Références

:

1.

Circulaire n° 00-317 du 19 juin 2000 relative à l’étude de l’impact sur la santé publique des demandes d’autorisation présentées au titre de la législation sur les installations classées.

2.

Convention pour la protection du milieu marin de l’Atlantique du Nord-Est (OSPAR) :

- décision 98/4 sur les plafonds d’émission et de rejet applicables à la fabrication de chlorure de vinyle monomère et la recommandation 96/2 associée

- décision 98/5 sur les plafonds d’émission et de rejet dans le secteur du chlorure de vinyle, applicable à la fabrication du PVC en suspension (s.PVC) et la recommandation 96/3 associée

- recommandation 2000/3 sur les plafonds d’émission et de rejet dans le secteur du chlorure de vinyle, applicable à la fabrication du PVC en émulsion (e.PVC) et la recommandation 99/1 associée

3.

Circulaire du 15 décembre 2000 relative aux thèmes d’action nationale de l’inspection des installations classées pour l’année 2001

4.

Arrêté ministériel du 2 février 1998 relatif aux prélèvements et à la consommation d’eau ainsi qu’aux émissions de toute nature des installations classées soumises à autorisation.

Pièces jointes :

- dossier de référence relatif aux installations mettant en oeuvre le chlorure de vinyle monomère (annexe 1) ;

- rapport final du groupe de travail (annexe 2).

Le ministre de l’aménagement du territoire et de l’environnement à Mesdames et Messieurs les préfets de département (pour exécution).

Une enquête a été effectuée par la Direction de la prévention des pollutions et des risques fin 1998 sur les rejets des installations qui mettent en œuvre le chlorure de vinyle monomère. Il s’agit principalement des installations de production du chlorure de vinyle monomère (CVM) et des installations de production du PVC, à partir du CVM, par les procédés " suspension " (s.PVC) et " émulsion " (e.PVC).

Le bilan de cette enquête montre que les rejets de CVM sont réglementés dans les arrêtés préfectoraux d’autorisation de manière très disparate en ce qui concerne les valeurs de rejet (en concentration, en flux ou en flux spécifiques), le type d’émission pris en compte (canalisée ou non), l’exhaustivité des sources d’émission de l’établissement ainsi que les conditions de surveillance de l’environnement. Aussi, l’intercomparaison des niveaux de rejets entre établissements n’a-t-elle pu se faire de manière aisée.

Des investigations approfondies, menées sur quatre établissements comparables, qui ont abouti en mai 2000, ont permis de constater que, pour des sites de production de CVM, les rejets chroniques de cette substance, exprimés en flux spécifiques (ratio du flux à la capacité de production de l’établissement), varient très notablement.

Le CVM est un gaz extrêmement inflammable (phase de risque R. 12) relevant de la rubrique 1412 de la nomenclature des installations classées, qui présente des effets cancérigènes de type génotoxique établis (phrase de risque R. 45, données CIRC 1987 et 1979, OMS 1987). Cependant, en raison de sa forte pression de vapeur et de sa faible solubilité dans l’eau, la voie essentielle d’exposition est l’inhalation.

En outre, des accidents survenus en 1999 et en 2000 dans une usine de fabrication de PVC ont entraîné des rejets importants de CVM (plusieurs tonnes de CVM pour l’un des incidents) à l’atmosphère. Ils ont nécessité une évaluation approfondie des impacts potentiels des rejets au plan de la santé des populations les plus proches.

Ces éléments m’ont conduit à inscrire la prévention des effets sanitaires liés aux installations produisant ou mettant en œuvre du chlorure de vinyle monomère parmi les priorités d’action nationale 2001 présentées dans ma circulaire en référence 3.

J’ai également lancé en 1999 un groupe de travail national relatif aux installations qui mettent en œuvre le chlorure de vinyle monomère, en vue d’étudier les possibilités d’amélioration de l’évaluation des impacts sanitaires des rejets consécutifs au fonctionnement normal des installations. Il s’agit de l’un des quatre groupes de travail nationaux cités dans ma circulaire en référence 1. Celui-ci a finalisé ses travaux en février 2000.

Les conclusions du rapport final de ce groupe de travail, qui figure en annexe II au présent courrier, confirment qu’au-delà des impacts environnementaux, les rejets chroniques de CVM doivent être évalués en termes d’effets sur la santé des populations extérieures.

Les données toxicologiques utilisées dans le rapport ci-dessus mentionné sont à compléter par de nouvelles valeurs publiées en 2000 par l’US-EPA et en 2001 par l’OMS. Il conviendra, par exemple, de se reporter à la fiche de données toxicologiques et environnementales de l’INERIS qui récapitule l’ensemble des données publiées sur cette substance  (http://www.ineris.fr/recherches/fiches.htm).

Conformément aux conclusions de la réunion d’experts organisée par la Direction de la Prévention des Pollutions et des Risques le 1er juin 2001, le niveau de concentration de CVM susceptible d’entraîner un excès théorique de risque de 10-5 est d’environ 10 µg/m3, ceci pour une durée d’exposition " vie entière " des populations extérieures. Aussi, dans le cas d’espèce, compte tenu des performances permises par les meilleures technologies disponibles, il est recommandé de mettre en œuvre les mesures de prévention permettant de viser un tel niveau de concentration.

Je vous invite à prescrire aux exploitants concernés la remise du dossier de référence tel que décrit en annexe I, pour le 30 juin 2002, par voie d’arrêté complémentaire dans les conditions prévues à l’article 18 du décret n° 77-1133 du 21 septembre 1977 modifié.

Ce dossier comprendra principalement une évaluation des effets sanitaires résultant du fonctionnement normal et dégradé des installations, en permettant un positionnement par rapport aux meilleures technologies disponibles. Il sera complété d’un bilan de l’application de l’arrêté ministériel du 2 février 1998 en référence 4 et d’un bilan de l’application des textes de la convention pour la protection du milieu marin de l’Atlantique du Nord-Est (OSPAR) énumérés en référence 2.

L’élaboration de ce dossier correspondra, le cas échéant, à une accélération du bilan décennal de fonctionnement demandé par l’arrêté ministériel du 17 juillet 2000, publié au Journal officiel du 14 octobre 2000, transposant les dispositions de la directive 96/61/CE du 24 septembre 1996 relative à la prévention et à la réduction intégrées des pollutions (directive IPPC).

Ce dossier comportera en conclusion un plan d’action comportant des mesures de prévention, accompagné d’un échéancier de réalisation, pour réduire les rejets de CVM résultant du fonctionnement normal et dégradé des installations, adapté aux résultats des évaluations demandées ci-dessus.

Je vous serais obligé de bien vouloir me rendre compte des difficultés que vous pourriez rencontrer dans l’application des présentes instructions.

Annexe I : Dossier de référence relatif aux installations mettant en œuvre le chlorure de vinyle monomère (CVM)

1. Un bilan de l’application de l’arrêté ministériel du 2 février 1998

L’arrêté ministériel du 2 février 1998 comporte différentes dispositions concernant les installations qui mettent en œuvre le CVM, notamment au plan des valeurs limites de rejet et des conditions de leur surveillance. Il convient de rappeler, de manière non exhaustive, les dispositions qui suivent :

- articles 12, 25, 27-12 et 30-13. En effet, le CVM figure parmi la liste des substances de l’annexe II et de l’annexe IV-c de l’arrêté du 2 février 1998 ;

- article 32- 3° -15, le CVM figurant à l’annexe V-c-1 ;

- en matière de bilan annuel des rejets figurant à l’article 61 : le CVM est une substance figurant à l’annexe VI. Aussi, pour les installations qui produisent ou utilisent le CVM à plus de 10 tonnes par an, l’exploitant doit-il adresser au préfet, au plus tard le 31 mai de l’année suivante, un bilan annuel des rejets chroniques ou accidentels, dans l’air, l’eau et les sols, quels qu’en soit le cheminement, ainsi que dans les déchets éliminés à l’extérieur de l’installation classée.

