(MEEDDM n° 2009/22 du 10 décembre 2009)


NOR : DEVP0918244C

Le ministre d’Etat, ministre de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat, et le président de l’Autorité de sûreté nucléaire. Les anciennes mines d’uranium font l’objet, de longue date, d’une attention toute particulière de la part de la puissance publique, et notamment du ministère chargé de l’écologie et de l’Autorité de sûreté nucléaire, qui considèrent que ces sites doivent s’inscrire dans un processus vertueux de surveillance et, le cas échéant, de remise en état pour limiter les impacts de ces sites sur la santé publique et la qualité de l’environnement (1).

(1) La loi du 28 juin 2006, le décret no 2008-357 du 16 avril 2008 relatifs à la gestion durable des matières et déchets radioactifs et le plan national de gestion des matières et des déchets radioactifs (PNGMDR) de 2006 ainsi que sa nouvelle version, en cours de révision, contiennent notamment des dispositions pour prendre en compte les problématiques posées par ces sites

Un état des lieux récemment réalisé par la direction générale de la prévention des risques en lien avec l’Autorité de sûreté nucléaire permet de constater que ces sites ont fait l’objet d’un suivi de la part de l’administration, avec, dans certaines régions, des actions intéressantes qui s’inscrivent généralement dans un processus de concertation associant l’ensemble des acteurs concernés.

Dans le prolongement des actions qui ont déjà été menées, nous considérons qu’il est aujourd’hui nécessaire de poursuivre de manière résolue la gestion des anciennes mines d’uranium. Dans cette perspective, nos services ont défini un plan d’actions composé des mesures suivantes :

1. Contrôler les anciens sites miniers ;

2. Améliorer la connaissance de l’impact environnemental et sanitaire des anciennes mines d’uranium et la surveillance ;

3. Gérer les stériles : mieux connaître leurs utilisations et réduire les impacts si nécessaire ;

4. Renforcer l’information et la concertation.

A la demande du ministre d’Etat, ministre de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat, la présidente d’AREVA NC s’est engagée à mettre en oeuvre un plan d’actions (cf. lettre PrD-09/176 du 12 juin 2009, dont copie en annexe) qui participera à la déclinaison de ces quatre mesures à coté des actions qui seront conduites sous l’égide des services de l’Etat.

Dès la première année, la plupart de ces actions devra être largement engagée. Nous attachons cependant beaucoup de prix à ce que la mise en oeuvre de ce plan d’actions soit associée à une véritable concertation : l’exigence de concertation devra donc figurer en priorité dans vos méthodes de travail.

Enfin, la mise en oeuvre de ce plan d’actions exige d’agir dans un cadre coordonné, notamment en ce qui concerne le contrôle des anciennes mines d’uranium et le recensement des zones de réutilisation de stériles miniers dans l’environnement afin que des méthodologies robustes et harmonisées soient mises en oeuvre au niveau de l’ensemble de ces sites.

A. – Contrôler les anciens sites miniers

Les DRIRE et les DREAL devront contrôler, en relation avec l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), les principaux sites miniers recensés dans la base de données MIMAUSA (cf. www.irsn.fr). Les dixsept sites de stockage de résidus seront impérativement contrôlés dans le cadre de cette action, ainsi que ceux qui ont accueilli des usines de traitement ou des plates-formes de traitements passifs. D’autres sites pourront également être contrôlés du fait de la sensibilité qu’ils présentent. Le contrôle des sites répertoriés dans MIMAUSA comme « travaux de recherche par petit chantier », « travaux de reconnaissance par petit chantier » ou « tranchées » et pour lesquels il n’y a pas eu d’extraction d’uranium est moins prioritaire.

Le contrôle réalisé portera notamment sur les accès, les clôtures, la réutilisation des stériles, les modalités de surveillance de l’environnement, l’état général des sites et des dispositifs de confinement...Il s’agira notamment de vérifier que les dispositions visant, selon les cas, à interdire ou à limiter l’accès à ces sites et à limiter leur impact sanitaire et environnemental sont bien mises en oeuvre conformément aux engagements pris par AREVA NC et aux prescriptions que vous avez pu prendre. Le cas échéant, ces inspections pourront vous amener à identifier des zones « sensibles » pour lesquelles les accès devront être protégés. Dans ce cas, vous voudrez bien inviter l’exploitant à rapidement procéder aux travaux nécessaires et imposer ces protections par voie d’arrêté préfectoral.

