise que si lune de ces trois questions a une réponse négative, la masse deau peut alors être considérée comme fortement modifiée.
Il convient cependant de signaler quil sera nécessaire daller au bout de la démarche lorsque lévaluation des bilans environnementaux ne donne pas de réponse suffisamment tranchée.
(4) Les documents de présentation sont accessibles sur le site (http ://www.oieau.fr/west).
3. La circulaire DCE 2003/04 (5) relative à lidentification prévisionnelle des MEFM et des MEA
(5) Document téléchargeable sur http://www.ecologie.gouv.fr/IMG/eau/DCE-MEFMidentification_previsionnel….
Conformément à la DCE (art. 5, annexe II) et au document guide européen, il convenait de recenser pour fin 2004 les masses deau artificielles potentielles et les masses deau pouvant être désignées, par la suite, comme fortement modifiées.
Au niveau national, la circulaire n° 2003/04 du 29 juillet 2003 a donné des éléments de cadrage pour cette identification prévisionnelle des masses deau fortement modifiées pour les eaux continentales. Elle rappelle que doivent être écartées les masses deau qui, bien quayant subi des modifications physiques, peuvent de manière évidente :
- respecter les objectifs environnementaux de la DCE, dont le bon état ;
- être restaurées sans remettre en cause une des activiés listées à larticle 4.3 de la DCE et sans avoir dincidences négatives sur lenvironnement.
Elle précise que les critères didentification des MEFM comprennent notamment le caractère substantiel des modifications physiques affectant les masses deau, car telles que susceptibles dempêcher latteinte du bon état. Elle précise comment peut être apprécié ce caractère « significatif » des modifications hydromorphologiques de la masse deau. Elle donne aussi une liste des altérations hydromorphologiques susceptibles de rendre impossible latteinte du bon état.
La figure 2 page ci-contre rappelle les modalités dévaluation du caractère significatif des modifications hydromorphologiques dans le cas des cours deau.
Lidentification prévisionnelle des masses deau fortement modifiées ou artificielles étant faite, il convient maintenant de confirmer si les masses deau sélectionnées doivent effectivement être considérées comme telles en application de larticle 11 du décret n° 2005-475 du 16 mai 2005 précisant les modalités dapplication de larticle 4.3 de la directive-cadre.
D. La méthode de désignation dune masse deau comme artificielle ou fortement modifiée
La désignation des MEFM et des MEA nest pas un processus ponctuel et définitif. La directive permet de modifier les désignations lors de la mise à jour suivante du plan de gestion (SDAGE) afin de prendre en compte les changements des conditions environnementales, sociales et économiques au fil du temps.
La désignation des MEFM et MEA est optionnelle. Les Etats membres ne sont pas contraints de désigner des masses deau comme MEFM ou MEA (6) . Le fait de désigner une masse deau ne constitue pas une opportunité de se soustraire à tout objectif écologique et chimique, étant donné que, par construction, le « bon potentiel » est un objectif dont le niveau dambition est similaire à celui du « bon état ».
(6) Si des eaux modifiées ou artificielles ne sont pas désignées, larticle 4.5 peut autoriser, à terme, la définition dobjectifs adaptés, moins stricts que le bon état.
1. Compléter/affiner lidentification prévisionnelle
Létat des lieux 2004 a donné lieu à lidentification prévisionnelle des MEFM et des MEA. Les principales phases mises en uvre ont été les suivantes :
- vérification du respect ou non du « bon état » sur la base de la note de la direction de leau du 23 mars 2004 précisant la façon de déterminer le risque de ne pas respecter le bon état ;
- identification de la raison du non-respect du bon état : si liée à des modifications hydromorphologiques substantielles, possibilité de pré-identifier en masse deau fortement modifiée. Larticle 4.3 (a) énumère les types dactivités qui ont été considérées par le Conseil et par le Parlement comme un des critères à satisfaire pour la désignation dune masse deau comme fortement modifiée ou comme artificielle. Si lexercice de ces activités nécessite des modifications hydromorphologiques des masses deau sur une échelle telles que la restauration dun « bon état écologique » ne peut être réalisée même à long terme, sans gêner significativement la poursuite des activités ou porter significativement atteinte aux intérêts à lorigine de ces modifications, il est alors dit que ces modifications hydromorphologiques sont substantielles et ont des « effets adverses substantiels » sur létat écologique des masses deau ;
- lorsque la masse deau a été créée par lactivité humaine et que le « bon état » nest pas respecté pour les mêmes raisons : possibilité de pré-identifier en masse deau artificielle.
Conformément à la définition donnée par larticle 2 de la directive, les états des lieux établis fin 2004 pré-identifient les masses deau artificielles.
Si un bon état apparaît réalisable sans porter atteinte à lactivité ou aux intérêts à lorigine de la création de cette masse deau (le bon état étant évalué par référence aux masses deau présentant les caractéristiques les plus proches, cf. infra), une masse deau artificielle ne sera pas « désignée » en tant que telle au sens de larticle 4.3 de la directive, bien que répondant à la définition de larticle 2 (7) .
Si la réalisation du bon état de cette masse deau passe par des modifications hydromorphologiques ayant un impact significatif sur les activités ou les intérêts à lorigine de sa création, les tests présentés figure 4, page 23, seront à réaliser.
Létude et la description détaillée des modifications hydromorphologiques et de leurs impacts sur létat écologique faciliteront lidentification des mesures correctrices nécessaires pour respecter le bon état ou le bon potentiel.
Vérifier si les modifications hydromorphologiques sont substantielles :
Pour les cours deau, les points de repère donnés par la circulaire 2003/04 du 19 juillet 2003 sont à utiliser. Certaines masses deau peuvent avoir des linéaires importants (50-60 km) et comporter quelques sections artificialisées, des seuils et barrages. Ces sections, mineures à léchelle de la masse deau, peuvent localement altérer la masse deau sans pour autant porter atteinte à son bon état général. Pratiquement, la circulaire du 29 juillet 2003 précise que la possibilité de désignation en MEFM ne doit être examinée quau-dessus de 30 % dartificialisation du linéaire de la masse deau.
Dans limpossibilité pratique de préciser lensemble des cas de figure, il conviendra de se reporter chaque fois que nécessaire aux orientations définies par le guide européen.
Il y est rappelé (p. 42 et 43 de la version F du guide européen) que, pour quune masse deau soit substantiellement modifiée dans son caractère, le changement hydromorphologique par rapport aux conditions naturelles doit être évident, permanent et visible :
- « léchelle de la modification doit être en accord avec celle des activités énumérées dans larticle 4.3 (a) : une rivière canalisée, un port, une rivière aménagée en vue de la protection contre les inondations, une rivière transformée en lac de barrage ;
- le changement du caractère de la masse deau doit résulter dutilisations existantes identifiées. Il doit être le fruit des utilisations énumérées à larticle 4.3, soit individuellement, soit en combinaison ;
- une modification hydromorphologique substantielle doit concerner une étendue spatiale significative au regard de la taille de la masse deau. Elle doit impliquer un changement majeur par rapport aux caractéristiques hydromorphologiques que lon attendrait en labsence de cette modification : ce seront par exemple une rivière modifiée aux fins de navigation, un lac modifié pour le stockage de leau ou des eaux de transition subissant des modifications majeures pour la protection des côtes ;
- un changement substantiel du caractère dune masse deau doit être permanent, et non temporaire ou intermittent ;
- de nombreuses altérations des caractéristiques hydrologiques des masses deau, par exemple des prélèvements et des rejets, ne sont pas accompagnés de changements morphologiques et peuvent donc souvent être réversibles ou temporaires. De telles altérations ne constituent pas des changements substantiels du caractère des masses deau concernées et une désignation en tant que MEFM nest pas à envisager. »
(7) La référence à lannexe II est une erreur du texte. La version précédente de la DCE prévoyait un test de désignation en annexe II. La référence na pas été remise à jour lorsque lamendement du Parlement européen déplaça la désignation à larticle 4 (3).
2. Réalisation des tests du processus de désignation
Si le guide européen propose les principes et les orientations pour cette désignation, il laisse aux Etats membre le soin :
- de rassembler les données, notamment économiques, nécessaires pour procéder à la désignation ;
- et de préciser lorganisation et le déroulement des travaux.
Il convient en particulier, comme le souligne dailleurs le document européen, dintégrer cette désignation dans le processus de définition du programme de mesure et du plan de gestion (8) .
Les tests réalisés au plan européen (cf. ci-après) ont permis de préciser le processus de désignation des MEFM et des MEA. Il apparaît cependant que la mise en oeuvre de ce processus risque de se heurter très rapidement à plusieurs difficultés :
- pour la France, environ 1300 masses deau ont été inscrites dans la liste prévisionnelle des MEFM ou MEA. Vu ce nombre, il nest pas possible de réaliser des études lourdes sur chaque masse deau et il convient de rechercher des économies de moyens, respectant les exigences de la directive et en accord avec les dispositions du guide européen ;
- dans nombre de cas, la conclusion de la procédure de désignation sera évidente et logique pour lensemble des acteurs concernés. Il convient donc de trouver une méthode pragmatique, permettant de statuer rapidement sur les cas les plus évidents, sans toutefois être en contradiction avec les exigences de la directive.
Avant dengager les travaux dans les bassins, il convient également didentifier les sources de données mobilisables ainsi que les données économiques de référence caractérisant les activités et leurs coûts environnementaux.
Le respect de léchéancier de mise à jour des SDAGE conduit à engager les études de désignation des MEFM et des MEA dès la fin 2005. Pour préciser lorganisation des travaux, les moyens à mettre en uvre, pour identifier les difficultés et rassembler les données nécessaires, la Direction de leau a demandé au groupe « économie - DCE » de réaliser courant 2005 des tests préalables.
(8) La référence à lannexe II est une erreur du texte. La version précédente de la DCE prévoyait un test de désignation en annexe II. La référence na pas été remise à jour lorsque lamendement du Parlement européen déplaça la désignation à larticle 4 (3).
(8) Voir circulaire du 4 avril 2004 relative à la mise à jour des SDAGE, à la définition des programmes dintervention des agences de leau et des programmes de mesures (http ://www.ecologie.gouv.fr/IMG/eau/Circulaire_SDAGE-PoM-9E_8e_prog.pdf).
2.1. Présentation des tests
Pour conduire ces tests, un projet de document guide (V1) a été établi avec lappui du groupe « économie » et de représentants des agences RM&C et RM au groupe « eaux continentales » (Lyon, les 24 et 25 novembre 2004). Ce document guide a été construit sur la base du guide européen, la figure 3 page 16 présentant les différentes étapes de lanalyse.
Trois tests ont été engagés :
- cas de la navigation (agences de leau AP et RM, VNF étant associé) ;
- cas de lhydroélectricité (agence de leau AG, avec appui de D. 4E, EDF étant associé) ;
- cas des recalibrages lourds liés au drainage et à la protection contre les inondations (agence de leau LB, les acteurs institutionnels étant associés).
Ce projet de guide a été examiné successivement :
- par le groupe planification - DCE lors de sa réunion des 11 et 12 janvier consacrée à lexamen du calendrier général proposé et du lien avec les SAGE ;
- par le groupe économie lors de ses réunions du 31 janvier, du 20 mai (examen des premiers résultats des tests) et du 6 octobre 2005 ;
- par le groupe « eaux de surface continentales » lors de ses réunions du 13 mai, du 27 octobre et du 17 novembre ;
- le groupe coordination DCE a pris connaissance des premiers résultats le 8 juin et a examiné le projet de guide le 25 octobre 2005 ;
- le document guide a enfin été soumis à la mission interministérielle de leau le 13 décembre 2005.
2.2. Les résultats des tests
Les tests réalisés par les bassins Adour-Garonne, Artois-Picardie, Loire-Bretagne et Rhin-Meuse en vue de la préparation de ce guide ont mis en évidence les questions et les remarques suivantes :
- Limplication des acteurs locaux est indispensable pour rassembler, dans les meilleurs délais possibles et à des coûts acceptables, les connaissances des usages économiques ou environnementaux. Le processus de désignation doit clairement identifier cette implication locale.
- La mise en uvre de lensemble des étapes de la désignation prévues par le guide européen peut conduire à des études inutiles, le résultat final tenant dans beaucoup de cas du simple bon sens. Il y a ici un risque de rejet de la méthode de travail, portant alors en germe des risques de contentieux pour mauvaise application de la directive.
- Les définitions du bon état écologique et du bon potentiel écologique, même provisoires, constituent des préalables indispensables à lidentification des mesures correctrices nécessaires pour réaliser les objectifs environnementaux. Au-delà de cette définition du bon état écologique, il convient de préciser les impacts prévisionnels des mesures correctrices envisageables sur létat écologique des eaux.
- Les acteurs locaux souhaitent légitimement examiner en priorité les coûts et le financement du bon état ou du bon potentiel écologiques pour la masse deau susceptible dêtre désignée, alors que la directive demande dexaminer au préalable sil existe une alternative aux avantages retirés des modifications hydromorphologiques. Lexplication des exigences méthodologiques de la directive, et le pourquoi, est indispensable avant dengager la démarche. Des outils de présentation et de divulgation sont ici nécessaires.
- Si la désignation en MEFM doit être motivée, les acteurs locaux sont également demandeurs dune justification de la non-désignation en MEFM. Ce travail dexplication sera à conduire lors de la concertation préalable avec les acteurs locaux, en réintégrant la désignation des MEFM dans lensemble des possibilités dadaptation des objectifs (désignation des MEFM, report de délais, objectifs moins stricts).
- Le processus de désignation des MEFM et des MEA comporte une identification des solutions alternatives à lactivité à lorigine des modifications hydromorphologiques de cette masse deau. Cela ne doit pas être interprété comme la suppression inévitable de lactivité. Laccent doit être mis sur lidentification des adaptations possibles de lactivité, le cas échéant combinées à des mesures de restauration dhabitats. Le processus didentification des MEA proposé par le document guide européen doit notamment être complété par lidentification préalable de ces dispositions.
- La directive permet des objectifs moins stricts pour des masses deau « touchées par lactivité humaine » (art. 4.5), les critères de justification étant fort proches de ceux du classement en MEFM (absence dautres moyens pour assurer cette activité constituant une option environnementale meilleure et dont le coût nest pas disproportionné). Il convient de préciser dans quels cas lune ou lautre approche doivent être utilisées.
2.3. Les réponses aux questions soulevées lors des tests
Au vu des résultats des tests, le processus de désignation des MEFM et des MEA proposé dans la première version du guide a été revu et précisé afin de répondre aux points suivants :
a) Impliquer les acteurs locaux
La conduite du processus de désignation doit impliquer les acteurs locaux dès le début, afin de bien identifier les activités et les valeurs environnementales liées aux modifications hydromorphologiques de la masse deau. Cette implication locale ne pourra que favoriser lidentification des données et lappropriation des méthodes et des résultats.
Cette nécessaire implication locale est soulignée par le guide européen. En labsence de données locales, de nombreuses désignations ne pourront se fonder que sur une approche qualitative. Pour garantir la transparence de lapproche et améliorer les prises de décision, le guide européen préconise de mettre en uvre des mécanismes formels de consultation à des fins décisionnelles, conformément à larticle 14 de la directive :
- « Cercles de consultation, pour une approche participative afin de faciliter lidentification des impacts sur les utilisations de leau ou sur lenvironnement et leur caractère significatif ou non. Ce type dapproche doit permettre de prendre en compte les questions sociales et les sensibilités culturelles et locales et de favoriser lengagement des acteurs locaux dans la gestion des bassins hydrographiques et les procédures de participation publique ;
- comités représentatifs impliquant la participation des autorités responsables de la gestion de leau ;
- panels dexperts pour lévaluation technique des options par une équipe multidisciplinaire de spécialistes. La sélection de ce groupe dexperts doit être justifiée et transparente. Le groupe doit inclure des experts représentant les parties intéressées. »
b) Veiller au pragmatisme et à la progressivité de lanalyse
Lors des tests, il a été souligné que la désignation en MEFM allait parfois de soi, en labsence dalternative crédible.
Le respect de la méthodologie de la directive nempêche ni le pragmatisme ni le réalisme.
Si le processus général de désignation doit répondre au schéma de la figure 3, page 16, il apparaît possible dopter pour un approfondissement plus ou moins important de chaque étape de la démarche selon lévidence des réponses et la complexité des cas :
- dans les cas les plus simples (ex. : abandon ou changement majeur dune activité), une simple analyse qualitative peut suffire (ex. : absence de protection de la population contre les crues si on supprime des digues). Cest le premier « tamis » destiné à identifier les cas les plus évidents ;
- si des alternatives crédibles existent pour satisfaire les exigences de larticle 4.3, les évaluations demandées (faisabilité technique, bilan environnemental, coûts) pourront alors sappuyer sur des données guides arrêtées au plan national. Cest le second « tamis » ;
- ce nest que dans les cas les plus complexes que des études détaillées seront à conduire au plan local afin didentifier précisément les enjeux locaux (troisième tamis).
Après la désignation de la masse deau, il convient dexaminer :
- Si léchéance 2015 pour lobjectif de bon potentiel doit être reportée pour des motifs techniques, de coûts disproportionnés ou liés aux conditions naturelles ;
- Et, ensuite, si les objectifs napparaissent pas réalisables en 2027 (deux reports), de définir lobjectif à retenir à terme (objectif moins strict que le bon potentiel).
La démarche dadaptation des objectifs au vu des contraintes techniques, économiques ou liées aux milieux, est identique pour les masses deau « naturelles », fortement modifiées et artificielles.
c) Intégrer les approches techniques, environnementales et économiques dès le début du processus pour mettre à disposition des acteurs locaux les données nécessaires
La désignation impose de mobiliser diverses expertises : connaissance des milieux, évaluation des impacts des mesures correctrices envisageables, caractérisation économique des activités, évaluation des coûts environnementaux. Expertises techniques et économiques seront à mobiliser dès lengagement de la procédure.
Le processus de désignation des MEFM implique donc un travail pluridisciplinaire faisant appel à des connaissances en hydromorphologie, en génie biologique et en économie. Un appui des spécialistes « milieux » des agences, du CEMAGREF, du CSP, des DIREN et des MISE sera notamment nécessaire pour répertorier des exemples de travaux ayant permis daméliorer et de préserver la diversité des habitats, dassurer la continuité écologique, indépendamment dun retour du milieu à ses caractéristiques hydromorphologiques dorigine.
Le déficit actuel en matière dévaluation de lefficacité des mesures correctrices sur létat écologique sera à combler progressivement par le recueil et la diffusion des expériences acquises.
