(JONC du 21 février 1980)


Introduction

Les industriels producteurs de déchets et les autorités administratives sont souvent embarrassés lorsqu'ils ont à choisir (pour les premiers) ou à autoriser (pour les seconds) une solution techniquement et économiquement acceptable pour éliminer certains déchets. Ils sont en particulier fréquemment conduits à examiner s'il est possible de mettre ces déchets en décharge moyennant certaines précautions ou s'ils présentent un caractère nocif tel qu'il est nécessaire de leur faire subir un traitement approprié.

La présente circulaire a pour objet de préciser dans quel cas il est possible d'éviter des traitements coûteux notamment en énergie, ou générateurs de nouvelles pollutions (atmosphériques par exemple) en procédant à une mise en décharge contrôlée; elle complète donc, pour les déchets industriels, les dispositions proposées pour les résidus urbains par la circulaire du 9 mars 1973.

Les déchets industriels peuvent être schématiquement classés en deux groupes :

Déchets industriels "banals ", pouvant être traités avec les ordures ménagères et dans les mêmes conditions. Ils peuvent ainsi être mis dans les décharges autorisées pour les résidus urbains. Cependant, il y a lieu d'éviter la multiplication des décharges sur le territoire. Par ailleurs, afin de permettre de meilleures conditions d'exploitation et un meilleur contrôle des déchets entrants, il est nécessaire que les décharges aient une capacité suffisante.

Il est donc souhaitable, dans la mesure du possible, de rechercher et (ou) d'autoriser, dans chaque région, un nombre limité de sites capables de recevoir simultanément les résidus urbains et les déchets de l'industrie qui leur sont assimilables. Ces sites devraient recevoir environ 30000 tonnes par an de déchets.

Déchets industriels "spéciaux" tels qu'ils sont définis dans le décret du 19 août 1977, pris en application de l'article 8 de la loi du 15 juillet 1975 pouvant être à l'origine d'atteintes particulières pour l'environnement. Certains d'entre eux peuvent être mis en décharges moyennant un certain nombre d'obligations concernant notamment les modalités d'exploitation à imposer, le contrôle des déchets entrants, la surveillance à long terme. Dans l'immédiat, il est nécessaire d'ouvrir au moins une décharge par région apte à recevoir certains déchets industriels spéciaux, ainsi que les ordures ménagères et les déchets industriels banals utiles à la conduite de l'exploitation de la décharge. Dans certains cas, compte tenu des conditions locales, il pourra être nécessaire de prévoir deux ou trois sites ou même davantage dans les régions très industrialisées. Conçues comme des installations de traitement collectif, ces décharges devront, le cas échéant, être soumises à agrément. En attendant la publication du décret relatif aux conditions d'agrément des installations d'élimination des déchets industriels spéciaux prévues à l'article 9 de la loi du 15 juillet 1975, la direction de la prévention des pollutions devra être consultée avant toute délivrance d'autorisation.

I. Choix du site

Un site favorable, apte à recevoir une gamme étendue de déchets spéciaux, constitue l'élément fondamental pour une décharge de déchets industriels. Ce choix est évidemment fonction des déchets concernés, mais doit également prendre en compte un certain nombre de paramètres concernant le site, dont il convient d'établir la liste et de préciser l'importance relative. L'annexe I détaille et hiérarchise les différents paramètres qui doivent être pris en considération dans le choix du site.

L'approche proposée s'appuie sur des expériences menées en France et dans divers pays étrangers. Elle permet de classer les sites en quelques catégories et de leur associer une gamme de déchets admissibles ou à exclure en fonction de leur quantité, de leur solubilité, de leur toxicité, de leur concentration, etc. Il est possible de considérer trois types de sites, en fonction des propriétés de perméabilité de la couche géologique située immédiatement sous le fond de décharge :
1° Les sites imperméables qui assurent un confinement convenable de déchets et des lessivats et qui doivent en particulier pouvoir accueillir certains déchets spéciaux.
2° Les sites semi-perméables qui assurent une migration lente du lessivat à travers une zone non saturée d'épaisseur suffisante, et qui pourront principalement recevoir les déchets industriels assimilables aux ordures ménagères.
3° Les sites perméables qui permettent une migration rapide du lessivat, et qui devront être écartés pour les déchets industriels.

