(BO du MEEDDAT n° 10 du 10 juin 2009)
NOR : DEVO0906152C
Le ministre d'Etat, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire à Messieurs les directeurs des agences de l'eau.
La loi n° 2006-1772 du 30 décembre 2006 sur l'eau et les milieux aquatiques a défini les modalités de calcul et de recouvrement des redevances perçues par les agences de l'eau. Les modalités de calcul de la pollution évitée par des épandages sont définies par l'arrêté du 21 décembre 2007 relatif aux modalités d'établissement des redevances pour pollution de l'eau et pour modernisation des réseaux de collecte, et notamment son annexe VI.
La présente circulaire a pour objet de préciser :
1. Les modalités d'application du coefficient de récupération des effluents, en présence ou en absence d'un suivi régulier des rejets ;
2. Les modalités de prise en compte du niveau d'étanchéité des bassins de stockage d'effluents avant épandage, en cas de suivi régulier des rejets et en cas de dégradation de l'étanchéité des bassins de stockage des effluents avant épandage ;
3. Les modalités de détermination des coefficients d'élimination de la pollution par l'épandage, et notamment les informations à fournir pour l'obtention du niveau de performance de l'épandage " excellent 2e niveau " et la définition des taux d'élimination des polluants.
1. Les modalités d'application du coefficient de récupération des effluents
Ces modalités sont précisées ci-après en fonction de la mise en oeuvre, ou non, d'un suivi régulier des rejets.
1.1. Mise en oeuvre d'un suivi régulier des rejets
a) Rappel des dispositions générales
Le dispositif de suivi régulier des rejets est obligatoirement mis en oeuvre dès que le niveau théorique de pollution d'un établissement dépasse, pour l'un des éléments constitutifs de la pollution, la valeur mentionnée au tableau du I de l'article R. 213-48-6. La valeur de ces seuils est multipliée par 4 pour l'année d'activité 2008 et par 2 pour l'année d'activité 2009.
En cas d'impossibilité de prélèvement automatique d'un échantillon d'effluents compte tenu de ses caractéristiques, et comme pour tout établissement au suivi régulier quel que soit le procédé d'épuration, il convient d'examiner si des prélèvements manuels peuvent permettre l'évaluation des flux polluants dans des conditions satisfaisantes de fiabilité et de précision. Si tel est le cas, ces modalités de prélèvements, définies en accord avec l'agence de l'eau, seront jointes au descriptif du suivi régulier des rejets.
b) Dispositions spécifiques aux épandages directs d'effluents
Comme précisé au point 1 de l'annexe III de l'arrêté du 21 décembre 2007, le dispositif de suivi régulier des rejets porte sur les effluents avant épandage c'est à dire s'il y a stockage préalable, en aval du dispositif de stockage. Le dossier de demande d'agrément du dispositif de suivi régulier comprend en particulier :
- un plan de localisation des divers points de rejets de l'établissement, identifiant les rejets d'eaux pluviales et d'effluents ;
- un rapport montrant l'effectivité de la collecte, c'est à dire l'absence de rejets directs au milieu naturel d'effluents issus de l'activité de l'établissement, hors ceux destinés à être épandus sur des terres agricoles.
Après agrément du dispositif de suivi régulier des rejets de l'établissement, il n'y a donc plus lieu d'appliquer les dispositions du tableau n° 3 de l'annexe VI de l'arrêté précité. La pollution évitée est alors calculée en application du seul coefficient d'élimination de la pollution défini au tableau n° 4 de cette même annexe.
1.2. Absence de suivi régulier des rejets
En l'absence d'un suivi régulier des rejets, la redevance de l'établissement procédant à un épandage sur des terres agricoles est établie par différence entre d'une part la pollution théorique produite par l'établissement évaluée à partir d'une campagne générale de mesures, ou à défaut en application de l'annexe V de l'arrêté précité, et d'autre part la pollution évitée calculée en application du point 1 de l'annexe VI de ce même arrêté. La campagne générale de mesure permet également d'évaluer la pollution des effluents directement rejetés au milieu naturel, indépendamment de la pollution des effluents destinés à être épandus sur des terres agricoles.
La pollution évitée par l'épandage est alors calculée en appliquant à la pollution des effluents destinés à être épandus la valeur du coefficient de récupération des effluents définie en application du tableau n° 3 de l'annexe VI de l'arrêté précité. Le résultat obtenu est diminué de la pollution évitée calculée en application du tableau no 4 de cette même annexe.
