(BO du MEEDDM n° 2009/15 du 25 août 2009)


NOR : DEVP0918234C

Le ministre d'Etat, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat à Mesdames et Messieurs les préfets de départements, à Monsieur le préfet de police de Paris.

La présente circulaire a pour objet de préciser la méthode d'estimation de la probabilité dans les analyses de risque et les études de sécurité que doivent fournir les transporteurs en application des articles 5, 14 et 19 de l'arrêté du 4 août 2006 dit " arrêté multifluide ", et en conformité avec le guide professionnel GESIP " Etudes de sécurité " reconnu le 5 janvier 2009.

Le retour d'expérience des premières études de sécurité qu'ont fournies les transporteurs en s'appuyant sur le guide susmentionné, notamment dans la région grenobloise où l'article 19 de l'arrêté multifluide a fait l'objet d'une application expérimentale anticipée, a montré que les transporteurs ont proposé à l'Etat des méthodes significativement variables d'estimation de la probabilité associée aux différents scénarii de brèche.

Parmi les méthodes appliquées, les deux ci-dessous ressortent comme les extrêmes conduisant aux écarts les plus importants :
- méthode globalisée : analyse regroupée des scénarii de brèche, quelle que soit la taille de celle-ci, consistant à associer au scénario majorant en matière de maîtrise de l'urbanisation (rupture complète ou brèche de 70 mm selon le fluide transporté) la probabilité correspondant à la gamme complète des tailles de brèche possibles, du percement le plus petit jusqu'à la brèche majorante ;
- méthode dissociée : analyse par étape consistant à attacher à chaque scénario de brèche (au plus 3 selon le guide GESIP) une probabilité estimée à partir du nombre de brèches effectivement recensées dans le passé, et basée sur la somme des événements compris entre la gamme de brèches inférieure et la gamme de brèches supérieure.

Cette situation est due au fait que le guide GESIP précité ne propose pas de façon explicite, dans sa version en vigueur, de méthode de calcul ou d'estimation de la probabilité se rapportant à chacun des scénarii de brèche. Elle pose problème parce qu'elle est susceptible d'entraîner des écarts significatifs de traitement de la maîtrise de l'urbanisation pour des canalisations présentant des niveaux de risque équivalents. La première méthode exposée ci-dessus est toujours suffisamment conservative pour prendre en compte les situations les plus défavorables qui sont celles où les enjeux humains exposés au risque sont concentrés à proximité immédiate de la canalisation, elle peut l'être exagérément si ces enjeux sont concentrés près de la limite de la zone d'effets liée au scénario majorant.

La seconde traite de manière cloisonnée les risques d'atteinte des enjeux exposés par les différents scénarii. Or un enjeu situé à l'intérieur de la zone d'effets du scénario de petite brèche est a fortiori situé également dans les zones d'effets des scénarii de taille de brèche supérieure. De ce fait, cette seconde méthode peut s'avérer non acceptable dans certaines configurations de localisation des enjeux.

Pour y remédier, les transporteurs devront désormais respecter les dispositions fixées en annexe de la présente circulaire, qui permettent de normaliser les pratiques dans ce domaine. La méthode retenue donne un résultat intermédiaire entre ceux des deux méthodes susmentionnées, au plus près des principes d'analyse du risque réel en l'état actuel des connaissances.

L'orientation ainsi retenue permet de traiter la question de l'acceptabilité du niveau de risque en matière de maîtrise de l'urbanisation en utilisant directement le résultat issu des matrices de criticité appliquées par le transporteur dans l'étude de sécurité. Elle est nécessaire dans la mesure où le processus conduisant aux mesures effectives de maîtrise de l'urbanisation est direct pour les canalisations de transport, des conclusions de l'étude de sécurité au porter à connaissance des collectivités, puis à sa prise en compte dans les plans locaux d'urbanisme. Elle se différencie notamment de l'approche retenue pour les installations classées Seveso seuil haut dans laquelle l'analyse d'acceptabilité en matière de maîtrise de l'urbanisation passe par une étape d'agrégation des risques postérieure à l'étude de dangers fournie par le ou les exploitants, celle du PPRT.