2.Un bilan des écarts entre la situation actuelle et les dispositions des textes de la convention pour la protection du milieu marin de l’Atlantique du Nord-Est (OSPAR) en référence 2.

Ce bilan vise l’ensemble des paramètres et des dispositions des textes ci-dessus mentionnés, et ne se limite pas au CVM.

L’évaluation des impacts sanitaires ne concerne quant à elle que le CVM.

Il convient de rappeler que les décisions OSPAR postérieures à 1998 présentent un caractère contraignant pour les parties contractantes : leur mise en application par les parties contractantes ne nécessite pas de transposition en droit national, contrairement aux recommandations.

Enfin, j’attire votre attention sur les comptes rendus de mise en œuvre justifiant le respect des décisions ou des recommandations.

3. Un bilan de l’évolution des rejets canalisés et diffus de CVM (exprimés en concentration, en flux et en flux spécifiques) au cours de la période décennale passée

En ce qui concerne les rejets exprimés en flux spécifiques, il conviendra de retenir, sauf indications contraires spécifiées dans les textes en référence 2 et 4, la quantité de produits fabriqués et non la capacité de production des installations concernées.

4. Le bilan des différentes actions réalisées en matière de réduction des rejets de CVM dans l’air, l’eau et les déchets au cours de la période décennale passée

Il s’agit d’un bilan technico-économique, qui inclura les aspects de nature organisationnelle, des actions mises en œuvre en matière de réduction des rejets sur la période décennale passée. Les coûts de maintenance et de fonctionnement associés aux moyens actuels de prévention et de réduction des pollutions seront précisés.

5. Une synthèse des méthodes de quantification des rejets canalisés et diffus de CVM

6. Une évaluation des impacts sanitaires et environnementaux des rejets canalisés et diffus de CVM résultant du fonctionnement normal et dégradé des installations

L’évaluation des impacts sanitaires des rejets canalisés et diffus de CVM pourra se faire en adaptant à l’établissement concerné la méthodologie proposée dans le groupe de travail national, en annexe II. Les adaptations portent notamment sur les rejets canalisés et diffus de CVM (en cohérence avec le point 3) qui doivent être ceux des installations étudiées, sur les conditions météorologiques locales et la localisation des émissaires.

7. Les modifications envisageables en vue de réduire les rejets de CVM

Une étude technico-économique, basée la mise en œuvre des meilleurs technologies disponibles, sera établie pour :

7.1.

Justifier la mise en œuvre de mesures de prévention permettant de viser, pour les populations extérieures concernées, un niveau de concentration du CVM dans l’air ambiant de l’ordre de 10 ug/m3, ceci pour une durée d’exposition " vie entière ".

7.2.

Pour respecter les plafonds d’émission et de rejet fixés par les textes OSPAR en référence 2 et pour la mise en œuvre des meilleures technologies disponibles (la charte ECVM des producteurs de CVM et PVC, par exemple).

Cette étude sera complétée du bilan prévisionnel des rejets en découlant.

Outre les aspects techniques, les modifications envisageables comprennent les méthodes et les pratiques en vigueur sur les sites.

8. Le plan d’action visant à réduire les rejets de CVM et son échéancier de réalisation

Un plan d’action comportant des mesures de prévention visant à réduire les rejets de CVM dans les différents compartiments sera proposé à l’issue du dossier. Le plan d’action est assorti d’un échéancier de réalisation et d’achèvement.

Ce plan d’action sera élaboré en cohérence avec les points précédents, compte tenu notamment :

- des résultats des évaluations des impacts sanitaires du point 6 ;

- de l’analyse des accidents et des incidents survenus au cours de la période décennale passée, ainsi que dans des situations similaires en France ou à l’étranger ;

- des résultats de la comparaison entre les moyens de prévention actuellement installés, que ces moyens soient de nature technique ou organisationnelle, et les conclusions de l’étude demandée au point 7.

Annexe II : Rapport final du groupe de travail relatif aux installations mettant en œuvre le chlorure de vinyle monomère

Méthode d’évaluation des conséquences sanitaires dans l’étude d’impact d’une installation mettant en œuvre le chlorure de vinyle monomère (CVM) Février 2000

Ce document est le compte rendu final des travaux menés par le groupe " CVM " créé et animé par le service de l’environnement industriel du MATE.

Objet des travaux du groupe

Ce rapport rend compte de l’ensemble des études, travaux, discussions et réunions menés pendant l’année 1999 par un groupe de travail " étude d’impact CVM ", créé et animé par le service de l’environnement industriel du ministère de l’aménagement du territoire et de l’environnement.

Ce groupe de travail se constituait de représentants des organismes suivants :

- SEI ;

- DRIREs (Paca, France-Comté) ;

- INERIS ;

- SHD (syndicat des halogènes et dérivés) ;

- SPMP (syndicat des producteurs de matières plastiques) ;

- UIC (union des industries chimiques).

Contexte des travaux du groupe

Toute étude d’impact d’une installation relevant de la législation des installations classées pour la protection de l’environnement doit comporter, en application de l’article 3-4° du décret du 21 septembre 1977, " une analyse des effets directs et indirects, temporaires et permanents de l’installation sur l’environnement et en particulier sur les sites et paysages, la faune et la flore, les milieux naturels et les équilibres biologiques, sur la commodité du voisinage (bruits, vibrations, odeurs, émissions lumineuses) ou sur l’agriculture, l’hygiène, la salubrité et la sécurité publiques, sur la protection des biens matériels et du patrimoine culturel ; cette analyse précise notamment, en tant que de besoin, l’origine, la nature et la gravité des pollutions de l’air, de l’eau et des sols, le volume et le caractère polluant des déchets, le niveau acoustique des appareils qui seront employés ainsi que les vibrations qu’ils peuvent provoquer, le mode et les conditions d’approvisionnement en eau et d’utilisation de l’eau ".

Le décret du 20 mars 2000 a complété ce paragraphe, reprenant explicitement le terme " santé ", ce qui assure désormais une cohérence entre le contenu et les objectifs de l’étude d’impact du décret du 21 septembre 1977 avec le champ d’application de la loi du 19 juillet 1976 défini en son article 1er : " Sont soumis aux dispositions de la présente loi les usines, ateliers, dépôts, chantiers, et d’une manière générale les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l’agriculture, soit pour la protection de la nature et de l’environnement, soit pour la conservation des sites et des monuments. ".

L’examen de nombreuses études d’impact figurant dans des dossiers de demande d’autorisation a montré que l’analyse des effets des installations sur les personnes et l’environnement qui relève de l’entière responsabilité de l’exploitant était, dans de nombreux cas, réduite à un engagement, parfois peu démonstratif, de respect des valeurs fixées par la réglementation, notamment l’arrêté du 2 février 1998.