Il est rappelé que la valeur du coefficient de récupération des effluents, lié uniquement à la collecte, est définie comme suit :
- la valeur 0,8 est attribuée en l'absence de plans identifiant les divers exutoires de l'établissement au milieu naturel et en l'absence de suivi périodique de ces exutoires ;
- la valeur 1 est attribuée si l'établissement a identifié les divers exutoires au milieu naturel et en réalise un suivi périodique. Ce suivi périodique peut consister en une inspection régulière des points de rejets, pour vérifier l'absence de rejets ou de traces de rejets en temps sec, les collecteurs pluviaux pouvant être équipés de témoins permettant de caractériser des déversements en temps de pluie. La valeur du coefficient de récupération des effluents est attribuée sans tenir compte des caractéristiques du stockage éventuel des effluents avant épandage.
2. Modalités de prise en compte du niveau d'étanchéitédes bassins de stockage d'effluents avant épandage
Des installations d'épandage peuvent inclure un dispositif de stockage permettant d'organiser l'épandage sur les terres en fonction des pratiques culturales et/ou de stocker transitoirement l'effluent en cas d'impossibilité d'épandage.
2.1. Conditions d'agrément du suivi régulier des rejets
Comme précisé au dernier alinéa du point 1 de l'annexe III de l'arrêté du 21 décembre 2007, le descriptif du suivi régulier transmis par l'établissement à l'agence comporte un rapport montrant :
- d'une part, l'effectivité de la collecte des effluents, comme définie au point 1.1 (b) ci-dessus ;
- d'autre part, la bonne étanchéité du dispositif de stockage des effluents avant épandage. Dans ce but, un bilan hydrique global du fonctionnement du dispositif de stockage est à réaliser chaque année. Ce bilan peut être effectué sur une période ajustée en accord avec l'agence de l'eau de manière à en optimiser la précision. Selon la période retenue, il prend en compte les volumes d'eaux usées reçues, les volumes épandus, les apports pluviométriques et les pertes par évaporation et, s'il y a lieu, les stockages pluriannuels d'effluents en bassin ou dans les process lors de la campagne de production.
Après agrément du suivi régulier, l'établissement transmet chaque année à l'agence le bilan hydrique de l'installation avec les données recueillies.
Compte tenu du degré de précision des mesures de débits sur des effluents très chargés en matières en suspension, il convient d'avoir une graduation d'appréciation des résultats du bilan hydrique. La démarche suivante est donc préconisée :
- si le bilan hydrique défini ci-dessus met en évidence des pertes inférieures à 5 %, l'étanchéité est considérée comme bonne ;
- si le bilan hydrique défini ci-dessus met en évidence des pertes comprises entre 5 et 10 %, l'étanchéité ne pourra être considérée bonne qu'en l'absence d'impact significatif du stockage sur la qualité de l'aquifère. Cet impact pourra être apprécié par l'évolution des teneurs d'éléments pertinents (N, Cl, K..., à définir en fonction des caractéristiques des effluents et de la nappe), sur des échantillons prélevés dans un ou plusieurs piézomètres implantés à proximité de l'ouvrage de stockage selon les préconisations d'une étude hydrogéologique. Le suivi analytique réalisé est à définir en accord avec l'agence de l'eau et sera joint au descriptif du suivi régulier.
Si l'étanchéité ne peut pas être considérée comme " bonne " en application de ces définitions, le dispositif de suivi régulier ne pourra être agréé qu'après amélioration de l'étanchéité du stockage.
2.2. Cas d'une dégradation de l'étanchéité des bassins de stockage
Si, après agrément du suivi régulier, le bilan hydrique met en évidence une dégradation du niveau d'étanchéité des bassins de stockage, les dispositions suivantes s'appliquent :
- si le bilan hydrique met en évidence des pertes supérieures à 10 % au niveau du stockage, et en l'absence d'impact significatif sur la qualité de l'aquifère, les coefficients d'élimination de la pollution sont au plus égaux à ceux définis pour le niveau " moyen " du tableau n° 4 de l'annexe VI de l'arrêté précité modifié par l'arrêté du 19 décembre 2008 (soit en particulier au mieux 90 % d'élimination de la DBO5 et 85 % pour la DCO) ;
- des pertes lors du stockage des effluents supérieures à 5 % et un impact significatif des infiltrations d'effluents sur la qualité de l'aquifère (ou en cas d'absence de transmission de données sur ce dernier point) démontrent que le stockage avant épandage n'est ni suffisant ni adapté au vu du plan d'épandage. En application des dispositions du tableau no 4 de l'annexe VI de l'arrêté précité, le niveau " médiocre " est alors au mieux retenu pour la détermination des coefficients d'élimination de la pollution (soit en particulier au mieux 70 % d'élimination de la DBO5 et 65 % pour la DCO). L'agence pourra retirer l'agrément du suivi régulier en l'absence d'actions correctives.
