(JO n° 175 du 29 juillet 2005)


NOR : DOMX0500126P

Monsieur le Président,

Le c du 7° du I de l’article 62 de la loi de programme pour l’outre-mer (n° 2003-660 du 21 juillet 2003) habilite le Gouvernement à actualiser et à étendre à Mayotte par ordonnance prise sur le fondement de l’article 38 de la Constitution, avec les adaptations nécessaires, les dispositions relatives au droit domanial, au droit foncier, au droit de l’urbanisme et plus particulièrement à la protection, l’aménagement et la mise en valeur de la zone dite des cinquante pas géométriques.

La présente ordonnance crée, dans le code de l’urbanisme, un nouveau livre VII consacré à Mayotte. Elle procède parallèlement à l’abrogation du code local de l’urbanisme institué à Mayotte par l’ordonnance n° 90-571 du 25 juin 1990. Ce dernier n’a en effet pas fait l’objet d’actualisation et ne tient pas compte d’importantes évolutions du droit de l’urbanisme issues de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains et de la loi n° 2003-590 du 2 juillet 2003 « urbanisme et habitat ».

La présente ordonnance prend d’autre part en compte l’évolution statutaire de Mayotte conformément à l’accord dit « de Paris » du 27 janvier 2000 et à loi n° 2001-616 du 11 juillet 2001 relative à Mayotte dite « loi statutaire ». Cette loi a notamment introduit une décentralisation des autorisations d’occupation des sols à Mayotte alors même que les dispositions actuelles du code local ne prévoient pas la totale maîtrise par les communes de leurs documents d’urbanisme, les plans d’occupation des sols étant par exemple toujours approuvés par le représentant de l’Etat. Cette évolution est d’ailleurs appelée à être accentuée en application de la loi constitutionnelle n° 2003-276 du 28 mars 2003 relative à l’organisation décentralisée de la République.

Dans ce cadre, la présente ordonnance prévoit une large extension à Mayotte des dispositions du code de l’urbanisme applicables en métropole et dans les départements d’outre-mer, tout en les adaptant en tant que de besoin au contexte administratif et social de Mayotte. Son entrée en vigueur est prévue au 1er janvier 2006.

L’article 1er crée un nouveau livre VII dans le code de l’urbanisme, organisé en six titres.

Le titre préliminaire concerne les dispositions générales à l’ensemble du code. Il procède à des adaptations terminologiques par la création d’une grille de lecture à l’article L. 700-1. Il prévoit d’autre part que l’information du public relative aux documents d’urbanisme se fasse, comme c’est le cas à l’heure actuelle, par le biais de la mise à disposition du public du document tout en introduisant la possibilité pour le représentant de l’Etat à Mayotte de soumettre les documents ou opérations les plus importants à une enquête publique au sens de l’article L. 123-1 du code de l’environnement.

Le titre Ier énumère, dans un chapitre Ier, les articles issus du livre Ier du code de l’urbanisme applicables à Mayotte. Ce livre traite des règles générales d’urbanisme. L’ensemble de ses dispositions est étendu sauf celles relatives aux schémas de cohérence territoriaux, en raison d’une part du caractère encore très embryonnaire de l’intercommunalité à Mayotte, et d’autre part de l’approbation prochaine, par décret en Conseil d’Etat, du plan d’aménagement et de développement durable de Mayotte, document d’urbanisme stratégique qui sera applicable sur l’ensemble du territoire mahorais. L’article 3 de l’ordonnance prévoit une obligation de compatibilité de l’ensemble des documents d’urbanisme et notamment des plans locaux de l’habitat, des plans de déplacement urbains ou encore des grosses opérations d’aménagement avec ce plan d’aménagement et de développement durable de Mayotte. Il s’agit en fait d’une simple harmonisation du code général des collectivités territoriales avec le code de l’urbanisme. Les dispositions issues de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne (loi « montagne ») ne sont pas retranscrites non plus car sans objet. En revanche, sont introduits la plupart des apports de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains : ainsi, le plan local d’urbanisme, document exprimant le projet de la commune, se substitue aux plans d’occupation des sols, tandis que les communes plus rurales pourront se doter de cartes communales, véritables documents d’urbanisme opposables aux tiers. Les collectivités acquièrent par ailleurs la maîtrise des documents d’urbanisme telle qu’elle est prévue par le droit commun : le conseil municipal adopte ainsi les plans locaux d’urbanisme et élabore les cartes communales.

Des dispositions transitoires permettent l’articulation entre les documents d’urbanisme adoptés selon le code local et les nouveaux documents applicables à Mayotte à compter de l’entrée en vigueur de l’ordonnance. Les plans d’occupation des sols actuels doivent, avant le 1er janvier 2011, être transformés en plans locaux d’urbanisme ; jusqu’à cette date, les communes qui le souhaitent conservent leurs plans d’occupation des sols et ont la possibilité de les modifier suivant une procédure identique à celle qui existe dans le code local de l’urbanisme, sous réserve de ne pas porter atteinte à l’économie générale du document initial ou de ne pas comporter de graves risques de nuisances. Les communes ne sont ainsi pas contraintes de s’engager dans une refonte du document en cas de modifications mineures. De même, l’ordonnance prévoit que les schémas d’aménagement de commune ou de village, documents propres au code local de l’urbanisme, resteront en vigueur jusqu’au 1er janvier 2011. Passé cette date, les communes devront alors se doter soit d’une carte communale, soit d’un plan local d’urbanisme.

