NAPOLEON, Empereur des français, Roi d’Italie, Protecteur de la Confédération du Rhin, Médiateur de la Confédération Suisse ;

Sur le rapport de notre ministre de l'intérieur ;

Vu les plaintes portées par différents particuliers contre les manufactures et ateliers dont l'exploitation donne lieu à des exhalaisons insalubres ou incommodes ;

Le rapport fait sur ces établissements par la section de la chimie de la classe des sciences physiques et mathématiques de l'institut ;

Notre Conseil d'état entendu ;

Nous AVONS DECRETE et DECRETONS ce qui suit :

Article 1er du décret du 15 octobre 1810

A compter de la publication du présent décret, les manufactures et ateliers qui répandent une odeur insalubre ou incommode, ne pourront être formés sans une permission de l'autorité administrative : ces établissements seront divisés en trois classes.

La première comprendra ceux qui doivent être éloignés des habitations particulières ;

La seconde, les manufactures et ateliers dont l'éloignement des habitations n'est pas rigoureusement nécessaire, mais dont il importe, néanmoins, de ne permettre la formation qu'après avoir acquis la certitude que les opérations qu'on y pratique sont exécutées de manière à ne pas incommoder les propriétaires du voisinage, ni à leur causer des dommages.

Dans la troisième classe seront placés les établissements qui peuvent rester sans inconvénient auprès des habitations, mais doivent rester soumis à la surveillance de la police.

Article 2 du décret du 15 octobre 1810

La permission nécessaire pour la formation des manufactures et ateliers compris dans la première classe sera accordée, avec les formalités ci-après, par un décret rendu en notre Conseil-d'Etat.

Celle qu'exigera la mise en activité des établissements compris dans la seconde classe le sera par les préfets, sur l'avis des sous-préfets.

Les permissions pour l'exploitation des établissements placés dans la dernière classe seront délivrées par les sous-préfets, qui prendront préalablement l'avis des maires.

Article 3 du décret du 15 octobre 1810

La permission pour les manufactures et fabriques de première classe ne sera accordée qu'avec les formalités suivantes :

La demande en autorisation sera présentée au préfet, et affichées, par son ordre, dans toutes les communes, à cinq kilomètres de rayon.

Dans ce délai, tout particulier sera admis à présenter des moyens d'opposition.

Les maires des communes auront la même faculté.

Article 4 du décret du 15 octobre 1810

S'il y a des oppositions, le conseil de préfecture donnera son avis, sauf la décision au Conseil d'Etat.

Article 5 du décret du 15 octobre 1810

S'il n'y a pas d'opposition, la permission sera accordée, s'il y a lieu, sur l'avis du préfet et le rapport de notre ministre de l'intérieur.

Article 6 du décret du 15 octobre 1810

S'il s'agit de fabrique de soude, ou si la fabrique doit être établie dans la ligne des douanes, notre directeur des douanes sera consulté.

Article 7 du décret du 15 octobre 1810

L'autorisation de former des manufactures et ateliers compris dans la seconde classe ne sera accordée qu'après que les formalités suivantes auront été remplies.

L'entrepreneur adressera d'abord sa demande au sous-préfet de son arrondissement, qui la transmettra au maire de la commune dans laquelle on projette de former l'établissement ; en le chargeant de procéder à des informations de commodo et incommodo. Ces informations terminées, le sous-préfet prendra sur le tout un arrêté qu'il transmettra au préfet. Celui-ci statuera, sauf le recours à notre Conseil d'Etat par toutes parties intéressées.

S'il y a opposition, il sera statué par le conseil de préfecture, sauf le recours au Conseil d'Etat.

Article 8 du décret du 15 octobre 1810

Les manufactures ou établissements portés dans la troisième classe ne pourront se former que sur la permission du préfet de police, à Paris, et sur celle du maire dans les autres villes.

S'il s'élève des réclamations contre la décision prise par le préfet de police ou les maires, sur une demande en formation de manufacture ou d'atelier compris dans la troisième classe, elles seront jugées au conseil de préfecture.

Article 9 du décret du 15 octobre 1810

L'autorité locale indiquera le lieu où les manufactures ou ateliers compris dans la première classe pourront s'établir, et exprimera sa distance des habitations particulières. Tout individu qui ferait des constructions dans le voisinage de ces manufactures et ateliers après que la formation en aura été permise, ne sera plus admis à en solliciter l'éloignement.

