(JO n° 134 du 12 juin 2009)
NOR : DEVX0908081P
Monsieur le Président,
L'article 27 de la loi n° 2009-179 du 17 février 2009 pour l'accélération des programmes de construction et d'investissement publics et privés a habilité le Gouvernement à prendre par ordonnance, dans les conditions prévues par l'article 38 de la Constitution, les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires à la création d'un régime d'autorisation simplifiée applicable aux installations classées pour la protection de l'environnement.
La législation relative aux installations classées pour la protection de l'environnement régit les activités industrielles ou agricoles polluantes ou dangereuses, définies dans une nomenclature et classées, selon la gravité des dangers et inconvénients qu'elles présentent, sous un régime d'autorisation ou de déclaration.
Le régime d'autorisation simplifiée, dénommé « enregistrement », constituera un régime intermédiaire entre les régimes d'autorisation et de déclaration prévus par cette législation.
L'objectif de la réforme proposée est une meilleure mobilisation des moyens de l'action publique pour recentrer l'intervention de l'Etat, d'une part, sur les dossiers présentant un fort enjeu au plan de la protection de l'environnement et, d'autre part, sur le contrôle des installations.
L'objectif est également d'alléger les procédures administratives pour les petites installations dans les cas où il existe des risques significatifs justifiant un examen préalable du projet par l'inspection des installations classées, mais qui peuvent être prévenus par le respect de prescriptions standardisées. Les installations qui seront soumises à enregistrement bénéficieront ainsi de délais d'instruction de quatre ou cinq mois, alors que ce délai est de plus d'un an aujourd'hui pour les installations soumises à autorisation, en raison d'une instruction complète du dossier conduisant à imposer dans tous les cas des prescriptions individualisées.
La procédure d'autorisation simplifiée vise enfin à responsabiliser les exploitants et à leur donner davantage de visibilité sur les conditions de réalisation de leur projet. Les prescriptions techniques applicables, définies au niveau national, seront connues des opérateurs avant le démarrage de la procédure administrative. Les exploitants pourront intégrer ces exigences à un stade amont de la conception de leurs projets, ce qui permettra une meilleure prise en compte des préoccupations d'environnement. Il reviendra alors aux pétitionnaires de démontrer dans le dossier de demande d'enregistrement qu'ils seront à même de respecter la réglementation.
Conformément aux dispositions de la loi d'habilitation du 17 février 2009 précitée, l'ordonnance donne toutefois au représentant de l'Etat dans le département la possibilité de soumettre à la procédure d'instruction du régime d'autorisation de droit commun une demande d'exploitation d'installation si l'instruction du dossier selon le régime simplifié fait apparaître des risques particuliers ou cumulés.
La définition du champ d'application du régime de l'enregistrement relève, au-delà des critères énoncés par l'ordonnance, de la compétence du pouvoir réglementaire.
Le basculement d'un secteur d'activité ou d'une catégorie d'installations classées dans le régime d'enregistrement se fera ainsi par une modification de la nomenclature des installations classées, par décret en Conseil d'Etat qui interviendra au terme d'une phase de large concertation avec les différentes parties prenantes (organisations professionnelles, inspecteurs, associations, etc.), puis de la publication du projet et de sa transmission pour avis au Conseil supérieur des installations classées, instance où sont représentés les cinq collèges du Grenelle de l'environnement : monde économique, élus, associatifs, syndicats et administration.
La présente ordonnance prévoit :
― la création du régime d'enregistrement, les critères de classement des installations sous ce nouveau régime, les règles de procédure et la nature des prescriptions qui lui sont applicables ;
― la mise en cohérence ou l'adaptation des autres dispositions de la législation relative aux installations classées avec le nouveau régime simplifié, afin d'assurer son intégration dans la législation existante ;
― certaines dispositions de coordination d'autres législations existantes avec le nouveau régime.
I. Les articles 2, 3, 4, 5 et 6 créent le régime d'autorisation simplifiée qui prend le nom d'enregistrement et intègrent ce nouveau régime dans la législation existante en adaptant la présentation du titre Ier du livre V du code de l'environnement.
L'article 2 vient modifier l'article L. 511-2 afin, notamment, de préciser que les projets de décret de nomenclature concernant les installations enregistrées seront rendus publics avant leur transmission au Conseil supérieur des installations classées.
L'article 4 déplace en particulier l'article L. 512-7 du code de l'environnement dans la section « Dispositions communes ». Les dispositions de cet article, qui donnent au préfet la possibilité d'imposer des prescriptions particulières à l'exploitant, notamment à la suite d'un incident ou d'un accident survenu dans l'installation, et de prendre des mesures d'urgence, seront donc communes aux trois régimes.
II. L'article 5 du projet d'ordonnance introduit dans cette partie du code de l'environnement une nouvelle section 2 intitulée « Installations soumises à enregistrement » qui comporte les dispositions spécifiques au régime d'autorisation simplifiée. Ces dispositions font l'objet des nouveaux articles L. 512-7 à L. 512-7-7.
Le nouvel article L. 512-7 définit le champ du régime d'enregistrement, les critères de classement dans la nomenclature des installations sous ce régime et les règles qui lui sont applicables.