Dans la pratique, ces classes ne peuvent être définies de façon aussi tranchée. Néanmoins, une telle classification générale constitue un guide utile, si elle est correctement utilisée.

II. Admissibilité des déchets spéciaux

Les arrêtés d'autorisation, pris en application de la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l'environnement, des décharges pour déchets spéciaux devront comporter une liste des déchets interdits sur le site (liste négative) et une liste limitative des déchets pouvant être admis (liste positive). Le cas échéant, les arrêtés pourront prescrire un conditionnement préalable (cas des déchets pulvérulents notamment). Compte tenu de la difficulté à définir certains types de déchets, les arrêtés pourront également faire référence à l'origine du déchet. Bien évidemment, les listes qui figureront dans l'arrêté d'autorisation devront tenir compte de la nature précise du déchet, des quantités en cause, et des caractéristiques précises du site. Par ailleurs, I'arrêté prévoira une clause précisant que tout déchet non mentionné dans l'une de ces deux listes fera l'objet d'un accord délivré au "coup par coup" par la direction interdépartementale de l'industrie. Ces listes devront être mises à jour annuellement par arrêté complémentaire pris dans les formes prévues à l'article 18 du décret n°77-1133 du 21 septembre 1977 en fonction notamment des résultats des recherches qui sont ou pourront être menées et des contrôles effectués sur le site.

Afin de vous aider à élaborer les arrêtés d'autorisation, vous trouverez en annexe II la liste des déchets devant être refusés sur les différents types de sites.

Dans les sites dits de classe 1, les déchets liquides ou les boues à teneur en extrait sec inférieur à 15 % ne pourront être autorisés que dans les conditions compatibles avec le bilan hydrique sur le site.

Dans les sites de classe 2, il parait possible d'admettre des boues, ou à la rigueur des liquides en se limitant à des produits organiques susceptibles de se dégrader, et en les mélangeant en petite proportion à des déchets solides. Les solutions minérales toxiques doivent être interdites, comme l'indique l'annexe II. Cependant, des quantités limitées de boues minérales (notamment boues d'hydroxydes métalliques) pourront, le cas échéant, être admises.

III. Aménagement, exploitation, contrôle

Il appartient à l'inspection des installations classées, en liaison avec le service de police des eaux, de définir avec précision, en tenant compte des différents facteurs évoqués précédemment, les aménagements à prévoir, les règles d'exploitation à imposer et les moyens de contrôle à mettre en place. L'annexe III détaille les divers aspects de ce problème.

Les aménagements préconisés par la circulaire du 9 mars 1973 relative aux décharges contrôlées de résidus urbains doivent bien évidemment être également imposées aux décharges de déchets industriels. Afin d'assurer un contrôle des quantités et de la nature des déchets apportés, un poste de contrôle devra être implanté à l'entrée de la décharge et être équipé en moyens d'analyses appropriés. Une attention particulière sera portée aux aménagements relatifs à la prévention de la pollution des eaux. Enfin, I'aménagement final de la décharge, nécessaire aussi bien pour limiter les infiltrations que pour permettre la réinsertion de la décharge dans son cadre, devra être prévu dès l'origine de façon précise.

Les contrôles à prévoir sont de deux ordres :

  • contrôle de la quantité et de la nature des déchets entrants. Il impose de soumettre la mise en décharge de déchets spéciaux à un système de déclaration, tel que cela est prévu en application du décret n° 77-974 du 19 août 1977. Pour tous les types de déchets, un contrôle de laboratoire et visuel devra permettre de vérifier que le déchet est bien "admissible". En outre, des analyses inopinées devront avoir lieu, à l'initiative du service chargé du contrôle des installations classées et aux frais de l'exploitant;
  • contrôle de l'évolution de la décharge et de la qualité des eaux. La mise en place de puits d'observation est en particulier une nécessité absolue, quelle que soit la nature du site.

Ces règles générales devront, le cas échéant, être complétées par la prise en considération des caractéristiques particulières du site concerné et des déchets susceptibles d'y être admis.

Annexe I : Classification des sites, critères d'évaluation

Objet

L'objet de la présente annexe est de préciser les caractéristiques des trois grandes classes de sites au regard de la protection des eaux. On y indique les principaux paramètres à prendre en compte dans l'évaluation de l'aptitude des sites à une exploitation de décharges. Les principales précautions spécifiques aux décharges de chaque type y sont également mentionnées;

1° Il convient tout d'abord de définir l'appartenance d'un site à l'une ou l'autre des catégories. Le critère essentiel à examiner sera la valeur moyenne du coefficient de perméabilité K des formations non saturées constituant le substratum de la future décharge.