Cette mobilisation des expertises techniques et économiques sera également nécessaire dès lengagement de la définition des programmes de mesures. Il convient dailleurs de souligner que, même si léchelle danalyse peut être différente (cf. ci-après), lidentification des mesures correctrices nécessaires pour atteindre le bon état, de leurs coûts et de leurs impacts, constitue le premier acte dans les deux processus. On ne peut donc pas séparer les démarches de désignation des MEFM de la définition des programmes de mesures (se reporter à la circulaire du 4 avril 2004).
d) Objectif adapté en désignant des MEFM et des MEA (art. 4.3) ou objectif moins strict (art. 4.5) ?
La procédure de désignation en MEFM (article 11 du décret n° 2005-475) sera engagée lorsque les modifications hydromorphologiques apparaissent devoir constituer le point de blocage pour la réalisation du bon état écologique.
Les articles L. 212-1-VI du code de lenvironnement et 16 du décret n° 2005-475 (art. 4.5 de la DCE) précisent les conditions dans lesquelles peuvent être définis des objectifs moins stricts que le bon état ou le bon potentiel. Larticle 4.5 de la DCE définit un processus de dérogations applicable à toutes les eaux, y compris celles touchées par des altérations hydromorphologiques (9).
Il pourra ainsi être fait appel à cette procédure, par exemple, en cas déclusées ou de variations de débits dans les tronçons court-circuités des cours deau altérant létat écologique du milieu, lorsque lobjectif de bon état napparaît pas pouvoir être réalisé même après un ou deux reports de six ans (en application de larticle 15 du décret n° 2005-475) et sous réserve quil ny ait pas dalternative aux activités à lorigine de ces pressions présentant un meilleur bilan environnemental et pouvant être mises en uvre sans coûts disproportionnés.
(9) Cf. guide européen (p. 22 version F).
e) Comment prendre en compte la continuité écologique pour les cours deau ?
La continuité des cours deau se définit par la libre circulation des espèces biologiques et par le bon déroulement du transport naturel des sédiments : ces deux éléments doivent être examinés à léchelle de plusieurs masses deau du bassin versant (notion de continuum). Elle concerne toutes les masses deau « cours deau », quelles soient « naturelles » ou « fortement modifiées », y compris si un lac de retenue vient sintercaler.
A léchelle de la rivière, il est indispensable dassurer cette continuité afin que le bon état ou le bon potentiel puissent être atteints (§ 1.2.1 et 1.2.5 de lannexe V de la directive).
Une masse deau qui natteint pas le bon état (ou le bon potentiel pour les masses deau fortement modifiées) nexclut pas que les masses deau contiguës soient en bon état, voire en très bon état, puisquil faut aussi tenir compte de la typologie des masses deau. En effet, les références à partir desquelles se définit le bon état ou le bon potentiel sont adaptées à chaque type de masses deau : ceci signifie que ce ne sont pas forcément les mêmes espèces qui sont concernées pour atteindre le bon état ou le bon potentiel. Le référentiel dévaluation des éléments de qualité biologique est dabord défini sur la base des hydroécorégions et de la typologie des masses deau.
En définissant les objectifs détat des eaux, et leur échéance de réalisation, le SDAGE arrêtera par là même un objectif de restauration de la continuité de la rivière permettant datteindre les valeurs pour les éléments de qualité biologique caractérisant le bon état.
La désignation dune masse deau comme « fortement modifiée » ne dispense pas de mettre en uvre les mesures nécessaires pour assurer cette continuité dautant plus que, sur un cours deau, il peut y avoir une succession de masses deau de statut différent (masse deau « naturelle », masse deau « fortement modifiée »).
Seules les masses deau elles-mêmes substantiellement modifiées dans leur caractère (suite à des altérations physiques) peuvent être identifiées comme MEFM.
La question de lobjectif écologique des cours deau à grands migrateurs pour les sections en amont dobstacles majeurs est donc posée.
Pour ces cours deau où la continuité écologique est altérée, le SDAGE arrêtera un objectif de restauration à terme de cette continuité. Cet objectif de continuité écologique sera à réévaluer lors de chaque mise à jour ultérieure du SDAGE.
Le premier programme de mesures identifiera ainsi les améliorations de la continuité écologique des cours deau pouvant être apportées dici à 2015, en tenant compte de la faisabilité technique, des coûts, des dommages et des bénéfices environnementaux.
f) Le stockage deau pour la production hydroélectrique implique-t-il automatiquement le classement en MEFM ?
En premier lieu, il convient de rappeler que lexistence douvrages et/ou de modifications hydromorphologiques nimpliquent pas obligatoirement que lobjectif de bon état ne peut pas être réalisé. Les orientations suivantes ne sappliquent donc quaux masses deau risquant de ne pas atteindre le bon état en raison de modifications hydromorphologiques substantielles liées à des concessions dutilisation.
Il pourrait être soutenu que lexistence dune concession est liée au fait que cette activité de production ne peut être assurée par dautres moyens ayant de meilleurs effets environnementaux ou susceptibles dêtre mis en uvre pour un coût non disproportionné, ce qui correspond aux critères de définition des MEFM ou dapplication de larticle 4.5.
Au regard du droit européen, lexistence dune concession ne saurait dispenser de motiver lobjectif environnemental retenu pour la masse deau concernée et sa date de réalisation.
Lanalyse des alternatives possibles et de ses coûts de mise en uvre sera à réaliser en application de la méthodologie présentée dans ce document :
- en labsence dalternative présentant un meilleur bilan environnemental et réalisable à un coût non disproportionné, la masse deau est alors à désigner comme MEFM. Les évaluations respectives des coûts des mesures et des bénéfices environnementaux permettront alors dexaminer la faisabilité du bon potentiel pour 2015, dun report de délai, voire dun objectif moins strict ;
- en cas dalternative présentant un meilleur bilan environnemental et réalisable à un coût non disproportionné, la masse deau nest pas à désigner en MEFM. Dans ce cas, lobjectif est le bon état. Léchéance de réalisation est alors déterminée en tenant compte du caractère disproportionné ou non des coûts de réalisation du bon état, ces coûts intégrant lensemble des dépenses.
3. La méthode de désignation
La figure 4, page 22, présente les étapes du processus de désignation.
Les différentes étapes de ce processus sont présentées ci-après, les points abordés ayant été définis au vu des questions posées lors des tests ou à leur issue.
3.1. Caractérisation des activités
Quelles sont les masses deau concernées ?
Létat des lieux adopté par le comité de bassin identifie la liste des masses deau susceptibles dêtre désignées comme fortement modifiées ou comme artificielles. Lun des critères principaux ayant conduit à létablissement de cette liste est lidentification dun risque de non-atteinte du bon état écologique en raison de modifications hydromorphologiques substantielles des caractéristiques de la masse deau.
Ces premiers travaux ont été réalisés courant 2004. Depuis, une définition provisoire du « bon état » a été précisée : le risque de non-atteinte du bon état écologique doit donc être confirmé avant dengager la procédure de désignation. En cas de doute sur limportance de lécart à lobjectif de bon état écologique, un renforcement de la surveillance peut être inscrit dans le programme de mesures. La réalisation du bilan à mi-parcours du programme de mesures permettra alors davoir une vue plus précise de la situation.
Au cours du processus de désignation, il est possible que lidentification des mesures de restauration montre que lon peut atteindre le bon état sans remettre en cause les activités et sans impact sur lenvironnement au sens large. Il est donc logique que des MEFM « pré-identifiées » ne soient donc pas désignées en fin du processus. Dans ce cas, la masse deau doit atteindre le bon état en 2015 (sauf justification dun report de délai). Sous réserve du respect des règles de délimitation des masses deau, elle pourra alors être regroupée avec une masse deau contiguë.
Dans un nombre limité de cas, il nest pas exclu que des masses deau non répertoriées dans la liste prévisionnelle puissent intégrer le processus si la réalisation du bon état apparaît devoir passer par des modifications hydromorphologiques substantielles remettant en cause des activités ou des intérêts répertoriés à larticle 4.3 de la directive.
Quelle échelle danalyse ?
Larticle 4.3 de la directive vise « cette masse deau » et spécifie que les raisons de la désignation doivent être explicitement mentionnées dans le plan de gestion. La procédure de désignation des masses deau fortement modifiées doit être appliquée masse deau par masse deau. Toutefois, il sera nécessaire de conduire cette analyse :
- soit sur plusieurs masses deau quand les utilisations ou intérêts visés à larticle 4.3 concernent plusieurs masses deau contiguës ;
- soit à lensemble dun sous-bassin : lorsque la viabilité économique des activités implique une coordination des activités répertoriées (cas de la navigation ou de la production hydroélectrique).
Le document guide européen (p. 36) admet cette analyse groupée, dans la mesure où il ny a pas de différences dans les caractéristiques des masses deau et dans les usages concernés. Lexemple de cours deau navigués est cité.
Il convient de bien dissocier les échelles danalyse respectives de la désignation des MEFM-MEA et de la définition des mesures.
Pour les MEFM et MEA, la justification des objectifs adaptés est à indiquer pour chaque masse deau désignée dans le tableau récapitulatif des objectifs par masse deau.
Par contre, cette présentation par masse deau nest pas exigée pour les programmes de mesures, les mesures clefs étant alors à identifier pour chaque unité géographique pertinente, définie au vu des enjeux et des problèmes principaux identifiés à lissue de létat des lieux.
Comment décrire les activités et les intérêts liés aux modifications hydromorphologiques de la masse deau ?
La figure 5, page 25, présente des exemples de données rassemblées lors des tests de mise au point du guide. Il convient de rassembler les données économiques caractérisant lactivité à lorigine de la création ou de la modification de la masse deau, dans le respect des dispositions relatives à laccès à linformation dans le domaine de lenvironnement (art. 124-1 du code de lenvironnement) et de la confidentialité - en labsence de dispositions législatives ou réglementaires spécifiques - de données économiques ou financières sur les activités du domaine concurrentiel dont la communication pourrait porter atteinte au producteur de données. Comme pour létat des lieux, il conviendra dutiliser les données publiques, lobjectif étant de publier les indicateurs les plus pertinents sur limportance des activités économiques liées à leau.
Au fil du temps, dautres activités et dautres intérêts ont pu se développer en commensalisme avec lactivité principale à lorigine des modifications hydromorphologiques de la masse deau. Cest par exemple le cas dune base de loisirs ou dune zone de nourrissage doiseaux migrateurs sur un lac de retenue. Il sagit ici didentifier les activités et les intérêts en cause.
3.2. Identifier des mesures supplémentaires nécessairespour atteindre le bon état de la masse deau
Cas dune masse deau identifiée comme susceptible dêtre désignée MEFM.
La désignation dune masse deau fortement modifiée porte sur lensemble de la masse deau et non pas sur la seule section concernée par les modifications hydromorphologiques.
Pour une partie de la masse deau, ou pour sa totalité, les caractéristiques de la masse deau ont été substantiellement changées à la suite de modifications hydromorphologiques.
Nonobstant ces changements, il sagit de savoir si le bon état peut être restauré pour la masse deau considérée dans son ensemble sans porter atteinte aux activités à lorigine de ces modifications hydromorphologiques.
Lobjectif de bon état à retenir pour définir les mesures nécessaires de restauration de lhydromorphologie est le bon état du type de masse deau naturelle avant implantation de lactivité et réalisation des modifications hydromorphologiques nécessaires à cette activité.
Ce sera, par exemple, celui du cours deau initial pour un lac de barrage ou pour une rivière aménagée.
Après désignation en MEFM, lobjectif de bon potentiel à réaliser sera défini par référence au bon état de la masse deau présentant les caractéristiques les plus proches (lac du type « naturel » correspondant pour une retenue de barrage, cours deau du type « naturel » correspondant pour un cours deau aménagé pour la navigation...).
Cas dune masse deau prédésignée comme MEA.
En labsence préalable de masse deau, lobjectif de bon état écologique à retenir pour cette première étape est celui du type de masse deau naturelle dont les caractéristiques et la typologie sont les plus proches.
Ce sera par exemple un lac naturel pour un lac de barrage, une rivière de plaine pour un canal de navigation...
Quels sont les changements hydromorphologiques indispensables pour atteindre le bon état écologique ?
Il sagit didentifier les mesures minimales nécessaires (dont des modifications hydromorphologiques) pour atteindre le bon état.
Remarque : cette identification des mesures minimales nécessaires est également la première étape de définition du programme de mesures. On ne peut donc pas séparer les études liées à lélaboration du programme de mesures de celles liées à la désignation des MEFM-MEA.
La restauration du milieu dorigine et labandon des activités à lorigine des modifications hydromorphologiques ne constituent pas la seule voie possible pour atteindre le bon état écologique. Une graduation de solutions est possible dans la plupart des cas.
Des améliorations hydromorphologiques locales, ne remettant pas en cause les activités à lorigine de ces modifications, pourront parfois suffire pour atteindre le bon état.
A léchelle de la masse deau, la reconstitution de zones humides connexes et la mise en place de dispositifs de franchissement pourront permettre datteindre le bon état sans travaux lourds de restauration de lhydromorphologie et donc sans impact significatif sur les activités. Si tel est le cas, le processus de classement sera alors arrêté.
Sil apparaît que la restauration du bon état passe obligatoirement par des modifications hydromorphologiques risquant de porter significativement atteinte aux activités économiques ou aux intérêts mentionnés à larticle 4.3, le processus de désignation en MEFM-MEA doit être poursuivi.
3.3. Evaluation qualitative : identification simplifiée des impacts et des alternatives (tamis A)
Evaluer si les modifications hydromorphologiques nécessaires à la réalisation du bon état écologique ont des effets négatifs significatifs sur lactivité à lorigine des modifications de la masse deau.
Conformément aux enseignements des tests préalables, cette étape a pour objectif de sassurer si la désignation en MEFM ou en MEA nest pas du ressort du simple bon sens, sans engager des études approfondies. Cette évaluation qualitative nexclut pas lobligation de motiver la désignation et de mettre à disposition du public les données sur les activités et les impacts justifiant la décision prise.
Le guide européen propose de réaliser cette évaluation qualitative lorsque les impacts sont à lévidence extrêmement forts ou extrêmement faibles et lorsque tous les acteurs sont daccord pour dire sils sont significatifs ou non.
Un effet négatif doit être considéré comme significatif lorsquil compromet à long terme la viabilité de lusage. Lévaluation doit donc être menée à une échelle pertinente qui peut être celle de la masse deau, du groupe de masses deau, de la région, du district hydrographique ou de lEtat membre... selon la situation et le type dusage. Cela suppose donc de bien identifier à quelle(s) échelle(s) se manifestent les effets négatifs. Généralement, lévaluation commencera par lanalyse des effets locaux (échelle de la masse deau).
A ce stade, il sagit de rassembler les indicateurs disponibles pour évaluer limpact mais sans nécessairement calculer des valeurs monétaires.
On se limite donc à une évaluation qualitative de limpact sur lactivité des modifications hydromorphologiques de la masse deau nécessaires à latteinte du bon état. On évaluera ainsi la diminution de la protection contre les crues (population des secteurs concernés), limportance de perte dactivité (productions agricoles, tonnages transités, production dhydroélectricité,...). Sil apparaît que les éléments fournis sont suffisamment probants et que les intérêts et activités responsables des modifications hydromorphologiques doivent être maintenus, lévaluation environnementale et économique des alternatives possibles (décrite au point 3.4 ci-après) ne sera pas nécessaire, un simple renvoi aux données guides caractérisant les alternatives possibles étant à faire. Dans tous les cas, les motifs de la désignation devront cependant être mentionnés, même sils sont évidents.
Il ne sera pas nécessaire de caractériser les autres activités ou intérêts concernés, si la désignation apparaît devoir être faite sur la seule base des activités ou intérêts à lorigine des modifications hydromorphologiques.
Il est rappelé quaprès désignation, les mesures éventuellement nécessaires pour réaliser le bon potentiel écologique seront à identifier.
3.4. Evaluation simplifiée du bilan environnemental et des coûts des alternatives possibles (« tamis B »)
Cette étape nest à engager que si lévaluation qualitative réalisée lors de létape précédente nest pas suffisamment probante et/ou si la désignation en MEFM/MEA ne fait pas lobjet dun consensus entre les divers acteurs de leau.
Il convient alors :
- didentifier les autres activités ou intérêts (y compris intérêts environnementaux) qui seraient impactés par le classement en masse deau naturelle et la réalisation de lobjectif de bon état ;
- didentifier les pertes dactivités (et/ou de bénéfices) impliquées par les mesures de restauration de lhydromorphologie nécessaires pour la réalisation du bon état et de réaliser une première évaluation de ces mesures ;
- didentifier les bénéfices environnementaux attendus du fait de la réalisation du bon état ;
- didentifier les alternatives possibles à lactivité en cause et de procéder à une évaluation de ses coûts environnementaux ;
- didentifier les coûts de mise en uvre de lalternative, afin de vérifier quils ne sont pas disproportionnés au regard des bénéfices environnementaux liés à la réalisation du bon état pour la masse deau concernée.
Les points à traiter :
a) Préciser si ces modifications hydromorphologiques nécessaires à la réalisation du bon état écologique ont des effets négatifs significatifs sur dautres activités ou intérêts, y compris sur lenvironnement au sens large
Les activités citées à larticle 4.3 de la directive sont : la protection contre les inondations, la régularisation des débits et le drainage des sols ; la navigation, les zones portuaires ; les loisirs ; les activités aux fins desquelles leau est stockée, telles que lapprovisionnement en eau potable, la production délectricité ou lirrigation ; les activités de développement humain durable.
Au fil du temps, dautres activités et dautres intérêts ont pu se développer à côté de lactivité principale à lorigine des modifications hydromorphologiques de la masse deau. Cest par exemple le cas des loisirs sur un barrage hydroélectrique.
Lenvironnement au sens large doit être compris comme incluant les espaces naturels et lenvironnement humain (archéologie, patrimoine, paysages, effets de serre,...). Cela signifie :
- que lon ne se limite pas aux effets sur les milieux aquatiques ;
- que ces effets indirects sur lenvironnement sont à prendre en compte à léchelle locale dune part mais à une échelle plus large si nécessaire.
Cette évaluation revient en particulier à sassurer de la cohérence des mesures avec dautres directives communautaires(ex. : directives oiseaux, habitats, énergies renouvelables).
En ce qui concerne les énergies renouvelables et leffet de serre, les impacts seront évalués lors de lexamen des solutions alternatives (cas des MEFM-MEA liées à la navigation ou à lhydroélectricité).