A l’occasion de ces inspections, des campagnes de prélèvements inopinés et de mesures, aussi bien sur l’eau que sur les sédiments, seront réalisées. Ces contrôles pourront être effectués sur des points régulièrement suivis par l’exploitant ainsi que sur des points « particuliers » qui auront été relevés par l’inspection. Les écoulements d’eau, notamment en pied de verses à stériles ou de dépôts de résidus de traitement minier, feront l’objet d’une attention particulière. Ces inspections peuvent aussi être effectuées hors des emprises minières.

La surveillance environnementale des sites miniers relève de la responsabilité de l’exploitant. Par ailleurs, et dans le prolongement des pratiques habituelles, ces campagnes de prélèvements inopinés et de mesures seront décidées par l’inspection, réalisées par l’IRSN ou tout autre organisme agréé par l’ASN, et devront être prises en charge financièrement par l’exploitant.

B. – Améliorer la connaissance de l'impact environnemental et sanitaire des anciennes mines d'uranium et la surveillance

La connaissance des anciennes mines d’uranium constitue une étape essentielle dans leur gestion. Aussi faut-il constater que la connaissance de ces anciens sites est aujourd’hui perfectible. C’est pourquoi le ministre d’Etat, ministre de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat, a demandé à la société AREVA NC de conforter, sous trois ans, l’état des lieux environnemental de tous les sites dont elle est titulaire d’une autorisation administrative ou d’un acte de propriété. Une attention particulière devra être portée aux sites qui n’étaient auparavant pas exploités directement par AREVA NC, et aux sites sur lesquels des déchets (autres que miniers) ont pu être entreposés par le passé.

D’autre part, nous vous invitons à prescrire à la société AREVA NC, avant la fin de l’année 2009, la réalisation de « bilans de fonctionnement » pour les concessions, ainsi que pour les sites qui ont accueilli des usines de traitement, des dépôts de résidus miniers ou des plates-formes de traitement passif (ces bilans seront réalisés à une échelle adaptée au contexte local : ils pourront le cas échéant être réalisés à l’échelle départementale, comme cela a déjà été initié dans la région Limousin). Il conviendra notamment de prendre en compte dans ces études les dépôts de sédiments situés en aval des sites visés ci-dessus tant dans les cours que dans les plans d’eau. Sur la base de ces bilans de fonctionnement, des prescriptions appropriées pourront être imposées à l’exploitant dans l’année qui suivra la remise de cette étude pour améliorer l’impact environnemental de ces sites et/ou renforcer la surveillance environnementale.

Par ailleurs, AREVA a rendu début 2009, dans le cadre de l’application du plan national de gestion des matières valorisables et des déchets radioactifs, des études portant sur l’impact à long terme des sites de stockage de résidus miniers. Nous vous informerons de l’avis que l’Autorité de sûreté nucléaire va rendre au ministre dans le courant de l’été sur ces études et des prescriptions que vous pourriez être amenés à prendre en conséquence, au regard de l’analyse qui sera menée conjointement par l’ASN et les services de la direction générale de la prévention des risques du ministère, si besoin en s’appuyant sur des expertises complémentaires.

Enfin, un groupe d’expertise pluraliste (GEP) a été constitué en 2006 afin d’éclairer les pouvoirs publics sur la gestion des mines qui ont été exploitées dans le Limousin. Le GEP doit remettre ses conclusions d’ici à la fin de l’année 2009. Certains résultats de ces travaux devront être généralisés à l’ensemble des anciennes mines d’uranium, et pourront donc également faire l’objet de prescriptions qui seront imposées à l’exploitant. Nous vous en informerons dans le mois qui suivra la remise des conclusions du GEP Limousin afin que vous puissiez en tenir le meilleur compte dans le cadre de cette démarche.

Durant le processus qui vous amènera à imposer ces prescriptions, les objectifs suivants seront poursuivis (dans le cadre d’une démarche proportionnée aux enjeux) :
- réduire les rejets diffus et améliorer le traitement des rejets (en privilégiant les « techniques douces »), en particulier au regard de l’impact sur les milieux environnants ;
- poursuivre la réhabilitation des anciens sites qui le requièrent dans l’objectif de leur parfaite intégration dans leur environnement local et sur le long terme ;
- réévaluer la surveillance environnementale de tous les sites miniers (de leurs annexes, des installations de traitement et des stockage de résidus et de stériles...) pour, au besoin, définir une surveillance encore plus adaptée.

