(JO n° 241 du 17 octobre 2023)


NOR : TREP2326397V

La loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets a instauré un cadre législatif pour l'utilisation de drones par :
- les agents concourant à la connaissance et la prévision des phénomènes naturels évolutifs ou dangereux (l'article L. 125-2-2 du code de l'environnement, issu de la loi du 22 août 2021 précitée) ;
- les agents de contrôle des installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE) et des ouvrages hydrauliques L. 171-5-2 du code de l'environnement issu de l'article 282 de la loi du 22 août 2021 précitée.

Ces deux dispositions prévoient que l'enregistrement des images lors des opérations de survol n'est pas permanent et n'est rendu possible que dans des cas limitativement énumérés par décret et font l'objet d'une doctrine d'usage diffusée par le ministre chargé de l'environnement. Les articles R. 172-16 et R. 563-27 du code l'environnement, créés par le décret n° 2022-1638 du 22 décembre 2022 portant sur l'encadrement de l'utilisation de caméras et capteurs sur des aéronefs circulant sans personne à bord pour la connaissance des phénomènes naturels et la police administrative des risques technologiques, définissent les cas d'usage de ces aéronefs et les modalités d'encadrement complémentaires à ces dispositions législatives et prévoient une doctrine d'usage qui précise, en tant que de besoin, les modalités d'application de ce décret.

Tel est l'objet du présent document.

I. La protection des données personnelles captées par les drones

Les circonstances dans lesquelles le survol d'espace privés pourrait conduire à la collecte de données personnelles concernant les lieux d'habitation sont les circonstances évoquées à l'article L. 171-5-2 du code de l'environnement « lorsqu'elles sont mises en œuvre dans l'espace public, les opérations mentionnées au premier alinéa sont réalisées de telle sorte qu'elles ne visualisent ni les images de l'intérieur des domiciles, ni de façon spécifique, celles de leurs entrées » sur la prévention des risques technologiques et l'article L. 125-2-2 du même code qui dispose « lorsque ces opérations conduisent au survol d'espaces privés, toutes précautions sont prises pour limiter la collecte des données personnelles concernant ces espaces privés » dans le cadre de la prévention des risques naturels, le survol n'ayant pas finalité de capter des données personnelles dans les deux cas.

De plus, les inspecteurs de l'environnement peuvent capter des images comprenant des habitations uniquement si nécessaires et doivent flouter ces lieux lors du traitement des données. Les parties d'images permettant l'identification de personnes ou de véhicules seront systématiquement floutées au retour de survol.

Pour rappel, les agents qui mènent les survols et qui sont amenés à consulter les images ont fait l'objet d'une formation et d'une habilitation visant notamment à assurer que « les meilleures pratiques de limitation de collecte de données à caractère personnel sont acquises, » conformément aux articles R. 172-12 et R. 563-23 du code de l'environnement.

Est appelé poste de commandement du service chargé de la conduite et de l'exécution des opérations l'endroit où le télépilote se situe pour contrôler l'aéronef, cela étant entendu comme la seule circonstance permettant la transmission en temps réel des données physiques et images captées.

Les besoins qui justifient l'accès à un enregistrement sont tous ceux en rapport avec la contribution à une expertise ou à une décision en matière de prévention des risques par l'autorité administrative.

Les situations d'urgence permettant de ne pas procéder à une déclaration préalable susceptible de survol sont les suivantes :
- un incident industriel en cours ;
- un phénomène naturel en cours ;
- une activité irrégulière en cours préjudiciable et non permanente.

Si en cas de situations d'urgence la déclaration de survol n'a pas pu être faite, celle-ci doit être réalisée dans un délai raisonnable.

Sur les modalités de l'information générale du public, les articles R. 172-14 et R. 563-25 du code de l'environnement disposent : « une information préalable au survol par l'aéronef circulant sans personne à bord est publiée sur le site des services de l'Etat dans le département ». Celle-ci fera référence à une page du site du ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires qui indiquera les droits d'accès, de rectification et à la limitation des données dans les conditions prévues aux articles 14 à 16 et 18 du règlement (UE) 2016/679 du 27 avril 2016, dit RGPD.