Les approches environnementales et paysagères seront à réaliser en veillant à lidentification des territoires pertinents et en se rappelant que les paysages de rivières sont mouvants du fait de la dynamique fluviale.
Il conviendra en particulier didentifier les zones spéciales de conservation (ZSC) et les zones de protection spéciales (ZPS) figurant dans le réseau Natura 2000 et impactées par le rétablissement du bon état. Le choix retenu (mesures pour rétablir le bon état ou maintien des habitats et espèces des sites « Natura 2000 ») sera celui qui présente le meilleur parti économique et environnemental. Si les mesures proposées ne sont pas compatibles avec le maintien de ces sites, il conviendra dexaminer sil existe dautres moyens pour assurer ce même service environnemental afin de compenser les dommages induits. En cas de choix du rétablissement du bon état, il conviendra de vérifier les obligations dinformation de la Commission européenne et les mesures nécessaires en application de la législation protégeant ces sites.
Quelles sont les données disponibles pour évaluer ces effets négatifs sur les activités ou sur lenvironnement ?
Les sources de données économiques disponibles sur les activités ont été identifiées lors de létat des lieux. Ces sources de données seront utilisées pour une première évaluation économique des impacts.
A défaut de données, et sil napparaît pas nécessaire dengager une étude approfondie des avantages et des dommages, on pourra se limiter à une évaluation qualitative fondée sur limportance de la zone géographique concernée, le nombre dusagers, etc.
b) Identifier et évaluer les solutions alternatives
Il convient didentifier les solutions alternatives pour assurer les mêmes fonctions économiques, puis, si elles existent, évaluer si elles sont techniquement faisables, puis si tel est le cas, si elles constituent une meilleure option environnementale réalisable à un coût non disproportionné. Une réponse négative à lune de ces questions implique la désignation en MEFM (cf. figure 3, page 16).
Quelles autres solutions techniques permettent dassurer la même fonction économique ?
Il est rappelé que ces autres solutions techniques correspondent au remplacement, à service rendu identique, des parts dactivités existantes actuellement qui ne pourraient pas être maintenues compte tenu des modifications hydromorphologiques nécessaires à la réalisation du bon état (exemple : diminution de la production hydroélectrique à remplacer, selon les caractéristiques de la production actuelle - base, semi-base, pointe -, par des éoliennes, ou par un autre barrage existant ou nouveau, ou par une turbine gaz, les coûts de substitution intégrant les efforts déconomie dénergie).
Comment apprécier la faisabilité technique des autres solutions identifiées pour assurer la même fonction économique ?
La faisabilité technique telle que définie par la directive ninclut pas lexamen des aspects techniques et pratiques de mise en uvre des autres solutions. Il ne sera pas nécessaire de poursuivre la démarche en évaluant les incidences environnementales dalternatives qui, manifestement, ne peuvent pas techniquement être mises en uvre.
La directive demande dexaminer les alternatives possibles aux activités sans préciser lhorizon temporel pour la définition de ces alternatives. La désignation des MEFM devant être revue lors de chaque plan de gestion, il apparaît logique de considérer que ces alternatives devraient pouvoir être mises en place en 2015, terme du premier plan de gestion.
Quelles sont les données disponibles pour évaluer si ces alternatives constituent une meilleure option environnementale ?
Il faut sassurer ici quun problème environnemental nest pas remplacé par un autre. Il convient donc de considérer lenvironnement au sens large (eau, terre et atmosphère). A cette étape, cette analyse sera réalisée sur la base dévaluations des coûts environnementaux reconnues par les secteurs professionnels concernés.
Les annexes à ce guide présentent les valeurs des coûts environnementaux des diverses activités.
c) Comment évaluer si ces alternatives sont (ne sont pas) dun coût disproportionné ?
La directive précise que la solution alternative peut être écartée pour des raisons de coût disproportionné. Il sagit donc de vérifier si la solution alternative peut être mise en uvre à un coût « raisonnable » pour la société au regard des coûts directs et indirects de la situation actuelle.
Par analogie avec lapplication du concept de coûts disproportionnés utilisé pour lexamen des reports de réalisation en 2021 ou 2027, lanalyse du caractère disproportionné du coût de lalternative implique une analyse coûts/avantages comparant :
- Les coûts de la solution alternative à service rendu identique par rapport à la situation actuelle (même production électrique, même tonnage transporté,...) ;
- Les dommages environnementaux et les bénéfices marchands et non marchands en situation actuelle et pour lalternative.
Il convient donc dévaluer le « coût complet » de lalternative, les bénéfices retirés de la réalisation du bon état étant actualisés sur la durée de vie de léquipement à construire.
Quelles sont les données disponibles pour évaluer les bénéfices environnementaux liés à la réalisation du bon état ?
Lannexe II présente lévaluation des bénéfices liés à latteinte du bon état et les données disponibles. Dans ces bénéfices environnementaux doit être prise en compte la diminution éventuelle des dépenses compensatoires actuellement à la charge des usagers de leau du fait de la détérioration de létat des eaux (coût de la ressource).
Les documents guides européens ne définissent pas le seuil au-dessus duquel le coût de lalternative est jugé « disproportionné ». La décision sera prise localement, au cas par cas, par le comité de bassin, au vu des données rassemblées. Le motif du classement sera à mentionner dans le projet de SDAGE, les études et données utilisées devant être accessibles par le public.
3.5. Evaluation locale des coûts environnementaux et étude approfondie des pertes dactivité et des alternatives (« tamis C »)
Si les éléments rassemblés lors de létape précédente ne sont pas apparus suffisamment probants, il convient de compléter, par des études locales, la connaissance des activités, des coûts et des bénéfices environnementaux liés à la réalisation du bon état.
Les enjeux justifient ici de connaître plus finement tous les coûts économiques liés à lensemble des activités et des intérêts répertoriés.
Pour conduire ces études, des guides et cahiers des charges types élaborés par la direction des études économiques et de lévaluation environnementale du MEDD sont mis à disposition (site économie sur eaufrance).
Si, au terme de cette troisième étape, on a pu démontrer quune alternative est possible techniquement :
- quelle constitue une option environnementale meilleure ;
- quelle est réalisable à un coût non disproportionné,
alors la masse deau na pas à être désignée comme MEFM.
Elle retombe alors dans le régime général. Elle pourra faire lobjet de reports de délai ou, à terme, dun objectif moins strict en application des articles 4.4 et 4.5 de la directive. Lobjectif de bon état qui sapplique est celui du type de masse deau avant sa modification hydromorphologique.
4. Les outils
La procédure de désignation fait appel à diverses données économiques :
- des données sur les activités (chiffre daffaires, emploi,...), dont les sources ont été identifiées lors de la réalisation de létat des lieux en application de larticle 5 ;
- des données dévaluation des coûts, coûts dinvestissement, de fonctionnement,... et des coûts pour lenvironnement.
Lannexe I donne un exemple de fiche de présentation, récapitulant les différentes étapes de la démarche et les données concernées. De telles fiches sont à établir pour début 2006, afin de servir de base technique à la concertation locale. Elles seront établies, soit pour chaque masse deau candidate à la désignation, soit par groupe de masses deau riveraines, ou par unité hydrographique homogène si la viabilité des activités économiques ne peut être assurée que par une cohérence de la désignation des MEFM ou MEA à léchelle concernée.
Lannexe II fournit des valeurs de coûts environnementaux. Les sources de données correspondantes, les synthèses disponibles, ainsi que les cahiers des charges types pour lévaluation des bénéfices environnementaux sont disponibles sur le site eaufrance (rubrique économie) (10).
(10) Voir circulaire du 4 avril 2004 relative à la mise à jour des SDAGE, à la définition des programmes dintervention des agences de leau et des programmes de mesures (http ://www.ecologie.gouv.fr/IMG/eau/Circulaire_SDAGE-PoM-9E_8e_prog.pdf).
(10) Ouverture prévue mars 2006.
E. - Le calendrier de mise en uvre
Rappel : décembre 2004-septembre 2005 : réalisation des tests de la méthodologie.
En parallèle, identification des actions de restauration de biotopes déjà réalisées ayant fait lobjet dune évaluation avant-après du point de vue écologique (groupe eaux continentales de surface).
Février-septembre 2005 :
Identification des valeurs « guide » pour les coûts de production et pour les coûts environnementaux des activités et de leurs alternatives.
Octobre 2005-janvier 2006 :
Compléter lidentification des activités liées aux modifications hydromorphologiques ayant justifié la désignation prévisionnelle des MEFM et MEA.
A laide des fiches danalyse, réaliser rapidement un premier passage en revue des masses deau « candidates » à la désignation, sur la base des éléments déjà répertoriés dans létat des lieux. Cette revue doit permettre didentifier :
- les masses deau pour lesquelles la désignation en MEFM ou en MEA est évidente ;
- les données complémentaires quil faudra rassembler pour motiver ce premier choix (exemple : population des zones protégées contre les crues).
Ce travail permettra également didentifier les mesures minimales qui pourraient permettre datteindre le bon état.
Octobre 2005-mars 2006 :
Identification et évaluation des mesures minimales nécessaires pour atteindre le bon état pour les masses deau pré-identifiées en MEFM et non désignées comme telles à lissue du premier passage en revue.
Répertorier les alternatives possibles pour assurer les activités ou les intérêts en cause (sur la base des valeurs guides définies au plan national et bassin).
Janvier 2006-mai 2006 : concertation locale.
Présentation des travaux aux acteurs locaux :
- validation dune première liste de propositions ;
- définition dune seconde liste de masses deau nécessitant un examen plus approfondi.
Pour les masses deau inscrites sur la seconde liste, identification avec les acteurs locaux des scénarios alternatifs à étudier pour 2015.
Juin-juillet 2006 :
Examen des travaux par le comité de bassin ; lien avec la définition du IXe programme (volet milieux aquatiques, études des SAGE prioritaires).
Dès que possible - fin 2006 : études plus approfondies de la seconde liste.
Pour chacune des masses deau inscrites sur la seconde liste :
- étude de scénarios de classement en MEFM ou de restauration du bon état ;
- proposition dobjectifs et de stratégies : classement MEFM ou non ; définition dun report dobjectif ; identification des études à inscrire au programme de mesures pour préciser lobjectif à terme ; demande dun SAGE...
Ce travail doit contribuer à lidentification des priorités daction du futur programme dintervention de lagence dans les domaines de restauration des milieux naturels et de la politique territoriale (définition de SAGE).
Début 2007 : présentation des travaux aux acteurs locaux ; validation dune deuxième liste de propositions de classement.
Printemps 2007 : mise en forme et synthèse des travaux.
Et, si nécessaire, concertations locales pour intégrer les orientations définies par le comité de bassin.
Juin-juillet 2007 : validation de la liste de MEFM par le comité de bassin ; proposition de définition de SAGE prioritaires.
Septembre 2007 : adoption du projet de SDAGE à soumettre à la consultation du public.
Annexe I
Annexe II : Evaluation des bénéfices liés à latteinte du bon état
Dans le cadre de la DCE, toute dérogation dune masse deau (ME) à lobjectif de bon état (BE) sera à motiver. Aujourdhui 2 300 masses deaux sur les 4 500 recensées ont été identifiées comme risquant de ne pas atteindre le bon état ou susceptibles dêtre désignées comme « fortement modifiées ». Les analyses coûts-avantages qui montreraient des coûts de mesures de restauration du milieu disproportionnés par rapport aux bénéfices attendus du bon état sont un des critères possibles pour motiver ladaptation de lobjectif environnemental.
Cette annexe présente une stratégie pour mettre en uvre ces analyses coûts-avantages. Après avoir rapidement proposé une approche progressive, afin de traiter qualitativement les cas les plus simples, la note ne traite plus ensuite que des valeurs guides à mobiliser pour quantifier les bénéfices environnementaux à léchelle dune masse deau. Les valeurs « guides » proposées pour les bénéfices non marchands sont issues des travaux de lINRA de 2002 sur les études disponibles en France et assorties de fourchettes de valeurs disponibles, le cas échéant, autour des valeurs guides.
Il est possible de dégager les points suivants pour les actions qui restent à entreprendre :
- lévaluation des bénéfices environnementaux oblige à bien décrire les gains apportés par le passage au bon état, pour le patrimoine écologique ou pour les usages, pour le court terme ou pour le long terme. Cette traduction nest en général pas faite demblée. Or, elle devra lêtre non seulement pour la valorisation économique, mais aussi pour pouvoir engager les acteurs locaux dans un processus de discussion sur le choix des objectifs environnementaux ;
- si des données unitaires de valorisation existent et ont pu être stabilisées (critère de fiabilité, de représentativité,...), la connaissance des nombres dusagers ou de non-usagers auxquels elles sappliquent demeure une difficulté, quil convient de traiter avec les agences de leau en fonction des données disponibles localement ;
- toute valorisation des améliorations du patrimoine en lui-même, en dehors de tout usage sont probablement un enjeu majeur en terme de poids économique. Ce sont aussi les plus fragiles méthodologiquement. Elles devraient être incluses, mais chiffrées séparément pour être discutées.
Vu le nombre de masses deau pour lesquelles ces analyses coûts-avantages seront à réaliser afin de préciser la pertinence dobjectifs adaptés, des méthodes très rustiques doivent être mises au point pour conduire lévaluation coûts-avantages de la restauration des masses deau.
Cette note fournit des éléments simples dutilisation pour valoriser les bénéfices de latteinte du bon état (BE). Elle présente :
- une proposition dapproche progressive pour la mise en oeuvre des analyses coûts-avantages.
Après cette présentation, la note ne traite plus ensuite que des valeurs guides à mobiliser pour lévaluation des bénéfices ;
- un rappel structurant sur le périmètre des bénéfices à rechercher ;
- une proposition de méthode pour lévaluation des bénéfices marchands ;
- une proposition de méthode pour lévaluation des bénéfices non marchands assortie dun tableau de données de base servant au chiffrage ;
- enfin, quelques recommandations sur le cas de la valorisation despèces migratrices illustrées par le cas du saumon.
I. L'analyse coûts-avantages dans la DCE : une mise en oeuvre par une approche progressive de l'analyse
Au vu des travaux tests des bassins menés pour lanalyse des masses deau fortement modifiées (MEFM), il apparaît évident quune démarche progressive danalyse est à mettre en place pour réaliser les analyses coûts-avantages des masses deau. En effet, les cas les plus évidents de coûts disproportionnés doivent être traités par des méthodes plus simples que le recours à des valeurs guides. Il faut conduire une analyse coûts-avantages de manière qualitative pour tous les cas évident ou simples. Enfin, pour les cas indéterminés, des études locales devront être conduites.
La mise au point de la phase simplifiée nest pas abordée dans cette note, qui traite de la phase « valeurs guides ». Les consignes de mise en uvre de la phase simplifiée pourront être trouvées directement auprès de groupes tests, selon la thématique du test (navigation, hydroélectricité,...). La phase détude locale pourra, quant à elle, utilement sappuyer sur les documents « guides de bonnes pratiques pour la mise en uvre des études dévaluation des biens environnementaux ». Ces documents sont disponibles sur le serveur eau/économie de la direction de leau.
La succession détapes dans lanalyse coûts-avantages est envisagée de la manière suivante :
- une phase simplifiée : analyse des cas évidents de confirmation de laspect coûts disproportionnés par le recours à des indicateurs techniques, mais non monétaires (ex. : mesures nombreuses et coûteuses et enjeu écologique faible : alors coût disproportionné) ;
- une phase avec recours à des valeurs guides : étude plus détaillée à partir des indicateurs économiques disponibles ;
- une phase approfondie : réalisation détudes économiques plus approfondies avec recours à des évaluations spécifiques locales.
Schématiquement, ces trois phases senchaînent de la façon suivante :
Dans ce schéma, en terme de finesse danalyse, la phase « valeurs guides » se situe comme une approche intermédiaire entre lapproche qualitative la plus grossière et lapproche par une étude in situ. Aussi, lors de lanalyse coûts-avantages par les valeurs guides fournies dans cette note, une analyse de sensibilité des valeurs obtenues reste bienvenue. Elle sappliquera tant aux valeurs unitaires quà lassiette à laquelle ces valeurs unitaires sont appliquées. Les chiffrages doivent être davantage analysés comme des curseurs dalerte que comme des valeurs intangibles.
Enfin, si certains bénéfices ou coûts sont jugés malgré tout non monétarisables et susceptibles dinfluencer le résultat du calcul des coûts disproportionnés, il conviendra de recourir à une étude locale, si lon veut répondre à lanalyse des coûts disproportionnés.
II. Considérations générales sur la prise en compte des augmentations de bénéfices pour l'analyse des coûts disproportionnés dans le cadre de la DCE
La DCE demande de réaliser une analyse coûts-avantages pour statuer sur les coûts disproportionnés, dun scénario de passage dune masse deau au bon état. Dans ce cadre, il est rappelé que cest bien laugmentation de bénéfice générée par le passage au bon état de la masse deau qui est à rechercher et non le bénéfice total dune masse deau en bon état (comparativement à un scénario où le bon état nexisterait pas).
2.1. Notions à prendre en compte pour rechercher les augmentations de bénéfices liés au passage au bon état dune masse deau
La DCE demande de chiffrer les bénéfices environnementaux. Ceux-ci sont de deux types :
- marchands (coûts évités, par exemple moindres coûts de fonctionnement des usines de potabilisation,...)
- non marchands, ceux-ci pouvant être subdivisés entre ceux qui concernent :
- les usagers (augmentation de bien-être issue de la pratique dune activité liée à leau,...)
- et ceux relatifs aux non-usagers, cest-à-dire liés à une amélioration de lenvironnement en dehors de tout usage (bénéfice dune amélioration du patrimoine naturel en lui-même,...).
En outre, la DCE demande de chiffrer les bénéfices résultant de variations détat : passage de la situation de létat actuel à la situation dun état amélioré (bon état, voire bon potentiel,...). A priori, cette variation environnementale peut induire deux types deffets bénéfiques :
- un effet « qualité » : on entend par là que les individus déjà usagers dune masse deau profitent de lamélioration de sa qualité (par exemple, on pourra localement pêcher du poisson sauvage au lieu despèces de pisciculture,...) ;
- un effet « quantité » : on entend par là quil peut aussi y avoir augmentation du nombre dusagers de la masse deau, du fait de son amélioration (par exemple, on peut désormais pêcher un poisson migrateur absent jusqualors).
2.2. Pour les demandes de la directive, quels types de bénéfices prendre en compte ?
Le croisement des notions présentées ci-dessus permet de dresser le tableau à 6 entrées de la page suivante.