Un site pourra être considéré de classe 1 si le substratum contient sur toute l'étendue de la future décharge un niveau dont le coefficient de perméabilité K est égale ou inférieure à 10-9 mètres/seconde, et dont l'épaisseur est au moins équivalente à 5 mètres.

Dans les mêmes conditions, un site appartenant à la classe 2 avec des niveaux de présentation des valeurs de K comprises entre 10-9 et 10-6 mètres/seconde.

Les sites présentant un substratum à perméabilité de fissures, ou un coefficient K moyen supérieur à 10-6 mètres/seconde, appartiendront à la classe 3.

2° Les limites des différentes classes peuvent dans certains cas être appréciées en admettant une certaine modulation (1 puissance de 10) des valeurs du coefficient si l'étude du site met en évidence les critères secondaires suivants : grande épaisseur des formations à faible perméabilité; faible importance des ressources aquifères souterraines; topographie locale permettant un drainage et une évacuation des eaux vers une zone non sensible.

1. Sites de 1ère classe ou sites imperméables

L'attention doit être portée en priorité sur le bilan des eaux entrant et sortant du site. Sous la plupart des climats en France, les eaux météoriques incidentes sur la surface d'un site au cours d'une année dépassent en quantité celles qui peuvent être réexportées par évaporation. Deux considérations devront alors guider le choix d'un site imperméable :

  • le caractère effectif de l'étanchéité du fond de décharge;
  • la possibilité de mettre en oeuvre une évacuation sans nuisance de l'excédent des précipitations par rapport au potentiel d'évaporation.

A. Caractéristiques du fond de décharge

Quelles que soient les précautions prises, et au moins pendant la durée de l'exploitation, une partie de l'eau reçue percolera à travers les déchets stockés et viendra jusqu'au fond de la décharge. Les caractéristiques de celui-ci devront garantir :

Qu'il n'y ait pas accumulation de cette eau sur des épaisseurs dépassant quelques dizaines de centimètres Cela exige que soit réalisable un façonnage du fond de décharge garantissant l'écoulement vers un ou plusieurs points bas (drains et pente);

Que la hauteur d'eau susceptible dans le cas le plus défavorable (accumulation de l'ordre de 1 mètre) de s'infiltrer à travers le fond de décharge vers les couches sous-jacentes ne dépasse pas quelques millimètres par an. Pour cette faible quantité de lessivat un captage des éléments polluants qu'elle contient sera possible dans les couches non saturées sous-jacentes.

L'imperméabilité artificielle d'un fond de décharge par un revêtement, même si elle peut être parfois admise lorsque aucun site naturel satisfaisant n'est disponible, rend indispensables les mêmes garanties de collectabilité des eaux, en amont et en aval du revêtement.

B. Bilan hydrique

Pour déterminer quelle pourra être la destination des lessivats recueillis aux points bas du fond de décharge, il est nécessaire d'établir le bilan prévisionnel des entrées et des sorties d'eau dans l'excavation à exploiter.

Supposant écartés, Ie cas échéant, par des drainages appropriés, les apports d'eaux de ruissellement venus de l'extérieur du site, ce bilan comporte principalement :

  • Les précipitations;
  • L'eau incluse dans les déchets dont le stockage est envisagé;
  • L'évaporation et l'évapotranspiration;
  • Le ruissellement superficiel;
  • La variation des réserves dans le sol de couverture.

Ce bilan devra être effectué par périodes mensuelles et cumulé sur la durée de la période d'exploitation prévue et la période postérieure à la couverture finale jusqu'à instauration d'un régime permanent. Il ne prendra en compte que les eaux polluées par leur percolation à travers des déchets; celles qui auront ruisselé soit sur la couche finale de recouvrement. soit sur le fond de décharge non encore recouvert, pourront être évacuées sans traitement.

Compte tenu du bilan indiqué, I'arrêté d'autorisation devra prescrire les aménagements nécessaires pendant la durée d'exploitation de chaque partie de la décharge (couvertures intermédiaires, nature, pente et couverture végétale de la couverture finale). Une couverture finale étanche ne pourra être acceptée qu'après un délai suffisant pour que le volume des émissions gazeuses issues de la décharge soit devenu très faible, ou en prévoyant le mode d'évacuation de ces gaz.

