(JO n° 98 du 27 avril 2022)


NOR : TRER2202234D

Publics concernés : tout acteur procédant à une compensation obligatoire ou volontaire, exploitants d'aéronefs devant compenser les émissions de gaz à effet de serre de leurs vols effectués à l'intérieur du territoire national.

Objet : décret d'application de l'article 147 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.

Entrée en vigueur : le lendemain de la publication du décret.

Notice : le décret précise les modalités d'application des principes de la compensation carbone énoncés dans l'article 147 de la loi climat et résilience (caractère mesurable, vérifiable, permanent, additionnel et transparent). Le décret précise également les conditions et modalités d'application de l'obligation de compensation des émissions de gaz à effet de serre des vols nationaux effectués par des exploitants d'aéronefs introduite par l'article 147 de la loi climat et résilience. Cette obligation s'applique à partir du 1er janvier 2022 et de manière graduelle jusqu'en 2024 où toutes les émissions devront être compensées. Le projet de décret précise notamment les acteurs visés, les éléments d'information devant être fournis par les exploitants d'aéronefs et leurs délais de transmission, ainsi que les modalités de vérification par l'autorité. Le décret prévoit une exemption pour les exploitants d'aéronefs générant moins de 1 000 tonnes de dioxyde de carbone (CO2) par an. Il précise les critères d'éligibilité des projets dont sont issus les crédits carbone, notamment la date de démarrage du projet, la répartition géographique des projets retenus, et la valorisation des co-bénéfices pour la biodiversité. Le décret prévoit des aménagements pour le financement ex-ante de projets européens. Il précise également le processus d'achat et d'annulation des crédits carbone.

Références : le décret peut être consulté sur le site de Légifrance (https://www.legifrance.gouv.fr).

Vus

Le Premier ministre,

Sur le rapport de la ministre de la transition écologique,

Vu le code de l'environnement, notamment ses articles L. 229-5 à L. 229-7 et L. 229-55 à L. 229-60 ;

Vu la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, notamment le II de son article 147 ;

Vu le décret n° 97-1198 du 19 décembre 1997 pris pour l'application au ministre de l'équipement, des transports et du logement du premier alinéa de l'article 2 du décret n° 97-34 du 15 janvier 1997 relatif à la déconcentration des décisions administratives individuelles ;

Vu les observations formulées lors de la consultation publique réalisée du 17 janvier au 6 février 2022 inclus, en application de l'article L. 123-19-1 du code de l'environnement ;

Le Conseil d'Etat (section des travaux publics) entendu,

Décrète :

Article 1er du décret du 26 avril 2022

Au chapitre IX du titre II du livre II du code de l'environnement, est ajoutée une section 7 ainsi rédigée :

« Section 7

« Réductions d'émissions issues de projets de compensation des émissions de gaz à effet de serre

« Art. R. 229-102-1. Les principes mentionnés à l'article L. 229-55 sont applicables, aux fins de compensation obligatoire ou volontaire, aux projets de réduction et de séquestration des émissions de gaz à effet de serre dans les conditions suivantes :

« 1° Les réductions et séquestrations d'émissions de gaz à effet de serre sont quantifiées, pour chaque projet de compensation, selon une méthodologie fondée sur les connaissances scientifiques et techniques les plus récentes. Les données utilisées dans les calculs sont clairement explicitées et référencées, afin de pouvoir être vérifiées. Ne sont prises en compte que les réductions et séquestrations d'émissions additionnelles par rapport à un scenario de référence qui doit être établi, pour chaque projet, en tenant compte de sa nature et de ses spécificités, de son contexte, de l'évolution tendancielle des émissions de gaz à effet de serre et des meilleures pratiques existantes. La méthodologie prend en considération les risques de remise en cause de la permanence des projets de compensation. Les réductions et séquestrations d'émission ne présentant pas un caractère suffisamment durable entraînent une minoration du nombre de crédits carbone pris en compte dans la méthodologie ;

« 2° Les réductions et séquestrations d'émissions sont contrôlées et validées, pour chaque projet de compensation, par une personne physique ou morale indépendante, dotée des compétences requises ;

« 3° Sont regardées comme présentant un caractère additionnel les réductions ou séquestrations d'émissions qui ne pourraient intervenir, en tout état de cause, dans le cadre du scénario de référence mentionné au 1°. A cette fin, il est tenu compte notamment des obligations découlant des textes en vigueur, des différents dispositifs incitant à opérer des réductions ou séquestrations d'émissions, ainsi que des pratiques existantes dans le secteur d'activité dont relève le projet ;

« 4° Sont mises à disposition du public, de façon aisément accessible, les informations relatives aux principales caractéristiques du projet, à la méthodologie sur laquelle il repose, aux modalités de comptabilisation des réductions et séquestrations d'émissions, au prix des crédits carbone correspondants, ainsi que celles permettant de s'assurer de la permanence des mesures de compensation.