Les arrêtés fixant les prescriptions générales applicables aux installations soumises à enregistrement seront pris par le ministre chargé des installations classées, après consultation des ministres intéressés et du Conseil supérieur des installations classées. Par ailleurs, les projets d'arrêtés de prescriptions générales seront rendus publics avant leur transmission au Conseil supérieur des installations classées.
L'article L. 512-7-1 précise les règles de procédure. L'arrêté d'enregistrement sera pris par le préfet, après mise à disposition du public du dossier du pétitionnaire et consultation des conseils municipaux concernés.
Des dispositions sont prévues pour assurer l'articulation avec la procédure de délivrance du permis de construire.
La procédure d'enregistrement est donc simplifiée par rapport à la procédure d'autorisation en ce qu'elle ne prévoit pas, en principe, la production par l'exploitant d'une étude d'impact et d'une étude de dangers, la réalisation d'une enquête publique et l'avis d'une commission départementale consultative.
L'article L. 512-7-2, conformément aux dispositions de la loi d'habilitation, donne la possibilité au représentant de l'Etat dans le département de soumettre à la procédure du régime normal d'autorisation une installation :
― si, au regard de la localisation du projet, en prenant en compte les critères mentionnés au point 2 de l'annexe III de la directive 85/337/CEE du 27 juin 1985 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement, la sensibilité environnementale du milieu le justifie ;
― ou si le cumul des incidences du projet avec celles d'autres projets d'installations, ouvrages ou travaux situés dans cette zone le justifie ;
― ou si l'exploitant a, dans sa demande, sollicité un aménagement des prescriptions générales applicables à l'installation.
Dans ce cas, le préfet notifie sa décision motivée au demandeur, en l'invitant à déposer le dossier prévu par la procédure du régime normal d'autorisation.
L'article L. 512-7-3 prévoit la possibilité pour le préfet d'assortir l'enregistrement de prescriptions particulières complétant ou renforçant les prescriptions générales applicables à l'installation, ou d'y inclure des aménagements aux prescriptions générales justifiées par les circonstances locales, après consultation de la commission départementale compétente. Le demandeur devra justifier dans son dossier qu'il est en mesure de respecter l'ensemble des prescriptions générales, et éventuellement particulières, applicables.
Les articles L. 512-7-4 et L. 512-7-6 étendent aux installations soumises à enregistrement certaines dispositions existantes applicables aux installations classées soumises à autorisation : la délivrance d'un titre d'exploitation à durée limitée pour certaines installations (carrières et installations de stockage de déchets) et les obligations en matière de remise en état du site lors de la mise à l'arrêt définitif de l'installation.
L'article L. 512-7-5 donne au préfet la possibilité d'imposer des prescriptions complémentaires à l'exploitant après la mise en service de l'installation.
III. Le dernier volet de l'ordonnance, constitué des articles 1er et 7 à 20, intègre le régime d'enregistrement dans des dispositions communes aux deux autres régimes et adapte en conséquence les dispositions existantes.
L'article 1er modifie les dispositions de la loi sur l'eau, codifiée au titre Ier du livre II du code de l'environnement, en ce qui concerne ses conditions d'articulation avec la législation relative aux installations classées pour prendre en compte l'existence du nouveau régime.
L'article 10 prévoit que pour les installations soumises à enregistrement le délai de recours des tiers sera de un an à compter de la publication de l'arrêté préfectoral d'enregistrement, prolongé, le cas échéant, jusqu'à la fin d'une période de six mois suivant la mise en activité de l'installation.
Les articles 11 et 12 modifient certaines dispositions pénales et prévoient notamment la création d'un délit d'exploitation d'une installation sans enregistrement.
L'article 20 modifie le code de l'urbanisme pour prendre en compte le nouveau régime, notamment en ce qui concerne les dispositions applicables aux documents d'urbanisme existants.
Le ministère du développement durable, dans la suite d'un rapport de l'inspection générale de l'environnement de 2006, a proposé que soient visées de manière privilégiée par le régime d'autorisation simplifiée des catégories d'installations qui répondent aux critères suivants :
― installations aujourd'hui soumises à autorisation ;
― installations non soumises à la directive 2008/1/CE du Parlement européen et du Conseil du 15 janvier 2008 relative à la prévention et à la réduction intégrée de la pollution, ou soumises à une obligation d'évaluation environnementale systématique au titre de l'annexe I de la directive 85/337/CEE du 27 juin 1985 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement ;
― secteurs d'activités ou technologies dont les enjeux environnementaux et les risques sont aujourd'hui bien connus et peuvent ainsi être efficacement réglementés par des prescriptions définies au niveau national, sans qu'il soit nécessaire, dans la plupart des cas, de réaliser une étude d'impact ou une étude de danger ;
― installations dont les risques sont largement reconnus comme suffisamment maîtrisés pour ne pas nécessiter, de manière générale, une concertation locale approfondie.
Environ 40 % des installations autorisées chaque année répondent potentiellement à ces critères. Une première phase de mise en œuvre de la réforme pourrait en concerner la moitié. Un retour d'expérience sera nécessaire avant d'envisager une seconde phase.
Tel est l'objet de la présente ordonnance que nous avons l'honneur de soumettre à votre approbation.
Veuillez agréer, Monsieur le Président, l'assurance de notre profond respect.