C. Evacuation des lessivats

La détermination du bilan hydrique permettra de choisir le mode d'évacuation des eaux polluées par leur percolation à travers les déchets.

Si l'excédent du bilan hydrique est faible (200 mm/an) dans les conditions d'exploitation et de couverture retenues, il pourra suffire de favoriser l'évaporation par un dispositif de relevage et d'aspersion. L'évaporation réelle pourra alors, sur la surface où est effectuée cette aspersion, ne pas être sensiblement inférieure à l'évaporation potentielle. Cela exigera en général que les précipitations ne dépassent pas 750 mm/an.

Dans les autres cas, il sera nécessaire de traiter les eaux polluées avant leur rejet au milieu naturel. Si un ouvrage de traitement in situ est prévu, la technique de traitement devra être adaptée à la nature des déchets admis. En général, elle devra être capable d'éliminer à la fois la pollution organique et la pollution minérale.

On obtiendra une meilleure fiabilité du traitement en acheminant par une canalisation les eaux polluées recueillies jusqu'à une station d'épuration urbaine ou industrielle.

D. Critères d'évaluation d'un site

Les principaux critères d'évaluation d'un site de 1ère classe seront donc :

Caractéristiques indispensables

1° Imperméabilité du fond de décharge.
2° Aptitude du site à un façonnage garantissant les écoulements en fond de décharge vers un point bas.
3° Aptitude à l'implantation d'un ouvrage de contournement évitant les entrées d'eaux de surface.
4° Aptitude à une couverture finale en pente favorisant le ruissellement.

Caractéristiques souhaitables

1° Précipitations limitées, inférieures à 750 mm/an;
2° Possibilité de raccordement à une station d'épuration existante sans en perturber le fonctionnement.

2. Sites de 2ème classe ou semi-perméables

Il s'agit de sites qui n'assurent aucun confinement mais autorisent la migration à faible débit du lessivat de telle sorte que des processus naturels de captage ou de dégradation des éléments polluants apparaissent avant que ce lessivat n'atteigne la nappe souterraine De tels sites sont acceptables, notamment pour des matières dégradables (par exemple : ordures ménagères et déchets industriels assimilables).

Un site idéal pourrait, par exemple, surmonter une couche de sable ou de limon à travers laquelle le flux est intergranulaire, et dans laquelle existe une importante zone non saturée. Le débit à travers cette zone est très nettement inférieur à celui qui existerait dans une zone saturée. Elle contient de plus de l'oxygène favorable à une dégradation biologique des composés organiques présents dans le lessivat.

Ce site doit être suffisamment loin de points de captages d'eau, de telle sorte que la dilution des produits solubles de fin de dégradation soit suffisante.

Les paramètres intervenant dans l'évaluation des sites de cette classe seront par ordre d'importance décroissante :

1° La capacité de la zone non saturée, à assurer une épuration des lessivats issus de la décharge, et qui sera déterminée par :

  • L'épaisseur de la zone non saturée comprise entre Ie fond de la décharge et le niveau saisonnier Ie plus élevé de la nappe, et qui devra nécessairement et impérativement être supérieure à 5 mètres. Une épaisseur supérieure, de l'ordre des dizaines de mètres est évidemment un facteur favorable;
  • La granulométrie et la perméabilité de différentes couches de cette zone non saturée dont les valeurs faibles à l'intérieur de l'intervalle définissant la classe 2 seront plus favorables que les valeurs fortes en raison de la corrélation entre la perméabilité, I'effet de filtration mécanique et l'effet d'épuration biologique;
  • La capacité d'absorption, déterminée principalement par la capacité d'échange cationique et l'absence de matières.

Dans Ie cas de la mise en décharge de déchets contenant des métaux, la présence d'argile à une teneur au moins égale à 3 % offrira une capacité d'échange cationique permettant de capter de grandes quantités de métaux, à condition que la teneur en matières organiques soit faible.

Certains types d'argiles (montmorillonites chlorites, illites, interstratifiés) agiront plus efficacement que d'autres (kaolinites).

2° L'infiltration potentielle résultant du bilan d'eau effectué comme pour les sites de classe 1. Une hauteur d'eau infiltrée modérée après la couverture finale sera un facteur favorable.