II. Usage des drones pour les besoins de la police administrative des ICPE

Extrait art. R. 172-10 du code de l'environnement :

     I. En application de l'article L. 171-5-2, les chefs de service et les agents des services de l'Etat chargés des contrôles prévus au chapitre Ier du titre VII de la partie législative du présent code et des enquêtes prévues à l'article L. 142-21 du code de l'énergie peuvent mettre en œuvre, en tous lieux relevant de leurs pouvoirs de contrôles ou d'enquête, les traitements des données provenant des caméras et capteurs installés sur des aéronefs circulant sans personne à bord et opérés par un télépilote.

     II. Ces traitements ont pour finalité l'exercice des missions de police administrative dont ils ont la charge, notamment :

        1° La vérification du respect des dispositions législatives ou réglementaires applicables aux installations à l'article L. 511-1 du présent code (…) et, le cas échéant, la constatation des non-conformités passibles des sanctions administratives correspondantes ;
          - photogrammétrie des sites et réalisation d'un modèle numérique de terrain et de surface ;
          - prises de vues de différentes zones d'une installation (bâtiments, toitures, stockages extérieurs…), en particulier celles d'accès difficile ou dangereux ;
          - visualisation des bandes anti-inflammables des murs REI 120 et 180 ;
          - visualisation des éléments présents en toitures de bâtiments ou sur des stockages (évents, soupapes, ouvrants, panneaux solaires, stockages non prévues…) ;
          - visualisation en vidéo/photo du milieu en périphérie (rivières, étangs…) ou stockages non autorisés par l'exploitant ;
          - analyse de la périphérie des sites étendus ;
          - calcul volumétrique et de surface de stockages (tas de déchets, gravats…), qui peut se faire par capture photogrammétrique avec réalisation d'un MNT ;
          - vérification du respect des limites de propriété, relevé de cadastre ;
          - visualisation et éventuellement évaluation de la surface de désenfumage des bâtiments ;
          - calcul des tirs de mines pour les carrières ;
          - cartographie (dont LiDAR) permettant d'établir la détection de fissures, inspection de toiture, levé topographique ;
          - prises de vues aériennes en cas d'accident industriel afin de visualiser l'étendue des dégâts, les dégâts sur le voisinage ou la visualisation de points non visibles du sol ou encore la visualisation des écoulements des eaux polluées… ;
          - acquérir des mesures physiques (imagerie radiométrique, opacité des fumées, concentration gazeuses, mesure de vitesse, mouvement de terrain, altimétrie de ligne d'eau, etc.) ;
          - captation de données physiques du rejet par prélèvements atmosphériques et/ou l'observation de la propagation du nuage ;
          - établir des plans d'établissements répertoriés (ETARE). Il s'agit concrètement de disposer de vues aériennes des établissements acquises à une certaine altitude et plus souvent hors période d'exploitation ;
          - vérification de l'avancement du plan de phasage / cohérence avec le calcul des garanties financières ;
          - étude des prises de vues pour visualiser l'avancement d'une remise en état ;
          - prise de vue avant/après régularisation d'un site ;
          - analyse d'une remise en conformité (suite à extension illégale) du site par prises de vues et plus précisément de parcelles, non prévues dans l'ICPE, utilisées illégalement précédemment (parcelles difficilement accessible après mise en place des clôtures) ou encore dans le cas de site sans activité temporairement (déclaré comme tel par l'exploitant).

III. Usage des drones pour les besoins de la police administrative des ouvrages hydrauliques

Extrait art. R. 172-10 du code de l'environnement :

     I. En application de l'article L. 171-5-2, les chefs de service et les agents des services de l'Etat chargés des contrôles prévus au chapitre Ier du titre VII de la partie législative du présent code et des enquêtes prévues à l'article L. 142-21 du code de l'énergie peuvent mettre en œuvre, en tous lieux relevant de leurs pouvoirs de contrôles ou d'enquête, les traitements des données provenant des caméras et capteurs installés sur des aéronefs circulant sans personne à bord et opérés par un télépilote.

