La ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement
à
Mesdames et messieurs les préfets,
Monsieur le préfet de police

En raison de l'utilisation et de la manipulation de substances chimiques toxiques, le plus souvent persistantes, les pollutions et les nuisances susceptibles d'être engendrées par l'industrie du traitement de surface sont importantes.

La prévention des risques et des pollutions associés aux activités de traitement de surface est réalisée dans le cadre de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement. Ces activités sont visées par la rubrique n° 2565 de la nomenclature des installations classées. Elles sont soumises aux dispositions de l'arrêté ministériel du 26 septembre 1985 relatif aux ateliers de traitements de surfaces.

L'application effective des dispositions minimales prévues par l'arrêté du 26 septembre 1985 est la condition indispensable à tout progrès. Elle doit permettre à la fois de garantir une réduction importante des rejets toxiques dans les milieux naturels et d'éviter les distorsions de concurrence. Je vous demande d'engager une action déterminée de contrôles à l'égard des ateliers de traitement de surface et, en cas de non-respect des obligations réglementaires, de mettre en oeuvre les sanctions prévues par la loi du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l'environnement.

Je vous rappelle que la protection des milieux aquatiques a été sensiblement renforcée ces dernières années, en particulier depuis la loi n° 92-3 du 3 janvier 1992 sur l'eau. C'est ainsi que l'arrêté ministériel du 2 février 1998 fixe des conditions minimales relatives aux prélèvements et à la consommation d'eau et aux émissions. Ce texte ne s'applique pas aux ateliers de traitement de surface mais peut vous servir de guide, par exemple en ce qui concerne les dispositions à prendre pour prévenir la pollution des sols. Je vous recommande, pour la définition des prescriptions des arrêtés d'autorisation, de vous inspirer des instructions jointes en annexe à la présente circulaire.

Je vous saurais gré de me tenir informé annuellement des contrôles réalisés par l'inspection des installations classées et des mesures prises pour assurer la mise en conformité des installations non conformes. Vous voudrez bien également me transmettre avec la même fréquence la liste des installations de traitement de surface de votre département faisant l'objet d'un arrêté complémentaire pris à la suite de mes recommandations figurant aux 2.2 et 2.3. de l'annexe ci-jointe.

Vous voudrez bien, sous le timbre de la direction de la prévention des pollutions et des risques, me rendre compte des difficultés qui pourraient résulter des présentes instructions.

Annexe

La présente annexe décrit les modalités d'application des dispositions de l'arrêté du 26 septembre 1985 relatif aux ateliers de traitements de surfaces, en distinguant d'une part les installations nouvelles et les modifications d'installations existantes, d'autre part les installations existantes.

I. Installations nouvelles et modifications d'installations existantes

La présente partie s'applique aux installations nouvelles. Elle s'applique également aux modifications d'installations existantes qui justifient une nouvelle demande d'autorisation en application de l'article 20 du décret n° 77-1133 du 21 septembre 1977, notamment en cas d'augmentation significative des flux polluants de l'installation.

1.1. Prévention des pollutions à la source

La pollution trouve fréquemment son origine dans la perte de matières premières. En traitement de surface, elle peut être en partie prévenue par des actions sur les aménagements et une bonne maîtrise des rinçages.

Il est donc fondamental de prendre en considération les contraintes liées à la dépollution dès la conception des chaînes de production. Vous veillerez, dès l'émergence des projets portés à votre connaissance, à ce que la prévention des pollutions à la source soit clairement affirmée comme fil directeur.

1.2. Sécurité vis-à-vis des milieux récepteurs

Depuis le début des années 80, l'épuration des effluents de traitement de surface par précipitation physico-chimique a été largement privilégiée au détriment de techniques en circuit fermé.

Le retour d'expérience en matière de pollutions accidentelles démontre la fréquence des pollutions de rivières à la suite d'erreurs opératoires ou de dysfonctionnements non détectés dans des ateliers pourvus de stations d'épuration au fil de l'eau. Le risque de pollution est d'autant plus important que nombre de petites entreprises, bien souvent, ne sont pas en mesure de mobiliser les moyens humains et matériels requis pour la surveillance des rejets et la maintenance de la station d'épuration.

La mise en oeuvre de techniques visant l'absence de tout rejet liquide dans le milieu récepteur permet aujourd'hui une meilleure sécurité vis-à-vis de ce milieu. Les techniques (échange d'ions, évaporation, ...) permettant la suppression totale des rejets liquides en traitement de surface sont disponibles et se développent dans certaines régions.