Concernant les hypothèses simplificatrices proposées dans ce tableau, on constatera que :
- lestimation des bénéfices marchands issus dun effet « qualité » ninduit quun seul type de bénéfice : celui lié à la diminution des coûts de traitement deau potable. Lamélioration de létat dune masse deau ninduit pas de variation de bénéfices pour les autres activités ;
- les bénéfices marchands intégrés aux prix immobiliers (méthode des prix hédonistes) en liaison avec une amélioration de létat des eaux ne sont volontairement pas pris en compte ici. Ceci sexplique par la difficulté daccéder aux données nécessaires au calcul de ce bénéfice (nombre de biens concernés et valeur des biens). Dans le cas de la variation de létat dune masse deau, lhypothèse dun enjeu faible associé à ces bénéfices devrait être théoriquement vérifiée.
Tableau 1 : Types de bénéfices à rechercher dans le cadre des travaux DCE
TYPES DE BÉNÉFICES |
EFFET QUALITÉ |
EFFET QUANTITÉ |
Marchands |
Impact AEP (diminution des coûts de traitement pour AEP, industries...).
Sinon négligé pour les valeurs guides de la DCE
|
Rien à compter dans lanalyse coûts-avantages (voir § III) |
Non marchands pour les usagers |
Augmentation des bénéfices pour les usagers actuels
Nombre actuel dusagers
|
Bénéfices totaux pour les nouveaux usagers
Augmentation du nombre dusagers
|
Non marchands pour les non-usagers |
Bénéfices dune amélioration du patrimoine en dehors de tout usage (augmentation de la valeur patrimoniale pour les habitants du bassin ou territoire)
Nombre de résidents dans un périmètre à déterminer (BV local à régional)
|
|
Les bénéfices des non-usagers (bénéfices patrimoniaux) sont difficiles à estimer du fait :
- de la signification intrinsèque de la valeur : celle-ci est-elle vraiment celle que les personnes non utilisatrices du site accordent à une amélioration du patrimoine aquatique sur une masse deau bien précise ?
- du nombre de ménages à prendre en compte pour la valorisation : les études font apparaître plusieurs zones dinfluence en fonction du caractère commun ou exceptionnel du patrimoine naturel revalorisé : la sphère dintérêt peut être celle des communes limitrophes, du bassin versant ou elle peut être régionale pour les enjeux les plus emblématiques (retour despèces migratrices tel le saumon,...).
En conséquence, il est préconisé de chiffrer distinctement les valeurs patrimoniales (non-usages) des autres, pour les discuter séparément.
III. L'augmentation des bénéfices marchands issue du passage au BE des masses d'eau
Cette augmentation de bénéfices peut être :
- une diminution des coûts de traitement deau potable ;
- tout bénéfice économique net pour la société, sil ne relève pas dun mécanisme de simple transfert financier à léchelle locale ou nationale. Dans ce cas, il est rappelé que ce nest pas la connaissance de laugmentation des chiffres daffaires des activités qui est recherchée ici, mais de laugmentation des bénéfices des activités issue du passage au bon état.
Le cas des chiffres daffaires des activités locales liés à létat des eaux
Il est naturel de prendre en considération lactivité économique induite ou disparue du fait dune variation environnementale locale comme un considérant économique local du projet.
Par contre, inclure les impacts économiques en termes de chiffres daffaires créés ou disparus dans lévaluation coûts-avantages est généralement exclu, car relève, la plupart du temps, de simples mécanismes de transferts.
Dans le cadre dune analyse coûts-avantages où une activité récréative se développerait du fait du passage au BE (nouveau type de pêche...), le bénéfice pertinent est celui que retirent les pratiquants potentiels de la pratique de leur activité, ce surplus non marchand pour les usagers devant être estimé par une méthode de monétarisation adaptée (évaluation contingente ou méthode des coûts de transport essentiellement).
Ajouter à ce surplus le chiffre daffaires des activités induites na pas de sens économiquement, puisque ce chiffre daffaires correspond à un transfert entre agents économiques. Ce chiffre daffaires nest quune contrepartie à une dépense des pratiquants récréatifs et il faut prendre en compte le fait que le montant de cette dépense, dans le scénario « de référence » (maintien de la masse deau dans son état initial) serait allé grossir le chiffre daffaires dautres activités économiques (par exemple, dautres activités de loisirs). Ainsi, laugmentation du chiffre daffaires économique issu de lamélioration de la masse deau ne peut être vu comme un bénéfice net du projet pour la collectivité.
Néanmoins, une autre possibilité est que, dans le scénario de référence (maintien de la masse deau dans son état initial), le pratiquant récréatif, privé de son activité, choisisse dépargner plutôt que de se livrer à une autre activité de loisirs ou plus généralement de consommer nimporte quoi dautre. Mais, dans le cadre micro-économique qui sous-tend lanalyse coûts-avantages, cela ne change rien au niveau global, puisque lépargne se traduit simplement par de la consommation future.
Il nen demeure pas moins que, selon les économistes, ne pas développer lactivité récréative peut avoir une incidence économique :
- soit si lon considère que lépargne qui est créée à la place de cette activité est à un niveau trop élevé freinant lactivité ;
- soit si lon se place à un niveau local et que les activités substituées dans le scénario de référence à lactivité récréative associée au BE peuvent avoir lieu ailleurs.
Mais, on se place alors dans un cadre danalyse macro-économique. En tout état de cause, le cadre danalyse nest plus celui de lanalyse coûts-avantages.
On retiendra que lévaluation des effets induits sur lactivité doit donc être proposée, dans le débat local, comme un élément complémentaire à lanalyse coûts-avantages, mais non comme lune de ses composantes. En effet, il sagit la plupart du temps de simples arbitrages des acteurs entre plusieurs activités, sans bénéfice net pour la société, mais qui correspondent à de simples transferts.
Lorsque les éléments sur lactivité économique induite sont proposés, il convient de signaler que la valeur ajoutée est un indicateur de bénéfice de lactivité plus pertinent que le chiffre daffaires (VA en général de lordre de 40 % du chiffre daffaires), en particulier si lon sintéresse à lemploi induit.
IV. L'augmentation des bénéfices non marchands issue du passage au bon état des masses d'eau
Un tableau (tableau 2) a été élaboré pour la valorisation des bénéfices environnementaux non marchands.
4.1. Préconisations générales
Compte tenu de létat des connaissances sur les bénéfices non marchands, il est rappelé certaines précautions dusage générales pour la valorisation de ces bénéfices par des valeurs guides :
- le tableau a dabord une vocation de « check-list » visant à aider à vérifier que lensemble des bénéfices environnementaux figure bien dans les discussions entre acteurs sur lévaluation des coûts disproportionnés du passage de la masse deau au bon état ;
- lévaluation des bénéfices environnementaux oblige à bien décrire les gains apportés par le bon état, pour le patrimoine ou pour les usages, pour le court terme ou pour le long terme. Cette traduction nest pas toujours évidente, elle nest en général pas faite demblée. En tout cas, elle simpose non seulement pour la valorisation économique, mais aussi dans le but de pouvoir donner aux acteurs du bassin des éléments concrets permettant dengager entre eux une discussion. On ne peut pas imaginer que celle-ci se fasse correctement sur la seule base des paramètres techniques du bon état ;
- la règle générale qui sapplique est déviter les doubles comptes, notamment entre les usagers et les non-usagers. Il est rappelé que, de manière générale, il est admis que la valeur patrimoniale est déjà partiellement incluse dans la valorisation que fait un usager quant à lamélioration du site par la mesure de restauration. Aussi, les usagers ne seront pas comptés aussi parmi les personnes ayant une valorisation spécifique du patrimoine (non-usage). Pour valoriser le passage au bon état, il est proposé de ne pas directement sommer, mais dafficher séparément laugmentation des bénéfices non marchands des usages dune part et celui procuré par lamélioration du patrimoine en dehors de tout usage, dautre part.
4.2. Valeurs unitaires des bénéfices
Le tableau de valeurs unitaires (tableau 2) a été élaboré à partir de la revue de littérature produite en France par lINRA sur les études de valorisation des bénéfices environnementaux non marchands. A ce stade, seuls les documents les plus utiles pour le cas des bénéfices induits par les MEFM liées à lhydroélectricité ont été sélectionnés.
Le tableau cite les écarts entre les valeurs disponibles pour valoriser une même modification du milieu, mais en retient une seule comme valeur guide (en gras), les autres permettant dinitier une discussion sur la sensibilité.
Par sécurité, cest la valeur minimale qui a été retenue. Les évaluations environnementales sont donc proposées a minima.
4.3. Comment déterminer les assiettes dapplication des valeurs unitaires ?
Si des données unitaires de valorisation existent et ont pu être stabilisées (critère de fiabilité de représentativité...), la connaissance des nombres dusagers ou de non-usagers auxquels elles sappliquent demeure une difficulté quil convient de discuter avec les agences de leau en fonction des données disponibles localement. A ce stade, le tableau renvoie essentiellement aux données locales, considérées comme les meilleures données possibles. Elles comprennent les dires dexperts, les enquêtes locales de fréquentation des sites, les transferts denquêtes faites sur des sites similaires du point de vue environnemental et de leur fréquentation.
A lautre extrémité, le tableau 2 cite des ratios dusagers (pourcentage de pêcheurs parmi la population...) obtenus sur les études primaires de monétarisation. Lextension de ces ratios aux sites à analyser est évidemment très critiquable.
Entre ces deux scénarios, la réutilisation des méthodes britanniques contenues dans le guide « Benefit Assessment Guidance » de lEnvironment Agency (2003) est à tester en France, car elle permettrait, si elle était possible, de trouver un moyen terme entre la précision et le coût des études locales dune part et le transfert de ratios de fréquentation issus de sites primaires dautre part. Cette validation nayant pas encore été faite, la présente note ne prend pas position sur lutilisation de la méthode britannique.
V. Quelques recommandations sur le cas particulier du saumon
Il convient avant tout de préciser si, en application de la définition du bon état des eaux et des objectifs de gestion piscicole de la rivière concernée, la circulation des poissons grands migrateurs tel le saumon est un objectif de continuité écologique pour la masse deau en cours détude dans le processus MEFM. La présente note économique ne prend pas position sur ce point. Dans laffirmative, il est probable que les acteurs iront au moins jusquau stade de lanalyse coûts-avantages par des valeurs guides. La littérature ayant également analysé cet enjeu par plusieurs études, le paragraphe qui suit met en lumière, pour cet enjeu spécifique, les éléments les plus à jour et les plus concrets en matière dévaluation des bénéfices.
5.1. Plage de validité des valeurs
Létude portant sur la valorisation de la pêche aux poissons migrateurs sur la Sée et Sélune met en évidence que permettre les migrations du saumon dans un contexte où cette situation est très rare en France procure un bénéfice important (surplus) de 42 Euro (1991)/jour de pêche/an. Dans le même temps, elle met en évidence une valorisation faible dun scénario dextension du parcours de pêche de la part des pêcheurs qui se rendent déjà sur le site : 16 Euro (1991)/pêcheur/an.
Ces deux valeurs sont très différentes. Ceci nest pas étonnant dans la mesure où elles ne valorisent pas le même changement environnemental. De plus, cet écart vérifie la décroissance de lutilité marginale dun bien (la satisfaction du bien environnemental dépend du niveau auquel ce bien est déjà présent et décroît dautant plus que le bien est déjà présent en quantité abondante). Toutefois, dans les situations observées en pratique, où la présence du saumon est avérée, mais peut se situer à un niveau très faible, la question de la valeur à utiliser se pose. On ne peut plus faire lapproximation que la valeur unitaire reste constante sur toute la plage dévolution de la qualité du bien.
Compte tenu des données disponibles et des enjeux, cette question ne sera détaillée et traitée que dans le cas de la valorisation de la réhabilitation du saumon sur une ME (voir encadré).
Dans les autres cas, les valeurs unitaires des bénéfices seront estimées constantes pour les plages dutilisation de cette note.
5.2. Estimation des individus concernés par lamélioration, le cas des poissons migrateurs
Létude est celle de Julien Salanié, Philippe Le Goffe et Yves Sury (2004) sur lévaluation des bénéfices procurés par le démantèlement de barrages hydroélectriques mérite dêtre citée en référence, car elle propose une approche qui pourrait être reprise, sauf si une autre estimation jugée plus fiable est disponible.
Létude propose un modèle de prévision de laugmentation du nombre de visites à attendre sur la Sélune dans le cas où les concessions de deux barrages ne seraient pas renouvelées. Actuellement, la pêche au saumon est dores et déjà pratiquée sur cette rivière en aval des ouvrages hydroélectriques existants, près de 8 000 journées de pêche au saumon y ont déjà lieu annuellement conduisant à 110-140 captures annuelles sur un parcours de 13 kilomètres. Le modèle a été établi à partir de 28 rivières à saumon localisées en Bretagne et dans le département de la Manche. Il part du principe, que, hors barrage, cette rivière pourrait exprimer les potentialités dont elle dispose pour le saumon et avoir un nombre de visites en augmentation, tout en tenant compte de ses caractéristiques propres par rapport à celles des autres rivières à saumon de la région. Le nombre de visites a été agrégé à partir des données obtenues par enquête téléphonique auprès de 827 pêcheurs de saumon pour la saison 2002. Il part du principe démontré par la théorie économique, mais aussi logique et vérifié empiriquement, que le nombre de visites dépend du nombre de poissons quil est possible de capturer (mesuré dans le modèle par le TAC : total autorisé de captures), de la longueur du parcours de pêche et du débit. Pour ce dernier paramètre, lhypothèse que ce coefficient ne puisse être différent de zéro ne peut être statistiquement écartée. Par sécurité, il convient donc, de préférence, dutiliser le modèle pour valoriser des variations de la fréquentation dun site dans des scénarios où le débit de la rivière nest pas modifié. On a alors un modèle qui sécrit :
Nbre visites = 1* nbre captures + 2* longueur parcours
PARAMÈTRE |
MODÈLE |
Nombre captures ( 1) |
34,21 (1,63) |
Longueur parcours en kilomètres ( 2) |
123,09 (59,65) |
R. 2 ajusté |
0,91 |
Dans cette approche, le TAC si le barrage était démantelé a été estimé par le CSP. Il augmenterait de 400 unités (estimation basée sur le potentiel de la Sélune en unités de production [UP], en lien avec les surfaces de frayères) et le linéaire du parcours de pêche sagrandirait de 25 kilomètres sur les 68 kilomètres que compte le cours deau.
Ainsi, lapplication du modèle pour une augmentation de 400 captures et la création dun parcours de 25 kilomètres produit 16 763 visites supplémentaires par an (intervalle de confiance à 90 % : [14 750-18 800]). En reprenant une valorisation des bénéfices (surplus) de la pêche au saumon issu de nombreuses études, dont des études étrangères, les auteurs utilisent deux approches de valorisation :
- une à 25 Euro (2002) par journée de pêche au saumon. Ils en déduisent un bénéfice non marchand issu de lamélioration de lactivité pêche au saumon suite à un scénario de non-renouvellement des concessions des 2 barrages de la Sélune de 400 000 Euro (2002) par an environ ;
- une à 50 Euro (2002) par journée de pêche au saumon. Ils en déduisent un bénéfice non marchand issu de lamélioration de lactivité pêche au saumon suite à un scénario de non-renouvellement des concessions des 2 barrages de la Sélune de 800 000 Euro (2002) par an environ.
Interrogés en septembre 2005, les auteurs, après avoir conduit des études locales en France valident la valeur haute de leur estimation (50 Euro [2002] par journée de pêche au saumon). Du coup, cette valeur est proche de celle proposée en 1991 par F. Bonnieux et al.
Compte tenu de lenjeu que peut avoir lestimation des bénéfices non marchands de la réintroduction de poissons migrateurs lors dun préchiffrage même grossier des bénéfices, il est proposé la démarche pragmatique suivante pour obtenir une valeur type :
Létude sur la Sélune a mis en évidence :
- surplus moyen sur [0 - 32 000 visites] = 42-61 Euro (1991) par jour et par pêcheur ;
- CAP moyen sur [32 000 - 35 427 visites] = 16 Euro (1991) par pêcheur favorable/an ou 7 Euro (1991) par pêcheur du site/an.
Approche proposée sur un site quelconque :
- connaître le nombre actuel de visites (données existantes ou dires dexperts) ;
- utiliser le modèle de Surry pour le nombre de visites supplémentaires ;
- en déduire le nombre total de visites Vt ;
- valoriser les augmentations de visites tant que Vt < [0-32 000 visites] à 42 Euro (1991) par jour et par pêcheur ;
- valoriser à 7 Euro (1991) par pêcheur et par an, les visites au-delà de cette plage.
Une alternative envisageable pourrait être de fixer à dire dexperts (CSP,...) les bornes du passage à 42 Euro (1991) par visite à 7 (1991) par pêcheur et par an pour savoir où est pour le site envisagé la limite entre un fort bénéfice du saumon (offre très rationnée) et un bénéfice faible (offre abondante).
Annexe I : Annexe calculatoire
A1.1.Tableau de conversion inter-annuel des valeurs
ANNÉES |
IPC |
1990 |
100 |
1991 |
103,2 |
1992 |
105,7 |
1993 |
107,9 |
1994 |
109,7 |
1995 |
111,6 |
1996 |
113,8 |
1997 |
115,2 |
1998 |
116,0 |
1999 |
117,4 |
2000 |
119,2 |
2001 |
120,8 |
2002 |
123,3 |
2003 |
125,3 |
2004 |
127,8 |
A1.2. Facteur de conversion entre population majeure et population totale
Certaines études sources sappuient sur des valeurs établies relativement à un nombre de personnes majeures présentes sur le bassin, dautres sur le nombre dhabitants du bassin. Le tableau pour faciliter laccès aux données ne reprend que le nombre dhabitants. Le facteur de conversion issu du recensement 1999 est de 78 %. Il varie de 75 à 79 % entre les régions. Lhypothèse est faite dun taux de conversion constant pour toutes les études.
Annexe III : Désignation de MEFM au titre de lhydroélectricité
TEST MÉTHODOLOGIQUE MEFM « HYDROÉLECTRICITÉ »
I. Synthèse du test réalisé sur lusage hydroélectricité dans le bassin Adour-Garonne (11)
(11) Contact pour plus dinformation : Stéphane Robichon, AEAG.
Le bassin Adour-Garonne étant fortement concerné par lhydroélectricité (cet usage est en effet à lorigine de plus de la moitié des masses deau pré-désignées fortement modifiées), le MEDD a confié à lagence de leau Adour-Garonne le test de confirmation des MEFM pour lusage hydroélectricité.
