(BO min. Équip. n° 598-98/14 du 10 août 1998)
Texte abrogé par la circulaire du 19 juillet 2013 (circulaire.legifrance.gouv.fr)
La ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement à Mesdames et Messieurs les préfets; Monsieur le préfet de police de Paris.
La loi du 19 juillet 1976 vous confie d'importantes responsabilités dans la maîtrise des dangers et inconvénients que peuvent entraîner pour l'homme et l'environnement les activités auxquelles s'applique la réglementation en cause.
Bien entendu, Ia responsabilité principale incombe à celui qui conçoit le projet, le réalise, I'exploite et remettra ultérieurement le site en état. Ce principe est l'un des moteurs essentiels d'une bonne maîtrise des risques : la vigilance et la capacité d'initiative de l'exploitant ou du détenteur apportent en général, compte tenu de l'efficacité des techniques disponibles dans des conditions économiques acceptables, les réponses nécessaires à la protection de nos concitoyens.
S'il est important d'éviter toute confusion des rôles en la matière, la loi définit les responsabilités que les pouvoirs publics exercent pour leur part, qu'il s'agisse de la fixation des règles, du contrôle de leur respect ou de la réaction qu'appelle le constat d'un écart.
Concernant ce dernier point. plusieurs exemples montrent des situations insatisfaisantes quant à l'utilisation de la mise en demeure prévue par l'article 23 de la loi. La présente circulaire a pour objet de vous rappeler les règles qu'il convient de respecter en la matière.
1.1. La définition des règles nécessaires et suffisantes pour la protection des intérêts visés à l'article 1er de la loi obéit à des conditions de forme précise qui visent à apporter les garanties indispensables tant pour le public que pour les maîtres d'ouvrage.
Ces règles résultent d'une part de la loi, des décrets et des arrêtés ministériels, d'autre part des arrêtés préfectoraux qui interviennent après avis du conseil départemental d'hygiène ou de la commission départementale des carrières. Ces conditions de forme sont impératives sauf les cas d'urgence expressément prévus par la législation: elles visent en particulier à permettre à l'exploitant de s'exprimer avant l'intervention de votre décision
La mise en demeure ne doit pas, pour sa part, avoir pour objet de fixer des prestations nouvelles ou de modifier les prestations existantes. Si l'origine de la difficulté est en réalité l'insuffisance, I'imprécision ou l'inadaptation des prescriptions édictées, celles-ci doivent être rectifiées dans les formes prévues par les articles 18 et 30 du décret du 21 septembre 1977, en tenant compte le cas échéant des dispositions édictées au plan national, en particulier pour traduire les règles adaptées par l'Union européenne. De même, la réalisation d'une étude visant à déterminer les travaux à effectuer doit, pour le cas où cette étude est nécessaire, être imposée par arrêté complémentaire préalablement à l'intervention de l'arrêté de mise en demeure.
Outre l'urgence, seul le cas prévu à l'article 24 de la loi peut conduire à la fixation de règles provisoires par un arrêté préfectoral dont la régularité n'est pas conditionnée par la consultation du conseil départemental d'hygiène ou de la commission départementale des carrières. Je vous confirme à cet égard les termes de la circulaire ministérielle du 10 mai 1983 (copie jointe) mais je souhaite que. chaque fois que ce sera possible, vous procédiez également dans cette hypothèse à la consultation de la commission compétente.
1.2. Si la mise en demeure ne doit pas fixer de prescriptions nouvelles, elle doit indiquer avec précision celles des prescriptions en vigueur, résultant d'arrêtés ministériels ou d'arrêtés préfectoraux, dont la poursuite de la violation conduirait à l'application des mesures prévues par l'article 23 de la loi, les autres infractions demeurant passibles des sanctions pénales prévues par les articles 18 et 19 de la loi ou par l'article 43 du décret.
De même, la loi dispose que la mise en demeure doit déterminer le délai imparti pour le respect des règles en cause.
La question se pose du rapport éventuel entre le délai que doit fixer la mise en demeure et la durée prévisible des travaux nécessaires pour la mise en conformité avec les prescriptions qui ne sont pas respectées au moment de la mise en demeure.