Sans exclure a priori les procédés classiques, il convient de ne pas omettre l'examen de la faisabilité au cas par cas des solutions à rejet liquide nul. En conséquence, vous veillerez, lors de toute demande d'autorisation concernant soit la création d'installations nouvelles, soit les modifications d'ateliers existants dans les conditions prévues par l'article 20 du décret n° 77-1133 du 21 septembre 1977, à ce que le dossier soumis par le pétitionnaire étudie, parmi les diverses solutions envisageables, la faisabilité technico-économique d'un rejet liquide nul.

Quelle que soit la solution adoptée, l'étude d'impact décrira tous les moyens qui rendent l'épuration plus fiable (automatisation, procédures, etc.) et les compétences des personnes chargées du suivi de la dépollution.

1.3. Valeurs-limites de rejet des substances toxiques

Lorsque le recyclage total ne peut être retenu, l'impact sur l'environnement dépend essentiellement des flux de substances toxiques rejetées. Je vous rappelle que les valeurs limites de rejet prescrites par l'arrêté du 26 septembre 1985 ne constituent que des exigences minimales, que je vous recommande de renforcer quand les circonstances l'exigent, en particulier lorsque :

  • les objectifs de qualité ou la vocation piscicole des milieux récepteurs l'exigent;
  • des actions de reconquête du milieu aquatique s'appuyant sur des dispositions réglementaires (SAGE, ...) ou non réglementaires (contrats de rivière, contrats de baie, ...) sont engagées;
  • le raccordement des rejets sur une station d'épuration communale est susceptible de nuire à la qualité des boues valorisées en agriculture.

Je vous recommande alors d'utiliser comme valeurs guides les valeurs de concentration mentionnées au 3° de l'article 32 de l'arrêté du 2 février 1998 relatif aux prélèvements et à la consommation d'eau ainsi qu'aux rejets de toute nature des installations classées pour la protection de l'environnement soumises à autorisation.

1.4. Raccordement à une station d'épuration urbaine

La circulaire du 5 novembre 1985 relative à l'industrie du traitement de surface recommande que le raccordement ne soit pas à l'origine d'un dysfonctionnement de la station d'épuration urbaine ou d'un enrichissement de ses boues en métaux. Il est donc recommandé que, pour les polluants toxiques, les valeurs-limites de concentration au niveau du raccordement soient au moins aussi contraignantes que celles de l'arrêté du 26 septembre 1985 de telle manière que les flux apportés par l'atelier raccordé associés aux autres apports permettent aux boues d'être épandues.

L'étude d'impact doit démontrer notamment que le raccordement est possible, ce qui implique que la station d'épuration urbaine doit pouvoir épurer les polluants classiques, notamment la DCO, que les effluents raccordés n'ont pas d'impact sur le réseau et le fonctionnement de la station et que la valorisation des boues urbaines est possible.

Dans tous les cas, le raccordement doit par ailleurs être autorisé par la collectivité à laquelle appartient le réseau public, en application de l'article L.35-8 du code de la santé publique. Une convention fixant les conditions administratives, techniques et financières de raccordement peut compléter utilement l'autorisation.

1.5. Surveillance de l'impact de l'atelier de traitement de surface sur l'environnement

L'arrêté d'autorisation fixe les conditions de surveillance de l'impact sur l'environnement en prenant pour base minimale les prescriptions de l'article 4 de l'arrêté du 26 septembre 1985.

Afin d'assurer un meilleur contrôle des rejets les plus importants, je vous recommande d'adopter les prescriptions suivantes, similaires à celles prescrites par l'arrêté du 2 février 1998.

1.5.1. Surveillance des émissions

Je vous recommande de soumettre les flux autorisés de rejets dans l'air et dans l'eau à une surveillance permanente lorsque le rejet correspondant dépasse un certain seuil. Vous pouvez vous référer aux seuils figurant aux articles 59 et 60 de l'arrêté du 2 février 1998 pour la mise en oeuvre de cette surveillance.

1.5.2 - Bilan environnement

Je vous recommande de prescrire un bilan annuel des rejets chroniques ou accidentels, dans l'air, l'eau et les sols, qu'il s'agisse d'émissions canalisées ou diffuses, ainsi que dans les déchets éliminés à l'extérieur de l'installation autorisée, pour toute substance toxique ou cancérigène figurant à l'annexe VI de l'arrêté du 2 février 1998 et produite ou utilisée à plus de 10 tonnes par an.