3° L'intérêt plus ou moins grand de garantir la protection des eaux souterraines contre les pollutions. La présence d'une nappe durablement inutilisable est un facteur très favorable. Inversement, on évitera les risques vis-à-vis de nappes exploitées ou exploitables présentant un intérêt.

3. Sites de 3ème classe ou perméables

Ces sites sont tels qu'ils permettent une migration des lessivats à un taux empêchant une atténuation significative et constituant par conséquent un risque aigu de pollution des nappes. De nombreuses couches géologiques fournissent des exemples de ce type de phénomène (formations calcaires fissurées, dépôts alluvionnaires grossiers, etc.).

De tels sites ne peuvent convenir que pour des déchets inertes et sont donc à proscrire pour les autres déchets.

Annexe II : Déchets devant être refusés sur les différents types

I. Déchets devant être refusés dans les sites de classe 1

Sont à exclure les déchets dont les eaux de lessivage présenteraient un haut degré de toxicité ou de nocivité dans les eaux :

  • Arsenic et boues arsénieuses;
  • Biocides;
  • Fluides de coupe;
  • Liquides ou boues contenant une proportion importante d'hydrocarbures (10 à 15 %);
  • Sels solubles de métaux lourds (notamment bains usés de traitement de surface);
  • Solutions cyanurées et sels de trempe;
  • Solvants organiques;
  • PCB.

Sont également à exclure les déchets dont la manipulation entraîne des dangers immédiats, ou dont la réactivité vis-à-vis des déchets de type courant entraîne des dangers immédiats ou différés :

  • Explosifs;
  • Liquides inflammables;
  • Substances radioactives;
  • Acides et bases.

Il. Déchets devant être refusés sur les sites de classe 2

Les déchets à exclure des sites de classe 1 doivent l'être également des sites de classe 2 pour les mêmes raisons.

Doivent de plus être exclus. Ies déchets susceptibles de charger les eaux de percolation d'éléments polluants non dégradables ou non captables dans les couches qu'elles traversent avant d'atteindre la nappe souterraine;

Sels solubles non toxiques sauf si on se trouve au-dessus d'une nappe saumâtre ou dont la pollution saline est acceptable;

Bains usés et boues pompables telles que celles provenant des teintureries, tanneries, papeteries, et autres liquides contenant des éléments polluants organiques et minéraux.

Annexe III : Aménagements des décharges de déchets industriels

Les aménagements prescrits dans la circulaire du 9 mars 1973 relative aux décharges contrôlées de résidus urbains s'imposent généralement également aux décharges de déchets industriels. Cette annexe détaille les points sur lesquels des modifications ou des compléments sont à apporter, notamment pour les décharges recevant des déchets industriels "spéciaux".

1. Aménagements généraux

Parmi les aménagements préconisés par la circulaire du 9 mars 1973, il paraît utile de rappeler l'importance des dispositions prises pour préserver l'aspect des abords immédiats de la décharge :

  • Un écran de végétation masque l'exploitation aux vues extérieures lorsque le site n'est pas suffisamment isolé;
  • L'accès de la décharge s'effectue par des voies suffisamment importantes permettant une circulation quelles que soient les conditions climatiques, et une aire d'attente permet d'éviter les files de camions sur la voie publique;
  • L'usage d'un décrotteur (par voie sèche de préférence) et l'aménagement des voies intérieures propres et accessibles en toute saison doivent permettre de maintenir la voirie extérieure en constant état de propreté.

2. Aménagements relatifs à la prévention de la pollution des eaux

2.1. Limitation du flux polluant

Les garanties présentées par le site ayant été reconnues suffisantes pour pouvoir y déposer des déchets industriels spéciaux, il importe de limiter le flux polluant qui résulte de la percolation des eaux à travers la décharge. Ainsi dans le cas d'une décharge située dans une dépression, toute disposition (drainage, digues de protection, etc.) devra être prise pour éviter que les eaux des pentes voisines ne ruissellent vers la décharge.

Dans le cas des sites de 2ème classe, le flux polluant peut être réduit en disposant au fond de la décharge une couche de matériaux filtrants. Le choix de ces matériaux pourra résulter de l'étude géologique mais sera également conditionné par la nature des déchets déposés. Par exemple, des matériaux sableux seront aptes à favoriser la dégradation d'une pollution organique.