Si effectivement les valeurs limites de l’arrêté du 2 février 1998 ont pour objectif d’assurer la protection des populations (la circulaire d’application de l’arrêté du 2 février 1998 datée du 17 décembre 1998 précise qu’un des objectifs de l’arrêté est d’assurer un haut niveau de protection des milieux naturels et de la santé des populations), le simple engagement de respect de valeurs réglementaires ministérielles constitue une condition nécessaire mais certainement pas suffisante. En effet, le principe même du régime de l’autorisation est d’obliger l’exploitant à établir la démonstration de la compatibilité de son projet avec l’environnement. Le paragraphe 4 de l’article 4 du décret du 21 septembre 1977 précise que l’étude d’impact présente successivement :

c) Les raisons pour lesquelles, notamment du point de vue des préoccupations d’environnement, parmi les solutions envisagées, le projet présenté a été retenu.

d) Les mesures envisagées par le demandeur pour supprimer, limiter et si possible compenser les inconvénients de l’installation ainsi que l’estimation des dépenses correspondantes. " Ces mesures font l’objet de descriptifs précisant les dispositions d’aménagement et d’exploitation prévues et leurs caractéristiques détaillées. Ces documents indiquent les performances attendues, notamment en ce qui concerne la protection des eaux souterraines, l’épuration et l’évacuation des eaux résiduelles et des émanations gazeuses, ainsi que leur surveillance, l’élimination des déchets et résidus de l’exploitation, les conditions d’apport à l’installation des matières destinées à y être traitées, du transport des produits fabriqués et [modification introduite par le décret du 20 mars 2000] de l’utilisation rationnelle de l’énergie. "

En vue d’étudier les possibilités d’amélioration de l’évaluation des impacts sanitaires des rejets des installations classées pour la protection de l’environnement, quatre groupes de travail nationaux ont été initiés par le MATE, dont celui objet du présent document qui a finalisé ses travaux en février 2000.

Méthodologie générale

La démarche générale suit la logique " source-vecteur-cible " dans un contexte d’étude des effets chroniques éventuels dus aux émissions et rejets d’une activité industrielle en fonctionnement normal, en phases transitoires (démarrage ou arrêt) ou en phases dégradées. Les émissions résultant des situations accidentelles relèvent de l’étude de dangers.

La démarche suit les étapes suivantes :

- inventaire des émissions susceptibles d’entraîner des conséquences sur la santé des populations avoisinantes ;

- inventaire des substances présentes dans chacune des émissions inventoriées ;

- quantités ou flux de substances émises.

On peut alors se trouver en présence de nombreuses substances qui, par leur toxicité et les quantités rejetées, pourraient présenter des risques sanitaires potentiels. Il est alors possible de ne retenir, pour la suite de l’étude, que les cas où les risques potentiels sont les plus importants, à condition de justifier ces choix.

Pour chaque substance concernée, la description des effets connus et anticipés sur la santé de l’homme suivant les modalités d’exposition se déroule selon les étapes suivantes :

- dispersion, diffusion ;

- étendue des zones géographiques d’étude ;

- populations concernées ;

- points et voies d’exposition ;

- quantification des expositions.

Un point délicat, en particulier, reste celui du choix des valeurs-limites d’exposition de référence. On doit rechercher, chaque fois qu’elles existent dans les réglementations nationales ou européennes, ou dans les recommandations internationales (OMS par exemple), les valeurs pertinentes existantes. A défaut, on procédera par expertise avec les données disponibles.

Pour ce qui concerne les effets, il y a lieu de distinguer entre les effets toxiques apparaissant à partir d’un certain seuil et ceux pour lesquels il ne paraît pas possible, dans l’état actuel des connaissances, d’établir l’existence d’un seuil (cas typique de certains effets cancérogènes de type génotoxique).

Dans le premier cas, une exposition inférieure au seuil de toxicité permet de conclure à une absence de risque ou à sa faible probabilité d’occurrence.

Dans le second cas, pour les substances à effet sans seuil, la méthode actuellement retenue, mais faisant toujours l’objet de discussions, est la suivante : la substance est caractérisée par un excès de risque sanitaire unitaire (ERU), calculé pour une exposition durant la vie entière et caractérisant un excès de cas (cancer en l’occurrence) par rapport au niveau de base d’une pathologie donnée. En multipliant l’ERU par la dose journalière d’exposition, on obtient l’excès de risque individuel (ERI).

Pour l’exposition à une substance cancérogène, est ainsi défini un risque résiduel caractérisé par l’ERI. La fixation de valeurs d’ERI acceptables, raisonnables et réalistes, en particulier au regard d’autres risques sur la santé non générés par les installations industrielles, relève du processus de décision et non de l’expertise.

Dans le cas où plusieurs substances sont en cause, il n’est pas pertinent de cumuler les effets : les risques doivent être évalués séparément sauf le cas exceptionnel où les substances considérées auraient le même effet sur le même organe ou bien si leurs effets se potentialisent. Il faut donc évaluer les risques (probabilité x conséquence) séparément. Chaque substance agit par un mécanisme qui lui est propre sur des organes cibles spécifiques et entraîne des effets qui lui sont propres ; il n’est donc pas pertinent d’additionner les risques.

On peut avoir affaire à une installation nouvelle ou à une extension d’installation existante. Il est alors important de quantifier l’éventuelle exposition préexistante (niveau initial environnemental pour une nouvelle installation, exposition due aux activités déjà exercées pour une installation existante) car l’exposition due à l’activité de l’installation s’y ajoute et c’est le résultat global qui est à prendre en compte dans la phase de comparaison aux valeurs de référence.

L’industrie fabriquant ou utilisant le chlorure de vinyle monomère comprend essentiellement des unités de production de cette substance et des unités de fabrication de PVC (polychlorure de vinyle) associées ou non aux précédentes. Cette industrie peut rejeter différentes substances, mais le groupe de travail a choisi de se limiter au seul CVM, ce qui donne l’occasion d’illustrer la démarche d’évaluation de l’effet sanitaire sur un composé gazeux cancérogène génotoxique de catégorie 1 (classification de l’UE).

Bien évidemment, la démarche pour les substances pouvant exercer d’autres types d’effets à long terme sur la santé devra être adaptée aux caractéristiques toxicologiques du produit, notamment pour le choix des niveaux de risque acceptables et donc de la valeur limite de référence.

D’autres facteurs ont milité en faveur du CVM pour une telle étude ayant pour objet de définir une méthodologie :

- la voie d’exposition est uniquement la voie aérienne (voir ci-après) ;

- l’industrie, à la suite de la mise en évidence du caractère cancérogène du CVM et de la publication de valeurs limites en Europe et aux Etats-Unis, a mené des études pour mieux connaître ses émissions et les réduire ;

- la mise en application des décisions OSPAR ainsi que les possibilités de réglementation attribuées à l’autorité préfectorale par l’arrêté intégré du 2 février 1998 ne peuvent qu’être confortées par la présente étude.

Les industriels concernés ont préconisé de tester la méthodologie sur le cas d’émissions d’une " installation générique ", représentative, par sa capacité et ses niveaux d’émission, des sites de production les plus importants en France. Les émissions de cette installation, regroupant production de CVM et fabrication de PVC, ont été définies quantitativement par le syndicat des halogènes et dérivés (SHD) et le syndicat des producteurs de matières plastiques (SPMP), et validées par le groupe de travail. Cette voie de l’" installation générique " a été préférée à celle étudiant une installation réelle, en particulier parce qu’elle donne un modèle plus facilement utilisable pour traiter un cas réel.

Le groupe de travail a ensuite étudié le potentiel de risque pour la santé des populations voisines. Sur ce sujet, qui a fait l’objet de nombreuses recherches, une étude critique menée conjointement par le syndicat des halogènes et dérivés et l’UIC, mise à disposition par la direction sécurité-environnement d’Elf-Atochem et par Solvay, a permis de sélectionner des valeurs de référence dont celles de l’OMS.

Les effets sanitaires éventuels étant dus à l’exposition aérienne à ce corps gazeux, on a pu simplifier la partie délimitation de la population exposée et estimation de son niveau d’exposition. En partant des limites de propriété de l’installation générique, on a tracé des courbes d’isoconcentration moyenne sur une durée annuelle. Cela a pu se faire en utilisant un logiciel (DISPER) développé par Elf-Atochem pour le cas des faibles concentrations et modifié pour déterminer, en fonction des quantités émises, des conditions de vent et de stabilité de l’atmosphère, la valeur moyenne annuelle de la concentration dans l’air en un lieu donné.