« Un arrêté du ministre chargé de l'environnement précise, en tant que de besoin, les modalités techniques d'application du présent article, notamment celles tendant à garantir le caractère permanent et additionnel des actions de compensation.

« Sous-section unique

« Compensation des émissions de gaz à effet de serre des vols effectués à l'intérieur du territoire national

« Art. R. 229-102-2. La présente sous-section s'applique aux exploitants d'aéronefs opérant des vols à l'intérieur du territoire national mentionnés à l'article L. 229-56 et soumis aux obligations prévues aux articles L. 229-57 et L. 229-58, lorsque les émissions de ces vols, déterminées dans les conditions prévues à l'article R. 229-37-7, sont supérieures à 1 000 tonnes de dioxyde de carbone (CO2) par an.

« Art. R. 229-102-3. Pour l'application de la présente sous-section, les mots : “ l'autorité compétente ” désignent le ministre chargé de l'aviation civile, à l'exception des dispositions de l'articles R. 229-102-11 pour l'application desquelles l'autorité compétente est le ministre chargé de l'environnement.

« Art. R. 229-102-4. Les exploitants d'aéronefs s'acquittent chaque année de leurs obligations de compensation en utilisant ou en procédant à l'acquisition de crédits carbone afférents à des projets conformes aux dispositions de la présente section, à la condition qu'ils n'aient pas pour objet la réduction des émissions des aéronefs. Ils peuvent satisfaire à ces obligations s'ils bénéficient de réductions d'émissions reconnues en application du décret n° 2018-1043 du 28 novembre 2018 créant un label “ Bas Carbone ”.

« Art. R. 229-102-5. Les réductions et séquestrations d'émissions reconnues en application du décret n° 2018-1043 du 28 novembre 2018 créant un label “ Bas Carbone ”, ainsi que celles éligibles au régime de compensation et de réduction de carbone pour l'aviation internationale (CORSIA) mises en œuvre dans le cadre de l'Organisation de l'Aviation Civile Internationale (OACI) sont réputées respecter les dispositions de l'article R. 229-102-1.

« Art. R. 229-102-6. Les projets de réduction ou de séquestration des émissions de gaz à effet de serre ne sont éligibles au présent dispositif de compensation que si les travaux destinés à leur mise en œuvre ont commencé après le 31 décembre 2019 et s'ils n'ont pas d'impact négatif net sur la biodiversité.

« Art. R. 229-102-7. I. Un arrêté conjoint des ministres chargés de l'environnement et de l'aviation civile fixe un pourcentage minimum d'émissions réduites ou séquestrées par des projets situés dans l'Union européenne. Ce pourcentage augmente progressivement entre 2022 et 2025. A compter de 2025, il doit être d'au moins 50 %. Le respect de ce pourcentage est apprécié annuellement et pour chaque exploitant d'aéronefs soumis à l'obligation de compensation.

« II. L'arrêté mentionné au I fixe également un prix plafond du crédit carbone au-delà duquel les exploitants sont dispensés de l'application du taux mentionné à l'alinéa précédent, s'ils ne sont plus en mesure de trouver des projets situés dans l'Union européenne dont le prix du crédit carbone est inférieur à ce plafond.

« Art. R. 229-102-8. Les projets qui apportent des améliorations significatives en matière de préservation et de restauration des écosystèmes naturels et de leurs fonctionnalités peuvent bénéficier d'une majoration du montant des crédits carbone pris en compte pour apprécier le respect de l'obligation de compensation, dans la limite d'un plafond de majoration de 15 % par exploitant et par an.

« Un arrêté du ministre chargé de l'environnement précise les critères permettant d'évaluer ces projets au regard de ces objectifs et le taux de majoration.

« Art. R. 229-102-9. Les exploitants d'aéronefs transmettent à l'autorité compétente, au plus tard le 31 mars de chaque année, une déclaration portant sur les émissions de l'année précédente telles que définies au quatrième alinéa de l'article R. 229-37-7. Elles sont vérifiées conformément aux dispositions du III de l'article L. 229-7 et à celles de la présente section.

« En l'absence de déclaration dans le délai requis ou si l'autorité compétente constate qu'elle n'est pas conforme aux conditions fixées par l'arrêté relatif aux aéronefs prévu au cinquième alinéa de l'article L. 229-6, l'autorité compétente procède d'office, après mise en demeure infructueuse de l'exploitant, au calcul des émissions, conformément au quatrième alinéa de l'article R. 229-37-7.