Par contre, les techniques d'imperméabilisation artificielle de la base d'une décharge avec récupération des eaux de percolation ne doivent être développées que quand le fond de la décharge n'est pas suffisamment distant des eaux souterraines. En effet, les phénomènes physiques ou chimiques (absorption, neutralisation, dégradation, etc.) qui se produisent naturellement dans la zone non saturée d'un site et qui permettent un écoulement lent des eaux de lixiviation devront être reproduits artificiellement en station de traitement. Les mesures coûteuses d'étanchéification ne font donc que créer un nouveau problème technique dont la solution ne sera sans doute pas simple. Il faut donc réserver étroitement cette technique au cas où seul un site la rendant nécessaire a pu être retenu.

Lorsque le drainage des eaux de percolation d'une décharge ne pourra cependant pas être évité, des normes de qualité et de flux seront imposées au rejet éventuel en fonction de l'utilisation du milieu récepteur. Ces eaux devront être dirigées vers un bassin de stockage où il sera possible de contrôler leur qualité avant rejet et après traitement si nécessaire.

Le recyclage par aspersion sur la décharge est souvent à préconiser. Sa mise en oeuvre suppose que cette aspersion soit réalisée en dehors des périodes de pluie et sur une partie de la décharge suffisamment remblayée. Cette solution nécessite la mise en place d'un stockage des eaux d'infiltration correspondant à au moins un mois de forte pluviosité.

2.2. Piézomètres de contrôle

Pour les sites de classe 1, un piézomètre situé au sein même de la décharge sera destiné à contrôler en permanence le niveau des eaux accumulées au-dessus de la couche de faible perméabilité.

Indépendamment du type de site, I'aménagement d'une décharge de déchets industriels devra être complété par la mise en place de piézomètres destinés à contrôler la qualité des eaux. Les emplacements de ces puits de contrôle déterminés par un hydrogéologue tiendront compte du sens d'écoulement des eaux souterraines et de la position d'éventuels captages.

Au nombre de trois ou quatre, ils seront placés à des distances variables depuis la périphérie de la décharge jusqu'à environ 200 mètres. Cette distance limite pourra évidemment être fonction de conditions géologiques particulières et de la vitesse d'écoulement des eaux souterraines.

Le réseau ainsi constitué sera complété, le cas échéant, par de nouveaux ouvrages pour tenir compte de l'évolution éventuelle des résultats obtenus lors des analyses effectuées ou de modifications survenant dans l'exploitation des eaux souterraines au voisinage de la décharge.

2.3. Elimination des gaz de fermentation

Il est maintenant bien connu que les fermentations anaérobies des produits mis en décharge, notamment les ordures ménagères et les déchets banals, donnent naissance à des gaz tels que ammoniac (NH3), gaz carbonique (CO2) et méthane (CH4).

La production de méthane est souvent assez longue à se manifester, mais elle est pratiquement inévitable. Son élimination se réalise sans inconvénients majeurs dans les décharges peu compactées ou de faible épaisseur. La présence de fortes quantités de sablon mêlé aux déchets semble faciliter également la dispersion et l'exhalaison de ce gaz.

Dans les décharges fortement compactées, la formation de méthane est plus tardive et s'accompagne parfois malheureusement d'odeurs fétides résultant de la présence de faibles quantités d'hydrogène sulfuré (H2S) ou de mercaptans.

Il convient donc de prévoir le drainage des gaz par la mise en place de buses verticales à parois perforées. Ces conduites seront lestées intérieurement de pierres pour en éviter le renversement sans empêcher la remontée des gaz. Le rayon d'efficacité des buses verticales pour la captation des gaz est d'environ 50 mètres, il est donc recommandé de les placer en quinconce à 80 mètres de distance les unes des autres.

Le méthane collecté pourra soit être récupéré après lavage si l'intérêt économique de cette valorisation est démontré, soit brûlé dans une torche.

2.4. Aménagement final

Les caractéristiques physiques et géométriques exigées de la décharge terminée seront précisées dès l'arrêté d'autorisation. Il est donc nécessaire de connaître dès le départ quelle sera la destination finale de la décharge.