Pour les dossiers que les transporteurs ont à fournir au service chargé du contrôle à l'échéance du 15 septembre 2009, l'application de la présente circulaire en ce qui concerne le cumul de la probabilité pourra être limitée aux tronçons de canalisation pour lesquels des établissements recevant du public ou des immeubles de grande hauteur sont situés à l'intérieur de la zone d'effets létaux des scénarii de brèche moyenne (70 mm) et de petite brèche (12 mm). Il sera également possible de proposer une approche générique apportant la démonstration que, dans le cas le plus défavorable, la méthode de calcul déjà appliquée par le transporteur conduit à des résultats au moins aussi conservatoires que ceux de la présente circulaire. La circulaire devra en revanche être pleinement appliquée dans le cas des projets de construction de nouvelles canalisations ou de nouveaux tronçons, ainsi que lors des révisions quinquennales d'études de sécurité existantes.

L'annexe ci-jointe précise en outre les conditions d'estimation de la probabilité pour certains points singuliers tels que les zones où un même enjeu est exposé à plusieurs tronçons d'une même canalisation, plusieurs canalisations d'un même transporteur, ou plusieurs canalisations de transporteurs différents, ou les zones de croisement de lignes électriques aériennes. Pour les études à fournir avant le 15 septembre 2009 relativement aux canalisations existantes, l'évaluation de la probabilité d'inflammation relative à ce dernier point pourra être limitée aux lignes électriques de plus de 63 kV.

Enfin, elle constitue un guide pour déterminer l'intervalle de confiance d'une valeur de probabilité en fonction de la richesse du retour d'expérience disponible qui a permis de la déterminer. Les transporteurs peuvent cependant utiliser des méthodes alternatives si elles apportent des garanties équivalentes.

Vous voudrez bien me tenir informé, sous le présent timbre, de toutes difficultés que vous pourriez rencontrer dans l'application de la présente circulaire.

La présente circulaire sera publiée au Bulletin officiel du ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat.
Le directeur général de la prévention des risques, délégué aux risques majeurs,
L. Michel

Annexe - Estimation de la probabilité dans les études de sécurité de canalisation de transport

1. Estimation de la probabilité associée aux différents scénarii de taille de brèche

Les éléments de caractérisation des différents scénarii de taille de brèche d'une canalisation de transport sont les suivants :

Les deux tableaux ci-après indiquent les couples (probabilité ; gravité) qu'il convient de prendre en compte pour examiner l'acceptabilité, en matière de maîtrise de l'urbanisation, des différents scénarii de taille de brèche, avant et, le cas échéant, après mise en oeuvre de dispositions compensatoires. Le premier concerne le cas général où trois tailles de brèches sont à prendre en compte. Le second concerne le cas simplifié où le scénario de rupture dû aux travaux tiers peut être écarté et où le risque de mouvement de terrain est absent ou convenablement pris en compte (cas des hydrocarbures liquides, notamment).

Cas général (3 scénarii de taille de brèche)

Cas particulier (2 scénarii de taille de brèche)

Lorsque la part d'un immeuble de grande hauteur ou d'un établissement recevant du public présente dans la bande d'effets d'un scénario de taille de brèche est minoritaire, par rapport à la part présente dans la bande d'effets du scénario de taille de brèche directement supérieur, cette part peut être prise en compte pour le calcul de la gravité, avec un minimum de 30 % de l'effectif maximal, en substitution à l'effectif maximal prévu au paragraphe 2.1.2 de l'annexe VII du guide professionnel " Etudes de sécurité ". Le complément à 100 % de l'effectif maximal est alors pris en compte dans le scénario de taille de brèche supérieure. Cette disposition n'est pas applicable au scénario de rupture.

En ce qui concerne la prise en compte d'une disposition compensatoire, le calcul du couple [P ; N] résultant doit être fait en appliquant le coefficient EMC de réduction des risques défini par l'annexe VIII du guide professionnel " Etudes de sécurité " aux seules probabilités de taille de brèche sur lesquelles la disposition compensatoire a effectivement une influence. Il en est de même pour la prise en compte d'un facteur correctif C.

2. Estimation de la probabilité résultante dans le cas d'un enjeu exposé aux effets des scénarii relatifs à plusieurs tronçons d'une même canalisation ou à plusieurs canalisations différentes

Lorsqu'un enjeu est proche d'un tronçon de canalisation principale et d'un tronçon de branchement perpendiculaire raccordé à cette canalisation principale, ou lorsqu'un enjeu est contourné par une canalisation, il doit en être tenu compte dans le calcul de la probabilité, la longueur L de canalisation concernée pouvant dans ce cas être supérieure à deux fois la distance d'effets D (des premiers effets létaux ou des effets létaux significatifs selon le cas).