C. – Gérer les stériles : Mieux connaître leurs utilisations et réduire les impacts si nécessaire

Dans l’environnement des mines d’uranium, des stériles ont généralement été réutilisés en remblais. Il s’agissait d’une pratique couramment admise. A partir de 1984, des règles ont cependant été imposées aux exploitants des mines d’uranium pour, notamment, assurer la traçabilité des lieux où ils étaient utilisés. Puis, à partir de 2002, les exploitants des mines d’uranium ont définitivement arrêté cette pratique.

Les stériles des anciennes mines d’uranium présentent un marquage radioactif. La réutilisation de ces stériles dans l’environnement peut conduire, au fil des ans, à ce que l’usage du sol ne soit pas compatible avec la présence de tels stériles (par exemple en cas de constructions d’habitations à l’aplomb de tels remblais).

Si nous considérons que, d’une manière générale, il ne faut pas remettre en cause les utilisations passées, nous considérons qu’il est en revanche dorénavant nécessaire :
- d’interdire tout nouveau projet de valorisation de stériles issus d’anciennes mines d’uranium ;
- d’instaurer des servitudes sur les terrains où se situent des dépôts significatifs de stériles issus d’anciennes mines d’uranium pour, d’une part, les mémoriser et, d’autre part, empêcher leur réutilisation en dehors des terrains où ils ont été déposés ;
- de réaliser un recensement des lieux où de tels stériles ont été mis en oeuvre en dehors du périmètre des anciennes mines ;
- de recenser les usages du sol là où des stériles ont été valorisés en dehors du périmètre des anciennes mines d’uranium ;
- de vérifier la compatibilité des usages à l’aplomb et dans l’environnement immédiat des zones où des stériles ont été utilisés.

Le recensement des lieux de réutilisation des stériles doit être réalisé sous la responsabilité de l’exploitant (sous réserve de l’accord préalable des propriétaires des parcelles concernées par la présence de stériles) et conformément à l’engagement pris par la présidente d’AREVA NC dans le courrier (dont copie en pièce jointe) qu’elle a adressé le 12 juin 2009 au ministre d’Etat. Ce recensement devra cependant se dérouler dans le cadre d’une démarche concertée associant les CLIS, ainsi que les populations et les élus locaux. Nous vous serions reconnaissants de bien vouloir y veiller.

La société AREVA NC procédera à ce recensement sous deux ans pour l’ensemble des anciennes mines d’uranium (cependant, la méthode de recensement sera développée, qualifiée puis mise en oeuvre sur le tiers des surfaces à investiguer sous un an). Ce recensement sera ensuite présenté en CLIS puis mis à la disposition du public dans les communes concernées par la réutilisation de tels stériles. Durant cette période, le public devra être en mesure de pouvoir émettre des observations sur ce recensement. A l’issue de cette période de concertation et de consultations, AREVA NC tiendra compte de ces informations pour parfaire ce recensement.

Nous vous informons que, dans le cadre du programme MIMAUSA (cf. inventaire disponible sur www.irsn.fr), nous envisageons de confier à l’IRSN la réalisation de contre-expertises sur quelques sites qui présentent des enjeux importants. Ces contre-expertises ont vocation à nous permettre de juger de la qualité du recensement réalisé par l’exploitant et à fiabiliser cette base de données. Elles pourront, là aussi, vous conduire à demander à l’exploitant de procéder à des compléments d’inventaire.

Une fois cet inventaire achevé, il sera vérifié que les usages des sols là où des stériles ont été valorisés (et dans l’environnement immédiat de ces zones de valorisation) sont acceptables au plan environnemental et sanitaire. En cas d’incompatibilité d’usage, la société AREVA NC participera au cas par cas, comme elle s’y est engagée auprès du ministre d’Etat, aux actions de remédiation nécessaires. Dans la mesure où certaines des dispositions du code de la santé publique devront être appliquées, ces situations devront être gérées en relation avec la direction départementale des affaires sanitaires et sociales et avec l’Autorité de sûreté nucléaire.

Dans l’hypothèse où des stériles devraient être retirés de leur lieux d’utilisation, il conviendrait de les retourner préférentiellement au site dont ils sont issus (qui sera autorisé au titre de la rubrique 1735 de la nomenclature des installations classées pour la protection de l’environnement ou sur lequel des arrêtés préfectoraux pris au titre du code minier encadrent déjà les conditions d’entreposage de ces matériaux), ou vers tout autre lieu autorisé à recevoir ce type de déchet et en tenant compte du principe de proximité.