La couche finale de recouvrement d'exploitation qui sera mise en place rapidement au fur et à mesure de l'avancement de la décharge, devra être conçue de façon à limiter les infiltrations. Pour y parvenir Ies techniques suivantes peuvent être développées :

  • Recouvrement de la décharge par une couche de matériaux peu perméables surmontés d'un sol engazonné et planté pour favoriser l'évapotranspiration;
  • Mise en pente légère de la dernière couche pour favoriser le ruissellement vers l'extérieur de la décharge;

Dans le cas d'une couverture définitive étanche, il faudra soit ne la réaliser qu'après un délai suffisant, soit prévoir le mode d'évacuation des gaz issus de la décharge.

3. Exploitation de la décharge de déchets industriels

3.1. Contrôle des déchets à l'entrée

L'expérience montre qu'actuellement le contrôle de l'entrée de la décharge se limite à une appréciation très approximative du volume des déchets apportés, excluant tout contrôle qualitatif. Il est maintenant nécessaire de prévoir dans les arrêtés d'autorisation des procédures permettant un meilleur contrôle des déchets entrants. Il est cependant évident que la nature de ce contrôle sera différente selon qu'il s'agit de déchets dits "banals" ou de déchets "spéciaux".

Contrôle quantitatif :

L'utilisation du paramètre "volume" comporte trop d'imprécisions et ne tient pas compte des importantes variations de densité des déchets industriels. La pesée paraît donc être la seule mesure capable d'indiquer de façon précise les quantités de déchets mis en décharge. Cette pesée n'exclut d'ailleurs pas qu'il existe une tarification adaptée à la densité des déchets.

Contrôle qualitatif :

Le contrôle qualitatif doit permettre de s'assurer que les déchets acceptés appartiennent exclusivement à la liste des déchets autorisés et de vérifier l'absence de déchets toxiques prohibés. La procédure liée à ce contrôle restera cependant simple et rapide, le poste implanté à l'entrée de la décharge n'ayant pas pour but de procéder à des analyses complexes ou à l'identification de déchets inconnus.

Afin de faciliter le contrôle au moment de la mise en décharge, et de bien définir les responsabilités en cas d'accident, Ies producteurs de déchets dits "spéciaux" figurant dans l'arrêté d'autorisation de la décharge devront faire une demande préalable à l'exploitant de la décharge. Cette demande comportera toutes les indications relatives à l'origine, I'aspect et la composition des déchets concernés. Les déchets dits "banals" doivent évidemment être dispensés de la déclaration préalable.

Les mesures de contrôle à l'entrée devront comporter :

Pour les déchets industriels spéciaux, des vérifications, à caractère systématique ou non, ayant pour but de s'assurer que les déchets soumis à autorisation préalable répondent au descriptif initial. Ces vérifications inopinées peuvent prendre la forme d'un prélèvement pour analyse complète postérieure ou de tests rapides effectués sur le site (pH, siccité des boues, détection de Cr Vl dans les boues détoxiquées...) et pour lesquels le poste de contrôle devra être équipé.

Les contrôles seront systématiquement exercés vis-à-vis des résidus liquides dont la mise en décharge sera autorisée.

Dans tous les cas, le dépôt d'un bon indiquant la nature et la provenance du déchet, et un contrôle visuel qui permette de vérifier que la forme physique du déchet répond aux contraintes d'admission sur la décharge ou de vérifier que le déchet n'était pas soumis à déclaration préalable.

A l'entrée de tout déchet sur la décharge, les indications suivantes seront donc notées :

  • Provenance (nom de l'industrie);
  • Nom du transporteur;
  • Poids;
  • Nature (en mentionnant l'autorisation préalable accordée si nécessaire);
  • Tests éventuels effectués;
  • Lieu et condition de mise en dépôt sur la décharge.

3.2. Mise en décharge

La mise en décharge proprement dite sera soumise aux dispositions de la circulaire du 9 mars 1973 prescrivant en particulier l'exploitation par couches de déchets d'épaisseur modérée, compactées, recouvertes au minimum journellement par des matériaux inertes (terres, gravats, mâchefers).

Il semble que, compte tenu de l'hétérogénéité des déchets industriels, de bons résultats soient obtenus sur les décharges compactées qui utilisent des engins spéciaux, capables d'assurer le tassage et le déchiquetage des déchets par des passages répétés. Sur ce type de décharge l'épaisseur des couches successives de déchets ne dépasse pas 20 centimètres à 50 centimètres après compactage.