Ce test a été réalisé par un groupe de travail réunissant les services de lagence, la direction des études économiques du MEDD, la mission technique commune AEAG-EDF, le CSP, la DIREN de Midi-Pyrénées et la DRIRE. Ce test a porté sur la première version du projet de guide établie en novembre 2004.
1. Présentation de la méthodologie retenue
Le travail réalisé par le groupe a consisté à étudier comment on pouvait appliquer le guide européen sur la désignation des MEFM aux masses deau impactées par lhydroélectricité. Afin dévoluer dans un climat de travail constructif, il est apparu nécessaire aux membres du groupe de sorienter vers une application pragmatique du guide européen, cest-à-dire une démarche dont le degré de complexité des données est adaptée au degré de complexité des cas étudiés.
Ce choix a considérablement assaini les discussions en :
- ne donnant plus limpression que tout était remis en question ;
- ne cherchant plus à engager systématiquement une collecte lourde de données.
La méthodologie proposée par le guide européen demande en particulier dapporter des réponses à 3 questions clefs ; les mesures à envisager pour atteindre le bon état :
- ont-elles des impacts négatifs ou un coût significatif pour les usagers ?
- ont-elles des effets négatifs sur lenvironnement au sens large ?
- se traduisent-elles par des bénéfices pour la société dans son ensemble qui justifient les coûts de ces mesures ?
Le principe de la méthode retenue par le groupe est de répondre à ces questions en passant chaque masse deau à travers trois niveaux danalyse :
- une phase simplifiée : analyse des cas évidents de confirmation des MEFM avec recours à des indicateurs techniques mais non monétaires ;
- une phase avec recours à des valeurs guides : étude plus détaillée à partir dindicateurs économiques disponibles ;
- une phase approfondie : réalisation détudes économiques plus approfondies avec recours à des évaluations spécifiques. Cette phase est hors champ du guide de test des MEFM.
2. Application de cette méthodologie au cas de lhydroélectricité dans le bassin Adour-Garonne
A ce stade, il sagit de se livrer à une description claire de la masse deau en faisant apparaître des information sur :
2.1. De quoi a-t-on besoin et à partir de quelle source travailler pour traiter la phase simplifiée
- limpact de la mesure sur lusage hydroélectricité est estimé en croisant la nature de louvrage (lac, éclusée, fil de leau) avec le type de mesures nécessaires à latteinte du bon état (effacement, relèvement du débit réservé) ;
- une typologie des ouvrages hydroélectrique a été réalisée : elle prend en compte le productible et puissance de lusine et la capacité de lusine à produire de lénergie de pointe ;
- pour chaque type de pression, un catalogue de mesures types a été réalisé ;
- le bénéfice environnemental dune masse deau en bon état est estimé en prenant en compte le potentiel écologique de la masse deau que le groupe propose dévaluer en sappuyant sur les zonages du SDAGE de Natura 2000 et les zonages réglementaires. La prise en compte de ces zonages ayant un lien avec la problématique des milieux aquatiques permet dintégrer dans ce bilan une première évaluation de la valeur des milieux pour lesquels le BEE doit être recherché ;
- une liste de zones a été sélectionnée pour prendre en compte le potentiel écologique ;
- limpact des mesures sur les autres usages associés à la masse deau est évalué en croisant le poids actuel de lusage avec une estimation qualitative sur lévolution de cet usage liée à la mesure.
Le plus important à ce stade étant dapporter un minimum de transparence sur les choix effectués, sans nécessairement chiffrer limpact précis des mesures.
Illustration :
Ainsi pour la masse deau 147 du bassin Adour-Garonne (centrale de La Raviège), il a été mis en évidence que limpact des mesures à prévoir pour atteindre le bon état serait fort pour lusage hydroélectricité (baisse de la production dénergie de pointe pour le report intersaisonnier), puisque ces mesures se traduisent par un relèvement du débit réservé.
Par ailleurs la masse deau étudiée nétait concernée par aucun zonage réglementaire, et aucun zonage SDAGE.
Lestimation de limpact des mesures sur les autres usages reste à consolider.
La situation étant suffisamment claire dès ce niveau danalyse simplifiée, le groupe a proposé de classer cette masse en MEFM.
Par contre pour la masse deau 83 (centrale de Hautefage), la situation est moins tranchée, puisquon se retrouve en présence dune masse deau sur laquelle lusage hydroélectrique est fortement impacté par les mesures (modifications de la modulation de lénergie et baisse de la production de lénergie de pointe) tout en étant située sur une zone remarquable du SDAGE. Le groupe a donc proposé de passer cette masse deau à travers « un deuxième tamis » : lanalyse à partir des valeurs guides. (Joindre le tableau de ces exemples en annexe.)
2.2. De quoi a-t-on besoin et à partir de quelles sources travailler pour traiter la phase valeurs guides ?
Limpact des mesures sur lusage hydroélectricité est estimé en prenant en compte les coûts liés aux pertes ou aux déplacements dénergie et de puissance provoqués par les mesures et aux coûts des aménagements quinduisent les mesures (ex. : coûts des ouvrages de franchissement, ou coût deffacement de louvrage).
La valeur économique des pertes ou déplacements dénergie et de puissance associés aux mesures est calculée en sappuyant sur la méthode tarifaire utilisée habituellement par EDF. Celle-ci produit des coûts annuels liés à la substitution de lhydroélectricité par le mix des moyens de production délectricité français. Les pertes ou déplacements dénergie reflètent les pertes en fonctionnement et les pertes de puissance reflètent les pertes de capacité de production. Ces dernières nécessitent un redimensionnement du parc de production délectricité pour conserver globalement la même puissance disponible. Le coût de la puissance renvoie à des coûts dinvestissement.
Pour utiliser cette méthode, il faut être en mesure de calculer les pertes dénergie et de puissance selon différents postes horo-saisonniers, ce qui se fait habituellement à laide du modèle PARSIFAL. Compte tenu des données que ce type de modèle mobilise, il ne faut pas sattendre à pouvoir lutiliser pour chaque masse deau, et il est donc nécessaire denvisager des modes destimation simplifiée des pertes énergétiques et de puissance.
Dans le cas général, il conviendra de préciser ce que la mesure de restauration proposée induit en termes de volumes deau turbinables perdus selon différents postes horo-saisonniers. A partir de là, quelques caractéristiques standards de louvrage hydroélectrique sur la ME et la méthode tarifaire permettront de valoriser le coût total de la perte de production et de la limitation de puissance du fait de la mesure de restauration proposée (MW et GWh).
Dans le cas où louvrage est totalement effacé, une estimation simplifiée, dérivée de la méthode précédente est proposée sur la base de la production annuelle perdue (GWh) et de coefficient de valorisation dépendants des types douvrages. Dans ce cas, il conviendra de compter en outre les coûts de démantèlement de louvrage et les coûts échoués associés à la perte de louvrage, sur la base de la production annuelle perdue, dans le cas où le contrat dexploitation ne soit pas à son terme.
Les coûts des ouvrages de franchissement sont obtenus à partir dune synthèse des dossiers aidés par lagence et des informations disponibles dans dautres agences ; les coûts deffacement des ouvrages sont estimés à partir des rares expériences connues.
Limpact des mesures sur lenvironnement au sens large est estimé en prenant en compte les émissions supplémentaires de CO2 associées à un transfert de la production dénergie de lhydroélectricité vers un mix énergétique (parc français).
Le coût de ces émissions supplémentaires est estimé à partir de valeurs de référence utilisées en France (rapport Boiteux, cohérent avec approche de la DIDEME) et dune quantité moyenne démission du parc thermique à flamme français. La valorisation peut dès lors se faire sur la base de la production hydroélectrique perdue (GWh) du fait de la mesure de restauration sur les périodes où il doit lui être substitué une production thermique à flamme.
Les bénéfices environnementaux dune atteinte du bon état sont estimés en évaluant laugmentation des activités récréatives et en intégrant la valeur patrimoniale liée au bon état (cf. le document D 4E au point 2 ci-après).
Ces estimations sappuient sur des transferts de valeurs en provenance des rares études existantes.
Illustration :
Ainsi pour la masse deau 83, latteinte du bon état suppose : une augmentation du débit de base à 8 m3/s, ainsi quune augmentation du débit réservé de 1,5 à 2 m3/s ; en extrapolant au cas de cette masse deau les données du défi éclusées sur la Dordogne, on parvient à une estimation de la perte de production dénergie de lordre de 1 000 kEuro /an (énergie et puissance).
Par ailleurs, le déplacement dénergie (transformation dune production de pointe en une production de base), estimée sur ce site en première approche à environ 23 000 MWh, doit être compensée par une autre source de production qui sera un mix déquipements thermiques à flamme au moins en hiver et sur lensemble des heures pleines de lannée.
Le coût moyen des émissions de CO2 supplémentaires liées à ces sources de production est de 16,2 Euro/MWh, ce qui représente un coût environnemental de plus de 372 kEuro/an (16,2* 23 000 MWh/an) ; il sera évidemment plus important pour les conditions du BEE.
Lestimation des bénéfices associés à latteinte du bon état est pour lheure limitée aux effets induits sur les usages récréatifs. Dans le cas de la masse deau 83, on cherche à évaluer laugmentation des populations piscicoles associée au bon état, et à chiffrer la valeur de cette augmentation en termes de bénéfice net pour les pêcheurs.
Une estimation du nombre actuel de visites et de laugmentation des populations piscicoles liées au bon état est en cours de réalisation par le CSP ; elle servira de base au calcul du gain de satisfaction des pêcheurs.
Sil savère que les coûts calculés plus haut sont disproportionnés par rapport aux bénéfices obtenus à partir de ces sources disponibles, et que ces mesures ont un impact négatif important sur dautres usages on classera la masse deau en MEFM.
Sinon, selon le degré dacceptabilité de ces chiffrages par les acteurs concernés, la masse deau sera considérée comme normale ou elle fera lobjet dune étude spécifique (passage au niveau de la phase approfondie).
3. Les résultats obtenus
3.1. Les produits fournis
Les travaux conduits dans le cadre de ce groupe de travail ont permis :
- dobtenir un catalogue de mesures types à envisager pour résoudre les pressions hydromorphologiques liées à lhydroélectricité ;
- de se doter dune grille danalyse simplifiée (mais qui reste dans lesprit du guide européen) mettant en regard limpact des mesures sur les usages et le potentiel écologique des masses deau concernées ;
- clarifier avec EDF la base dinformation minimum à partir de laquelle on peut travailler :
- la définition dune typologie douvrages avec la fourniture de données sur le productible et la puissance par ouvrage qui sont les variables clefs qui permettent dappréhender les pertes dénergie provoquées par les mesures ;
- le recours à la grille tarifaire des postes horo-saisonniers dEDF ;
- de valider que, à défaut dautres propositions à ce stade, la méthode tarifaire couramment utilisée par EDF pouvait être utilisée pour valoriser les pertes dénergie et de puissance liées aux mesures ;
- de faire une première évaluation des coûts environnementaux en estimant le coût des émissions supplémentaires de CO2 consécutives à un remplacement de lénergie hydroélectrique par une production à partir du mix énergétique français ; les coûts utilisés provenant de sources nationales ;
- damorcer un chiffrage des bénéfices environnementaux liés aux mesures en sappuyant sur les bénéfices liés aux usages et sur les valeurs patrimoniales des milieux aquatiques disponibles à partir des retours dexpériences connus.
3.2. Les aménagements à apporter au projet initial de guide technique
Après avoir cherché à conduire une application du guide européen trop rigide mais peu constructive, les travaux du groupe ont révélé la nécessité daborder cette confirmation des MEFM en appliquant une démarche progressive. La démarche retenue a consisté à dégager du guide européen les questions clefs qui étaient posées et à y apporter des réponses adaptées à la complexité des cas, de façon à ne pas passer trop de temps sur des cas évidents.
Le guide européen propose dabord de tester limpact dune mesure « douce » (autre que leffacement du barrage) qui permet datteindre le BEE (ex. : modulation des éclusées). Si lactivité est touchée de façon significative, le guide propose alors de tester une solution alternative consistant à remplacer 100 % de la production hydroélectrique par un autre moyen.
Dune part pour lusage hydroélectricité, ce passage par une mesure « douce » ne permet pas toujours datteindre le bon état, et il faut souvent directement envisager la suppression de louvrage, en particulier pour les lacs.
Dautre part, on pourrait considérer que le recours aux autres moyens est à étudier sans pour autant que lactivité disparaisse complètement de la masse deau. En effet, si une mesure de restauration empêche une partie de lactivité de se réaliser, la question se pose logiquement de savoir comment va se réaliser cette partie de lactivité (exemple des éclusées diminuées). Il faut donc alors avoir recours à un autre moyen de production pour cette partie dactivité. Il serait donc logique de prendre en compte dans lanalyse coûts-bénéfices lintervention dautres moyens de production, pas nécessairement en remplacement total de lactivité exercée sur la masse deau, mais juste pour la part de lactivité qui est empêchée du fait de la mesure prise pour atteindre le BEE.
Cest pourquoi le groupe propose de ne pas systématiquement changer de mesure en cours danalyse.
Le guide européen propose de ne prendre en compte le coût de mise en oeuvre des mesures que lors de la construction du programme de mesures, et de ne pas les intégrer dans les étapes 4.3 (a) et 4.3 (b) des MEFM.
A lexpérience, cette démarche paraît trop théorique, et il semble plus réaliste de prendre en compte lestimation du coût de mise en uvre des mesures au moment de la désignation des MEFM ; cest en particulier le cas pour tout ce qui concerne les mesures deffacement douvrages, mais aussi pour toute mesure dont le coût de mise en uvre est élevé.
3.3. Comment ont été traitées les notions clefs ?
Les étapes 4.3 (a) et 4.3 (b) du guide européen MEFM font appel à 3 notions clefs :
- la notion de coût significatif pour lusager ;
- la notion dimpact sur lenvironnement au sens large ;
- la notion de coût disproportionné.
Comme évoqué précédemment, la notion de coût significatif pour lusager a nécessité destimer le coût des pertes de production délectricité liées aux mesures ; il sest avéré difficile de fixer un seuil de coût supportable par lusager, car lenjeu concerne également la modulation de lénergie. Il serait intéressant de disposer de différents modes de présentation du coût disproportionné (du point de vue de lenvironnement, du point de vue de la capacité contributive, du point de vue des financeurs...)
Les impacts sur lenvironnement au sens large ont à ce stade été pris en compte en estimant le coût des émissions de gaz à effet de serre qui résulteraient dun recours à dautres moyens de production de lélectricité. Ces estimations ont pu être réalisées en considérant que les moyens de substitution assurant la production hydroélectrique étaient formés par un ensemble de moyens de production répartis dans les différentes tranches horaires dutilisation de lénergie.
Les coûts de ces émissions de CO2 ont pu être valorisés à partir des données du rapport Boiteux, elles-mêmes cohérentes avec celles de la DIDEME.
Enfin, la notion de coût disproportionné a été traitée aux différentes étapes du guide.
Au niveau de la phase danalyse simplifiée, la notion de bénéfice environnemental a été traitée en prenant en compte les enjeux écologiques associés à la masse deau ; lidée étant de sappuyer sur tous les zonages réglementaires qui permettent dargumenter un intérêt écologique avéré.
Au niveau de la phase danalyse plus approfondie, des valeurs guides des bénéfices ont été proposées. Cette notion reste délicate à traiter parce quil savère encore difficile de quantifier les bénéfices associés à un bon état (les valeurs disponibles nétant pas toujours transposables aux cas étudiés).
Compte tenu de ces difficultés, il pourra être compliqué de conclure sur cette confirmation des MEFM, il faudra alors envisager des études locales plus précises.
4. Les principales difficultés à contourner
La première difficulté est liée à lévaluation des bénéfices environnementaux (cf. paragraphe précédent) ; celle-ci renvoie notamment à la question des données disponibles localement pour connaître le nombre dusagers récréatifs dun site ou évaluer le périmètre sur lequel lamélioration du site peut générer un intérêt du seul point de vue patrimonial. Il est important de boucler lévaluation des bénéfices environnementaux avec les données locales disponibles.
La difficulté de mesurer lefficacité des mesures pour atteindre le bon état. En fait face à une pression donnée, on sait identifier le type de mesures nécessaires, mais il est beaucoup plus délicat de dimensionner ces mesures, car leur efficacité environnementale est rarement bien connue.
Il nest pas toujours évident didentifier léchelle de travail la plus pertinente. Conformément au guide européen, les travaux du groupe ont été réalisés masse deau par masse deau ; mais une mesure sur une masse deau peut avoir un impact sur des usages dautres masses deau.
A part pour un nombre limité de mesures (ex. : aménagements des berges, suppression des retenues), il sera nécessaire de sappuyer sur la méthode tarifaire et sur un travail conjoint avec EDF pour évaluer les pertes énergétiques. Ces évaluations supposent davoir accès à des informations précises sur les postes horosaisonniers impactés par les mesures ; ces informations ne seront pas toujours disponibles car elles font appel à des calculs trop lourds pour être menés en routine et à des données qui peuvent être stratégiques pour le gestionnaire de louvrage. La poursuite de ce travail nécessitera une collaboration étroite avec les représentants dEDF qui pourra se concrétiser par la création dateliers de travail par bassin associant EDF et les autres parties prenantes.
Lévaluation des bénéfices environnementaux oblige à bien décrire les gains apportés par le bon état, pour le patrimoine ou pour les usages, pour le court terme ou pour le long terme. Cette traduction nest pas toujours évidente, elle nest en général pas faite demblée. En tout cas, elle simpose non seulement pour la valorisation économique, mais aussi dans le but de pouvoir donner aux acteurs du bassin des éléments concrets permettant dengager entre eux une discussion. On ne peut pas imaginer que celle-ci se fasse correctement sur la seule base des paramètres techniques du bon état.
Comme dit précédemment, il semble également utile de creuser la notion de coûts disproportionnés en prenant notamment en compte les modalités de financement des mesures pour se prononcer sur le caractère fortement modifié ou non des masses deau. En effet si on nintègre pas les possibilités de financement public des mesures, on peut très bien se retrouver avec un coût significatif pour lusage, et se priver de marges de progrès quaurait permises la prise en compte de ses financements publics.
Ces difficultés supposent daccepter de travailler à partir de résultats grossiers et nécessitent de définir des programmes détudes et la mise au point dindicateurs de programme susceptibles de combler nos lacunes.