Les conclusions quant au risque sanitaire présenté par l’installation générique sont obtenues en comparant les concentrations d’exposition les plus défavorables aux valeurs limites de référence.

Apport de l’exemple à la méthode

Cet exemple du VCM présente quelques particularités qu’il convient de garder présentes à l’esprit :

Il s’agit d’unités multisources à émissions canalisées et diffuses.

Le traitement de la dispersion atmosphérique conduit à des concentrations moyennes annuelles en des lieux donnés.

Toutefois, les propriétés physico-chimiques particulières du VCM font qu’on ne le retrouve que dans l’air, qui devient l’unique vecteur de transport.

En ce qui concerne le chapitre relatif à l’établissement de la valeur limite de référence, l’exemple du CVM constitue un cas particulier non généralisable aux autres substances chimiques.

En effet, le cas du CVM présente deux particularités :

1. Parmi les substances chimiques susceptibles d’exposer la population générale par inhalation, c’est l’une des rares qui soit reconnue comme agent cancérogène génotoxique prouvé pour l’homme ; on considère dans ce cas qu’il n’existe pas de dose en dessous de laquelle on n’observerait aucun effet génotoxique ; le problème serait de considérer de façon différente, si nous avions affaire à un cancérogène non génotoxique (cas beaucoup plus fréquent) ; dans ce cas, on peut admettre l’existence d’une dose seuil.

2. C’est pratiquement la seule substance industrielle pour laquelle on dispose d’enquêtes épidémiologiques permettant de quantifier directement le risque cancérogène.

Ces particularités conduisent à employer des modalités d’évaluation du risque cancérogène pour le CVM qui seraient très probablement beaucoup plus difficilement applicables à d’autres substances chimiques industrielles.

I. Installations produisant ou utilisant du CVM et sources d'émission correspondantes

I.1. Généralités

L’étude d’impact, dans sa partie impact sur l’environnement, doit présenter un bilan des émissions dont une partie au moins est utilisable pour élaborer l’évaluation des effets sur la santé des populations. Il s’agit donc des émissions habituelles prévisibles de l’installation qui soit sont canalisées, soit sont diffuses ou fugitives.

Le type même de l’émission canalisée est la cheminée qui collecte les effluents gazeux des épurateurs de gaz. Dans cette situation, on peut faire des mesurages représentatifs de flux d’effluent et de concentration de polluants et quantifier ces émissions.

Les émissions diffuses sont celles émises à partir d’une surface ou d’un volume sans qu’un point d’émission puisse être défini (par exemple ouverture d’un appareil).

Les émissions fugitives sont émises en un point de façon intermittente et peu prévisible (exemple : défaut d’étanchéité d’un joint, levée d’une soupape). Un ensemble d’émissions fugitives réparties dans l’espace peut être assimilé à une émission diffuse dans le volume des installations (on suppose la concentration constante dans le volume).

Si les émissions peuvent être collectées, par exemple par aspiration dans un émissaire, elles peuvent être mesurées et suivies comme une émission canalisée. Dans le cas contraire, ces émissions peuvent faire l’objet d’évaluations statistiques.

Elles posent un problème supplémentaire, car les logiciels de modélisation de leur dispersion atmosphérique sur le site sont plus difficiles de mise en œuvre. La solution retenue dans ce qui suit consiste à assimiler l’émission à une source unique ponctuelle virtuelle équivalente qui donne, dans le volume considéré, la même concentration volumique en CVM que les émissions diffuses.

L’effet sanitaire sur la population peut résulter du fonctionnement normal (tel que prévu) de l’installation, mais aussi d’un fonctionnement dégradé. En effet, des dysfonctionnements peuvent apparaître dans toute installation industrielle, avec comme conséquence une variation des émissions, pendant un temps limité. Des exemples de tel dysfonctionnement générant une augmentation des émissions peuvent être l’arrêt inopiné et temporaire d’un système de traitement des évents. C’est l’expérience industrielle qui permet d’identifier ces situations dégradées et d’avoir des données sur leur probabilités d’occurrence, leur durée et les émissions correspondantes. On peut prendre en compte ces émissions en tant que source ponctuelle ou diffuse selon leur nature, pendant une durée limitée. De même, les périodes d’arrêt des installations et correspondant généralement à un arrêt des émissions seront à soustraire. Dans l’étude réalisée, les débits de CVM sont évalués globalement puis répartis en moyenne sur la totalité du temps pris en compte dans l’étude.

I.2. Production de CVM

Le chlorure de vinyle monomère est produit industriellement à partir d’éthylène et de chlore ou de chlorure d’hydrogène (ou gaz chlorhydrique).

Le procédé comprend, en première étape, la production de dichloréthane (DCE), obtenu par chloration de l’éthylène suivant la réaction :

C2H4 + Cl2 (ρ) C2H4 Cl2

Le dichloréthane peut aussi être produit à partir de gaz chlorhydrique anhydre par une réaction d’oxychloration avec l’éthylène :

C2H4 + 2 HCl + 1/2 O2 (ρ) C2H4Cl2 + H2O

Le DCE est épuré, puis " craqué " en phase gazeuse pour générer le CFM :

C2H4 Cl2 (ρ) C2H3 Cl + HCl

L’essentiel du gaz chlorhydrique produit par ce craquage est utilisé en oxychloration après séparation.

Le bilan global d’obtention du CVM à partir de l’éthylène s’écrit donc :

2 C2H4 + Cl2 + 1/2 O2 (ρ) 2 C2H3Cl + H2O

La figure 2 est un schéma simplifié de l’installation de production. A la sortie des réacteurs de chloration, l’unité de purification du dichloréthane, qui reçoit également le DCE produit par le réacteur d’oxychloration, est composée d’un module de lavage à l’eau acidulée suivi d’une décantation, d’un séchage et d’une distillation.

A la sortie du four de craquage (environ 500 °C et 1,2 Mpa), la séparation de l’acide chlorhydrique formé, la séparation du dichloréthane non transformé, puis la purification du CVM se font dans des colonnes à distiller.

Le réacteur d’oxychloration utilise de l’air éventuellement enrichi en oxygène. Il travaille en lit fixe ou en lit fluidisé, avec un catalyseur à base de chlorures de cuivre. Le mélange réactionnel est d’abord refroidi par trempe à l’eau, puis passe dans un décanteur à la sortie duquel le 1,2-dichloréthane récupéré est renvoyé en tête d’installation, tandis que la phase gazeuse est traitée par des solvants lourds pour la débarrasser des dernières traces de 1,2-DCE. L’effluent gazeux résiduaire est incinéré avec récupération de la chaleur de combustion sous forme de vapeur.

Dans toutes ces opérations, il se forme des sous-produits. Ce sont, en particulier :

- les produits légers sortant des réacteurs de chloration et oxychloration ;

- les produits lourds sortant du four de craquage et qui sont récupérés dans les étages de séparation qui suivent.

Ces produits liquides sont généralement envoyés vers un four d’incinération. Les gaz brûlés sont traités dans une colonne de lavage (on peut récupérer de l’acide chlorhydrique) avant d’être rejetés à l’atmosphère.

Le décanteur qui se trouve à la sortie du réacteur d’oxychloration produit un effluent aqueux contenant des hydrocarbures chlorés dissous dans l’eau et des sels métalliques. Cet effluent est traité avant d’être rejeté.

Les principales émissions sont décrites dans les documents BAT CVM déjà publiés (ECVM, OSPAR) ou en cours de rédaction (EIPPC bureau).

Les principales sources d’émission du CVM sont :

- les évents des réacteurs de chloration et d’oxychloration, des colonnes de distillation et autres équipements de purification ;

- les brides sur tuyauteries et appareils, les garnitures d’étanchéité des pompes et compresseurs ;

- les ouvertures des équipements, particulièrement des réacteurs pour les opérations d’entretien, les relargages des stations d’épuration ;

- les émissions lors des opérations de chargement/déchargement de véhicules de transport de CVM.

