(non publiée)
La Ministre de lEcologie et du Développement Durable à Mesdames et Messieurs les Préfets
Après presque trois ans de retour dexpérience de lapplication de larrêté ministériel du 29 mars 2004, il est apparu que certains ajustements à ce texte étaient nécessaires, notamment pour clarifier ses modalités dapplication ou pour corriger quelques cas difficiles dappréciation du texte entre administration et exploitants qui étaient apparus ces derniers mois.
Lobjet de la présente circulaire est dapporter quelques éclairages sur les articles modifiés.
Article 1er de la circulaire du 13 mars 2007
La rédaction de larticle 1 prend en compte les conséquences de larrêté ministériel du 29 septembre 2005 relatif à lévaluation de la probabilité d'occurrence, de la cinétique, de lintensité des effets et de la gravité des conséquences des accidents potentiels dans les études de dangers des installations classées soumises à autorisation.
Jappelle toutefois votre attention sur le fait que ces dispositions ne doivent concerner que les études de dangers qui vous seront remises dans le futur. Il ne sera pas nécessaire de mettre à jour les compléments détudes de dangers remis précédemment dans le cadre de lapplication de larrêté ministériel du 29 mars 2004.
Article 2 de la circulaire du 13 mars 2007
Les accidents liés aux silos demeurent fréquents et potentiellement graves; la gestion de ce retour dexpérience doit permettre de consolider les analyses de risques et de tirer les enseignements de ces évènements, afin déviter que de tels accidents ne se reproduisent. Néanmoins, il est nécessaire de ne pas uniquement relever les accidents, mais dinclure aussi les accidents évités de justesse, les défaillances de mesures de maîtrise des risques, ainsi que les dérives détectées sur le site en matière de gestion de la sécurité. En effet, une bonne pratique consiste à utiliser des outils de remontée dinformation (tels que les registres) afin de recueillir et de formaliser, au niveau dun établissement, la nature des dysfonctionnements relevés sur les installations, puis den analyser les causes.
Lanalyse des causes des évènements nécessite néanmoins un recul constructif et doit permettre de remettre en cause la fiabilité des mesures de sécurité ; ainsi, cette étude doit être proportionnée aux enjeux, depuis le simple constat jusquà lenquête accident. La détermination des modalités de traitement, des délais ainsi que de la périodicité des bilans à réaliser incombent à lexploitant.
Une gestion du retour dexpérience est donc composée du recueil des évènements susceptibles de constituer un précurseur dexplosion, dincendie, de lidentification des causes possibles de ces évènements et enfin, de lexistence de mesures correctives si des carences en matière de sécurité ont été décelées. Elle permet de détecter la vulnérabilité de l'établissement vis-à-vis d'évènements pour lesquels aucune parade na été planifiée (analyse des risques défaillante ou incomplète).
Ces données pourront enrichir les bases de données existantes, gérées par des organisations ou fédérations professionnelles ou par le BARPI (base ARIA).
Article 3 de la circulaire du 13 mars 2007
Je vous rappelle quil existe, à travers la directive 1999/92 CE et sa transposition par le Code du Travail, une réglementation spécifique qui permet de fixer et dharmoniser les prescriptions minimales visant à améliorer la protection en matière de sécurité et de santé des travailleurs susceptibles dêtre exposés au risque datmosphères explosives (ATEX). Ainsi, le classement en zones ATEX (20, 21, 22, hors zone ATEX) est une obligation du chef détablissement fixée par le Code du Travai (décret n°2002-1553 du 24 décembre 2002 qui ajoute larticle R. 232-12-28 au Code du Travail). Le cadre général de ces textes concerne la santé et la sécurité des travailleurs, lapplication des principes généraux de prévention des risques professionnels et une évaluation des risques qui se traduit par lélaboration du document unique (document relatif à la protection contre les explosions notamment).