II. Définition des coûts externes des moyens de production énergétiques
(Note MEDD/D 4 E réf. : B3-05-083pd).
Résumé :
Dans le cadre de la mise au point de la méthode didentification définitive des masses deau fortement modifiées (MEFM), une analyse coûts-bénéfices tenant compte des coûts externes associés aux moyens de production dénergie est à conduire.
La note fait état des connaissances sur ces externalités, à partir dun document produit par la DIDEME et de travaux de recherche du programme européen ExternE. Afin de conduire rapidement et simplement une première analyse coûts-bénéfices sur les MEFM, la note détermine, parmi les valeurs proposées, celles dont la prise en compte représente lenjeu le plus important. Les études au cas par cas des MEFM pourront tester des approches plus fines que celle de cette note.
Lexercice est délicat, car seule la valeur des externalités du CO2 commence à être largement reconnue. Il est ainsi proposé de retenir comme valeur des externalités associées à ce polluant : 27 Euro/t CO2.
Les imprécisions associées aux polluants SO2 et NOx, de même que celles associées à la filière nucléaire sont par contre beaucoup plus fortes. La note a donc conduit une simulation des impacts de ces polluants selon les valeurs les plus plausibles.
Sur ces bases, les coûts externes représentent de 6 % à 84 % des coûts de production selon les filières thermiques à flamme. Le CO2 est responsable de 70 à 92 % des dommages environnementaux pour la plupart des filières, sauf la turbine à fioul où il est responsable denviron 50 % des coûts de dommages, mais ce moyen de production ne fonctionne quà lhyperpointe et les coûts externes totaux ne représentent que 6 à 18 % du coût total de ce moyen de production.
Dans le cas de la filière nucléaire, on peut estimer le coût des dommages externes à 0,4 % du coût de production.
Ainsi, dans le cas dune première approche simplifiée des coûts environnementaux pour le test densemble des MEFM, de la précision attendue des estimations et du souci de produire autant que faire se peut des valeurs partagées par les acteurs, il semble possible de se satisfaire de ne tenir compte que des externalités liées au CO2.
1. Les filières thermiques à flamme
1.1. Les fondements des différentes valeurs proposées par la DIDEME
La direction de la demande et des marchés énergétiques (DIDEME) entreprend tous les 3 à 5 ans létude des coûts de production de lélectricité. Les précédentes études visaient à adapter les tarifs dachat aux producteurs indépendants et de vente de lélectricité par EDF, monopole. La mise à jour de ce document en 2003 sest faite dans un contexte différent : celui dune concurrence accrue entre producteurs en France.
Enfin, la DIDEME a souhaité disposer déléments pour évoquer la place souhaitable de lensemble des filières de production électriques, dans le cadre du débat national sur les énergies. Le document a donc deux objectifs :
- valider les hypothèses de coûts retenues pour lélaboration des tarifs de lélectricité (dans ce cadre les externalités ne sont pas prises en compte) ;
- éclairer les décisions dinvestissement qui seront prises pour la programmation pluriannuelle des investissements de production (PPI). Cest cette approche qui a conduit la DIDEME à intégrer pour la première fois dans son document des valeurs dexternalités. Elles lui permettront déclairer ses propositions dans le cadre de la PPI, du point de vue du décideur public.
Les coûts externes environnementaux établis par la DGEMP-DIDEME rappelés ici concernent les filières de production délectricité suivantes :
- une centrale cycle combiné au gaz (CCG) ;
- une centrale à charbon pulvérisé (CP) ;
- une turbine à combustion au gaz (TAC) ;
- une turbine à combustion au fioul (TAC) ;
- une centrale nucléaire à eau pressurisée.
Les coûts externes par MWh, selon la DIDEME, sont présentés comme égaux à : SOMME (quantité de polluant par MWh × coût des dommages/tonne de polluant) sur les polluants.
Trois polluants sont envisagés pour refléter les émissions des centrales électriques (lors de létape « production » du kWh) : NOx, le SO2 et le CO2. Les dommages dus aux poussières ne sont pas repris, car, compte tenu des systèmes de dépollutions des fumées en France, cette pollution est maintenant jugée négligeable par rapport aux autres externalités de la production thermique classique.
1.1.1. Les quantités de polluants émises
La DIDEME propose deux horizons dévaluation : 2007 et 2015, ayant comme implication sur le calcul des externalités de modifier les hypothèses de quantités de polluants émis. Comme indiqué dans la note précédente, lhorizon datteinte du bon état des eaux étant 2015, il semble cohérent pour lexercice MEFM de retenir les résultats des estimations basés sur des émissions de polluants qui sont celles attendues des moyens de production plus modernes de lhorizon 2015. Les valeurs monétaires sont exprimées en euros de lannée 2001 (Euro 2001), sauf indication contraire.
1.1.2. Les coûts unitaires des dommages des polluants
La DIDEME retient pour chaque polluant trois hypothèses de coût : basse, médiane et haute. Ces coûts correspondent :
- soit à une estimation explicite de la valeur des dommages causés par le polluant. Il sagit alors de construire des modèles de diffusion des polluants, de leur impact sur la population ou le milieu et des dépenses qui en découlent : restauration du milieu, dépenses de soins, années de vie perdues... Ces modèles permettent de tracer la courbe du coût des dommages en fonction du taux de polluant. De telles estimations explicites sinspirent alors directement des résultats de létude européenne ExternE et de sa déclinaison dans chaque pays ;
- soit à une estimation implicite :
- du côté de loffre de dépollution : cest une approche par les coûts dévitement, qui mobilise les coûts marginaux des réductions démissions nécessaires au respect des directives européennes (grandes installations de combustion, plafonds nationaux démission) ou du protocole de Kyoto ;
- par le prix de permis démissions négociables sur des marchés existants ou simulés. Les valeurs calculées précédemment peuvent alors être comparées aux valeurs révélées sur des marchés.
En ce qui concerne les valeurs explicites de dommages, les résultats dExternE sont :
- pour les NOx, une valeur moyenne retenue pour la France de lordre de 17 400 Euro 2001/tonne (16 100 Ecu 1995/tonne y compris les dommages via lozone) ;
- pour le SO2, une valeur moyenne retenue pour la France de lordre de 9 600 Euro 2001/tonne (8 900 Ecu 1995/tonne) ;
- pour le CO2, une fourchette de 19 à 50 Euro 2001/tonne (18 à 46 Ecu 1995/tonne).
En matière de valeur de la tonne de polluant évitée (coût de réduction des émissions), la DIDEME estime :
- pour les NOx, un minimum de 800 à 1 000 Euro 2001/tonne et une valeur pouvant atteindre 2 000 Euro 2001/tonne ;
- pour le SO2, un minimum de 300 à 500 Euro 2001/tonne et une valeur pouvant atteindre 2 000 Euro 2001/tonne ;
- pour le CO2, une fourchette de 40 à 60 Euro 2001/tonne (coût de capture et stockage selon une étude de lAIE).
Enfin, dans un système de marché de permis démissions négociables, la DIDEME indique des prix allant de quelques euros à 20 Euro 2001/tonne CO2.
Au total, sur ces bases, les hypothèses basse, médiane et haute retenues par la DIDEME sont :
- pour les NOx : 1 000, 2 000 et 15 000 Euro 2001/tonne ;
- pour le SO2 : 500, 2 000 et 10 000 Euro 2001/tonne ;
- pour le CO2 : 4, 20 et 50 Euro 2001/tonne.
La base Externe :
La valeur des dommages supposés être causés par un polluant sinspire directement des résultats dExternE qui, via la démarche dite du « cheminement dimpact » (12), a retenu une telle logique destimation. Il faut noter que les valeurs estimées par ExternE datent désormais (publiées en 1995 et 1998). Selon les experts de ces projets, les résultats partiels issus du projet européen NewExt (New Elements for the Assessment of External Costs from Energy Technologies, 1998-2002) mené dans la continuité dExternE apparaissent en baisse par rapport à ceux dExternE. Compte tenu de leur immaturité et des incertitudes fortes qui les affectent, ces valeurs sont par ailleurs en cours de révision dans un nouveau grand projet intégré européen (6e PCRD) NEEDS (New Energy Externalities Developments for Sustainability) qui a débuté en 2004.
(12) Etude successive des émissions, de leur dispersion et de leurs transformations chimiques, des augmentations de concentration en polluants qui en résultent, des impacts de ces concentrations et de leur valorisation.
1.2. Quelles valeurs choisir pour les analyses coûts-bénéfices des MEFM ?
Le document DIDEME sen est tenu à une fourchette de valeur et na pas opéré de sélection. En la matière, compte tenu de lincertitude qui règne sur ces valeurs, on ne peut que rappeler, en priorité, la recommandation générale qui est de réaliser des analyses de sensibilité des résultats sur la base dune fourchette de valeurs. Cette recommandation devrait être reprise pour les études au cas par cas qui découleront du test MEFM. Par contre, afin de conduire rapidement une première analyse coûts-bénéfices sur des centaines de MEFM, il est préférable de simplifier en ne retenant quune valeur type de dommage par polluant, si possible.
La conduite dune analyse coûts-bénéfices pour le choix de projet consiste à intégrer tous les coûts et bénéfices du point de vue de la société. Il convient donc de retenir les estimations se rapportant à des coûts de dommages marginaux, cest-à-dire aux valeurs explicites de la DIDEME ou dExternE. En effet, seule létude ExternE en Europe fournit des valeurs utilisables en ce domaine.
Lorsque certaines de ces valeurs semblent trop incertaines, la note propose toutefois de recourir à une référence internationale, qui reflète la valeur moyenne dévaluation des coûts marginaux des dommages dans dautres pays européens.
1.2.1. Le CO2
Létude ExternE propose destimer les dommages issus de leffet de serre selon une fourchette de valeurs variant de 20 à 50 Euro 2001/tonne CO2. La première valeur DIDEME de 4 Euro 2001/tonne CO2, non seulement ne résulte pas dune démarche destimation des dommages, mais, selon les dires mêmes de la DIDEME, constitue une valeur visiblement trop faible.
En France, le rapport Boiteux (13) estime quune valeur raisonnable de dommages issus des émissions de carbone est 27 Euro/tonne de CO2. Compte tenu que cette valeur tutélaire est largement utilisée par les pouvoirs publics lors des évaluations de dommages, quelle est incluse dans la fourchette des valeurs de dommages de la DIDEME (20 à 50 Euro/tonne de CO2), il est proposé de retenir la valeur de 27 Euro 2001/tonne de CO2 parmi les valeurs DIDEME.
(13) Rapport du groupe de travail présidé par Marcel Boiteux : « Transports : choix des investissements et coût des nuisances ».
1.2.2. Le SO2
Létude ExternE estime que les dommages causés par lémission dune tonne marginale de SO2 en France sont de lordre de 8 100 Euro 2001/tonne à 16 500 Euro 2001/tonne.
La DIDEME retient, comme valeur de monétarisation des dommages, la valeur de 10 000 Euro 2001/tonne SO2. La plupart des autres pays européens ayant des estimations de dommages également variables, mais généralement plus basses, une valeur alternative internationale, de lordre de 5 000 Euro 2001/tonne SO2 devrait être introduite, pour comparer.
1.2.3. Le NOx
La DIDEME conduit pour les NOx le même raisonnement que pour les SOx. Les valeurs proposées par ExternE sont de 11 600 Euro 2001/tonne à 19 500 Euro 2001/tonne. La DIDEME retient, comme valeur de monétarisation des dommages, la valeur de 15 000 Euro 2001/tonne NOx. La plupart des autres pays européens ayant des estimations de dommages également variables, mais généralement plus basses, une valeur alternative, de lordre de 5 000 Euro 2001/tonne SO2 devrait être introduite pour comparer.
1.3. Résultats pour les filières thermiques à flamme
Finalement, parmi les valeurs DIDEME, celles qui sont les plus adaptées au texte des MEFM sont :
- pour le CO2 : 27 Euro/tonne ;
- pour les NOx : 15 000 Euro 2001/tonne, à comparer avec une valeur alternative internationale, de lordre de 5 000 Euro 2001/tonne NOx ;
- pour le SO2: 10 000 Euro 2001/tonne, à comparer avec une valeur alternative internationale, de lordre de 5 000 Euro 2001/tonne SO2.
Comme le montre le tableau joint en annexe à la note, pour tous les moyens de production, aujourdhui comme dans les conditions techniques 2015, les externalités dues au CO2 restent supérieures à celles des autres polluants. Pour toutes les filières, à lexception de la TAC fioul, les externalités du CO2, sont mêmes majoritaires dans le montant total des dommages (70 à 80 %). Dans le cas de la TAC fioul, ce dernier moyen de combustion est utilisé pour les moments dhyperpointe et donc pendant des durées courtes sur lannée (une centaine dheures sur 3 600 heures).
Les valeurs retenues conduiraient aux coûts dexternalités suivants :
- centrale cycle combiné au gaz (CCG) : 10 à 12 Euro 2001/MWh (dont 80 à 92 % dû au CO2), soit environ 28 à 34 % des coûts de production ;
- centrale à charbon pulvérisé (CP) : 22 à 27 Euro 2001/MWh (dont 74 à 88 % dû au CO2), soit environ 69 à 84 % des coûts de production ;
- turbine à combustion au gaz (TAC) : 17 à 22 Euro 2001/MWh (dont 70 à 87 % dû au CO2), soit environ 11 à 15 % des coûts de production ;
- turbine à combustion au fioul (TAC) : 34 à 52 Euro 2001/MWh (dont 43 à 65 % dû au CO2), soit environ 6 à 18 % des coûts de production (qui varient eux-mêmes de 285 à 575 Euro/MWh).
2. La filière nucléaire
La DIDEME sappuie directement dans le cas du nucléaire sur des valeurs estimées dans le cadre dExternE, en ce qui concerne les effets sanitaires et le coût dun accident nucléaire, en y ajoutant une rubrique intitulée « coûts de recherche et de développement ». A la différence des autres moyens de production, le rapport DIDEME ne fait état daucune donnée comparative (taxe, coûts dévitement, valeur implicite accordée par lEtat) dans ce domaine et il nexiste pas de valeurs tutélaires comparatives arrêtées en la matière par le Gouvernement. Cela témoigne de laspect novateur et donc non stabilisé de ces valeurs pour une utilisation par les politiques publiques.
2.1. Coût externe en fonctionnement normal
La DIDEME retient une fourchette de coût de 0,1 à 2,5 Euro 2001/MWh, correspondant aux résultats de limplémentation française dExternE en ce qui concerne les effets sanitaires :
- la valeur de 2,5 Euro/MWh est établie sans actualisation ;
- la valeur de 0,1 Euro/MWh est établie avec un taux dactualisation de 3 %.
Par homogénéité avec les approches précédentes, le plus logique de retenir le taux dactualisation de 3 % et donc à la valeur dExternE de 0,1 Euro/MWh.
2.2. Coût dun accident nucléaire
La DIDEME retient une fourchette de coût de 0,01 à 0,46 Euro/MWh, avec une valeur médiane de 0,05 Euro/MWh.
Ces valeurs sont obtenues en intégrant de laversion au risque à partir des valeurs estimées dans le cadre ou en complément dExternE.
Compte tenu que ces informations ne sont pas encore largement partagées, il est proposé par sécurité de prendre la valeur médiane des fourchettes proposées par ExternE allant de 0,000 5 à 0,023 Euro/MWh (correspondant à différents scénarios daccident grave). Elles correspondent aux valeurs calculées dans lapplication à la France de la méthodologie générale dExternE. Il est donc proposé de retenir la valeur de 0,01 Euro/MWh.
2.3. Coûts de recherche et développement
La DIDEME retient une fourchette de coût de 0,75 à 1,4 Euro 2001/MWh. La DIDEME, reconnaissant que « les coûts de R & D existent également pour les autres filières », justifie notamment le choix de compter cette externalité non spécifiquement environnementale par le fait que « nul autre secteur en France ne fait lobjet dun effort aussi important ».
Dans notre optique dutilisation pour les MEFM, seules les valeurs marginales dexternalités sont à retenir (accroissement probablement marginal du parc nucléaire du fait des éventuelles modifications du parc hydroélectrique). Or, les dépenses de recherche ne peuvent être considérées dans une approche marginale, mais reflètent plutôt des coûts moyens. Il est proposé de ne pas en tenir compte pour notre exercice.
2.4. Résultats pour la filière nucléaire
Les valeurs pour cette filière semblent les moins stabilisées parmi celles présentées. Il nexiste aucune valeur tutélaire des pouvoirs publics.
Il est proposé de retenir une valeur de 0,11 Euro/kWh.
Sur la base des coûts de production fournis par la DIDEME, cette valeur représente environ 0,4 % des coûts de production par le nucléaire.
3. Suites à donner
La note précédente mentionnait la possibilité dutiliser la méthode tarifaire dEDF pour procéder aux valorisations des pertes économiques pour lactivité hydroélectricité. En effet, cette méthode est celle actuellement utilisée par les agences de leau devant rémunérer les pertes de productibles négociées avec EDF pour la réhabilitation de lenvironnement. Le propos nest pas ici de valider ou dinvalider la méthode, mais de faire le constat, quà cette date, les informations disponibles au MEDD ne permettent pas daboutir à une méthode alternative partagée par les acteurs. Par ailleurs, les valeurs guides de coûts de production des différents moyens énergétiques fournis par la DIDEME demandent, pour être utilisés, de disposer de données actuellement non publiques sur chaque ouvrage du parc hydroélectrique : nombre dheures de production en pointe, base, semi-base...
A ce jour, la méthode tarifaire ninclut pas les coûts environnementaux. Les travaux ci-dessus sont un premier pas pour les y incorporer.
Hypothèses et résultats DIDEME (2015) et autres
III. Exemple de fiche de présentation des données
Annexe IV : Désignation de MEFM au titre de la navigation (14)
Dans le cadre dune démarche nationale pilotée par la direction de leau du ministère de lécologie et du développement durable, les bassins Artois-Picardie et Rhin-Meuse ont été désignés pilote pour travailler de manière conjointe à la désignation des masses deau artificielles et fortement modifiées relevant de lusage de la navigation.
Lobjectif de ce test a été didentifier, à partir dune première version dun projet de guide technique, les aménagements envisageables afin datteindre le bon état ainsi que les sources de données disponibles sur les solutions alternatives et leurs coûts environnementaux.
Au niveau du bassin Artois-Picardie, un groupe de travail a été constitué pour la mise en oeuvre de ce travail : il est constitué des Voies navigables de France, des fédérations départementales des associations agréées de pêche et de protection des milieux aquatiques (Nord et Pas-de-Calais), la DIREN et lagence de leau Artois-Picardie. A lissue de ce groupe de travail, deux masses deau ont été choisies :
- le canal du Nord ;
- les Wateringues, Aa.