Article 10 du décret du 15 octobre 1810

La division en trois classes des établissements qui répandent une odeur insalubre ou incommode, aura lieu conformément au tableau annexé au présent décret impérial. Elle servira de règle, toutes les fois qu'il sera question de prononcer sur les demandes en formations de ces établissements.

Article 11 du décret du 15 octobre 1810

Les dispositions du présent décret n'auront point d'effet rétroactif : en conséquence tous les établissements qui sont aujourd'hui en activité continueront à être exploités librement, sauf les dommages dont pourront être passibles les entrepreneurs de ceux qui préjudicient aux propriétés de leurs voisins ; les dommages seront arbitrés par les tribunaux.

Article 12 du décret du 15 octobre 1810

Toute fois en cas de graves inconvénients pour la salubrité publique, la culture, ou l'intérêt général, les fabriques et ateliers de premières classe qui les causent pourront être supprimés, en vertu d'un décret rendu en notre Conseil d'Etat, après avoir entendu la police locale, pris l'avis des préfets, reçu la défense des manufacturiers ou fabricants.

Article 13 du décret du 15 octobre 1810

Les établissements maintenus par l'article 11cesseront de jouir de cet avantage, dès qu'ils seront transférés d'un un autre emplacement, ou qu'il y aura une interruption de six mois dans leurs travaux. Dans l'un et l'autre cas, ils rentreront dans la catégorie des établissements à former, et ils ne pourront être remis en activité qu'après avoir obtenu, s'il y a lieu, une nouvelle permission.

Article 14 du décret du 15 octobre 1810

Nos ministres de l'intérieur et de la police générale, sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret, qui sera inséré au bulletin des lois.

NAPOLEON
Par l'Empereur :
Le Ministre Secrétaire d'état,
H. B. DUC DE BASSANO

Annexe : Nomenclature des Manufactures, Etablissements et Ateliers répandant une odeur insalubre ou incommode, dont la formation ne pourra avoir lieu sans une permission de l'Autorité administrative.

Etablissements et Ateliers qui ne pourront plus être formés dans le voisinage des habitations particulières, et pour la création desquels il sera nécessaire de se pourvoir de l'autorisation du Ministre de l'intérieur.

Amidonniers Fours à chaux
Artificiers Porcherie
Bleu de Prusse  Poudrette
Boyaudiers Rouissage de chanvre
Charbon de terre épuré Sel ammoniac
Charbon de bois épuré Soude artificielle
Chiffonniers Taffetas et toiles vernis
Colle-forte Tueries
Cordes à instruments Tourbe carbonisée
Cretonniers Triperies
Ecarrissage Echaudoirs
Eau-forte, acide sulfurique, etc. Cuirs vernis
Suif brun Cartonniers
Ménagerie Fabriques de vernis
Minium Fabrique d'huile de pied ou de corne de bœuf
Fours à plâtre  

Etablissements et Ateliers dont l'éloignement des habitations n'est pas rigoureusement nécessaire, mais dont il importe néanmoins de ne permettre la formation qu'après avoir acquis la certitude que les opérations qu'on y pratique sont exécutés de manière à ne pas incommoder les Propriétaires du voisinage, ni à leur causer des dommage. Pour former ces Etablissements, l'autorisation du préfet sera nécessaire.

Blanc de céruse Suif en branche
Chandeliers Noir d'ivoire
Corroyeurs Noir de fumée
Couverturiers Plomberies
Dépôts de cuirs verts Plomb de chasse
Distillerie d'eau-de-vie Salles de dissection
Fonderies de métaux Fabriques de tabac
Affinage des métaux au fourneau à manche Taffetas cirés
  Vacheries

Etablissements et Ateliers qui peuvent rester sans inconvénient auprès des habitations particulières, et pour la formation desquels il sera nécessaire de se munir d'une permission du Sous-préfet.

Alun Caractères d'imprimerie
Boutons Doreurs sur métaux
Brasseries Papiers peints
Ciriers Savonneries, etc.
Colle de parchemin et d'amidon Vitriols
Cornes transparentes  

Certifié conforme :

Le Ministre Secrétaire d'état,
H. B. DUC DE BASSANO

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