Sans préjudice de ces dispositions, contrôlées notamment par lInspection du Travail, lanalyse de risques Installations Classées doit permettre détudier lensemble des scénarii et des phénomènes dangereux. En effet, larticle L. 512-1 du Code de lEnvironnement nexclut aucun potentiel de danger et aucune cause externe ou interne et ce, quelle que soit la probabilité doccurrence de ce potentiel de danger. Ainsi, dès linstant que des poussières inflammables en suspension peuvent être présentes, dans le cadre dun mode de fonctionnement normal ou dégradé, à larrêt, au démarrage, en phase travaux, y compris en cas daccident, cet événement doit être étudié dans létude de dangers. Par conséquent, lanalyse de risques, qui sappuie sur ce recensement, ne doit pas omettre les phénomènes dangereux susceptibles de générer des inconvénients ou des dangers pour les intérêts visés à larticle L. 511-1 du Code de lEnvironnement, dont ces potentiels de danger peuvent être la source : explosion et incendie.
Certaines mesures de sécurité proposées dans le cadre de la protection des travailleurs peuvent constituer des mesures de sécurité relative à la maîtrise des risques daccidents pouvant avoir des conséquences sur les intérêts visés àlarticle L. 511-1 du Code de lEnvironnement. Une démonstration est néanmoins nécessaire.
Larticle 9 de larrêté du 29 mars 2004 définit des mesures minimales à mettre en uvre afin de prévenir lapparition de sources dinflammation. Sa rédaction est précisée pour permettre didentifier les mesures nécessaires, au titre du Code de lEnvironnement, à la prévention des risques dexplosion et dincendie.
Ainsi, afin de prévenir linflammation des poussières combustibles, il est nécessaire de limiter la température des surfaces potentiellement en contact avec ces poussières (norme EN 50 281-1-2 concernant les ATEX " poussières "), de rendre étanche à la pénétration des poussières tous les équipements ou matériels à lorigine darcs, détincelles électriques ou qui possèdent une température de surface importante, et enfin déviter toutes les autres sources dinflammation possibles.
La nouvelle rédaction de larticle 9 prévoit létablissement dun rapport annuel de vérification de létat de conformité du matériel et des équipements au regard des critères précédents : un état de conformité initial pourra être proposé, qui sera remis à jour au moins annuellement, en cas de modification concernant le matériel, les équipements, les installations ou les caractéristiques des produits stockés ou utilisés.
Il est nécessaire de rappeler par exemple que linterdiction de lutilisation de lampes baladeuses à lintérieur des cellules est une mesure de sécurité fondamentale en ce qui concerne la prévention des risques incendie et explosion.
En particulier, en ce qui concerne les courants vagabonds, évènements aléatoires et par conséquent difficilement prévisibles et maîtrisables, des bonnes pratiques consistent à respecter la mise à la terre systématique de tous les équipements principaux; la continuité des courants électriques et lamélioration de linstallation électrique, notamment par le remplacement, la maintenance des câbles abîmés, par la vérification des appareils présentant des pertes. Le respect des règles de lart en matière dinstallations électriques (respect des obligations de la norme NF C 15-100, relative aux installations électriques basse tension) constitue donc une mesure de protection dans le cas général (notamment en ce qui concerne les appareils défectueux, les défauts disolement, les perturbations électromagnétiques, les surtensions).
En ce qui concerne lélectricité statique, générée par exemple par le contact ou la séparation de corps solides, laccumulation de charges peut entraîner des risques dinflammation. Ainsi, la prévention des décharges électrostatiques peut être assurée par la limitation des parties plastiques ainsi que par la continuité et la mise à la terre des éléments métalliques et plus largement de lensemble des installations électriques.
La prévention des risques liés à la foudre passe par le respect des dispositions de larrêté du 28 janvier 1993 concernant la protection contre la foudre de certaines installations applicables aux installations classées. Il est important de rappeler que le contrôle de linterconnexion de la prise de terre des installations électriques avec celle de linstallation de protection contre la foudre est nécessaire.