En cas de dysfonctionnement imprévisible du dispositif de stockage, l'agrément du suivi régulier est maintenu si, l'entretien des ouvrages étant correctement réalisé, toutes les dispositions destinées à rétablir leur fonctionnement normal sont prises dans les meilleurs délais en application, s'il y a lieu, des dispositions prévues par l'arrêté d'autorisation d'exploiter.
Ces mêmes dispositions sont également applicables pour le calcul de la pollution évitée par l'épandage si l'assiette de la redevance est calculée à partir de la pollution théorique produite déterminée par application des résultats d'une campagne générale de mesures ou d'un niveau forfaitaire de pollution théorique produite (cf. annexe V de l'arrêté du 21 décembre 2007).
2.3. Tableau récapitulatif des niveaux d'épandage dans le cas d'un suivi régulier des rejets
3. Les modalités de détermination des coefficients d'élimination de la pollution par l'épandage
3.1. Informations à fournir sur l'épandage
Pour la détermination des coefficients d'élimination de la pollution pour une année d'activité considérée, l'établissement transmet à l'agence, au plus tard avant la fin septembre de l'années suivante, un compte rendu du fonctionnement de l'épandage comportant :
a) La présentation générale du système d'épandage précisant notamment le matériel utilisé au regard des éventuelles contraintes d'épandage ;
b) Les informations et données précisant les périodes d'épandage (nombre de jours en mentionnant les périodes d'arrêt) et, s'il y a lieu, les actions engagées au cours de l'année pour l'amélioration de l'exploitation et des performances de l'épandage ;
c) Le plan d'épandage ou le récapitulatif des parcelles ayant fait l'objet d'épandages ;
d) Les résultats du suivi agronomique ;
e) Les résultats éventuels du suivi de la qualité des eaux souterraines et/ou superficielles.
Si les éléments mentionnés aux points a et c ci-dessus ont déjà été transmis à l'agence, seules les modifications apportées sont à signaler.
Pour permettre à l'agence de l'eau d'attribuer les meilleurs niveaux d'élimination de la pollution définis par le tableau 4 de l'annexe VI de l'arrêté précité, les éléments complémentaires suivants sont également à transmettre par l'établissement :
- pour l'obtention des niveaux au moins " bon ", un bilan hydrique établi pour l'ensemble des parcelles épandues et montrant que les volumes d'effluents apportés n'ont pas dépassé les possibilités d'évapotranspiration et d'absorption des sols sans saturation de leur couche superficielle ou que les dispositions préconisées par l'arrêté d'autorisation d'exploiter sont respectées ;
- pour l'obtention du niveau " très bon ", un bilan agronomique, établi globalement pour l'ensemble des parcelles épandues sur la base du programme d'épandage, des doses d'apport d'effluents (apports organiques et minéraux) et des cultures pratiquées ;
- pour l'obtention du niveau " excellent 1er niveau ", un équilibre agronomique pour l'azote (azote réduit et azote oxydé) et pour le phosphore apprécié globalement pour l'ensemble des parcelles épandues ;
- pour l'obtention du niveau " excellent 2e niveau ", les éléments mentionnés au point 3.2. ci-après.
Sauf impossibilité matérielle, ces éléments sont transmis à l'agence sous un format électronique convenu d'un commun accord entre l'agence et l'établissement.
3.2. Eléments à fournir pour l'obtention du niveau " excellent 2e niveau "
I. - Pour l'obtention du niveau de performance le plus élevé et la détermination des coefficients d'élimination de la pollution pour la DBO5 et la DCO, l'établissement complète les éléments demandés pour bénéficier du niveau de performance "Excellent 1er niveau" selon les trois points suivants :
1. La fourniture des données relatives aux apports organiques et minéraux (azote et phosphore) par îlot cultural, c'est-à-dire par parcelle ou ensemble contiguë de parcelles où une même culture est pratiquée. En cas d'épandage sur des territoires agricoles divisés en petites parcelles, et sous réserve d'accord de l'agence de l'eau, ces données seront fournies par parcelle ou ensemble contiguë de parcelles en mentionnant les cultures pratiquées.