     II. Ces traitements ont pour finalité l'exercice des missions de police administrative dont ils ont la charge, notamment :

        1° La vérification du respect des dispositions législatives ou réglementaires applicables (…) aux ouvrages hydrauliques relevant des rubriques 3.2.5.0. et 3.2.6.0. de la nomenclature annexée à l'article R. 214-1 du présent code ou autorisés ou concédés en application du titre Ier du livre V du code de l'énergie et, le cas échéant, la constatation des non-conformités passibles des sanctions administratives correspondantes ;

        2° La vérification de l'état des ouvrages hydrauliques relevant des rubriques 3.2.5.0. et 3.2.6.0. de la nomenclature annexée à l'article R. 214-1 du présent code ou autorisés ou concédés en application du titre Ier du livre V du code de l'énergie.
          - aide au contrôle des responsables d'ouvrages hydrauliques par des investigations visuelles sur leurs ouvrages aux fin de :
          - contrôle par sondage de l'entretien de l'ouvrage (absence de gros désordres manifestes) ou de son environnement immédiat (absence de végétation intrusive, par exemple), notamment sur les ouvrages de grand linéaire ;
          - contrôle de la réalisation et de la progression de travaux ;
          - contrôle du cadre réglementaire de fonctionnement de l'ouvrage (cote de retenue normale et des plus hautes eaux sur l'ensemble de la retenue par exemple…) ;
          - contrôle de la mise en œuvre d'une prescription obligatoire ;
          - contrôle par sondage de l'adéquation des informations contenues dans une étude de dangers.

IV. Usage des drones pour la connaissance et la prévention des risques naturels

Art. R. 563-21 du code de l'environnement :

En application de l'article L. 125-2-2, les services de l'Etat, les collectivités territoriales et leurs établissements publics chargés de la prévention des risques naturels peuvent mettre en œuvre des traitements de données, provenant des caméras et capteurs installés sur des aéronefs circulant sans personne à bord et opérés par un télépilote, captées en tous lieux pertinents pour la connaissance et la prévention des risques naturels tels que :

     1° Les niveaux d'eau ou des laisses de crue pendant ou à la suite d'une inondation ainsi que la délimitation d'emprises inondées. Sont considérées comme une inondation, les débordements de cours d'eau, y compris torrentiels, les submersions marines, les phénomènes de ruissellement et les remontées de nappe ;

     2° Les phénomènes volcaniques et les indices physiques tel que des émissions de gaz ou des élévations de température permettant d'anticiper la survenue d'un phénomène volcanique ;

     3° Les incendies ; (…)

     5° Les mouvements de terrain, les mouvements glaciaires ou périglaciaires et les niveaux des manteaux neigeux dans les zones où sont susceptibles de se produire des avalanches ;

     6° Les crues ou submersions marines pouvant avoir une incidence sur les ouvrages hydrauliques relevant des rubriques 3.2.5.0. et 3.2.6.0. de la nomenclature annexée à l'article R. 214-1 du présent code ou autorisés ou concédés en application du titre Ier du livre V du code de l'énergie.

        1° Au titre de la connaissance des niveaux d'eau ou des laisses de crue ainsi que de la délimitation d'emprises inondées
          - prises de vues de zones inondées pour déterminer l'emprise de l'inondation (y compris dans le cas d'inondation par ruissellement en zone urbaine) en complément des prises de vues aériennes ;
          - calcul de la bathymétrie d'une zone ;
          - réalisation d'études hydromorphologiques améliorant la finesse des zonages des PPRI ;
          - acquisition de mesures physiques pour mieux connaître l'évènement (imagerie radiométrique, mesure de la vitesse d'écoulement, altimétrie de la ligne d'eau, glissement des berges, etc.) ;
          - prise de vue de l'installation à la suite d'une inondation sur site et détermination de la surface inondée.

