(BOMEDD n° 01/5 du 15 janvier 2005)


NOR : DEVG0430479X

A. Les principes

Par circulaire du 30 septembre 2003 publiée au Journal officiel du 2 octobre 2003, le Premier ministre a demandé à chaque ministère de se doter d’une Charte de la réglementation afin d’en améliorer la qualité.

La qualité de la réglementation, telle que l’attendent nos concitoyens, repose sur trois axes à combiner : la qualité intrinsèque du projet évalué au préalable dans toutes ses dimensions (macroéconomique, budgétaire, fiscale, sociale, écologique), sa qualité sociale qui conditionne son acceptabilité par la consultation effective de toutes les parties concernées ou affectées par le projet et, enfin, sa qualité juridique, qui permet sa bonne application et la prévention du contentieux.

La présente Charte s’appuie sur les outils et les pratiques déjà en vigueur au sein du ministère de l’écologie et du développement durable (MEDD), qu’il s’agit d’améliorer et de formaliser.

Chaque axe est mis en œuvre par une méthode et des outils pratiques.

1. La qualité intrinsèque de projet de réforme

Il faut ici entendre au sens large tous les aspects économiques et sociaux pour évaluer et mettre en balance les avantages économiques et sociaux, ainsi que les coûts du projet de réglementation. Le coût s’entend pour l’Etat mais aussi pour les personnes privées sur qui la réglementation pèsera.

Il s’agit de faire un exercice approfondi d’évaluation préalable, éloigné de tout formalisme, mais appliqué de manière sélective aux projets dont les enjeux sont les plus importants.

L’un de ses premiers objets sera d’évaluer les alternatives à la réglementation, qui permettraient d’atteindre les mêmes objectifs.

1.1. L’outil

Un premier outil existant est le rapport Lasserre (méthodologie des études d’impact et coût de la réglementation, mars 2004), réalisé précisément pour aider à la mise en œuvre des nouvelles orientations du Gouvernement.

Selon les besoins et les compétences disponibles, d’autres méthodes pourront être mises en œuvre à l’initiative du service évaluateur. Des fiches d’impact d’ampleur plus modeste et ciblée pourront être conduites à l’initiative du MEDD, en dehors des études d’impact approuvées par le Secrétariat général du Gouvernement (SGG).

De telles fiches sont particulièrement recommandées pour tous les textes touchant des procédures ou des régimes d’autorisation (combien de procédures, combien d’autorisations, effets en termes de délais et de complexité) pour éclairer la discussion, ces questions étant de toute manière posées par le Conseil d’Etat.

Ces fiches sont des documents de travail de l’administration et n’ont pas vocation à être publiées.

1.2. La méthode de sélection

La mise en œuvre adéquate de cette évaluation, au bon moment et sur les dossiers qui le méritent, suppose au sein du MEDD un mode de décision pour sélectionner les projets en relevant.

Les directeurs de l’administration centrale du MEDD, sur proposition du haut fonctionnaire à la qualité de la réglementation (HFQR), veillent au cadrage général des études d’impact et arrêtent les études retenues.

Il est souhaitable de caler cet exercice sur le programme de travail semestriel du Gouvernement, au cours duquel le SGG validera les projets soumis à étude d’impact, conformément aux instructions du Premier ministre.

L’étude d’impact elle-même est conduite par le service à l’origine de la réforme. Elle mobilise les moyens d’expertise disponibles du MEDD et de ses établissements publics. Le service peut aussi utiliser les chiffres fournis par le secteur privé affecté par le projet de réforme.

Sur les dossiers présentant une forte composante économique, l’évaluation économique de l’étude peut être confiée à la direction des études économiques et de l’évaluation environnementale - D4E.

A la suite de ce travail, la direction en charge du dossier et le HFQR, avec l’appui « technique » de la sous-direction des affaires juridiques, veillent au caractère complet de l’étude.

2. La qualité de la concertation préalable

Quelle que soit la qualité technique et économique d’un projet de réglementation, elle sera mal ressentie et mal appliquée si les parties intéressées ne se l’approprient pas. Il s’agit là d’un engagement politique fort. Dans le champ particulier de l’environnement, il s’agit aussi d’une obligation internationale (convention d’Aarhus, art. 7 et 8).

