(circulaire.legifrance.gouv.fr et BO MTES n° 2017/17 du 25 décembre 2017)


NOR : TREP1730180N

Date de mise en application : immédiate.

Résumé : la présente note technique complète l’instruction gouvernementale du 31 mars 2016. Elle apporte des précisions sur les modalités d’intervention des services de l’État concernant la mise en oeuvre des plans de prévention des risques technologiques, et plus particulièrement des mesures alternatives aux mesures foncières pour les activités économiques. Elle rappelle que le recours à de telles mesures doit être encouragé lorsque le contexte est
favorable. Elle précise les critères permettant d’apprécier leur pertinence et le contenu des études préalables devant être fournies par les propriétaires des biens concernés.

Catégorie : note technique adressée aux préfets de région et de département et aux services déconcentrés placés sous leur autorité.

Domaine : prévention des risques.

Mots clés liste fermée : environnement ; sécurité.

Mots clés libres : accident majeur – établissement Seveso – plan de prévention des risques technologiques – mesures alternatives.

Référence : section 6 du chapitre V du titre Ier du livre V du code de l’environnement.

Annexe : Tableaux définissant les critères permettant d’apprécier la pertinence des mesures alternatives.

Publication : BO ; site circulaires.gouv.fr.

Le ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, aux préfets de région (direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement ; direction de l’environnement, de l’aménagement et du logement ; direction régionale et interdépartementale de l’environnement et de l’énergie) ; aux préfets de département (direction départementale des territoires ; direction départementale des territoires et de la mer) ; à l’Institut national de l’environnement industriel et des risques ; au Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (pour exécution) ; au secrétaire général du Gouvernement ; au secrétariat général du ministère de la transition écologique et solidaire ; à la direction générale de la prévention des risques (pour information).

Les plans de prévention des risques technologiques (PPRT), créés par la loi n° 2003-699 du 30 juillet 2003 à la suite de la catastrophe d’AZF, ont pour objectifs, en traitant les situations héritées du passé, d’améliorer et de pérenniser la coexistence des sites industriels à hauts risques (classés Seveso seuil haut) avec leurs riverains.

À ce jour plus de 90 % des 392 PPRT à élaborer ont été approuvés et la phase de mise en oeuvre de ces plans est désormais pleinement opérationnelle. Une instruction gouvernementale a été signée le 31 mars 2016 afin de rappeler l’importance d’achever la phase d’élaboration des PPRT rapidement et surtout d’accélérer la phase de mise en oeuvre. Pour cela, cette instruction précise les modalités de pilotage, par les préfets de département, de la phase de mise en oeuvre des PPRT et détaille l’ensemble des outils à disposition des services déconcentrés pour accompagner les collectivités à mener à bien les différentes mesures prévues par les plans. Plusieurs fiches thématiques disponibles sur le site intranet des services en charge de la prévention des risques industriels (ICAR) complètent cette instruction.

Une des principales dispositions de l’ordonnance du 22 octobre 2015 a été d’offrir la possibilité pour les biens autres que les logements situés dans les secteurs de délaissement et d’expropriation de proposer la mise en place de mesures dites « alternatives » aux mesures foncières et financées de la même manière (par financement tripartite État – collectivités – industriel à l’origine du risque). Ces mesures, définies à l’article L. 515-16-6 du code de l’environnement, peuvent notamment consister en des mesures de protection des populations, de réduction de la vulnérabilité ou d’organisation de l’activité. Elles doivent être prescrites dans la limite des dépenses qui seraient engagées si les mesures foncières avaient été menées et permettre une « amélioration substantielle de la protection des populations ». L’intérêt de ces mesures est d’éviter une délocalisation des entreprises lorsqu’il est possible de les protéger autrement, elles doivent donc être encouragées dès lors que la situation s’y prête. Les activités ont 6 ans, à compter de la signature de la convention de financement des mesures foncières ou de la mise en place du  financement par défaut, pour proposer de telles mesures.