Les émissions qualifiées de " canalisées " sont issues d’émissaires telles que des cheminées, des dispositifs de rejet à l’atmosphère de système ventilation d’atelier, qui peuvent collecter des émissions provenant de brides ou d’ouverture de capacités.

Par opposition, les émissions diffuses sont constituées par les rejets qui ne peuvent être canalisés.

Différentes situations de fonctionnement dégradé peuvent se manifester, telles que perte d’efficacité sur traitement des évents de sécurité.

I.3. Fabrication du PVC

Le polychlorure de vinyle est une macromolécule linéaire obtenue par polymérisation radicalaire du CVM. Il est composé du motif :

H
H
où n va de 300 à 1 500
C
C
H
Cl
n

Industriellement, il existe trois procédés de production de PVC à partir du CVM. Ils sont connus sous les noms de " PVC suspension ", " PVC émulsion " et " PVC par polymérisation en masse ". Les deux premiers procédés se sont imposés et ce sont eux qui sont étudiés dans ce qui suit.

I.3.1. Procédé PVC suspension (figure 3)

Le chlorure de vinyle monomère (peu soluble dans l’eau) est mélangé avec de l’eau désionisée dans un réacteur dont l’agitation vigoureuse mène à une suspension de gouttelettes de CVM dans l’eau. Les gouttelettes ont un diamètre de 30 à 50 µm en moyenne, et elles vont constituer chacune un minuscule réacteur de polymérisation. Pour cela, on ajoute au moment de la formation du bain, des initiateurs de polymérisation et des adjuvants dont un émulsifiant qui permet le maintien en suspension des gouttelettes réactionnelles. On laisse se poursuivre la réaction jusqu’à un rendement de 85 % avant de passer à la suite du traitement. Il s’agit donc d’un procédé discontinu dans un réacteur qui, dans les nouvelles installations ou dans les installations rénovées, est du type fermé.

La pâte obtenue est envoyée dans une cuve de dégazage, où l’on récupère la majeure partie du CVM non utilisé. Un stripper fonctionnant à la vapeur finit le travail d’extraction du CVM. La pâte est alors essorée dans une centrifugeuse et le produit obtenu subit un séchage final en lit circulant ou par un séchage flash. On obtient ainsi une poudre, dont les grains font 120 à 150 µm de diamètre et qui contient des traces de CVM (moins de 10 ppm dans tous les cas).

Du point de vue substances dangereuses émises, le CVM domine les autres. On le retrouve dans les eaux résiduaires et il est émis dans l’air par des sources canalisées et diffuses. Du côté des sources canalisées, elles convergent vers une cheminée avec une contribution majeure de l’unité de séchage. Les sources diffuses sont celles déjà citées en I.2 ci-dessus. Mentionnons l’importance des opérations d’ouverture des réacteurs lorsque ceux-ci sont du type ouvert. En effet, il est nécessaire de procéder à cette ouverture après quelques opérations seulement, alors qu’en réacteur fermé on peut aller jusqu’à une centaine de cycles de fabrication.

Un fonctionnement dégradé peut s’observer lors d’emballement de la réaction qui est fortement exothermique.

I.3.2. Procédé PVC émulsion (figure 4)

Comme précédemment, le CVM est mélangé avec de l’eau, mais cette fois en présence d’un agent émulsifiant qui permet d’obtenir une suspension colloïdale stable, avec des globules de taille micronique. On distingue deux procédés industriels de mise en œuvre de cette voie suivant que la suspension colloïdale se forme spontanément ou que l’on introduit volontairement des noyaux sur lesquels se forme le colloïde. On décrit ci-après le procédé sans ensemencement, avec pour produit final une poudre de PVC. Il existe, en effet, des variantes où l’on s’arrête à l’étape de fabrication de la résine de PVC en suspension colloïdale, obtenant ainsi du latex de PVC. Généralement, tous ces procédés sont de type discontinu au niveau du réacteur, avec possibilités de stockage intermédiaire pour permettre un fonctionnement continu de l’aval, par exemple pour le tour de séchage par atomisation.

Les composants de la réaction sont introduits dans une cuve de mélange maintenue à 20° C sous 1 bar. L’émulsion homogène ainsi obtenue, est transférée dans le réacteur de polymérisation qui travaillera vers 60° C sous 6 à 10 bars. Lorsque le taux de transformation approche 90 %, on arrête la réaction en dégazant le ciel du réacteur et en transférant la suspension vers une colonne de stripage qui élimine le CVM restant. La suspension est alors séchée, généralement dans une tour d’atomisation. La poudre résultante est récupérée dans un cyclone à la sortie duquel la phase gazeuse chargée de fines est envoyée dans un filtre à manches dont la sortie débouche à l’extérieur.

Le produit venant du cyclone est envoyé à un broyeur de façon à obtenir le produit commercial qui est une poudre de grains de diamètre moyen autour de 20 µm, chaque grain étant un agglomérat de particules de quelques microns.

Du point de vue substances dangereuses, le CVM domine les autres. Il est émis par voie canalisée venant de la tour d’atomisation et de la sortie du filtre à manche, et par voie diffuse analogue à celle citées en I.2 ci-dessus.

Un fonctionnement dégradé peut s’observer lors d’emballements de la réaction de polymérisation qui est fortement exothermique

II. Caractéristiques physico-chimiques et toxicologiques du CVM

II.1. Propriétés physico-chimiques

Dans les conditions normales de températures et de pression, le CVM est un gaz incolore peu soluble dans l’eau. Il est usuellement stocké à l’état liquide dans des récipients en acier sous pression ou en stockage cryogénique.

Il figure dans l’ELINCS sous le n° 609-023-00-7 (voir figure 5). Son étiquetage F+ associé à la phrase de risque R 12 (extrêmement inflammable) le fait entrer dans la nomenclature ICPE, mais c’est la phrase de risque R 45 (peut provoquer le cancer) qui justifie les préoccupations d’impact sanitaire sur le voisinage.

Voici quelques caractéristiques physico-chimiques :

- température normale d’ébulition : -13,9° C ;

- masse volumique du liquide : à -14° C 0,975 kg/m3 ; à 20 °C 0,915 kg/m3 ;

- pression de vapeur : à -20 °C 0,077 MPa ; à 0° C 0,175 MPa ; à 20° C 0,33 MPa ;

- température d’autoinflammation : 472 °C ;

- solubilité dans l’eau : 1,1 g/l à 25 °C ;

- évaporation de la solution aqueuse à 1 mg/litre portée à 35 °C : 50 % après 26’; 90 % après 96’, (d’après le "Verschueren");

- constante de Henry à 25 °C : 1070 Pa.m3.mole-1 ;

- coefficient de partage octanol/eau : log Kow = 1,38 ;

- coefficient de partage carbone organique/eau : log Kow = 1.74 ;

- relation ppm - mg/m3/ : 1 ppm = 2,6 mg/m3.

Remarques :

La constante de Henry est le rapport de la pression partielle du corps dans l’air à sa fraction molaire dans l’eau lorsque le système est à l’équilibre.

Le coefficient de partage octanol-eau, désigné en France par Po/e, est un nombre sans dimension qui est le rapport des concentrations partielles du corps dans les phases octanol et eau du mélange des deux solvants. Son logarithme est, pour la plupart des substances, proportionnel au facteur de bioconcentration et il peut donc servir à caractériser l’accumulation de la substance dans les tissus biologiques.

Le coefficient de partage carbone organique-eau sert à étudier le potentiel de mouvement d’un produit dans les sols. Il représente le rapport entre la quantité de substances abordée par unité de poids de carbone organique et la concentration dans l’eau lorsque le système est à l’équilibre.