La fourniture de ces éléments suppose une bonne connaissance des caractéristiques de l'effluent, ce qui implique la mise en place d'un suivi régulier des rejets. Le niveau de performance " excellent 2e niveau " ne peut donc être obtenu que si l'établissement concerné a mis en place un suivi régulier des rejets.
2. La réalisation d'un descriptif de la procédure de validation des mesures et du dispositif de suivi interne à l'établissement. Ce descriptif présente l'organisation du suivi de l'épandage, la procédure d'évaluation des résultats, les résultats obtenus, les difficultés rencontrées. Il doit ainsi permettre d'identifier les mesures à mettre en oeuvre pour améliorer les résultats obtenus et prévenir des incidents. Il rend compte de la formation assurée au personnel impliqué dans l'exploitation de l'épandage. Ce descriptif est mis à disposition du personnel d'exploitation de l'épandage.
Ce descriptif, documenté et maintenu à jour, constitue un élément du dispositif de suivi régulier des rejets. A ce titre, il fait l'objet d'un audit périodique par un organisme choisi par l'établissement, une périodicité de trois années apparaissant suffisante compte tenu des caractéristiques des installations d'épandage concernées.
Un guide pour la rédaction de ce descriptif de la procédure de validation des mesures et du dispositif de suivi interne à l'établissement a été établi en concertation entre les associations professionnelles des établissements industriels procédant à des épandage et les agences de l'eau. Il est disponible sur demande à l'agence de l'eau.
3. Des analyses ou études spécifiques de l'élimination des pollutions (DCO et DBO5) sous forme particulaire et soluble définies comme suit :
a) Les DCO et les DBO5 solubles et particulaires sont déterminées par analyses tous les 15 jours d'un échantillon représentatif des effluents épandus, avant et après infiltration.
b) Pour définir le taux d'élimination de la pollution soluble, ces analyses peuvent également inclure l'un des éléments suivants :
- L'analyse de la DBO ultime (au moins 21 jours) sur fraction soluble, le cas échéant après complémentation des effluents pour rétablir l'équilibre minéral (rapport DBO5/N/P au moins égal à 100/5/1). La fréquence de cette analyse est définie en accord avec l'agence de l'eau afin de prendre en compte la variabilité de la composition des effluents épandus compte tenu des productions de l'établissement. Cette analyse est réalisée au moins une fois au cours de la saison d'épandage.
- Des tests de lixiviation réalisés sur les sols après épandage afin de préciser les rendements d'élimination de la matière organique ;
- L'utilisation de modélisations de la cinétique de dégradation de la phase organique soluble ;
Sans exclure toute autre méthode proposée par l'établissement compte-tenu des caractéristiques de l'épandage, et validée par l'agence de l'eau.
Les compléments d'informations définis aux points 1, 2 et 3 ci-dessus étant fournis à l'agence :
- un coefficient d'élimination de 100 % sera retenu pour la pollution particulaire pour les éléments DBO5 et DCO ;
- des taux d'élimination de la pollution soluble pour les éléments DBO5 et DCO supérieurs à 97 % seront déterminés en application des résultats des analyses spécifiques mentionnés au point 3. ci-dessus. Les résultats d'analyses de la DBO ultime ou de modèles seront retenus, sans devoir être complétés par des méthodes d'analyse imposant des équipements de terrains importants (bougies poreuses ou autres méthodes), si la quantité de DCO épandue par îlot cultural est inférieure à 10 T/ha/an.
En l'absence de ces compléments, le coefficient d'élimination de la pollution soluble pour les éléments DBO5 et DCO sera fixé à 98 % si un suivi réalisé sur piézomètre met en évidence l'absence d'impact significatif de l'épandage sur l'aquifère, la quantité de DCO soluble épandue étant inférieure à 10 T/ha et par an. En cas d'épandage sur des territoires agricoles divisés en petites parcelles, ce suivi sur piézomètre pourra porter sur un ou des territoires représentatifs de l'épandage et des milieux récepteurs concernés déterminés en accord avec l'agence de l'eau.
II. - Tableau récapitulatif des modalités d'obtention du niveau "Excellent 2e niveau"
Ces modalités permettront ainsi de s'assurer de l'obtention des meilleurs niveaux de performance de l'épandage pour la protection de la ressource en eau.
Vous voudrez bien me faire part des difficultés que vous pourriez rencontrer dans l'application de la présente circulaire.
La présente circulaire sera publiée au Bulletin officiel du ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire.
Fait à Paris, le 2 avril 2009.
Pour le ministre et par délégation :
La directrice de l'eau et de la biodiversité,
O. Gauthier