Ce dispositif peine aujourd’hui à démarrer, très peu de mesures alternatives ont été prescrites à ce jour. La présente note est motivée par les échanges récents avec vos services qui ont montré la nécessité de préciser certains aspects de la procédure pouvant mener à la prescription des mesures alternatives, procédure qui peut paraître complexe à la fois pour les services déconcentrés et les activités riveraines.

I. Initier la réflexion sur l’opportunité de mettre en œuvre des mesures alternatives

La réflexion sur l’opportunité de mettre en oeuvre des mesures alternatives peut être menée, soit par le propriétaire, soit par le locataire, toutefois, la proposition doit au final être effectuée par le propriétaire.

À noter que lorsqu’un local à usage commercial ou artisanal est en location et que son propriétaire souhaite bénéficier du droit au délaissement, l’ordonnance du 22 octobre 2015 prévoit que le locataire puisse l’acquérir pour ensuite bénéficier d’une mesure alternative.

Il est attendu des services de l’État, qu’ils présentent le dispositif et apportent tous les éléments d’appréciation permettant aux acteurs d’évaluer l’opportunité de s’engager dans la démarche.

La faisabilité de ces mesures dépend de plusieurs paramètres et en particulier :
- des conditions d’alerte de l’activité riveraine ;
- de la dynamique des phénomènes dangereux l’impactant ;
- de leur intensité et type d’effets ;
- de la nature de l’activité ainsi que de la nature et du nombre de personnes susceptibles d’être présentes.

Ainsi, le recours à des mesures alternatives apparaît particulièrement pertinent lorsque :
- un système d’alerte rapide et efficace associé à des consignes adéquates pour toutes les personnes en lien avec l’activité peut être mis en place avec l’exploitant à l’origine des risques ;
- l’activité est impactée uniquement par des phénomènes dont la dynamique permet aux personnes présentes de se protéger ;
- les personnes présentes sont formées à la conduite à tenir en cas de déclenchement de l’alerte ;
- la localisation de l’activité permet l’accès aux services de secours et l’évacuation des personnes.

Des mesures alternatives peuvent néanmoins être envisagées dans des cas plus complexes. Afin d’orienter la réflexion, vous trouverez en annexe des tableaux définissants les critères permettant d’apprécier la pertinence des mesures alternatives. Ils précisent en fonction de la dynamique des phénomènes dangereux et du type d’effet, les mesures qui paraissent les plus adaptées et les points de vigilance associés.

Pour mener la réflexion, les propriétaires ou locataires doivent disposer des informations détaillées sur la manière dont ils pourront recevoir l’alerte de la part de l’exploitant à l’origine des risques et sur les phénomènes dangereux impactant leur activité. Ces informations pourront être recueillies auprès des exploitants à l’origine des risques ou des services de l’État.

Dans les cas où de telles mesures sembleraient inadaptées, il y a lieu d’en informer le plus en amont possible le propriétaire ainsi que le locataire le cas échéant et d’engager les mesures foncières sans tarder.

Plus généralement, il convient de prévoir une information à destination des activités potentiellement concernées afin de leur présenter la possibilité de recourir aux mesures alternatives et d’accompagner celles qui s’engageraient dans la démarche. Les instances locales de concertation, et en particulier les commissions de suivi de sites (CSS) ou les secrétariats permanents pour la prévention des pollutions et des risques industriels (S3PI), peuvent être le relai d’une telle information.

II. L’étude préalable

Dès lors que le propriétaire souhaite étudier la faisabilité des mesures alternatives, il doit effectuer une étude justifiant qu’elles apportent une « amélioration substantielle de la protection des populations », et permettant au préfet de prescrire les mesures le cas échéant.

Afin de faciliter la réalisation par les propriétaires des études préalables, le CEREMA a établi un cahier des charges type que vos services pourront se procurer sur ICAR.