II.2. Devenir dans l’environnement - Voies d’exposition au chlorure de vinyle des populations riveraines de l’installation

En raison de sa forte pression de vapeur (3 300 hPa à 20° C) et de sa faible solubilité dans l’eau, le mode de transport principal du chlorure de vinyle dans l’environnement est l’atmosphère. Cependant, lorsqu’il est libéré dans l’atmosphère, le chlorure de vinyle subit une dégradation rapide par oxydation photochimique. Il ne s’absorbe pas dans le sol (Koc = 57 ml.g-1) et les sédiments et ne s’accumule pas dans les tissus biologiques (log Kokw = 1,38). Selon les modèles de fugacité de Mc Kay, il apparaît que tout le chlorure de vinyle libéré se retrouve virtuellement dans l’air et se distribue très peu dans les autres compartiments (Delzell et coll. 1994).

Le niveau de base d’exposition de la population générale au chlorure de vinyle a été estimé par l’OMS. L’exposition provient essentiellement de l’inhalation et s’établit, toutes sources confondues, à 2-10 µg/jour/personne (un gros fumeur inhale en plus 0,5 µ/j). L’apport par l’eau et les aliments est négligeable, est estimé inférieur à 0,1 µg/j. (WHO, 1987).

En Angleterre, vers le milieu de la décennie quatre-vingt, les concentrations mesurées dans l’air autour d’installations de production et d’utilisation de chlorure de vinyle, en situation de marche normale, étaient de 225 µg/m3 en bordure de site, de 50 µg/m3 à 100 m de la limite du site et étaient voisines du seuil de détection analytique (13 µg/m3) au-delà (Turner et coll. 1984).

La voie essentielle d’exposition potentielle de la population riveraine par le chlorure de vinyle issu de l’installation sera donc l’inhalation.

II.3. Evaluation du potentiel de danger pour la santé

Les dangers liés à l’exposition au chlorure de vinyle ont été, pour l’essentiel, identifiés en milieu professionnel dans les années

cinquante/soixante-dix et sont rappelés ci-après :

II.3.1. Potentiel de danger à court terme (toxicité " aiguë ". - Situation accidentelle)

Les effets du chlorure de vinyle à la suite de l’inhalation de fortes concentrations de vapeurs en exposition unique et/ou de courte durée se caractérisent essentiellement par une dépression du système nerveux central. À 2 300 mg/m3, on note une euphorie, des étourdissements, des maux de tête, de la somnolence, puis une narcose (Suciu et coll. 1975). Vers 25 000 mg/m3, on note des arythmies cardiaques, une narcose et une perte de connaissance (Lilis et coll., 1975). Des concentrations de chlorure de vinyle de l’ordre de 10 à 20 % dans l’air (250 000 à 500 000 mg/m3), sont nécessaires pour obtenir l’anesthésie chirurgicale qui fut expérimentée pendant un certain temps dans les années cinquante/soixante (Torkelson, 1963).

II.3.2. Potentiel de danger par expositions répétées et prolongées à fortes concentrations (toxicité " chronique ")

Dans les années 50-60, on a observé un syndrome pathologique spécifique sur des personnes exposées de façon répétée à quelques centaines de mg/m3 de vapeurs de chlorure de vinyle en milieu professionnel. Cette " maladie du chlorure de vinyle " était caractérisée par des signes cutanés (pseudosclérodermie et épaississement du derme), un accroissement de volume du foie et de la rate avec fibrose (Filatova et Gronsberg, 1957). A des concentrations encore plus élevées, notamment chez les " décroûteurs " des réacteurs de polymérisation, on observait des troubles circulatoires périphériques semblables à ceux de la maladie de Raynaud (insensibilisation, pâleur et cyanose des doigts) précédant l’acro-ostéolyse (décalcification des phalanges terminales) (Cordier et coll. 1966).

II.3.3. Potentiel de dangers toxiques spécifiques

II.3.3.1. Tératogénèse et embryotoxicité

Les expositions expérimentales au chlorure de vinyle durant la période de gestation n’ont pas provoqué d’effets tératogènes chez le rat, la souris et le lapin à des concentrations allant jusqu’à 6 500 mg/m3 (John et coll. 1977).

En raison d’une augmentation du taux d’avortement des épouses d’hommes employés dans l’industrie du PVC et de l’incidence de malformations chez leurs enfants, il a été suggéré que le chlorure de vinyle pourrait provoquer des mutations des cellules germinales (Infante et coll. 1976). Les déficiences méthodologiques de ces études ne permettent pas d’établir une conclusion formelle (WHO, 1987), d’autant que des enquêtes ultérieures conduites de façon correcte, n’ont pas confirmé les résultats d’Infante et coll. (Torkelson, 1994).

Le danger vis-à-vis de la reproduction n’est pas considéré comme identifié pour le chlorure de vinyle.

II.3.3.2. Mutagenèse (ECETOC, 1988, Giri, 1995)

Les fortes expositions professionnelles des années antérieures à 1975 ont été associées à des aberrations chromosomiques des lymphocytes périphériques dans plusieurs études conduites sur des ouvriers en contact avec le chlorure de vinyle.

Le chlorure de vinyle s’est révélé mutagène et génotoxique dans plusieurs types de tests expérimentaux in vitro et in vivo.

Le chlorure de vinyle doit donc être considéré comme globalement génotoxique.

II.3.3.3. Cancérogenèse

Le potentiel cancérogène du chlorure de vinyle est reconnu chez l’homme depuis le milieu des années 70, de nombreuses études de cas et enquêtes épidémiologiques ayant permis d’établir avec certitude son caractère cancérogène (IARC 1979 ; IARC, 1987). Le chlorure de vinyle provoque des augmentations d’incidence hautement significative d’hémangiosarcomes hépatiques. Il a été associé également avec des augmentations d’incidences de plusieurs autres cancers (système nerveux central/cerveau, tractus gastro-intestinal, poumons, système lymphatique) mais sans confirmation statistique (WHO, 1987).

De nombreux essais de laboratoire ont confirmé le potentiel cancérogène du chlorure de vinyle chez le rat, la souris et le hamster exposés par inhalation ou par voie orale. Toutes les espèces ont développé des angiosarcomes hépatiques. Des augmentations d’incidence de tumeurs d’autres sites (glande de Zymbal, glandes mammaires, poumon, peau...) ont également été observées (IARC, 1979, 1987 ; ECETOCn 1988). Les incidences de tumeurs varient avec l’âge des animaux ou l’association du chlorure de vinyle avec l’éthanol ; les effets sont proportionnels aux expositions et apparaissent dans une large gamme de doses (entre 25 et 77 000 mg/m3 par inhalation ; entre 0,3 et 50 mg/kg/j par voie orale) comme cela est généralement noté avec les cancérogènes génotoxiques (ECETOC, 1988).

III. Choix d'une installation générique

III.1.Justification du choix, origine des données numériques

L’installation générique retenue est composée de trois unités de production constituées d’une unité de fabrication de CVM d’une capacité de 300 000 t/an, d’une unité de PVC - suspension d’une capacité de 200 000 t/an et d’une unité de PVC - émulsion d’une capacité de 80 000 t/an, représentatives des sites de production les plus importants en France. Elles sont supposées être regroupées sur un même site, et disposées de sorte que les expositions alentour soient maximisées, compte tenu de la rose des vents.

Pour identifier et quantifier les émissions des différentes sources, on dispose de valeurs de ces émissions pour des installations utilisant les BAT (Best Available Techniques) et aussi de résultats de mesurage sur des installations en fonctionnement. Du côté des standards, on dispose principalement de la charte ECVM signée par les producteurs de CVM et PVC, des BAT publiées par OSPARCOM et des décisions OSPAR 98/4 et 98/5 (CVM et PVC suspension). Les données expérimentales sont issues de mesures effectuées sur un site de production.