Au niveau du bassin Rhin-Meuse, deux masses deau ont également été choisies suite à une réflexion commune entre le CSP, la DIREN de bassin, les services de la navigation et lagence de leau Rhin-Meuse :
(14) Contacts pour plus dinformation : Sophie Nicolaï, AERM ; Arnaud Courtecuisse, AEAP.
1. Les sites pilotes
1.1. Les sites pilotes du bassin Artois-Picardie
Le groupe de travail a tout dabord procédé à lévaluation des usages en cours pour les différentes masses deau pré-désignées. Chaque usage a été qualifié par une note de 0 à 2 (0 : pas dusage ; 1 : usage existant ; 2 : usage existant et significatif). Le tableau 3 ci-après est le résultat de ce travail.
Tableau 3 : Liste des usages des masses deau prédésignées dans le bassin Artois-Picardie
N° |
Type de réseau |
Masses deau |
Transport de marchandises |
Transfert deau |
Canal permettant un écrêtement des crues |
Drainage (agriculture) |
Electricité |
Tourisme loisir |
Navigation plaisance |
Pêche |
1 |
M |
Aa canalisé, canal de Neufossé |
2 |
2 |
2 |
Pm |
0 |
2 |
2 |
2 |
2 |
M |
Canal dAire |
2 |
2 |
2 |
Pm |
0 |
1 |
2 |
2 |
3 |
R |
Canal dHazebrouck |
0 |
0 |
1 |
Pm |
0 |
0 |
0 |
0 |
4 |
M |
Canal de Saint-Quentin, Escaut canalisé |
2 |
0 |
2 |
Pm |
0 |
2 |
2 |
2 |
5 |
M |
Canal du Nord |
2 |
2 |
0 |
Pm |
0 |
2 |
2 |
2 |
6 |
R |
Canal maritime |
0 |
0 |
1 |
Pm |
0 |
2 |
2 |
2 |
7 |
M |
Deûle, canal de Lens |
2 |
2 |
2 |
Pm |
0 |
1 |
1 |
1 |
8 |
M |
Escaut canalisé |
2 |
1 |
2 |
Pm |
0 |
2 |
2 |
2 |
9 |
R |
Espierre, canal de Roubaix |
0 |
0 |
0 |
Pm |
0 |
2 |
2 |
1 |
10 |
M |
Lys canalisée, Clarence canal Iawe aval |
2 |
0 |
2 |
Pm |
0 |
2 |
2 |
1 |
11 |
M |
Lys canalisée, Deûle, canal de Roubaix |
2 |
0 |
2 |
Pm |
0 |
2 |
2 |
1 |
12 |
M |
Lys canalisée, Vieille Lys, r. de Busne |
0 |
0 |
2 |
Pm |
0 |
2 |
2 |
1 |
13 |
R |
Sambre canalisée |
1 |
0 |
1 |
Pm |
1 |
2 |
2 |
2 |
14 |
R |
Scarpe amont |
1 |
0 |
1 |
Pm |
0 |
2 |
2 |
2 |
15 |
R |
Scarpe aval |
0 |
0 |
1 |
Pm |
0 |
2 |
2 |
2 |
16 |
R |
Somme canalisée amont |
2 |
0 |
1 |
Pm |
0 |
2 |
2 |
2 |
17 |
R |
Wateringues, Aa |
2 |
2 |
1 |
2 |
0 |
2 |
2 |
2 |
Le groupe de travail a sélectionné pour les études pilotes les masses deau, le canal du Nord et les Wateringues. Ce choix sest notamment basé sur la volonté davoir une masse deau en réseau de navigation « majeur » et une en réseau « régional ». Le secteur des Wateringues présentant par ailleurs une particularité intéressante à analyser. La carte ci-après localise les deux sites retenus.
La masse deau « canal du Nord » se caractérise par un linéaire de 41 kilomètres, cest un canal entièrement artificiel qui relie la Scarpe canalisée à la Somme canalisée. La limite nord de cette masse est la confluence avec la Scarpe, la limite sud est située au niveau de la commune dHavrincourt (limite du SAGE de la Sensée).
La masse deau « Wateringues, Aa » se caractérise par un linéaire de 688 kilomètres et est composée :
- dune partie fortement modifiée : lAa canalisé en aval de la confluence avec le canal de la haute Colme et le canal de Guines à Calais ;
- dune partie artificielle comprenant le réseau de canaux et wateringues allant du canal de Calais à louest au canal de la haute et basse Colme, et à la frontière belge à lest.
La zone des Wateringues recèle en fait un réseau très dense de petits canaux façonnés par lhomme afin de drainer des terres marécageuses et de les orienter vers un usage de production agricole. Les eaux drainées étant évacuées vers la mer.
1.2. Les sites pilotes du bassin Rhin-Meuse
La volonté de lAERM était de sélectionner deux masses deau de gabarit différent et dont les usages seraient différents, mais également deux masses deau navigables représentatives du bassin Rhin-Meuse. Le choix sest ainsi porté sur les masses deau :
- Meuse 5 qui est une masse deau de petit gabarit utilisée pour le transport de marchandises et le tourisme de plaisance ;
- Moselle 6, masse deau de grand gabarit, sur laquelle transitent un très grand nombre de bateaux de marchandises mais également de plaisance. Cette masse deau est également utilisée par une centrale nucléaire et deux centrales thermiques pour leur activité. La carte suivante localise les deux sites pilotes du bassin Rhin-Meuse.
Test MEFM AERM - masses deau pilotes
La masse deau « Meuse 5 » est une masse deau provisoirement classée en MEFM. Sa longueur est de 83 kilomètres qui sont constitués dune succession de tronçons canalisés et de tronçons court-circuités.
La masse deau « Moselle 6 » est elle aussi provisoirement classée en MEFM. Elle se caractérise par une longueur de 173 kilomètres, incluant de nombreuses dérivations artificielles.
2. Les différentes approches et les tests réalisés dans les bassins Artois-Picardie et Rhin-Meuse
2.1. Existe-t-il des mesures de restauration permettant datteindre le Bon Etat Ecologique sans remettre significativement en cause les usages existants ?
a) Lapproche par type daménagement
La première approche a consisté à prendre comme point de départ le type daménagement effectué sur la masse deau en question afin de la rendre navigable. A partir de ces aménagements, des experts de lagence ont dégagé des mesures de restauration imputables à ces aménagements et ce afin daméliorer létat de la masse deau. Le tableau 4 ci-après présente les aménagements en question et les mesures en découlant.
Tableau 4 : Approche par type daménagement
TYPE DAMÉNAGEMENT |
TYPE DE MESURE |
|
Construction de passes à poissons, amélioration du fonctionnement des passes existantes |
Barrages et retenues |
|
|
Modification du régime des éclusées |
Entretien et maintenance des chenaux |
Amélioration de la qualité des dragages |
|
Reconnexion des anciens méandres avec le chenal principal |
Canalisation |
|
|
Création ou re-création des bras et zones humides |
|
Plantation |
|
Diversification, retalutage |
Maintien des berges et opérations de gestion pour les besoins de la navigation |
Diversification, mise en place dépis |
|
Protection des berges
Reprise de végétation existante
|
b) Lapproche par type daltération
Depuis, une nouvelle approche a été développée par des experts de la DIREN, du CSP et de lAERM. Celle-ci consiste à prendre comme point de départ, non plus les aménagements effectués sur les masses deau, mais plutôt les altérations subies par celles-ci. Ainsi, une nouvelle liste de mesures de restauration a pu être développée, comme présentée dans le tableau page suivante.
Tableau 5 : Approche par type daltération
ALTÉRATION LIÉE AUX MODIFICATIONS hydromorphologiques liées à la navigation |
MESURE(S) POTENTIELLE(S) |
|
Augmentation débit biologique estival par arrêt hydroélectricité en été. |
I1 Réchauffement de leau en amont des barrages. |
Prise deau de fond si barrage sup. à 7 mètres.
Ombrage. Restauration ripisylve surtout en partie artificielle.
|
I2 Refroidissement de leau (vannes de fond en aval des retenues). |
Prise deau de surface. |
I7 Déficit en oxygène. |
Modification du rythme de stockage déstockage de leau, éventuellement arrêt de lhydroélectricité. |
I9 Eutrophisation. |
Modification du rythme de stockage déstockage de leau, éventuellement arrêt de lhydroélectricité. |
I4 Diminution de la transparence. |
|
I12 Accentuation de létiage (prélèvement en basses eaux, capacité tampon réduite) dans les parties court-circuitées en aval des barrages. |
Augmentation du débit biologique (réservé) dans les parties court-circuitées. |
I15 Diminution des débordements (fréquence, durée) par augmentation de la section mouillée et lors de la gestion des barrages à aiguilles, I49 Déconnexion des zones inondables (la construction de digues nest pas nécessairement liée à la navigation). |
Amélioration de la gestion des barrages à aiguilles en crue.
Création de zones de ralentissement dynamique (digues transversales en lit majeur) diminution de la section mouillée en crue.
Restauration des zones aval (en lit majeur) des affluents et remise en connexions.
voir également I48 et I49.
|
I20 Batillage sur berges verticales (mise à nue des berges, absence de macrophytes, de caches et de supports de ponte) parties naviguées. |
Protection et diversification des berges.
Pose dun rideau de palplanche ou dun remblais brise-vague (CF Moselle entre Metz et Thionville : Malroy ou Niffer Mulhouse).
|
I21 Marnage sur parties aval court-circuitées. |
Modification du rythme de stockage déstockage de leau en amont du barrage. Gestion de lhydroélectricité. |
I22 Uniformisation du profil en travers (largeur, profondeur) et I36 Uniformisation des berges (hauteur, pente), I37 Réduction du linéaire de berge, I38 Réduction des caches et abris de berge (blocs, sous-berges, souches, embacles...), I40 Artificialisation des berges. I41 Réduction de la végétation de bordure (hélophytes), partie naviguée. |
Protection et diversification des berges par retalutage (différents degrés).
Remplacement des palplanches, pierrés (etc.) par des protections de berges végétales.
Protection et diversification des berges par des brise-vagues.
Epis.
|
I22 Uniformisation du profil en travers (largeur, profondeur) portions courts-circuitées. |
Augmentation du débit biologique (réservé) dans les parties court-circuitées. Augmentation de la section mouillée et de la capacité daccueil.
Epis.
|
I23 Enfoncement du lit (par déficit du transport solide ou surcreusement, conséquence : diminution des inondations et baisse des nappes daccompagnement, déconnexion des annexes). |
Déversement de granulat.
Création de seuils de fond de stabilisation.
Recréation de méandres selon une approche énergétique.
|
I25. Réduction de la sinuosité, de la longueur (= uniformisation profil en long). |
Recréation de méandres selon une approche énergétique. |
I28 Réduction de la granulométrie grossière (blocs, pierres) dont : I26 Colmatage du substrat (cours deau salmonicoles et intermédiaires). |
Voir I22. |
I42 Réduction/altération de la ripisylve (végétation arborée), chemin de halage. |
Plantations, réaménagement du chemin de halage. |
I46 Obstacle à la montaison. |
Passe à poissons. |
I47 Obstacle à la dévalaison. |
Glissière de dévalaison.
Grilles fines aux usines hydroélectriques.
|
|
Connexion (passages busés ou ponts). |
I48a Déconnexion des annexes (bras morts et affluents). |
Approfondissement de lannexe en cas de milieu « perché ». |
|
Connexion en amont et en aval. |
148b Déconnexion danciens méandres. |
|
|
Approfondissement de lannexe en cas de milieu « perché ». |
Une fois cette liste dressée, elle a été communiquée aux services de la navigation concernés. Ces derniers nont pour le moment pas émis dobjections majeures par rapport à celle-ci, mais il est possible que quelques remarques et/ou compléments puissent tout de même être formulés.
Nous avons ensuite cherché pour ces quatre masses deau pilotes à identifier les données nécessaires pour évaluer les coûts des mesures de restauration (bien que cette analyse ne soit pas demandée à cette étape).
Application aux cas détude AEAP
Les mesures de restauration applicables aux sites pilotes de lAEAP, ainsi que leurs coûts, sont présentés dans le tableau 6 page suivante.
Ce tableau reste à compléter sur de nombreux points et notamment la quantification des mesures qui seraient à mettre en uvre.
Ces premiers résultats permettent de tirer les enseignements suivants :
- certaines mesures à envisager restent très théoriques et il est délicat de les imaginer à léchelle dune masse deau complète à lhorizon 2015 (ex. : pose de passes à poissons sur lensemble du canal, création de méandres,....) ;
- les premiers coûts identifiés sont loin dêtre négligeables ;
- la mise en place de ces mesures, même en les développant à grande échelle, ne peuvent permettre denvisager le classement des masses deau pilotes en masses deau naturelles.
Tableau 6 : caractérisation des usages des sites pilotes AEAP et identification des mesures de restauration ainsi que leur coût.
Application aux cas détude AERM :
Les mesures de restauration applicables aux sites pilotes de lAERM, et leurs coûts, sont présentés dans le tableau 7.
Les mesures de restauration proposées pour la Meuse 5 devraient lui permettre datteindre le bon état écologique. En effet, seule labsence de languille est imputable aux aménagements de la Meuse dans ce secteur. La restauration de bonnes conditions de circulation pour cette espèce est donc suffisante. A noter toutefois que dautres altérations par des substances polluantes existent et empêchent actuellement lobtention du bon état. Ces altérations sortent du cadre de la désignation en masse deau fortement modifiée.
En revanche, les mesures proposées pour Moselle 6 ne permettront pas de restaurer un bon état écologique sur la masse deau Moselle 6 mais contribueront à atteindre un bon potentiel écologique (qui reste à déterminer).
Conclusions de létape de définition des mesures de restauration :
Le risque de non-atteinte du bon état écologique étant confirmé, il convient donc pour les masses deau Canal du Nord, Wateringues et Moselle 6 de passer à létape suivante qui consiste à examiner les solutions alternatives aux activités à lorigine des modifications hydromorphologiques, cest-à-dire identifier comment les usages en cours sur les masses deau pilotes pourraient être satisfaits par une autre manière qui soit techniquement faisable, présentant un meilleur bilan environnemental et réalisable à un coût non disproportionné.
2.2. Existe-t-il des solutions alternatives techniquement faisables, représentant une meilleure option environnementale et un coût non disproportionné ?
Pour le site pilote « Moselle 6 » du bassin Rhin-Meuse :
En labsence de solutions permettant datteindre le bon état ne portant pas de préjudice majeur à la navigation, lalternative consisterait à transporter les marchandises par un autre moyen de transport.
Indépendamment du fait que la désignation en MEFM et la définition dun objectif adapté peuvent constituer une évidence au vu des impacts sociaux, économiques et environnementaux dune telle disposition, létude a été poursuivie afin didentifier les sources de données disponibles et les questions relatives à ces données.
Trois étapes ont donc été vérifiées afin de tester la méthodologie jusquà son terme : la faisabilité technique, le bilan environnemental et le coût de mise en uvre.
Les solutions alternatives au transport de marchandises par voie fluviale pour la masse deau Moselle 6 sont le transport par voie routière et par voie ferrée (173 kilomètres).
La MEFM Moselle 6 suit un des axes routiers les plus fréquentés du bassin en terme de trafic routier (autoroute A 31). Supprimer le trafic fluvial sur la MEFM Moselle 6 reviendrait à rajouter sur la route 1 000 poids lourds par jour. Cette solution est techniquement possible mais il ne sagit pas dune meilleure solution environnementale. Loption de mettre sur rail les marchandises transportées par voie fluviale consisterait à mettre en service onze trains complets supplémentaires par jour. La faisabilité technique dépend notamment de la capacité dabsorbtion de ce trafic ferroviaire supplémentaire.
Il convient de dresser à présent le bilan environnemental. Comme le montre le tableau suivant, la solution alternative du train ne génère pas un coût supplémentaire pour lenvironnement (les coûts externes de transport figurent en annexe) mais un gain externe de nuisance à condition que dautres aménagements ne soient pas nécessaires pour que la circulation puisse se faire sereinement. Ce bilan environnemental est surtout impacté par les sources dénergie utilisées sur leffet de serre, le fer étant alimenté en énergie électrique et donc principalement dorigine nucléaire.
Tableau 8 : Les coûts externes du transport de marchandises sur la masse deau Moselle 6
MOSELLE 6 |
TRAFIC DE MARCHANDISES
(sur la base des données 2004)
|
Tonnes transportées |
11,5 millions de tonnes |
|
Tonnes par kilomètre |
680 millions de tonnes/Km |
|
Equivalence en PL/jour |
1 000 |
|
Equivalence en train/jour |
11 trains, soit 1 400 tonnes par jour |
|
Coûts externes de nuisance en euros (route à la place de la voie navigable 87,8 - 22,4 Euro pour 1 000 TKm)/an. |
Par an |
44 472 KEuro |
Sur la période 2004-2015 (11 années) |
489 192 KEuro |
Gains externes de nuisance en euros (fer à la place de la voie navigable 17,9 - 22,4 Euro pour 1 000 TKm)/an. |
Par an |
3 060 Keuro |
Sur la période 2004-2015 (11 années) |
33 660 KEuro |
Afin de préciser le coût disproportionné ou non de lalternative, il convient à présent détudier les coûts estimés de lalternative au regard des bénéfices environnementaux de la restauration du bon état. Comme le montre le tableau 9 nous navons pas chiffré à ce stade de lanalyse les coûts induits et les bénéfices environnementaux générés par la réalisation du bon état.
Tableau 9 : Analyse coûts-bénéfices de la masse deau Moselle 6
SOLUTION alternative |
FAISABILITÉ technique |
MEILLEURE OPTION environnementale ? |
COÛT ESTIMATIF |
BÉNÉFICE ATTENDU |
Transfert des marchandises sur voie routière |
+ 1000 PL/jour ? |
NON |
Coût environnemental supérieur + Coût perte tourisme fluvial + Coût décanalisation |
Retour du bon état de la masse deau |
Transfert des marchandises sur voie ferroviaire |
+ 11 trains complets (1 400 tonnes)/jour ? |
? |
Coût perte tourisme fluvial + Coût décanalisation |
Retour du bon état de la masse deau + 3 MEuro de gain environnemental fer/eau |
Pour les sites pilotes du bassin Artois-Picardie.