« Art. R. 229-102-10. L'annulation des crédits carbone utilisés ou acquis en vue de la compensation des émissions de l'année précédente doit intervenir au plus tard le 30 avril de chaque année.

« Art. R. 229-102-11. L'exploitant d'aéronefs transmet à l'autorité compétente, avant le 1er juin de chaque année, un rapport de compensation contrôlé par le vérificateur mentionné à l'article R. 229-102-12 ainsi qu'une copie du rapport de celui-ci.

« Le rapport de compensation comprend la liste des projets de réduction ou de séquestration d'émissions de gaz à effet de serre mis en œuvre. Il indique, pour chacun d'eux, la localisation, le secteur d'activité et la nature du projet, la quantité d'émissions concernées, la méthodologie utilisée, l'année de démarrage du projet, les modalités de son financement, ainsi que tous les éléments pertinents permettant d'apprécier l'éligibilité des projets au regard des conditions prévues à l'article R. 229-102-1.

« Le rapport de compensation est accompagné des pièces justificatives permettant de vérifier que les réductions et séquestrations d'émissions qu'il mentionne sont bien attribuables à l'exploitant d'aéronefs et que celles-ci ont exclusivement pour objet de satisfaire à ses obligations de compensation pour l'année considérée.

« L'exploitant d'aéronefs fournit à l'autorité compétente les pièces justificatives demandées par cette dernière.

« Art. R. 229-102-12. Le vérificateur est chargé de s'assurer du respect des exigences prévues par la présente sous-section, y compris en matière de préservation et de restauration des écosystèmes naturels. Sont habilités à procéder à cette vérification les organismes accrédités dans les conditions prévues par arrêté du ministre chargé de l'aviation civile.

« Art. R. 229-102-13. La sanction prévue à l'article L. 229-59 en cas de non-respect de l'obligation de compensation s'applique également lorsque l'exploitant d'aéronefs n'a pas, dans les délais prescrits, transmis le rapport de compensation vérifié ou n'a pas fait les diligences nécessaires à l'annulation des crédits carbone utilisés pour remplir ses obligations de compensation des émissions de l'année précédente.

« La décision prononçant l'amende en application de l'article L. 229-59, qui est prise par le ministre chargé de l'aviation civile, est notifiée à l'exploitant d'aéronef. La décision de sanction peut prévoir sa publication au Journal officiel de la République française. »

Article 2 du décret du 26 avril 2022

Les crédits carbone afférents aux projets de réduction ou de séquestration d'émissions de gaz à effet de serre situés dans l'Union européenne peuvent être pris en compte pour satisfaire aux obligations de compensation, sans qu'il soit besoin de procéder aux contrôles et validations prescrits au 2° de l'article R. 229-102-1 du code de l'environnement, s'ils sont prévus dans un contrat conclu à cette fin entre l'exploitant d'aéronefs et le responsable du projet avant le 1er janvier 2026.

Il en va de même, lorsque le projet est mis en œuvre par l'exploitant d'aéronef, s'il notifie au ministre chargé de l'aviation civile, avant la date mentionnée au précédent alinéa, l'engagement d'utiliser exclusivement ces crédits carbone pour satisfaire à ses obligations de compensation au titre du présent décret.

Toutefois, si les réductions ou séquestrations d'émissions prévues dans le contrat ou l'engagement s'avèrent différentes de celles constatées en application du 2° de l'article R. 229-102-1, il est procédé à une régularisation dans les conditions fixées par arrêté conjoint des ministres chargés de l'environnement et de l'aviation civile.

Article 3 du décret du 26 avril 2022

Après la ligne 59 de la rubrique « Aviation civile » de l'annexe 1 « Liste des décisions administratives individuelles prises par le ministre chargé de la transition écologique et solidaire » du décret du 19 décembre 1997 susvisé, est ajoutée la ligne suivante :

«

60 Sanction infligée aux exploitants d'aéronefs n'ayant pas compensé leurs émissions de gaz à effet de serre pour les vols réalisés à l'intérieur du territoire national

Code de l'environnement
Article L. 229-59

Ministre chargé de l'aviation civile

».

Article 4 du décret du 26 avril 2022

Le présent décret s'applique aux émissions de l'année 2022, dans les conditions prévues au 1° de l'article L. 229-57 du code de l'environnement et, pour les années suivantes, dans les conditions prévues aux 2° et 3° du même article.

Article 5 du décret du 26 avril 2022

La ministre de la transition écologique et le ministre délégué auprès de la ministre de la transition écologique, chargé des transports, sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.

Fait le 26 avril 2022.

Jean Castex

Par le Premier ministre :
La ministre de la transition écologique,
Barbara Pompili

Le ministre délégué auprès de la ministre de la transition écologique, chargé des transports,
Jean-Baptiste Djebbari

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