Il n'y a aucun lien à établir entre ces deux éléments pour les raisons suivantes.
D'une part, s'il est exact qu'en ce domaine la logique et la jurisprudence imposent que les prescriptions fixées par les arrêtés initiaux ou complémentaires soient réalisables dans leurs contenus et leurs délais, il ne serait pas rationnel que le délai retenu dans la mise en demeure. qui n'a pas pour objet de modifier les conditions d'exploitation ni les délais de mise en conformité, prenne une seconde fois en considération la durée de réalisation des travaux.
D'autre part, la mise en demeure constitue uniquement un ultime avertissement; si elle n'est pas respectée à l'expiration du délai fixé, le juge pénal ou l'autorité administrative sont à même de prendre les décisions dont la loi leur confie la responsabilité: suspension de l'activité jusqu'à réalisation des actions nécessaires, astreintes, travaux d'office, consignation d'une somme répondant du coût des travaux à effectuer par versements uniques ou fractionnés, amendes et peines d'emprisonnement, etc.
Il est clair que ces différents mécanismes permettent la prise en compte concrète des délais éventuellement nécessaires à la mise en conformité si celle-ci n'a pas été réalisée à l'issue du délai imposé par la mise en demeure.
Pour ces deux raisons. il convient que le délai fixé dans la mise en demeure ne dépasse pas ce qui est logique pour un ultime avertissement.
S'il y a urgence, ce délai pourra être réduit à quelques heures ou moins. Pour les travaux complexes, la mise en demeure peut le cas échéant fixer plusieurs délais: passation de commandes, début de travaux, etc. En règle générale, vous veillerez à ne pas fixer de délai supérieur à trois mois, sauf circonstances de droit ou de fait très particulières. Sauf cas particulier. un délai supérieur à trois mois, et à fortiori un délai qui atteindrait ou dépasserait un an. ne pourrait que s'analyser comme un report dans le temps d'obligations résultant des décisions antérieures et. par voie de conséquence. comme une modification des exigences des arrêtés initiaux ou complémentaires: procéder ainsi par le biais de la mise en demeure s'analyserait comme un détournement de procédure.
La mise en demeure, comme le précise d'ailleurs l'article 20 de la loi du 19 juillet 1976, doit prendre la forme d'un arrêté préfectoral. Comme pour l'ensemble des arrêtés prévus par cette législation. je vous recommande de ne déléguer votre signature qu'au secrétaire général de la préfecture, à l'exception de toute autre autorité, Il conviendra tout particulièrement d'éviter l'utilisation de l'expression mise en demeure dans d'autres actes (cf par exemple C E. 28 octobre 1983 Etablissements Albert Motelet et compagnie annulant une lettre de mise en demeure adressée à l'exploitant par l'inspecteur des installations classées).
Cet arrêté doit, comme tout acte administratif individuel défavorable imposant des sujétions ou constituant une mesure de police, être motivé. La motivation consiste à énoncer. explicitement et clairement, les considérations de fait et de droit qui constituent le fondement de la décision, Ia seule mention d'un rapport de l'inspecteur des installations classées n'étant par exemple pas suffisante si ce rapport n'est pas joint à la mise en demeure (cf en ce sens: CAA Lyon, Assemblée plénière 8 mars 1994. société Elf France).
Bien entendu, I'arrêté préfectoral de mise en demeure sera notifié à son destinataire. Une ampliation de l'arrêté sera par ailleurs adressée au maire. La réglementation ne prévoit pas de formes de publicité particulières, à la différence des autres actes prévus par cette réglementation. Une copie sera cependant déposée en préfecture et en mairie (à Paris, au commissariat de police) pour consultation par les tiers. Vous pourrez également utilement informer de votre décision le procureur de la République, Ies associations ou personnes morales et physiques intéressées ainsi que l'établissement de crédit ou tout autre organisme ayant délivré les garanties financières.
La mise en demeure est un acte important don la violation ne doit pas rester sans suites.