III.2. Émissions des unités génériques

Pour le CVM, les sources d’émission sont décrites en I.2.

Pour le PVC-suspension, les sources d’émission sont décrites en I.3.

Pour le PVC émulsion, les sources d’émission sont décrites en I.3.

Le tableau ci-après donne les bilans des émissions :

Type d'unités Emissions canalisées Emissions fugitives
CVM 816 g/h 1 800 g/h
PVC-suspension 1 560 g/h 840 g/h
PVC-émulsion 9 000 g/h 1 000 g/h

IV. Evaluation des expositions

L’évaluation des expositions se fait par le calcul en mettant en œuvre une approche anisotrope et probabiliste, c’est-à-dire tenant compte des éléments météorologiques (vitesses et fréquences de directions du vent, stabilité atmosphérique associée) pour des zones géographiques homogènes.

IV.1. Choix du logiciel, données à fournir

IV.1.1. Logiciel

Le logiciel qui a été choisi est celui mis au point par Elf-Atochem à partir du modèle gaussien de Doury (Cf. cahier n° 6 de l’UIC). Il est habituellement utilisé au centre technique Elf-Atochem de Lyon et a été adapté pour déterminer en fonction de quantités émises, des conditions de vent et de stabilité de l’atmosphère, la " valeur moyenne annuelle " de la concentration dans l’air sur un lieu donné.

La version utilisée pour le calcul des concentrations moyennes tient compte de toutes les conditions météorologiques possibles sur un site, en intégrant la rose des vents dans le calcul, et donc, la fréquence d’occurrence de chaque condition de stabilité et de vitesse du vent, dans chaque direction. Les émissions de CVM sont supposées constantes dans le temps. On obtient les concentrations moyennes à une distance donnée, pour chaque secteur de vent sur une durée annuelle.

IV.1.2. Données fournies

Données météorologiques.

Les données météorologiques prises en compte dans cette étude, sont les suivantes :

Matrice de stabilité (d’après étude de Barthélémy).

Vitesse du vent (m/s) Atmosphère instable en % cumulé
1,00 79,00
3,00 95,00
7,50 100,00
14,00 100,00

Matrice des fréquence normalisées : ros des vents représentative utilisée en ‰. Les angles, en degrés représentent la direction d’où vient le vent. Le degré 0 indique le nord, le degré 90 l’est.

Angles

m/s

0 20 40 60 80 100 120 140 160 180 200 220 240 260 280 300 320 340
1.00 11 11 12 9 12 11 4 3 4 6 5 3 3 6 8 10 11 10
3.00 29 29 31 24 30 29 11 7 9 16 12 9 9 15 22 25 27 26
7.50 30 10 6 5 15 21 12 10 15 22 11 6 9 17 27 40 54 51
14.00 18 2 0 0 1 3 3 3 2 1 0 0 0 2 4 12 37 52

Matrice de directions des vents utilisée dans l’exemple

Disposition des sources.

Le calcul réalisé considère le cas de deux sources (CVM et PVC en suspension) et de trois sources (CVM, PVC en suspension, PVC en émulsion). Une hypothèse réaliste a été retenue pour la distance entre les sources, compte tenu de la surface au sol nécessaire à l’implantation de chacune des unités.

Des distances minimales de 225 m entre atelier CVM et PVC et de 150 mètres entres deux ateliers PVC sont justifiées par la taille des installations.

En ce qui concerne la disposition relative en direction, toutes les dispositions sont possibles et les expositions en chaque zone géographique homogène calculées pour les différentes dispositions.

La disposition pouvant conduire aux expositions les plus élevées a été recherchée. Une étude préliminaire a montré que ce cas est rencontré pour la situation météorologique type en alignant les cheminées des trois sources sur un axe est-ouest avec 225 mètres entre atelier CVM et PVC et 375 mètres entre ateliers les plus éloignés des uns des autres (voir figure 6).

Données d’émission :

Pour chaque atelier et pour simplifier le calcul, les émissions canalisées sont ramenées à une cheminée unique de 20 mètres de haut. On tient compte d’une surélévation du panache due à la vitesse d’éjection des gaz. Les émissions diffuses sont supposées provenir uniformément d’un volume fictif de 30 000 mètres cubes pour l’unité CVM et 360 000 mètres cubes pour l’unité PVC suspension et 15 000 mètres cubes pour le PVC émulsion.

IV.2. Concentrations d’exposition - Résultats majorants

En chaque zone géographique homogène autour de l’installation, le logiciel permet de calculer la valeur moyenne de concentration due à l’émission de chacune des trois sources. Les trois concentrations partielles peuvent être additionnées pour fournir la concentration d’expositionglobale. Le calcul s’est attaché aux expositions à une altitude de 1,8 mètre. A partir de là, on peut présenter les résultats sous deux formes différentes :

En considérant des couronnes successives autour d’une des unités et en donnant les valeurs moyennes de concentrations sur la couronne, en fonction de l’angle pour une même distance à la source.

En traçant des courbes d’iso-(valeur-moyenne de) concentration autour d’une source en faisant varier l’angle et la distance à la source.

IV.3. Valeur moyenne de la concentration d’exposition autour de l’ensemble des sources

La figure 7 présente la courbe d’iso-(valeur-moyenne de) concentration pour la valeur de 13,8 µg/m3, résultant des émissions d’un atelier de CVM et de PVC suspension. La figure 8 donne la même information pour une unité constituée de CVM, PVC-suspension et PVC-émulsion disposés comme indiqué précédemment.

Ces deux figures mettent en évidence l’effet des vents dominants.

Les figures 9-10-11 complètent ces informations en donnant des valeurs moyennes de concentration à différentes distances de la source, et pour différentes directions par rapport à la source (repérées par leur orientation à partir de la direction du Nord), pour respectivement l’atelier CVM, PVC-suspension et PVC-émulsion pris isolément.

On observe figure 9 que la valeur moyenne de concentration calculée décroît avec la distance par rapport à la source et qu’à 500 mètres, là où la probabilité selon les sites d’avoir des habitants devient plus importante, la valeur moyenne de concentration calculée est de l’ordre de 5 µg/m3. Pour le PVC en suspension (figure 10) la valeur moyenne de concentration à 500 mètres de la source est voisine de 1 à 2 µg/m3. Pour le PVC en émulsion (figure 11), on peut atteindre, pour certaines orientations,

10 µg/m3 à 500 mètres et 12 µg/m3 à 200 mètres.

V. Quantification des dangers et estimation des niveaux d'exposition non dangereux pour la santé (valeurs de référence)

V.1. Risque toxique aigu

L’intoxication aiguë se caractérise essentiellement par les effets sur le système nerveux central. Baretta et coll. (1969) ont exposé pendant 7-8 heures des volontaires sains jusqu’à 500 ppm (1 300 mg/m3). Seules des céphalées ont été rapportées à cette concentration qui peut être considérée comme le seuil d’action sur le système nerveux central de l’adulte sain.

De telles concentrations relèvent de fuites accidentelles majeures et sont traitées par ailleurs dans le cadre de " l’étude de dangers ".

V.2. Risque toxique chronique

Chez l’homme, la concentration seuil entraînant des effets toxiques chroniques (" maladie du chlorure de vinyle ") n’a pas été précisée. Cependant, ces effets avaient été notés à une époque où la valeur limite d’exposition professionnelle aux USA (TLV - ACGIH) était de 500 ppm (1 300 mg/m3) (Don Irish, 1963). De plus, Kramer et Mutchler (1972) ont établi qu’une exposition prolongée à la concentration moyenne de 300 ppm (700 mg/m3) commence à altérer les fonctions hépatiques.