Cette étude préalable devra contenir a minima les éléments suivants :

1. Une description de la situation actuelle :
- documents identifiant le demandeur et justifiant de son intérêt à agir ;
- localisation de l’activité au sein du zonage réglementaire du PPRT ;
- identification des phénomènes dangereux impactant l’activité (effets, intensité, dynamique) ;
- usage des différents bâtiments/aires à l’état initial sans mise en oeuvre des mesures alternatives et nombre de personnes présentes (présence permanente, ou présence temporaire ramenée à une présence permanente) ;
- description du type de population présente (employés, personnel d’entreprise extérieur, public…).

2. Une description des mesures proposées :
 - modalités de l’alerte (entre l’activité et l’entreprise à l’origine du risque et à l’intérieur de l’activité si nécessaire) ;
 - modalités d’information des populations présentes sur le site et de formation des personnes (consignes, fréquence des exercices qui peuvent être menés conjointement avec les exploitants à l’origine des risques, cohérence avec les plans d’urgence existants…) ;
- dimensionnement des mesures et justification de leur efficacité, suivant le cas :
       - caractéristiques des travaux de renforcement ;
       - caractéristiques des locaux ou zones de mise à l’abri, caractère adaptée de la distance à parcourir par rapport à la dynamique du phénomène dangereux, avec le cas échéant les caractéristiques des masques de fuites ;
       - caractéristiques des barrières techniques ;
       - schéma de réorganisation des espaces (intérieurs et/ou extérieurs) ;
- amélioration de la protection des populations apportées par les mesures : comparaison entre le nombre de personnes exposées avant et après mise en oeuvre des mesures et le cas échéant, justification que les mesures proposées apportent le meilleur niveau de protection possible des personnes au regard du montant de la mesure foncière évitée.

Si le bien est soumis à plusieurs effets, simultanés ou non, il est nécessaire que les mesures soient cohérentes entre elles (par exemple, il ne serait pas pertinent pour un même bien de prévoir une évacuation pour se protéger d’un phénomène thermique et un confinement pour se protéger d’un phénomène chimique).

3. Une estimation des coûts (établie sur la base de devis, seuls les opérations donnant lieu à une facture pouvant être financées dans le cadre du PPRT).

4. Si nécessaire, une proposition de servitudes afin de garantir leur efficacité dans le temps.

III. Prescription de la mesure

En application de l’article L. 515-16-6 du code de l’environnement, les mesures sont prescrites par le préfet aux propriétaires dans la limite des dépenses qui seraient engagées en cas de délaissement ou d’expropriation. Leur mise en oeuvre peut être complétée si nécessaire par le propriétaire et à ses frais dans le cas d’une démarche volontaire.

Si nécessaire, ces prescriptions devront être assorties de servitudes d’utilité publique telles que définies à l’article L. 515-8.

Lors de l’instruction de l’étude préalable, l’« amélioration de la protection des populations » apportée par les mesures proposées est appréciée notamment au regard de la réduction :
- du nombre de personnes exposées ;
- des niveaux d’intensité auxquels les personnes sont exposées ;
- de la probabilité que les personnes soient exposées aux effets d’un phénomène dangereux ;
- de la démonstration que les mesures proposées apportent le meilleur niveau de protection possible des personnes au regard du montant de la mesure foncière évitée.

À ce titre, il convient de prêter une grande attention à la robustesse des mesures envisagées lorsque les conséquences possibles sont particulièrement importantes. Vous veillerez à recueillir l’avis de la direction générale de la prévention des risques, avant prescription, si vous envisagiez des mesures alternatives concernant plus de 100 personnes exposées à un risque létal, ou plus de 10 personnes lorsqu’un phénomène dangereux les exposant à ce risque létal est «probable» (au sens de l’arrêté ministériel du 29 septembre 2005).

Je vous rappelle par ailleurs, comme indiqué dans l’instruction gouvernementale du 31 mars 2016, que les appuis techniques du ministère pourront être sollicités.

Mes services restent à votre disposition pour vous accompagner dans la mise en oeuvre de ces dispositions.

Fait le 7 novembre 2017.

Pour le ministre d’État et par délégation :
Le directeur général de la prévention des risques,
M. Mortureux

Annexe : Tableaux définissant les critères permettant d’apprécier la pertinence des mesures alternatives

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