Le matériel, même non électrique, peut provoquer des frictions, des impacts, des étincelles et des surfaces chaudes. De façon générale, lexploitant doit donc sassurer que des sources dinflammation ne peuvent se produire, que les effets dune explosion primaire sont contenus et que la propagation de lexplosion est évitée. Ces deux derniers objectifs sont couverts par les mesures de protection contre les effets des explosions prévues à larticle 10 de larrêté ministériel du 29 mars 2004.
Article 4 de la circulaire du 13 mars 2007
- Il modifie justement larticle 10 de larrêté ministériel. En matière de gravité des accidents, lexplosion demeure le phénomène dangereux le plus meurtrier. Les évolutions réglementaires ont permis de diminuer la probabilité de tels accidents. Néanmoins, dans le cas dun environnement vulnérable, il est nécessaire, outre la prévention, qui demeure loutil indispensable de maîtrise des risques, de disposer de mesures physiques de protection connues et éprouvées, tels que les évents et le découplage, permettant dabaisser significativement le niveau de gravité dun accident.
Les tiers considérés ici sont : les habitations, les immeubles occupés par des tiers, les établissements recevant du public, ainsi que les zones destinées à l'habitation par des documents d'urbanisme opposables aux tiers. Un seuil de sensibilité pour les voies de communication et les voies ferrées a été fixé à 2 000 véhicules par jour et 30 trains de voyageurs par jour.
En cas denvironnement sensible dans les zones déloignement forfaitairement définies à larticle 6 de larrêté ministériel du 29 mars 2004, ou dans les zones des effets létaux et irréversibles mises en évidence par létude de dangers, et afin déviter la propagation des explosions dans les volumes et lapparition dune explosion secondaire, un découplage " pression " bâtimentaire doit être réalisé au moyen de parois et de portes de résistance au moins équivalente à celle des volumes attenants (hors parties soufflables).
Les caractéristiques (résistance, matériau, ancrage, etc.) des parois de découplage mises en place sont à adapter selon la configuration des installations, et les modélisations dexplosions et des effets de surpression, doivent sappuyer à la fois sur les résultats de létude de dangers et sur les plans des structures des bâtiments.
Voici un exemple de détermination de la pression à laquelle un tel découplage doit résister :
Une modélisation numérique sur un étage de tour de manutention en béton armé d'un stockage de céréales (blé, orge, mais) de caractéristiques mécaniques et géométriques suivantes:
Dimensions de la tour: 20 m*7 m*9,5 m avec une résistance mécanique de 150 mbars
Et pour surfaces fragiles (surfaces, pression d'ouverture):
- vitres (1,3 m², 30 mbars)
- bardages(40,5 m², 30 mbars)
a donné après calcul une surpression d'explosion de 80 mbars. La tenue du découplage à la pression d'explosion entre cet étage et la galerie sur cellule doit donc être de 80 mbars.
- Dans le cas où la configuration du site ne permet pas de procéder à ce découplage bâtimentaire (par exemple dans le cas de surfaces trop importantes), une maîtrise de lempoussièrement doit être effectuée par des dispositifs techniques éprouvés. Des barrières chimiques peuvent aussi être employées pour diminuer la fréquence doccurrence dune explosion secondaire et la propagation dune explosion primaire.
En particulier, dans la configuration des silos dits " combles " ou des silos plats type " hangar ", si aucune galerie supérieure indépendante nexiste physiquement (uniquement une passerelle au-dessus de cellules de stockage ouvertes), lapplication de larrêté ministériel du 29 mars 2004 modifié nimpose un découplage quavec la tour de manutention et entre la tour et lespace sous-cellules si ce dernier existe. En effet, si les cellules de stockage sont ouvertes, lapplication de larticle 4 nimpose évidemment pas de fermer ces capacités.
Néanmoins, dans tous les cas, lexploitant doit faire la démonstration dune maîtrise suffisante des risques dexplosion secondaire, via une analyse de la fiabilité et de la performance des dispositifs techniques mis en place.