Cette situation constitue un délit pour le destinataire de la mise en demeure. Or, l'article 40 du code de procédure pénale prévoit que tout fonctionnaire qui acquiert dans l'exercice de ses fonctions la connaissance d'un délit est tenu d'en aviser sans délai le procureur de Ia République II va de soi que, dès lors qu'il s'agit là d'une attribution personnelle de l'inspecteur des installations classées, le procès-verbal doit être transmis directement au procureur de la République. Dans cette situation, le préfet doit bien sûr être tenu informé de la transmission du procès-verbal et des suites données à cette procédure.
Indépendamment des sanctions pénales prévues par la loi et, le cas échéant, de manière cumulative. il y a lieu. en cas de non respect d'un arrêté de mise en demeure. d'appliquer les sanctions administratives prévues par l'article 23 de la loi du 19 juillet 1976. Le préfet à la faculté de déterminer la sanction administrative la plus adaptée, à savoir la mise en œuvre d'une procédure de consignation. I'exécution de travaux d'office aux frais de l'exploitant et ou la suspension de l'installation, ces procédures administratives pouvant si nécessaire être menées de manière combinée. Il conviendra donc systématiquement. Iorsqu'une mise en demeure n'a pas été suivie d'effet, que l'inspection des installations classées vous communique par écrit un rapport sur la situation et vous présente ses propositions.
Si dans certains cas il pourra être légitime d'attendre la décision judiciaire sur le délit sans mettre en œuvre les sanctions administratives, il convient d'éviter toute situation qui s'analyserait comme une carence des pouvoirs publics: d'une part la responsabilité de l'Etat est en ce domaine engagée par une simple carence et, d'autre part. Ia crédibilité des pouvoir publics dans l'esprit des exploitants ou du public serait gravement mise à mal si rien ne se passait dans une telle hypothèse.
Je vous rappelle que le recours contentieux devant le juge administratif n'est par principe pas suspensif et qu'un arrêté reste exécutoire tant qu'il n'a pas fait l'objet d'une décision du juge en prononçant l'annulation ou le sursis à exécution. Toutefois, les oppositions formées, devant les tribunaux administratifs, aux états exécutoires pris pour l'application des mesures de consignation ont pour effet d'en suspendre l'exécution. Je vous recommande dans ce cas de demander au président du tribunal administratif la levée du caractère suspensif du recours conformément aux dispositions du dernier alinéa de l'article 23 de la loi du 19 juillet 1976. Les procédures d'appel dans ce domaine sont quant à elles dépourvues de caractère suspensif.
Dans l'hypothèse où l'arrêté de mise en demeure est entaché d'une irrégularité manifeste de nature à entraîner son annulation, il est souhaitable que l'administration modifie ou retire, selon les cas, I'arrêté en cause et prenne un nouvel arrêté satisfaisant aux exigences réglementaires ou procédurales, faute de quoi l'ensemble de la procédure administrative consécutive -arrêté de consignation, arrêté de travaux d'office et, le cas échéant, arrêté de suspension risquerait, par voie de conséquence, de se trouver privé de base légale.
Pour sa part. Ia juridiction administrative dispose. tout comme vous, du pouvoir de mettre en œuvre les mesures prévues par la loi du 19 juillet 1976, dans le cadre du régime contentieux de pleine juridiction défini par l'article 14 de la loi. Lorsque la juridiction administrative a effectué une mise en demeure au sens de cette législation, il vous appartient de veiller tout particulièrement au déclenchement des sanctions pénales ou administratives en cas de violation du contenu et du délai fixés par la juridiction.
Vous pourrez, pour ce qui concerne la mise en œuvre des sanctions administratives, vous référer en tant que de besoin aux circulaires ministérielles du 19 juillet 1978, du 22 février 1980 et du 25 janvier 1985. La présente circulaire se substitue à la circulaire du 29 janvier 1993 relative à l'application des sanctions et à la lutte contre les pollutions industrielles qui est abrogée.
Je vous demande de bien vouloir me faire part, sous le timbre de la direction de la prévention des pollutions et des risques, des difficultés que vous pourriez rencontrer dans l'application des présentes instructions.