Plusieurs outils de concertation sont envisageables et peuvent être pratiqués.

a) Les commissions consultatives instituées :

La liste des organismes permanents auprès du MEDD fera l’objet d’une publication ;
La consultation pourrait dépasser, le cas échéant, le champ des matières obligatoires, et couvrir l’ensemble des textes réglementaires émanant du MEDD.

b) Les groupes de travail :

Les groupes de travail informels et comités « ad hoc » sont recommandés notamment sur des questions très techniques (exemple : commission du plan national d’allocation des quotas...). Ils doivent avoir une durée de vie limitée à la réforme en préparation, et donc le plus possible ne pas être formalisés. Ils ne dispensent pas de la consultation effective des commissions consultatives instituées.

c) La consultation des administrés :

La consultation des usagers des services du ministère, et la consultation des « assujettis » à une réglementation (par exemple soumis à un régime d’autorisation), déjà en usage au MEDD, doit être développée dans toute la mesure du possible.

d) La consultation des grandes associations d’élus :

Cette consultation est recommandée sur toutes les matières qui affectent largement les champs de compétences des collectivités territoriales (exemple : régime des études d’impact).

e) Les forums de consultation sur internet :

Ils sont à réserver à quelques dossiers phares chaque année, après approbation par le cabinet. L’institution d’un tel forum oblige à se donner les moyens d’exploiter les avis exprimés, et d’en faire le bilan au moins par une note de synthèse elle-même rendue publique.

f) Les « grandes consultations nationales » :

(Exemple : débat national sur l’eau, consultation nationale sur la Charte constitutionnelle de l’environnement.) Les grandes consultations combinent les nouvelles technologies avec l’organisation de manifestations locales permettant d’organiser un débat ;
Vu leur coût et leur durée, elles doivent être réservées aux réformes majeures, portent en général sur un avant-projet aux orientations très générales, et sont décidées également par le cabinet. Elles ne dispensent pas d’une consultation plus classique sur le projet de texte lui-même en phase rédactionnelle.

g) La consultation des services chargés de mettre en œuvre la politique du MEDD et de ses établissements publics :

D’une autre nature que celle de la société civile, il conviendrait qu’elle soit recherchée sur tout projet de texte, y compris les circulaires, dans une phase presque finalisée, pour tester son applicabilité. Elle pourrait se combiner avec une consultation également en amont.

3. La qualité juridique

Ce concept doit être entendu là aussi au sens large : clarté, lisibilité pour ses destinataires, applicabilité, et légalité intrinsèque, qui va prévenir les risques d’annulation contentieuse, avec toutes leurs conséquences, y compris en termes de contentieux indemnitaire éventuel.

a) Les objectifs :

Il s’agit, pour toutes les directions, d’identifier leurs besoins en conseil juridique et de renforcer, le cas échéant, le rôle de leurs juristes dans la production normative (rédaction des textes en amont, puis lors des phases clés : consultation interministérielle, saisine du Conseil d’Etat).
En cas de besoin, la sous-direction des affaires juridiques pourra être associée aux travaux lors de chacune de ces phases.

b) Les outils méthodologiques :

  • la circulaire du SGG du 1er juillet 2004 ;
  • les ouvrages sur la rédaction de textes ;
  • l’outil spécifique élaboré pour les services du ministère.

B. La mise en œuvre et le suivi de la charte

1. Pour le volet études d’impact

Un compte rendu annuel de cette action est effectué par le HFQR devant le comité des directeurs.

2.  Pour le volet concertation

Dans le rapport de présentation de chaque texte (exposé des motifs d’une loi, rapport au Premier ministre d’un décret, note de présentation au cabinet d’un arrêté) seront référencées les consultations effectuées sur le projet de texte, conformément à la circulaire du Premier ministre du 30 septembre 2003.

Dans ce domaine aussi, le bilan annuel sera établi par le HFQR.

Ce bilan devra retracer non seulement les efforts de concertation, mais aussi la qualité et les limites de cet exercice.

3. Pour la qualité juridique

Il est proposé un contrôle de qualité systématique, opéré de la manière suivante : le directeur d’administration centrale concerné vérifiera, lors de la finalisation d’un texte, que le rapport de présentation mentionne la concertation engagée et que l’outil spécifique de la qualité juridique, joint au projet de texte, comporte les indications requises.

Le cabinet pourra demander à la sous-direction des affaires juridiques un avis, sans que cet avis retarde la marche du dossier.

Des indicateurs de volume et de qualité seront tenus annuellement pour apprécier les évolutions. Ils seront les mêmes que ceux requis dans le cadre de la LOLF, à
savoir :

  • le tableau de transposition des directives ;
  • un tableau permettant de mesurer le flux annuel des textes : le nombre de décrets d’application des lois publiés dans l’année sur ceux qui ont été publiés dans le délai de six mois ;
  • ainsi que le volume annuel en nombre de pages, à partir du Bulletin officiel, des textes législatifs et réglementaires.

En ce qui concerne le rapport entre dispositions abrogées et dispositions nouvelles, les chiffres y afférents seront disponibles au moment de la publication de la partie réglementaire du code de l’environnement.

Serge  Lepeltier

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