Enfin, cet inventaire a vocation à être tenu à la disposition du public (notamment dans la base MIMAUSA, disponible sur www.irsn.fr) et à rapidement trouver, sous votre impulsion, une déclinaison dans les plans locaux d’urbanisme des communes où des stériles des anciennes mines d’uranium ont été valorisés afin d’éviter que des projets incompatibles continuent de se développer sur des terrains où ces matériaux ont été valorisés.

D. – Renforcer l'information et concertation

Nous souhaitons qu’un affichage soit réalisé par la société AREVA NC au niveau de chacun de ses sites recensés dans l’inventaire MIMAUSA pour informer de la présence des anciennes mines d’uranium. Cet affichage, qui devra correctement couvrir la périphérie de ces sites, devra informer sur la surveillance radiologique réalisée. Lors des inspections réalisées par les directions régionales de l’industrie, de la recherche et de l’environnement ou par les directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement, il conviendra de veiller à l’entretien et au maintien dans le temps de cet affichage.

Les résultats du suivi radiologique et, d’une manière générale, les mesures réalisées dans l’environnement de ces mines devront être portés annuellement à la connaissance des commissions locales d’information et de surveillance, et des municipalités concernées. Vous veillerez particulièrement à l’entretien et au maintien dans le temps des affichages mis en place.

Comme nous l’avons déjà évoqué, nous attachons beaucoup de prix à ce que la mise en oeuvre de ce plan d’actions se déroule dans un cadre associant de la meilleure manière qu’il soit l’ensemble des parties prenantes concernées par ce dossier. Au plan national, le groupe de travail chargé d’élaborer le plan national de gestion des matières et des déchets radioactifs participe à cette nécessaire concertation. Au plan local, nous vous invitons à réévaluer l’opportunité (au regard des enjeux techniques et environnementaux, ou des attentes exprimées localement par la société) de créer des commissions locales d’information et de surveillance (CLIS) ou des structures analogues autour des sites qui n’en seraient pas encore dotés pour en créer le plus rapidement possible là où un manque existe. Si besoin, vous pourrez aussi évoquer le sujet lors des réunions du conseil départemental des risques sanitaires et technologiques ou dans des groupes pluripartites pouvant dépasser le cadre d’un site ou même d’un département (cf. le cas du groupe d’expertise pluraliste du Limousin).

Nous vous invitons à largement associer les CLIS, et d’une manière plus générale les populations et les élus locaux, à la mise en oeuvre de ce plan d’actions.

La gestion des anciennes mines d’uranium relève de la compétence des directions régionales de l’industrie, de la recherche et de l’environnement ou des directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement. La mise en oeuvre de ces actions pourra s’appuyer sur les dispositions du code minier (cf. article 77 et suivants du code minier, et tout particulièrement l’article 79, qui s’applique d’ailleurs aussi lorsqu’il n’y a eu qu’une activité d’exploration), sur les dispositions de l’article R. 512-31 du code de l’environnement pour les sites qui relèvent du régime des installations classées pour la protection de l’environnement, ainsi que sur le titre IV du livre V du code de l’environnement pour ce qui concerne les stériles réutilisés en remblais en dehors des anciennes mines. Si des cas de figure très particuliers n’étaient pas couverts par ces outils réglementaires, et de manière tout à fait exceptionnelle, il pourrait être fait usage des dispositions de l’article L. 514-4 du code de l’environnement . De plus, et compte tenu des spécificités liées aux anciennes mines d’uranium, vous pourrez vous appuyer sur les services de l’Autorité de sûreté nucléaire dans la mise en oeuvre de ce plan d’actions, notamment afin de veiller à la cohérence avec les principes de gestion des déchets radioactifs.

Nous vous remercions de bien vouloir nous faire part des difficultés que vous pourriez rencontrer dans la mise en oeuvre de ce plan d’actions. Par ailleurs, nous vous serions reconnaissants de bien vouloir nous adresser tous les six mois un bilan de la mise en oeuvre de la présente circulaire jusqu’à l’achèvement de ce plan d’actions.

La présente circulaire sera publiée au Bulletin officiel du ministère de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat.

Fait à Paris, le 22 juillet 2009.

Le ministre d’Etat, ministre de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat,
Jean-Louis Borloo

Le président de l’Autorité de sûreté nucléaire,
A.-C. Lacoste

Annexe : Lettre du 12 juin 2009 de la présidente du Directoire d'AREVA relative au plan d'actions pour poursuivre la surveillance des anciennes mines d'uranium

Consulter la lettre du 12 juin 2009.

 

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