L’examen des résultats des études de toxicité chronique chez diverses espèces animales, inhalant pendant plusieurs mois du chlorure de vinyle, indique un niveau de concentration sans effet toxique (NOAEL) (cf. note 1) de 130 mg/m3 (Torkelson 1994). Reitz et coll., 1996 ont appliqué récemment au chlorure de vinyle le modèle PBPK (" physiologically based pharmacokinetic " qui intègre les espèces métaboliques réactives intermédiaires considérées comme responsables de la toxicité du produit. Cette étude a montré que l’homme métabolise nettement moins le chlorure de vinyle que le rat et la souris et a donc une sensibilité moindre aux effets toxiques.

En considérant que le seuil d’intoxication chronique de l’adulte sain se situe vers 770 mg/m3 et en retenant une marge d’incertitude de 10 pour tenir compte d’une plus forte sensibilité de la population générale, le seuil d’effet toxique chronique pour les populations riveraines de l’installation pourrait être estimé à 77 mg/m3. La valeur de 130 mg/m3 comme NOAEL chez l’animal est donc cohérente avec un tel seuil de toxicité chronique estimé pour l’homme.

De telles concentrations d’exposition au chlorure de vinyle ne pourraient se concevoir qu’en milieu professionnel dans le cas théorique de contacts directs et répétés avec les équipements, qui pourraient éventuellement survenir dans un contexte accidentel lors de l’exploitation des installations. Ces situations sont traitées dans le cadre de la sécurité au travail pour la protection du personnel de l’établissement.

V.3. Risque cancérogène

Parmi les dangers toxiques spécifiques, le danger cancérogène a été identifié avec certitude, tant chez l’homme que chez l’animal de laboratoire. Le chlorure de vinyle est par ailleurs considéré comme un agent cancérogène de type génotoxique (IARC 1979, IARC 1987, WHO 1987) et peut donc être considéré, en thérorie, comme exerçant ses effets cancérogènes sans seuil de dose identifiable.

Selon l’OMS (WHO 1987), les évaluations à partir des études épidémiologiques sont les mieux adaptées pour juger des risques cancérogènes pour l’homme. Dans le cas du chlorure de vinyle, il existe des données épidémiologiques quantitatives suffisantes pour calculer les risques théoriques de cancer en appliquant une extrapolation linéaire : excès d’incidence de cancers statistiquement significatifs et estimations suffisamment raisonnables des niveaux d’exposition.

V.3.1. Estimation du risque par calcul

L’OMS (WHO 1987) a calculé, à partir des données de la grande cohorte américaine (EEH, 1978), un risque théorique d’angiosarcome hépatique de 1.106 pour 2,1 ug/m3 ; puis, en supposant que le nombre total de cancers d’autres localisations serait voisin du nombre total d’angiosarcomes hépatiques, l’OMS en déduit un risque d’excès de cancer totaux de 1.106 pour 1 ug/m3. Cependant, comme le fait remarquer l’OMS (1987), les cancers de localisations autres que le foie n’ont jamais été reliés de façon causale à l’exposition au chlorure de vinyle par les enquêtes épidémiologiques, et les augmentations d’incidence de cancer associées à l’exposition n’étaient pas statisquement significatives.

Donc, à partir du calcul de l’OMS, pour un niveau de risque théorique de 1 cas d’angiosarcome hépatique sur 100 000 personnes, la valeur d’exposition vie entière serait de 0,021 mg/m3. Pour 100 000 personnes, la valeur serait de 0,210 mg/m3.

Delzell et coll (1994) ont également calculé le risque théorique de mortalité par cancer lié au chlorure de vinyle en s’appuyant sur l’étude récapitulative de Doll (1988) sur l’ensemble des cohortes étudiées dans le monde. Pour leur calcul, ces auteurs ont retenu les éléments suivants :

- incidence de mortalité par cancer du foie : 2 % (Doll 1988) ;

- niveaux d’exposition : compris entre 260 mg/m3 (100 ppm) et 2 600 mg/m3 (1 000 ppm) considérés comme représentatifs des expositions antérieures à 1975 (IARC, 1979, Doll, 1988) ;

- extrapolation dose-réponse linéaire.

Cependant, l’extrapolation vie entière n’a pas été prise en considération.

A partir des calculs de Delzell et coll. (1994), on tire, pour un niveau de risque théorique de 1 cas de cancer du foie sur 100 000 personnes, une valeur d’exposition comprise entre 0,13 et 1,3 mg/m3. Pour 10 000 personnes, la valeur serait comprise entre 1,3 et 13 mg/m3.

V.3.2. Approche globale sans calcul

Richard Doll (1988) a estimé que les concentrations de chlorure de vinyle ayant occasionné l’apparition d’angiosarcomes hépatiques chez les ouvriers exposés dans les années antérieures à 1975 étaient 10 000 fois supérieures aux concentrations de chlorure de vinyle mesurées autour des sites industriels anglais produisant ou mettant en oeuvre ce produit. L’auteur britannique concluait donc que le risque d’angiosarcome hépatique résultant du chlorure de vinyle émis dans l’environnement autour des sites concernés est négligeable (" according to any reasonnable criterion, the hazard to the général public [if any at all] must be negligible "). En reprenant les données de Doll, Delzell et coll. (1994) ont estimé qu’au niveau de détection analytique du chlorure de vinyle des années 80, soit 0,013 mg/m3, le risque pour les populations riveraines est négligeable.

Par ailleurs, le groupe de travail a jugé intéressant de faire le rapprochement avec la valeur limite d’exposition professionnelle envisagée pour les installations nouvelles valeur moyenne d’exposition hebdomadaire = 1 ppm (2,6 mg/m3).

Si l’on admet une plus grande sensibilité de la population générale d’un facteur 10, on obtient la valeur de 0,26 mg/m3 (2,6/10 = 0,26). Si l’on admet ensuite, d’une part une exposition professionnelle de 8 h/j pendant 30 ans et d’autre part une exposition de la population riveraine de 24 h/24 pendant 70 ans, on obtiendrait finalement :

- (0,260) : (24/8) = 0.087 ;

- (0.087) : (70/30) = 0,037 mg/m3.

Pour le CVM, il va de soit que, pour une population générale, l’utilisation de valeurs limites d’exposition professionnelle même corrigées de facteurs de sensibilité, et extrapolé à une exposition permanente pendant une vie entière, n’est pas une démarche à retenir.

Compte tenu des niveaux de concentrations en chlorure de vinyle rapportés autour des installations industrielles manipulant un chlorure de vinyle (Turner et coll. 1984) et des risques calculés par l’OMS et par Delzell et coll. (1994), c’est donc le seul danger cancérogène qui est à considérer pour les populations riveraines de l’installation dans le cadre de l’étude d’impact sur la santé.

V.4. Choix de la valeur de référence pour le risque cancérogène

Les différentes valeurs examinées ci-dessus se récapitulent ainsi :

  Valeur entraînant excès théorique de cancer du foie pour un niveau de risque de : (en mg/m3)
1.10-4 1.10-5
OMS (1987) 0,210 0,021
Delzell et coll. (1994) 1,3 à 13 0,13 à 1,3
Doll (1998) Risque " négligeable " pour une valeur ? 0,013  

En raison, d’une part, du caractère démontré pour l’homme de l’angiosarcome hépatique et, d’autre part, du caractère génotoxique du chlorure de vinyle, nous proposons de retenir, comme valeurs de référence du chlorure de vinyle pour la protection de la santé des populations riveraines, la fourchette de concentration issue des valeurs OMS, c’est-à-dire : 21 à 210 µg/m3 pour une exposition vie entière.

Bibliographie

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Note :

(1) NOAEL : No Observed Adverse Effect Level.

 

 

 

 

 

 

 

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