L'aire de déversement doit prendre la forme d'une alvéole (encore appelée casier d'exploitation) limitée par des talus de terre ou de matériaux inertes dont la hauteur sera toujours supérieure à celle de la couche de déversement. L'ensemble de la décharge sera ainsi divisé en alvéoles comblées successivement. Cette technique permet de laisser à la vue une aire de déversement limitée, de supprimer les talus inesthétiques et difficiles à recouvrir, de rendre aisé le recouvrement.

Un plan, qui sera rigoureusement suivi, devra organiser la répartition des déchets sur la décharge en fonction de leur nature. Les règles suivantes peuvent être préconisées :

  • Les déchets les moins polluants et, dans la mesure du possible les plus perméables seront déposés à la base de la décharge; ceux qui contiennent des éléments polluants susceptibles d'être lessivés seront déchargés dans la partie haute. Ceci suppose donc que plusieurs alvéoles (deux ou trois) soient exploitées simultanément à des stades différents;
  • Certains mélanges devront être évités. Par exemple, les boues d'hydroxydes métalliques ne seront pas mises en contact avec des déchets à caractère acide, au contraire d'autres mélanges peuvent se révéler tout à fait souhaitables (dépôts de sels métalliques avec des déchets à caractère faiblement alcalin);

La capacité de rétention des ordures ménagères et déchets assimilables sera mise à profit pour éliminer des déchets non pelletables et des déchets contenant des hydrocarbures. Il faut donc bien remarquer que la quantité de boues non pelletables qui pourra être éliminée est directement liée à la quantité d'ordures ménagères et déchets assimilables reçus, le remblaiement obtenu devant permettre le roulage des engins.

De plus, si certains déchets solides peuvent être utilisés pour absorber des résidus pompables, il convient cependant de s'assurer en permanence que le taux de saturation ne peut pas être atteint et limiter en conséquence, les quantités de liquides et de boues admissibles.

La mise en décharge des déchets pompables ne peut pas être effectuée par simple déversement sur la partie en cours d'exploitation. La meilleure méthode consiste à déverser ces déchets dans des lagunes ou des tranchées aménagées au sein d'une zone déjà comblée par des ordures ménagères. Ces lagunes ou tranchées resteront d'une surface limitée et devront permettre une absorption rapide des liquides. Elles seront refermées et comblées de matériaux inertes dès que la percolation des liquides deviendra insuffisante.

La répartition et les conditions de dépôt devront également tenir compte des dangers que peuvent présenter certains déchets vis-à-vis des personnes qui assurent la mise en décharge. Le personnel d'exploitation devra, en tout état de cause, être particulièrement averti de tous les dangers éventuels des déchets à éliminer.

3.3. Contrôle de la qualité des eaux souterraines

Avant l'ouverture de la décharge, une campagne d'analyses devra fournir les données nécessaires à une bonne connaissance de la qualité initiale des eaux souterraines et; à une appréciation correcte de leur évolution au cours de l'exploitation et après le réaménagement.

En cours d'exploitation, la qualité des eaux souterraines ou superficielles fera l'objet d'analyses trimestrielles, cependant; cette périodicité pourra être revue dans un sens ou dans l'autre, en fonction de l'éventuelle évolution des résultats enregistrés sur chaque piézomètre. Les résultats des analyses seront transmis au service chargé du contrôle.

En ce qui concerne les analyses demandées, elles comprendront au minimum les analyses physiques et chimiques du type 2, définies à l'annexe C de la circulaire du 15 mars 1962, relative aux instructions générales concernant les eaux d'alimentation.

L'oxydabilité au permanganate de potassium sera de préférence remplacée par les mesures de la DBO5 et de la DCO.

D'autres analyses caractéristiques des déchets acceptés sur la décharge pourront être envisagées et, notamment :

  • Une analyse bactériologique;
  • Le dosage de certains ions métalliques;
  • Le dosage des phénols et des hydrocarbures.

Le choix de l'organisme chargé des prélèvements et du laboratoire où seront effectuées les analyses sera soumis à l'accord de la direction interdépartementale de l'industrie.

L'exploitant, après la fin d'exploitation de la décharge, devra assurer un contrôle des eaux souterraines. La durée de cette obligation sera imposée jusqu'à ce que les résultats des analyses effectuées soient compatibles avec les normes de rejets dans le milieu naturel. L'exploitant devra également assurer l'entretien des ouvrages de collecte et de traitement de ces eaux.

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