1.5.3. Surveillance des effets sur l'environnement

Pour les installations autorisées à rejeter des flux importants dans l'eau et dans l'air, je vous recommande de prescrire des modalités de surveillance de l'environnement (milieu aquatique essentiellement). Vous pouvez vous référer aux articles 63 et 64 de l'arrêté du 2 février 1998, aussi bien pour les modalités que pour apprécier les seuils à partir desquels la surveillance est prescrite.

II. Installations existantes

Les délais mentionnés au titre V de l'arrêté du 26 septembre 1985 pour son application aux installations existantes sont aujourd'hui écoulés.

Il convient donc de vérifier la conformité des arrêtés d'autorisation existants à cet arrêté ministériel et, le cas échéant, de les réexaminer et de les compléter.

2.1. Vérification de la présence d'une valeur limite du débit d'eau en l/m² de surface traitée et par fonction de rinçage

Les ateliers existants sont soumis à une valeur limite de débit et de consommation d'eau en application de l'article 3.2 de l'arrêté du 26 septembre 1985. Le respect des valeurs-limites en concentration, en effet, ne doit en aucune circonstance être obtenu par une consommation excessive d'eau. Le débit des effluents doit correspondre à un niveau moyen, pour chaque fonction de rinçage nécessaire dans une chaîne de traitement, de moins de 8 litres par mètre carré de surface traitée. Vous veillerez à ce que cette valeur de débit d'eau s'applique à tous les ateliers existants.

Néanmoins, l'arrêté du 26 septembre 1985 prévoit en son article 3.2 que certains cas particuliers peuvent exiger des débits supérieurs. Je vous recommande alors d'abaisser les valeurs-limites de concentration des polluants rejetés de manière à ce que les flux correspondants ne soient pas majorés du fait de l'application de cette dérogation.

2.2. Actualisation des arrêtés autorisant les ateliers qui ont une capacité de bains de traitement supérieure à 50 m3

Afin d'assurer une meilleure maîtrise des rejets les plus importants, je vous recommande, pour les ateliers dont l'importance le justifie, notamment ceux ayant une capacité de bains de traitement supérieure à 50 m3, de prescrire les dispositions suivantes :

  • une surveillance permanente des émissions dans les conditions précitées au point 1.5.1 ci-dessus pour les installations nouvelles,
  • un bilan environnement annuel dans les conditions précitées au point 1.5.2 ci-dessus pour les installations nouvelles,
  • une surveillance des effets sur l'environnement dans les conditions précitées au point 1.5.3 ci-dessus pour les installations nouvelles,
  • une étude technico-économique ayant pour but une réduction significative des flux concernés lorsque les émissions actuelles contribuent à un niveau de pollution incompatible avec la vocation du milieu récepteur en cas de rejet direct dans le milieu, ou à un impact négatif sur le système d'assainissement en cas de raccordement.

Il conviendrait que les arrêtés complémentaires correspondants soient pris dans un délai d'un an et que la réduction des flux de toxiques intervienne dans un délai ne dépassant pas quatre ans suivant la date de publication de la présente circulaire.

2.3. Prévention de la pollution des sols

Les ateliers de traitement de surface sont fréquemment la cause de pollutions graves des sols et des eaux souterraines.

Chaque fois qu'il existe une présomption de pollution de sols, vous prescrirez par voie d'arrêté complémentaire pris en application de l'article 18 du décret du 21 septembre 1977 un diagnostic initial et une évaluation simplifiée des risques. Pour ce faire, vous pourrez par exemple vous appuyer sur la méthodologie définie dans le guide relatif à la méthode nationale d'évaluation simplifiée des risques édité par le Bureau de Recherches Géologiques et Minières (BRGM).

Lorsque des eaux souterraines destinées à la consommation publique sont situées sous des installations n'ayant pas respecté ou ne respectant pas les dispositions de protection des sols et eaux souterraines prévues aux articles 2 (2.1) et 5 de l'arrêté ministériel du 26 septembre 1985, vous prescrirez à l'exploitant de l'installation en cause, après constatation des infractions prévues par la loi, une surveillance des eaux souterraines par voie d'arrêté complémentaire dans un délai d'un an suivant la publication de la présente circulaire (en général, un piézomètre en amont et deux piézomètres en aval sont implantés à partir d'une étude hydrogéologique et une mesure des substances polluantes pertinentes est prescrite). Il convient de souligner que plus la détection de pollution est précoce, moins les interventions sont coûteuses.

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