        2° Au titre de la connaissance des phénomènes volcaniques
          - prises de vues de zone à risque des zones volcaniques aux fins de la cartographie des coulées, de l'observation de la morphologie du volcan et de l'observation de mouvements de terrain ;
          - prélèvements d'échantillons (cendres, fluides) ;
          - observation de la propagation du nuage ;
          - acquérir des mesures physiques (imagerie thermique, imagerie chimique, imagerie optique, concentrations gazeuses) ;
          - déploiement de capteurs, vérification du bon fonctionnement de stations de mesures.

        3° Au titre de la prévention des incendies
          - prises de vues de zones à risque d'incendies, notamment en forêt, ou à l'interface entre la forêt et les zones anthropisées ;
          - cartographie (dont LiDAR) permettant d'établir une cartographie d'une zone malgré une végétation dense ;
          - reconnaissance des zones impactées après sinistre ;
          - détection précoce des départs de feux ;
          - surveillance des zones de risque ;
          - pendant un évènement :
          - réalisation de prélèvements atmosphériques ;
          - réalisation de mesures de paramètres physiques (vitesse de propagation de l'incendie ou d'un nuage, etc.) ;
          - repérage du point de départ d'un incendie.

        4° Au titre de la prévention des risques liés aux mouvements de terrain
          - inspections géotechniques et morphologiques souterraines afin d'évaluer les risques d'instabilité de cavités et d'ouvrages souterrains ;
          - inspection de falaises rocheuses et de zones susceptibles de départ de glissements de terrain aux fins d'identification des zones instables pouvant nécessiter d'être purgées préventivement ;
          - mesures d'activité de mouvement de terrain par l'acquisition de données d'imagerie ou de topographie.

        4° bis Au titre des risques d'origine glaciaire et périglaciaire
          - inspection et étude d'activité de sites glaciaires et périglaciaires par l'acquisition de données d'imagerie ou de topographie ;
          - étude de la géomorphologie glaciaire et périglaciaire ;
          - bathymétrie de lacs glaciaires.

        4° ter Au titre des risques liés aux avalanches
          - inspection avant évènement (reconnaissance des couloirs) ;
          - inspection après évènement : détermination des zones de départ et des zones de propagation ;
          - acquisition de données topographiques suite à évènement pour la détermination du volume de l'avalanche.

        4° quater Au titre des risques liés aux laves torrentielles
          - prises de vues pour déterminer l'emprise du phénomène ;
          - acquisition de données topographiques suite à évènement pour la détermination de volume associé notamment.

        5° Au titre des risques pour les ouvrages hydrauliques
          - surveillance du risque de dépassement de la cote correspondant au niveau de protection d'un système d'endiguement ou du risque de la capacité de stockage d'un aménagement hydraulique assurant préventivement le stockage de venues d'eau ;
          - vérification de l'état d'un ouvrage hydraulique qui subit une charge hydraulique hors norme (dépassant le cadre règlementaire, par exemple) pour évaluer le risque d'une rupture lors de l'évènement en cours ou postérieurement à celui-ci à l'occasion d'une prochaine mise en charge hydraulique, notamment :
          - la surveillance du risque de dépassement de la cote des plus hautes eaux (dans le cas d'un barrage) ;
          - le repérage de gros désordres sur l'ouvrage ;
          - la prise de vues pour évaluer le risque d'embâcles.

V. Au titre du suivi de l'érosion du littoral
  
Art. R. 563-21 du code de l'environnement :

En application de l'article L. 125-2-2, les services de l'Etat, les collectivités territoriales et leurs établissements publics chargés de la prévention des risques naturels peuvent mettre en œuvre des traitements de données, provenant des caméras et capteurs installés sur des aéronefs circulant sans personne à bord et opérés par un télépilote, captées en tous lieux pertinents pour la connaissance et la prévention des risques naturels tels que :

(…) 4° La position du trait de côte et les mouvements hydro-sédimentaires entraînant l'érosion du littoral ;
     - prises de vues de zone littorales érodées à la suite d'une tempête ;
     - suivi de la position du trait de côte dans les zones soumises à érosion littorale ;
     - surveiller les changements environnementaux comme la croissance de la végétation sur des zones côtières difficiles d'accès ;
     - comparaison du recul du trait de côte par analyse d'orthophotos.