(JO n° 175 du 28 juillet 2017)


NOR : PRMX1721468C

Les tentatives opérées jusqu'à présent de maîtrise du flux des textes réglementaires n'ont pas produit des résultats à la hauteur des enjeux. Traduction d'une politique publique, la norme peut aussi être une contrainte pour la compétitivité des entreprises, l'administration des collectivités territoriales, le fonctionnement des services déconcentrés et la vie quotidienne de nos concitoyens. La complexité, l'empilement et le nombre des normes font de la maîtrise de la production réglementaire un enjeu d'efficacité de l'action publique et de démocratie.

C'est pourquoi à l'occasion de la préparation des nouvelles normes réglementaires traduisant les choix du Gouvernement, nous devons veiller à maîtriser leur impact et réduire les normes existantes.

La maîtrise du flux des textes réglementaires constitue la première étape d'un exercice de simplification normative plus large qui a vocation à porter également sur les textes de loi. Dans le cadre de la réforme constitutionnelle annoncée par le Président de la République, il reviendra ainsi au Parlement de définir les modalités d'un meilleur encadrement de la production législative.

1. Toute nouvelle norme réglementaire doit être compensée par la suppression ou, en cas d'impossibilité avérée, la simplification d'au moins deux normes existantes

L'entrée en vigueur d'un décret réglementaire comportant des mesures constitutives de normes nouvelles contraignantes (obligations de mise en conformité, nouvelles formalités administratives, etc.) opposables aux acteurs de la société civile (entreprises, associations, particuliers), aux services déconcentrés et aux collectivités territoriales est désormais conditionnée par l'adoption simultanée d'au moins deux mesures d'abrogation ou, de manière subsidiaire, de deux mesures de simplification de normes existantes.

Afin d'être considérées comme valables, ces abrogations ou, à titre subsidiaire, ces simplifications doivent répondre à deux conditions préalables :
- d'une part, elles interviennent dans le même champ ministériel ou dans le cadre d'une même politique publique que la norme créée. Dans le cas spécifique où la norme créée s'applique aux collectivités territoriales, les abrogations ou, à titre subsidiaire, les simplifications proposées doivent impérativement concerner des normes s'appliquant aux collectivités territoriales ;
- d'autre part, elles doivent apparaître qualitativement de niveau équivalent et non pas simplement répondre à cet objectif quantitatif.

Le secrétariat général du Gouvernement s'assurera du respect tant de la lettre que de l'interprétation de ces deux règles. En cas de difficulté, le projet ou les projets de décret comportant la règle nouvelle et les simplifications qui sont proposées seront soumis par le secrétariat général du Gouvernement à l'arbitrage de mon cabinet. Cette validation préalable conditionnera la décision de poursuivre, modifier ou abandonner le projet de texte considéré.

Ne sont pas inclus dans ce cadre les projets de décret qui sont par nature sans impact sur la charge administrative des acteurs de la société civile (procédure pénale, textes d'organisation des administrations centrales, dispositions statutaires applicables aux agents de l'Etat, dispositions de nature budgétaire) ainsi que les décrets pris pour la première application de la loi ou d'une ordonnance (et dont la publication conditionne l'entrée en vigueur de ces textes).

Tous les autres projets de décret sont soumis à la règle de la double compensation des mesures nouvelles par des simplifications ou des abrogations, qu'il s'agisse de décrets du pouvoir réglementaire autonome ou de décrets pris pour l'application de lois et ordonnances déjà entrées en vigueur.

Cette règle nouvelle implique que vous procédiez à un exercice d'évaluation du stock de normes que recouvre votre champ de politique publique. Le secrétariat général du Gouvernement se tient à votre disposition pour vous appuyer dans cet inventaire.

2. L'impact de la réglementation doit être mieux mesuré et, in fine, ne pas se traduire par des contraintes excessives

Le travail de mesure préalable de l'impact des normes réglementaires doit être poursuivi et intensifié s'agissant des mesures ayant une incidence sur les entreprises, les collectivités territoriales, les services déconcentrés de l'Etat et les particuliers et qui ne sont pas une condition de l'entrée en vigueur d'une norme de niveau supérieur.

J'appelle votre attention sur l'exigence de qualité du chiffrage des impacts. Le secrétariat général du Gouvernement centralisera les éléments de chiffrage - produits par vos services à travers les fiches d'impact qui lui seront systématiquement adressées par voie dématérialisée - afin de retracer, par semestre, l'évolution des charges et des économies induites par la production réglementaire. L'évolution du solde entre les charges et les économies fera l'objet d'un suivi régulier par département ministériel.

3. Une vigilance particulière sera portée à la transposition des directives européennes

Toute mesure allant au-delà des exigences minimales de la directive est en principe proscrite. Les dérogations à ce principe, qui peuvent résulter de choix politiques, supposent la présentation d'un dossier explicitant et justifiant la mesure qui sera soumise à l'arbitrage de mon cabinet. Ce travail ne doit pas porter sur le seul flux de transpositions mais également sur le stock. Une mission d'inspection aura prochainement en charge un travail inédit d'inventaire. Toutes les surtranspositions identifiées dans vos champs ministériels et qui n'auront pu être justifiées feront l'objet d'un réalignement sur le niveau de contrainte exigé par l'Union européenne.

4. Prohibition des dispositions non normatives

Le Conseil constitutionnel rappelle que, sous réserve de dispositions particulières prévues par la Constitution, la loi a pour vocation d'énoncer des règles et doit par suite être revêtue d'une portée normative. Il juge donc contraire à la Constitution une disposition dépourvue de portée normative (n° 2016-741 DC du 8 décembre 2016). Il convient de veiller avec soin à ne pas insérer de telles dispositions dans les lois et règlements.

Je vous prie de veiller à la bonne mise en œuvre de ces méthodes dans les administrations placées sous votre autorité.
Le secrétariat général du Gouvernement est chargé de l'exécution de la présente circulaire, qui s'applique à compter du 1er septembre 2017.

Edouard Philippe

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