- Des évents ou des surfaces soufflables doivent être mis en place dans la tour de manutention, les espaces sur-cellules et sous-cellules, si la galerie est non enterrée. La méthode de dimensionnement de la surface des évents est libre et doit être en cohérence avec les mesures de découplage mises en uvre et les normes en vigueur décrites dans le guide de létat de lart sur les silos (NFU 54-540, VDI 36 73, NFPA 68, EN 14491
). Dans les silos plats ou les silos combles, la toiture ou des parois latérales fragilisées, sous réserve dune démonstration suffisante, peuvent constituer une surface soufflable permettant dévacuer la pression dune explosion primaire.
Dans le cas de galeries enterrées ou de tour de manutention en béton difficilement éventable (constructions antérieures à 1945, béton de mauvaise qualité; la démonstration devant être apportée par lexploitant), des mesures de prévention et de protection concernant les équipements doivent permettre de répondre à des objectifs de limitation de lempoussièrement, de résistance à lexplosion primaire, et de réduction de la probabilité de propagation dune explosion primaire.
Rappelons que lobjectif doit être que les évents débouchent vers lextérieur pour les silos existants, afin de protéger les opérateurs et de ne pas réduire leur capacité de réaction. Cela doit devenir la règle pour les silos nouveaux.
- Les transporteurs auxquels se réfère le quatrième alinéa de larticle 4 sont constitués des transporteurs à chaîne, à câbles, des vis dArchimède, ainsi que des transports pneumatiques. Les solutions techniques dépendent des caractéristiques des installations, du process, des conditions dexploitation, des modes opératoires ainsi que des caractéristiques des produits. Les exutoires libérant la pression dexplosion doivent être dans la mesure du possible dirigés vers un espace libre et les cellules doivent si possible ne pas être alimentées directement. Un capotage efficace et adapté est une mesure de sécurité qui peut assurer létanchéité de certains équipements.
- Si des tiers sont présents dans les seules distances déloignement forfaitaires après mise en place des mesures de protection pré-citées, alors cet article nimpose pas de moyens de réduction du risque supplémentaires.
- Je vous signale enfin que larrêté ministériel du 23 février 2007 nimpose pas de reprendre lexamen des situations existantes à laune de ces prescriptions lorsque lapplication antérieure de larrêté du 29 mars 2004 avait permis de conclure à un programme de mesures de protection satisfaisant, que vous aviez acté par arrêté préfectoral.
Article 5 de la circulaire du 13 mars 2007
Les accidents dans les silos nécessitent le plus souvent lintervention des services de secours et dincendie dans des conditions très difficiles (notamment dans le cas de risque dexplosions, dintervention lourde et longue lorsque des cellules doivent être vidées, de présence de sources dinflammables multiples). Des périmètres de sécurité, des interruptions de trafic, voire des évacuations de voisinage par crainte des projections ou des effets de surpression en cas dexplosion, sont parfois mis en uvre. Ainsi, depuis 1980, 33 accidents de silos ont nécessité la mise en place de périmètres de sécurité conduisant à des évacuations de locaux ou dhabitations environnantes ou des interruptions de la circulation fluviale, ferroviaire ou routière.
Afin de faciliter laction des services qui interviennent lors des sinistres, létablissement des procédures dintervention est une mesure qui concerne désormais lensemble du parc français des silos autorisés, quels que soient les risques liés à ces installations. En particulier, le plan des installations indiquant la nature des phénomènes dangereux (par exemple : incendie, explosion dun équipement) pouvant survenir constitue un outil primordial dans le cadre de la gestion des situations durgence. Un Plan dOpération Interne (POI), sil existe, permet de répondre aux mêmes exigences.
Article 6 de la circulaire du 13 mars 2007
Afin dapprécier les quantités de poussières pouvant générer une atmosphère explosive poussiéreuse dans un environnement fermé, des indicateurs sont proposés dans le guide de létat de lart relatif aux silos.
Je vous remercie de me faire part sous le timbre de la Direction de la Prévention des Pollutions et des Risques des difficultés que vous pourriez rencontrer dans lapplication des présentes instructions.
Pour la Ministre et par délégation,
le Directeur de la Prévention des
Pollutions et des Risques,
Délégué aux Risques Majeurs,
Laurent MICHEL