Le projet d’ordonnance rend applicables les taxes d’urbanisme (taxe locale d’équipement et taxe départementale des espaces naturels sensibles). Une délibération de la collectivité départementale sera toutefois nécessaire pour leur mise en place.

Au sein d’un deuxième chapitre du titre Ier sont détaillées les adaptations rendues nécessaires à Mayotte pour l’application des dispositions issues de la loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 dite « loi littoral ». L’application de cette loi à Mayotte se justifie par le fait que seize des dix-sept communes de l’île se situent sur le littoral, qui subit de plus une forte pression foncière. Les dispositions de cette loi sont par contre adaptées, eu égard aux spécificités de l’île, à l’existence de la zone dite des cinquante pas géométriques (qui tient lieu de la bande des 100 mètres applicable en métropole), et enfin pour permettre la réalisation de quelques projets touristiques, prévus par le projet de plan d’aménagement et de développement durable de Mayotte et indispensables pour le développement touristique de l’île. L’ordonnance prévoit ainsi une procédure dérogatoire au principe de l’urbanisation en continuité pour quelques opérations touristiques en nombre limité. Cette faculté, très encadrée, est ouverte à titre transitoire jusqu’au 1er janvier 2016. Les permis de construire résultant de cette dérogation relèveront de la compétence du représentant de l’Etat à Mayotte.

Enfin, un dernier chapitre est consacré aux dispositions particulières aux zones de bruit des aérodromes avec lesquelles les documents d’urbanisme doivent être compatibles.

Le titre II étend les dispositions du livre II relatif à la préemption et aux réserves foncières. Les communes disposent désormais, conformément au droit commun, de la possibilité de préempter en milieu urbain alors que le code local réservait l’exercice de cette compétence sur l’ensemble du territoire de l’île à la seule collectivité de Mayotte (qui la délègue au Centre national pour l’aménagement des structures des exploitations agricoles [CNASEA], en vertu de l’article 49 de la loi statutaire précitée). En l’absence de société d’aménagement foncier et d’établissement rural à Mayotte et afin de ne pas créer un vide juridique à compter de l’entrée en vigueur de l’ordonnance, il a été nécessaire d’introduire un droit de préemption en zone agricole au bénéfice de la collectivité. Une harmonisation des textes avec ces dispositions est opérée dans le cadre de l’article 2 de l’ordonnance modifiant le code du domaine de l’Etat et des collectivités publiques applicable à Mayotte.

Le titre III reprend le livre III du code consacré à l’aménagement foncier. Il permet l’introduction à Mayotte des zones d’aménagement concerté, important outil d’aménagement non prévu par le code local ; de même, le régime du lotissement, déjà existant à Mayotte, devient celui de droit commun, ce qui introduit, par exemple, la faculté de modifier le règlement de lotissement, alors qu’auparavant ce document était figé. Par ailleurs, l’Etat et les collectivités locales -  et le cas échéant l’Union européenne  - pourront réunir leurs participations financières au sein d’un fonds régional destiné à l’aménagement foncier et urbain, dispositif étendu moyennant quelques adaptations mineures. En revanche, la réglementation sur les secteurs sauvegardés et les périmètres de restauration immobilière a été exclue car inadaptée au contexte local.

Les dispositifs de protection des occupants se voient adaptés pour tenir compte de particularités locales, notamment de l’absence d’offre locative sociale permettant le relogement des occupants. De même, l’article 4 de l’ordonnance prévoit l’articulation de ces dispositifs avec l’ordonnance n° 2000-373 du 26 avril 2000 relative aux conditions d’entrée et de séjour des étrangers à Mayotte.

Le titre IV procède à l’extension limitée du livre IV, qui fixe les règles relatives à l’acte de construire et à divers modes d’occupation des sols. En effet, l’introduction de nouvelles règles relatives aux autorisations d’occupation des sols par rapport à celles prévues actuellement par le code local de l’urbanisme sera effectuée par une prochaine ordonnance prévoyant la simplification de ces actes, prise en application de la loi n° 2004-1343 du 9 décembre 2004 de simplification du droit. Dans ce cadre, le régime actuel des actes (permis de construire et certificat d’urbanisme) est maintenu jusqu’à l’entrée en vigueur de ce projet d’ordonnance afin de ne pas complexifier la transition entre plusieurs régimes juridiques. Ainsi le permis de démolir, les autorisations de clôture et d’installations et travaux divers qui n’existent pas dans le code local ne sont pas introduits puisqu’ils vont être réformés par le projet d’ordonnance de simplification. En revanche, le régime des sanctions est quant à lui étendu et adapté afin de permettre son entrée en vigueur immédiate, le régime local des sanctions étant devenu trop obsolète, notamment s’agissant du montant des amendes.

Le titre V ne comporte pas de dispositions législatives. En effet, le livre V concerne l’implantation des services, établissements et entreprises et la gestion de ces services en zones très urbanisées, telle celle de l’Ile-de-France.

Le titre VI relatif au contentieux de l’urbanisme est étendu intégralement et ne nécessite pas d’adaptations notables.

Au total, la présente ordonnance a pour objet de doter la collectivité d’un code de l’urbanisme moderne et adapté aux réalités locales.

est l’objet de la présente ordonnance que nous avons l’honneur de soumettre à votre approbation.

Veuillez agréer, Monsieur le Président, l’assurance de notre profond respect.

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