Sur le plan économique et environnemental, on peut essayer dévaluer le coût externe des transports liés à un transfert vers la route de ce qui est transporté aujourdhui par la voie deau. Ce calcul a été réalisé à partir des données de létude INFRAS/IWW.
Tableau 10 : Evaluation des coûts externes sur la base dun transfert de la voie deau vers la route
CANAL DU NORD |
TRAFIC DE MARCHANDISES
(sur la base des données 2004)
|
Tonnes transportées |
3,8 millions de tonnes |
|
Tonnes par kilomètre |
157 millions de tonnes/kilomètre |
|
Equivalence en PL/jour |
378 |
|
Equivalence en train/jour. Coûts externes de nuisance en euros (route à la place de la voie navigable 87,8 - 22,4 Euro pour 1 000 TKm)/an |
Par an |
10 283 KEuro |
Sur la période 2004-2015
(11 années)
|
113 117 KEuro |
WATERINGUES |
TRAFIC DE MARCHANDISES
(sur la base des données 2004)
|
Tonnes transportées |
1,3 million de tonnes |
|
Tonnes par kilomètre |
271 millions de tonnes/kilomètre |
|
Equivalence en PL/jour |
654 |
|
Equivalence en train/jour. Coûts externes de nuisance en euros (route à la place de la voie navigable 87,8 - 22,4 Euro pour 1 000 TKm)/an |
Par an |
17 772 KEuro |
Sur la période 2004-2015
(11 années)
|
195 492 KEuro |
Il est à noter par ailleurs que ce calcul ne tient pas compte de la possibilité réelle de faire ce transfert sans procéder à des extensions du réseau routier existant.
Il nen demeure pas moins que les coûts ici exprimés sont pour le moins conséquents.
Par ailleurs, il convient dajouter que, pour ce qui concerne la zone des Wateringues, la disparition des canaux, mis en place pour drainer des terrains marécageux, mettrait de fait en situation dinondation de nombreuses zones habitées.
En ce qui concerne les bénéfices associés à ces mesures, seuls laccroissement de certaines espèces (brochets notamment) et leur valorisation (étude extraite du PDPG du Nord) ont pu être identifiés :
MESURES
Descriptif
|
COÛTS |
IMPACT |
BÉNÉFICES |
Réhabilitation de frayères |
5 Euro/m2 (coût daménagement hors indemnisation) |
5 brochets pour 100 m2 |
63,60 Euro/brochet* |
Source : PDPG du Nord. |
2.3. Les mesures de restauration permettant datteindre le bon potentiel écologique
Si les solutions alternatives ne sont pas faisables techniquement et/ou ne représentent pas une meilleure option environnementale et/ou ont un coût disproportionné, il faudra passer à létape consistant à déterminer les mesures de restauration permettant datteindre non plus le Bon Etat écologique mais le Bon Potentiel écologique.
Pour cela, il convient dutiliser les mesures de restauration présentées dans la première partie du test.
3. Prochaines étapes
Ces tests ont permis didentifier les sources de données mobilisables et illustrer la méthode de calcul du bilan environnemental.
Les premières évaluations des bilans environnementaux présentées ci-dessus seront à compléter afin de comparer les émissions de CO2 de la solution de substitution après déduction des émissions de CO2 de la navigation actuelle, au gain pour lenvironnement lié à la réalisation du bon état de la masse deau.
Il conviendra également de finaliser la liste des mesures de restauration mais aussi de compléter le tableau des coûts avec lappui des services navigation du Nord-Est et de Strasbourg, les CSP et les DIREN.
Une fois toutes les mesures de restauration possibles identifiées, il faudra vérifier quelles ne sont toujours pas suffisantes pour atteindre le BEE pour les cas considérés (une pour Rhin-Meuse et deux pour Artois-Picardie).
Si tel est toujours le cas, il conviendra alors de motiver la désignation en MEFM sur la base de labsence de solution alternative, présentant un meilleur bilan environnemental et réalisable à un coût non disproportionné. Les données rassemblées au cours de ce test seront utilisées.
Les masses deau étant désignées en MEFM, il conviendra didentifier les mesures de restauration du bon potentiel écologique afin dexaminer leur faisabilité technique, de tenir compte des délais de réaction des milieux et de vérifier si elles ne sont pas dun coût disproportionné au regard des avantages retirés. Ces éléments permettront de motiver, là où nécessaire, des reports de délais de réalisation du bon potentiel.
Dans ce but, des coûts de restauration restent à préciser et à harmoniser au mieux les coûts déterminés par lAERM et lAEAP, en dégageant par exemple des fonctions de coût pouvant sappliquer nationalement.
Sources :
- Les Coûts externes des transports (2004), INFRAS/IWW ;
- ExternE - Externalities of Energy, www.externe.info ;
- Transport fluvial et fluvio-maritime, perspectives de développement du transport de marchandises à 20 ans (2000), VNF - Services des études économiques.
Annexe I : Létude INFRAS/IWW
Lentreprise suisse INFRAS et luniversité de Karlsruhe IWW ont publié en 2004 une étude intitulée « Les Coûts externes des transports ». Sappuyant sur les études les plus récentes au niveau européen et sur les méthodes dévaluation les plus avancées, cette étude vise à évaluer des coûts externes de nuisance des transports en fonction du nombre daccidents, du bruit, de la pollution atmosphérique, des risques de changement climatique, des coûts pour la nature et le paysage, des coûts additionnels en site urbain et du processus amont/aval.
Ces coûts sont évalués pour le transport routier, ferroviaire, fluvial et aérien.
Leurs conclusions sont présentées dans le tableau suivant :
MOYENS DE TRANSPORTS |
ROUTE |
FER |
VOIE DEAU |
AÉRIEN |
Coûts externes de nuisance en euros pour 1 000 Tkm |
87,8 |
17,9 |
22,4 |
271,3 |
Annexe IV : Désignation de MEFM au titre de la protection contre les inondations et le drainage des terres
LA DÉSIGNATION DES MASSES DEAU FORTEMENT MODIFIÉES (MEFM). TEST SUR LE CRITÈRE « RECTIFICATIONS - RECALIBRAGES DE GRANDE AMPLEUR ». LE CAS DE COURS DEAU DU VAL DALLIER
Contact pour plus dinformations : Hervé Gilliard, AELB.
Synthèse
Introduction
Objet
Le test mené dans le bassin Loire-Bretagne a porté sur des cours deau du val dAllier prédésignés masse deau fortement modifiée sur la base du critère rectifications - recalibrages de grande ampleur. Il sagit de modifications jugées significatives.
Pour mener à bien ce test, un groupe de suivi, composé des services du conseil général du Puy-de-Dôme, du conseil supérieur de la pêche Auvergne-Limousin, de la délégation Allier-Loire amont de lagence de leau Loire-Bretagne et de la direction régionale de lenvironnement Auvergne, a été constitué. Le pilotage a été assuré par la direction de lévaluation et de la prospective de lagence de leau Loire-Bretagne. Les réunions se sont déroulées à Clermont-Ferrand. Des visites de terrain ont été effectuées afin de mieux cerner les enjeux concernés. Le test sest déroulé sur quatre mois, de début mars à fin juin 2005.
Lobjectif du test était de réunir un maximum déléments utiles au déroulement de la démarche de désignation pour ce type de MEFM. Les investigations techniques ont donc été menées aussi loin que possible. Elles ont porté spécifiquement sur le diagnostic approfondi (aménagements initiaux, contexte socio-économique, état actuel du milieu), sur les mesures de restauration de la morphologie (impacts et coûts) et, de façon succincte et qualitative, sur les bénéfices associés aux mesures. Au-delà du test, il sagissait également de recueillir des données techniques et financières en matière dopérations de renaturation de cours deau.
Le critère de « rectifications - recalibrages de grande ampleur » dans le bassin Loire-Bretagne : le cas des MEFM de Limagne
Initialement, six masses deau prédésignées sur le critère unique de « rectifications - recalibrages de grande ampleur » ont été proposées pour le test, deux étant finalement retenues : le Bedat, 60 % de son linéaire étant concerné par le critère ; le Litroux, 80 % de son linéaire étant concerné par le critère.
En sus des cours deau dont les caractéristiques physiques ont été modifiées, le territoire de la plaine de Limagne est parcouru par un linéaire important de voies deau artificielles (fossés et canaux de drainage). Pour mieux se rendre compte de lampleur des aménagements réalisés, le rapport entre le linéaire des voies deau « artificielles » et des cours deau « naturels » a été effectué pour la partie des bassins versants du Bedat et du Litroux concernés par les travaux (cette limite correspond approximativement à celle des masses deau fortement modifiées) :
BASSIN VERSANT |
KM DE COURS DEAU NATURELS |
KM DE VOIES DEAU ARTIFICIELLES |
RAPPORT (ART./NAT.) |
Bedat |
93 |
118 |
1,27 |
Litroux |
45 |
39 |
0,87 |
Pour le Bedat, le ratio « linéaire de voies deau artificielles »/« linéaire de cours deau naturels » est de 1,27, pour le Litroux, il est de 0,87.
Ces proportions, très significatives, fournissent une illustration tangible du qualificatif « de grande ampleur ».
CARACTÉRISATION DÉTAILLÉE : UN PRÉALABLE NÉCESSAIRE
Facteurs à lorigine des aménagements de grande ampleur
Le recalibrage et la rectification de cours deau ont été mis en oeuvre à grande échelle dans le val dAllier autour de Clermont-Ferrand afin de lutter contre les inondations subites potentielles (canaux enterrés, cunettes couvertes, abaissement des niveaux deau) et de satisfaire les besoins de lépoque notamment en matière de développement cultural (chenalisation, approfondissement, suppression des méandres...).
Les travaux, qui se sont déroulés sur environ 20 ans, ont porté sur 250 kilomètres de cours deau, et représentent, en euros 2004, près de 80 millions deuros. Les travaux sur le Bedat, rivière à problématique urbaine et agricole, correspond à 10 % du total, les travaux sur le Litroux, à problématique essentiellement agricole, à 4 % du total.
Caractérisation socio-économique des activités
La prépondérance de lagriculture sur le territoire
La Limagne est en France une des zones de production privilégiée en semence de maïs (environ 5 000 hectares dans le département du Puy-de-Dôme, pour environ 50 000 hectares en France).
Le tableau suivant présente les estimations de la valeur des productions au prix de base pour le blé et le maïs dans les cantons traversés par le Bedat et le Litroux.
|
VALEUR de la production du blé en millions deuros (% du département) |
VALEUR DE LA PRODUCTION DU MAÏS en millions deuros (% du département) |
Bedat |
- 7 (14) |
- 8,4 (30) |
Litroux |
- 4,8 (10) |
- 3,7 (13) |
La protection des populations contre les inondations
Les plans de prévention des risques naturels prévisibles dinondation (PPRNPI) de lagglomération clermontoise concernent 11 communes, soit une population de 210 000 habitants. La proportion de superficie de la communauté dagglomération concernée par les aléas est estimée à environ 10 %.
La capacité utile des bassins dorage du Bedat (réalisés et prévus) est de lordre de 450 000 mètres cubes.
Précision sur les altérations des masses deau
La caractérisation détaillée de létat hydromorphologique actuel du Bedat et du Litroux a été effectuée pour lessentiel sur la base du réseau dévaluation des habitats (REH) mis en place par le Conseil supérieur de la pêche. Ce réseau permet de dresser un état des lieux du niveau daltération des habitats. Cette expertise standardisée est réalisée à léchelle du tronçon. Elle permet didentifier les couples « pression/perturbation » les plus significatifs et dévaluer les altérations associées.
Lévaluation est réalisée à partir des paramètres daltération de lhabitat en prenant en compte leur force (degré daltération) et létendue de leur influence sur le tronçon (linéaire affecté). Pour chacun des compartiments (débit, ligne deau, berges et ripisylve...), le niveau daltération retenu est donné par lexpertise globale des altérations de lhabitat.
Cest sur la base de ces éléments dévaluation quont été définies les mesures de renaturation pour contribuer à latteinte du bon état.
LES MESURES POUR TENDRE VERS LE BON ÉTAT
Plusieurs précisions sont nécessaires :
- les principales mesures visant la restauration des compartiments de la morphologie ont été privilégiées, le critère morphologique étant considéré comme le facteur déclassant principal ;
- les mesures éventuelles à mettre en uvre sur les annexes hydrauliques et les affluents nont pas été définies ;
- compte tenu des objectifs du test et des délais impartis, il na pas été possible dapporter un dimensionnement technique fin (en termes demprise, de localisation des interventions, en termes defficacité de laction, etc.) ;
- en labsence de définition précise du bon état, la classe « bon » du REH a été choisie comme objectif de référence pour définir les mesures.
Les mesures et leurs impacts sur les activités
Schématiquement, les mesures envisagées pour contribuer à latteinte du bon état consiste à recréer des méandres sur une portion donnée des cours deau, à stabiliser et végétaliser les berges et le lit, à mettre en place des épis, à créer des bandes enherbées et à faire des opérations de talutage. Ces différentes mesures ont été dimensionnées à partir dobjectifs de renaturation quantifiés. Le tableau suivant présente les coûts des mesures, estimés à partir dune batterie de coûts moyens recensés à loccasion du test, et les impacts de ces mesures sur les activités et services associés aux modifications hydromorphologiques (activité agricole et problème dévacuation des crues).
Les mesures et leurs impacts Un coût moyen de restauration de la morphologie (hors fonctionnement et hors travaux sur les affluents) estimé entre 6,5 et 13 millions deuros sur le Litroux, et entre 6 et 13 millions deuros sur le Bedat.
Des pertes de terres agricoles liées aux mesures estimées à 50 hectares sur le Litroux (exploitation de 60 hectares de taille moyenne) ; à 46 hectares sur le Bedat (exploitation de 50 hectares de taille moyenne).
Pas deffet sur les systèmes de drainage compte tenu des hypothèses de dimensionnement retenues.
Problème éventuel lié au ralentissement de lévacuation des crues (effet damplification dans les zones urbaines sur le Bedat), aux inondations dans la partie agricole et aux impacts sur les infrastructures (Bedat et Litroux).
Une qualification succincte des bénéfices
Cet aspect na pas fait lobjet dun traitement approfondi dans le cadre du test. Les bénéfices potentiels ont été qualifiés a minima. Les mesures de restauration de lhydromorphologie visant latteinte du bon état sur le Litroux et le Bedat se traduisent par des effets bénéfiques sur le milieu aquatique et lenvironnement humain immédiat (valeur paysagère, effet sur la pratique de pêche, etc.). On peut également mentionner la contribution positive que pourrait avoir le rétablissement de certaines zones inondables de crue sur les zones situées en aval des deux cours deau.
SYNTHÈSE DES CRITÈRES DAPPRÉCIATION
Les chiffres clés rassemblés dans le tableau de synthèse portent sur les opérations de recalibrage et de rectification effectuées sur le Bedat et le Litroux, sur la situation socio-économique actuelle, sur les mesures envisagées pour restaurer la morphologie et contribuer à latteinte du bon état, et sur les impacts. Pour mémoire, les éléments relatifs aux bénéfices des mesures, bien que très succincts, ont été rappelés.
Les ordres de grandeur et les ratios proposés constituent des critères dappréciation pour décider in fine du caractère fortement modifié des masses deau concernées par le critère de « rectifications - recalibrages de grande ampleur ».
Les travaux daménagement en Limagne 250 kilomètres de cours deau rectifiés en Limagne entre 1960 et le début des années 1980.
80 millions deuros de travaux daménagement, 10 % concernant le Bedat et 4 % concernant le Litroux.
4 000 hectares drainés entre 1960 et 1980, soit plus de 6 millions deuros de travaux : mise en place parfois exclusive en maïs.
Un linéaire important :
- concerné par le critère « rectifications - recalibrages de grande ampleur » : 60 % pour le Bedat et 80 % pour le Litroux ;
- de voies deau artificielles : environ 50 % pour la partie Est du bassin, versant du Bedat et pour le Litroux en aval de Ravel.
Situation socio- économique actuelle Les cantons du Bedat : 30 % de la production du maïs du Puy-de-Dôme (13 % pour les cantons du Litroux).
Taille moyenne dune exploitation agricole : 60 hectares sur le Litroux et 50 hectares sur le Bedat.
Une zone de production privilégiée de maïs semence (présence du groupe Limagrain, leader européen de semence de maïs ; France : leader européen) : près de 5 000 hectares dans le Puy-de-Dôme pour une surface de production française de 50 000 hectares.
210 000 habitants concernés par le PPRNPI ; 10 % de la superficie de lagglomération seraient concernés par les zones daléa.
Environ 14 millions deuros de travaux (faits ou prévus) pour linstallation de bassins dorage sur le Bedat.
Les mesures et leurs impacts
Un coût moyen de restauration de la morphologie (hors fonctionnement et hors travaux sur les affluents) estimé entre 6,5 et 13 millions deuros sur le Litroux, entre 6 et 13 millions deuros sur le Bedat.
Des pertes de terres agricoles liées aux mesures estimées à 50 hectares sur le Litroux ; à 46 hectares sur le Bedat.
Pas deffet sur les systèmes de drainage compte tenu des hypothèses de dimensionnement retenues.
Problème éventuel lié au ralentissement de lévacuation des crues (effet damplification dans les zones urbaines sur le Bedat), aux inondations dans la partie agricole et aux impacts sur les infrastructures (Bedat et Litroux).
Les bénéfices Une amélioration de la qualité des habitats et de la valeur attachée à un site (valeur paysagère ou encore valeur lié à la satisfaction dun usage de loisir).
Contribution à latténuation des crues en zone aval du fait du rétablissement de certains champs dexpansion.
En guise de conclusion, quelques éléments dappréciation peuvent être apportés :
- le contexte du test est spécifique, dans la mesure où les opérations de recalibrage et de rectification ont été effectuées à grande échelle : le pourcentage du linéaire concerné par ces travaux est très important ; le linéaire de voies deau artificielles créé sur le bassin versant des cours deau rectifiés est très significatif ;
- les mesures de renaturation remettent en cause les usages de façon partielle. Afin de voir si limpact de ces mesures est localement significatif, il serait notamment utile :
- sur le plan agricole, dexaminer la localisation des pertes de terres agricoles le long du linéaire concerné ;
- pour des masses deau comme le Bedat, de considérer le maintien dune capacité découlement des crues comme incontournable ;
A titre de comparaison, et afin dapprécier lampleur financière des opérations de renaturation, les coûts estimés de ces opérations peuvent être rapprochés des coûts de travaux de rectification et de recalibrage initiaux : ils sont globalement équivalents pour le Bedat, deux à trois fois plus élevés pour le Litroux.