Lorsqu'un enjeu est proche d'une nappe ou d'un rack de canalisations ou lorsque deux canalisations sont situées de part et d'autre d'un même enjeu, la notion de " canalisation équivalente " doit être retenue, par analogie à celle de " tuyauterie équivalente " définie dans le § 1.1 de la fiche no 6 annexée à la circulaire DPPR/SEI2/CB-06-0388 du 28 décembre 2006 relative à la mise à disposition du guide d'élaboration et de lecture des études de dangers pour les établissements soumis à autorisation avec servitudes. Cette notion doit être appliquée dès lors que le recouvrement des zones d'effets PEL des différents tronçons de canalisations qui concernent ce même enjeu est supérieur à la moitié de la plus petite de ces zones.

En toute rigueur, la somme des probabilités des tronçons parallèles intéressant un même enjeu est majorante, et le transporteur peut donc affiner le calcul pour ne pas se pénaliser, en tenant compte de la non-indépendance des probabilités relatives aux différents tronçons.

Elle est mise en application par le transporteur pour les différentes canalisations qu'il exploite, quel que soit le fluide transporté.

Dans le cas de nappes de canalisations intéressant plusieurs transporteurs différents, les études de sécurité produites par chacun d'eux indiquent de manière précise les zones géographiques dans lesquelles les tronçons sont concernés par ce parallélisme. Le service chargé du contrôle effectue à partir de ces informations la vérification de l'acceptabilité des scénarii résultants. Il est tenu compte lors de cette vérification des dispositions compensatoires intéressant, séparément ou simultanément, plusieurs tronçons ou plusieurs canalisations. En cas de détection par l'administration de situation non acceptable, les transporteurs concernés se concertent pour définir collectivement les mesures appropriées de réduction des risques et les proposent au service chargé du contrôle.

3. Probabilité d'inflammation dans les zones surplombées par un conducteur électrique nu

Dans les zones de surplomb de canalisations de transport de fluide inflammable par des conducteurs électriques nus en croisement avec le tracé de la canalisation, où la somme des enjeux humains présents correspond, pour l'examen du scénario majorant, aux deux premières lignes de la matrice ELS ou aux trois premières lignes de la matrice PEL, le transporteur ne peut appliquer a priori la probabilité d'inflammation générique (moyenne de l'ensemble des réseaux). Il détermine, en liaison avec l'opérateur concerné, la valeur corrective appropriée, le cas échéant.

4. Intervalle de confiance des valeurs de probabilités prises en compte

L'étude de sécurité doit mentionner la source de retour d'expérience utilisée pour la détermination de la fréquence générique de base entrant dans le calcul de probabilité défini par le § 4.2.5 du guide professionnel " Etudes de sécurité ". Doivent notamment figurer de manière explicite :
- la nature du (ou des) fluide(s) pris en compte ;
- la période prise en compte ;
- l'expérience E apportée par le retour d'expérience, exprimée en km/an, correspondant à cette période ;
- les typologies d'événements (fuites, fuites enflammées) prises en compte ;
- le nombre N d'événements survenus correspondant à la période ;
- les informations qualitatives démontrant la représentativité de la source de retour d'expérience utilisée, pour son application à la canalisation concernée.

Lorsque des fréquences génériques différentes sont appliquées pour des facteurs de risque différents ou pour des gammes de diamètre d'ouvrage différents, l'expérience E et le nombre N d'événements survenus doivent être indiqués pour chacun d'eux.

Pour chacune des fréquences génériques utilisées, le transporteur détermine l'intervalle de confiance unilatéral à 90 % (la valeur de la fréquence de fuites par kilomètre et par an est inférieure à la valeur de cette estimation avec un degré de confiance de 90 %). Lorsque la borne supérieure de cet intervalle de confiance dépasse de plus de 40 % la valeur de la fréquence calculée selon le ratio N/E, le transporteur applique cette borne supérieure pour estimer la fréquence générique de fuite, ou utilise une base de données dont les fréquences apportent de meilleures garanties.

Le calcul de correction de la fréquence générique en fonction de l'intervalle de confiance, dans le respect des critères ci-dessus, peut être établi selon la méthode ci-après basée sur l'approche poissonnienne avec approximation par une loi normale, ou selon toute autre méthode apportant des garanties scientifiques équivalentes :

 

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