Le ministre de l'écologie et du développement durable
à
Mesdames et messieurs les préfets de département.

Mon attention a été récemment appelée sur des demandes de transferts de résidus d'épuration des fumées d'incinération d'ordures ménagères (REFIOM) en vue de leur dépôt dans des cavités minières désaffectées, cette opération étant qualifiée de valorisation.

La qualification d'une opération de traitement de déchets en tant qu'élimination ou valorisation a fait l'objet de nombreux débats. Dans son arrêt du 27 février 2002
(affaire C-6/00), la cour de justice des communautés européennes a jugé que le dépôt de déchets dans une mine désaffectée ne constitue pas nécessairement une opération d'élimination au sens de l'annexe lI A point D12 de la directive 75/442/CEE (..) Ce dépôt doit faire l'objet d'une appréciation au cas par cas, en vue de déterminer s’il s'agit d'une opération d'élimination ou d'une opération de valorisation au sens de ladite directive. Un tel dépôt constitue une valorisation si son objectif principal est que /es déchets puissent remplir une fonction utile, en se substituant à l'usage d'autres matériaux qui auraient dû être utilisés pour remplir cette fonction.

Les REFIOM sont des déchets dangereux, qui, si les précautions nécessaires ne sont pas prises, sont susceptibles de relâcher dans l'environnement, en particulier sous forme lixiviée, des éléments toxiques et notamment des métaux lourds. La gestion de ces déchets doit donc viser à éviter cette dispersion d'éléments toxiques dans l’environnement, soit par un traitement adéquat comme la vitrification, soit par leur confinement dans un centre de stockage de déchets (en surface ou souterrain), le cas échéant après stabilisation.

Ainsi, il apparaît le plus souvent que l'objectif principal du dépôt des REFIOM dans des cavités minières est d'assurer leur confinement.

Le fait que le dépôt de déchets dans ces cavités permette de les remblayer et d'améliorer la sécurité d'un site minier ne me paraît pas un argument de nature à remettre en cause cette interprétation ni à considérer que cette opération a comme objectif principal la préservation des ressources naturelles.

En effet, nombre de déchets sont mieux adaptés pour assurer cette fonction, dont les résidus issus de l'exploitation minière elle-même, qui sont, de plus, stockés en grande quantité sur place, mais aussi d'autres catégories de déchets, comme les terres et gravats inertes issus des activités du bâtiment et des travaux publics. Les déchets de cette dernière catégorie sont produits en outre en grande quantité et à proximité des sites miniers.

Qui plus est, à l'inverse des déchets précédemment cités, les REFIOM ne possèdent pas de propriétés particulières qui les rendent particulièrement adaptés à une telle utilisation. Au contraire, le potentiel polluant des REFIOM nécessite de respecter des contraintes spécifiques. Ainsi, il ressort des dossiers de demande de transfert déjà déposés, que les techniques qu'il est proposé de mettre en œuvre; si elles sont nécessaires pour éviter une dispersion dans l'environnement des polluants contenus dans les REFIOM, sont manifestement disproportionnées pour une simple opération de comblement et répondent essentiellement à un souci de confinement de ces déchets.

Il apparaît donc en l'occurrence que des REFIOM sont utilisés à la place d'autres déchets plus adaptés, ne nécessitant pas de transport sur d'éventuelles grandes distances et n'impliquant pas la mise en œuvre de techniques de confinement. Aussi, il semble qu'à de rares exceptions près, une telle opération vise avant tout à confiner des déchets et non à préserver les ressources naturelles. Dans cette hypothèse, elle doit être considérée comme une opération d'élimination.

Si une demande de transferts transfrontaliers de REFIOM en vue d'une valorisation en comblement de cavité minière vous est soumise, il vous appartient alors d'apprécier le bien fondé de cette qualification au regard des critères qui viennent d'être présentés. S'il s'avère que l'objectif principal de l'opération est de confiner des déchets dangereux, il s'agit de la considérer comme une opération d'élimination et il conviendra alors de soulever une objection au transfert au motif de cette erreur de qualification.

Par ailleurs, les capacités de traitement en France de cette catégorie de déchets étant suffisantes, je vous demande de soulever systématiquement une objection aux demandes de transfert de REFIOM pour élimination en dehors du territoire national qui vous seraient adressées comme l'autorise l'article 4-3 (paragraphe a-i) du règlement 259/93 du 1er février 1993 concernant la surveillance et le contrôle des transferts de déchets à l'intérieur, à l'entrée et à la sortie de la communauté européenne.

Je vous serais reconnaissant de bien vouloir m'informer des difficultés que vous rencontrerez dans la mise en œuvre des présentes instructions.

Pour le ministre

Le directeur de la prévention des pollutions et des risques majeurs.
Thierry TROUVE

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