(BO du MEDAD n° 3 du 15 février 2008)
NOR : DEVO0803331C
Pièce jointe : document de cadrage sur les modalités pratiques de classement des cours deau.
Le ministre dEtat, ministre de lécologie, du développement et de laménagement durables, à Mesdames et Messieurs les préfets, coordonnateurs de bassin ; Mesdames et Messieurs les préfets de région ; Mesdames et Messieurs les préfets de département.
PLAN DE DIFFUSION
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POUR EXÉCUTION Destinataires |
POUR INFORMATION Destinataires |
Préfets coordonnateurs de bassin Préfets de région Préfets de département |
DIREN DRIRE MISE Agences de leau Offices de leau ONEMA |
La loi sur leau et les milieux aquatiques du 30 décembre 2006 rénove les critères de classement des cours deau en les adaptant aux exigences de la directive cadre sur leau. Le décret n° 2007-1760 du 14 décembre 2007 (publié au Journal officiel du 16 décembre 2007), portant dispositions relatives aux régimes dautorisation et de déclaration au titre de la gestion et de la protection de leau et des milieux aquatiques, aux obligations imposées à certains ouvrages situés sur les cours deau, à lentretien et à la restauration des milieux aquatiques et modifiant le code de lenvironnement, en précise les modalités dapplication.
La présente circulaire a pour objet de donner les éléments de cadrage nécessaires pour létablissement de ces nouveaux classements, qui seront arrêtés par les préfets coordonnateurs de bassin sur la base des propositions des préfets de département.
Cette refonte des classements des cours deau doit être en priorité loccasion de réexaminer et de toiletter les classements existants.
Le délai ultime pour procéder à la première refonte des classements est le 1er janvier 2014, date à laquelle les classements actuels au titre de la loi de 1919 ou de larticle L. 432-6 du code de lenvironnement deviendront automatiquement caduques. Si ces délais paraissent lointains, jattire dores et déjà votre attention sur des échéances plus rapprochées :
la nécessité de faire figurer dans les SDAGE les grandes orientations qui présideront à létablissement des classements, ainsi quune première identification des réservoirs biologiques ;
la nécessité dinscrire dans les programmes pluriannuels de mesure un engagement à publier les listes de cours deau classés au plus tard le 1er janvier 2014, et si possible dy faire figurer les premières propositions de listes ;
la nécessité de procéder au plus tard au 31 décembre 2010 au classement des bassins ou sous-bassins prioritaires pour la protection de languille et identifiés comme tels dans les plans de gestion de cette espèce, en application du règlement européen n° 1100/2007 du 18 septembre 2007.
Vous voudrez bien me faire part des difficultés que vous pourriez rencontrer dans lapplication de la présente circulaire.
Pour le ministre et par délégation :
Le directeur de leau,
P. BERTEAUD
Document de cadrage sur les modalités pratiques de classement des cours deau
Préambule
La loi sur leau et les milieux aquatiques du 30 décembre 2006 (LEMA) réforme les classements des cours deau. Dune part, elle déconcentre la procédure ; dautre part, elle modifie les critères de classement en les adaptant aux exigences de la directive cadre européenne sur leau.
En effet, le défaut de continuité écologique constitue pour de nombreuses masses deau une des causes de non atteinte du bon état (bon potentiel) et son maintien ou son rétablissement est pour la plupart des cours deau une des conditions nécessaire à cet objectif.
La loi recherche également un équilibre entre la protection des cours deau et leurs usages. Cest ainsi que la production dune étude préalable de limpact sur les usages de leau est exigée à lappui de la proposition de classement.
1. Les changements introduits par la loi sur leau et les milieux aquatiques (LEMA)
Jusquà la promulgation de la LEMA, les rivières pouvaient être classées sous 2 régimes :
les rivières réservées au titre de larticle 2 de la loi de 1919 sur lutilisation de lénergie hydraulique ;
les rivières classées au titre de larticle L. 432-6 du code de lenvironnement.
La LEMA réforme ces deux dispositifs et met en place des protections à partir de deux séries de critères, en distinguant deux listes.
Cette liste est établie parmi les cours deau qui répondent au moins à lun des 3 critères :
ceux en très bon état écologique ;
ceux qui jouent un rôle de réservoirs biologiques nécessaire au maintien ou à latteinte du bon état écologique des cours deau dun bassin versant, identifiés par les SDAGE ;
ceux qui nécessitent une protection complète des poissons migrateurs amphihalins.
Pour les cours deau inscrits dans cette liste, tout nouvel ouvrage faisant obstacle à la continuité écologique ne peut être autorisé ou concédé. Si la notion " douvrage nouveau " sapplique au renouvellement des titres des ouvrages existant, elle doit être appliquée de manière éclairée lorsquil sagit de la modification des caractéristiques douvrages existants. Si ces modifications améliorent ou naggravent pas la situation par rapport à la situation particulière ayant motivé le classement, il y a tout lieu de considérer quil ne sagit pas douvrages nouveaux. Cette interprétation souple peut aussi permettre de dégager des solutions " gagnant-gagnant " lorsque par exemple plusieurs ouvrages se trouvent remplacés par un seul, ou dans le cas de la modernisation dun ouvrage, pour des raisons de sécurité par exemple.
La notion dobstacle à la continuité écologique est définie à larticle R. 214-109 du code de lenvironnement.
Deux points importants sont à préciser :
1° Les impacts sur la libre circulation des espèces biologiques ne doivent pas être uniquement appréhendés à léchelle individuelle de louvrage nouveau, mais également être resitués dans un contexte de bassin. En dautres termes, dans une logique de délais de migration ou de cumul des impacts des ouvrages le long dun axe, limpact supplémentaire apporté, notamment en terme de retard à la migration et sa situation dans la chaîne dobstacles doivent être également évalués. En pratique, les ouvrages entièrement nouveaux nécessitant un dispositif de franchissement ne pourront probablement pas démontrer labsence dobstacle à la continuité.
2° La notion de bon déroulement du transport naturel des sédiments est relativement nouvelle au regard de celle de la libre circulation des espèces biologiques, pour les services instructeurs et les pétitionnaires. Cest pourquoi il faudra apporter une attention particulière à ce que létude dimpact ou le document dincidence du projet démontre la transparence sédimentaire de louvrage en fournissant des éléments dinformation détaillés sur les effets du projet sur le transport des sédiments, notamment les particules grossières et sableuses. En pratique, les ouvrages barrant intégralement le cours deau ne pourront probablement jamais satisfaire ce dernier critère.
Pour les ouvrages existants, le renouvellement de la concession ou de lautorisation est subordonné à des prescriptions permettant de maintenir le très bon état écologique des eaux, de maintenir ou datteindre le bon état écologique des cours deau dun bassin versant ou dassurer la protection des poissons migrateurs vivant alternativement en eau douce ou en eau salée.
Selon le cas, ces prescriptions peuvent être de natures différentes, à titre dexemple :
construction de dispositifs de franchissement pour la montaison et/ou la dévalaison du poisson ;
construction de dispositifs de gestion adaptée du transport solide.
Ces obligations pour les ouvrages sappliquent dès la date de publication de la liste.
Cette liste est établie pour les cours deau pour lesquels il est nécessaire dassurer le transport suffisant des sédiments et la circulation des poissons migrateurs (amphihalins ou non).
Tout ouvrage doit y être géré, entretenu et équipé selon des règles définies par lautorité administrative, en concertation avec le propriétaire ou, à défaut, lexploitant. Ces obligations sappliquent au plus tard dans les 5 ans après la publication de la liste et doivent conduire à des résultats réels damélioration du transport des sédiments ou de la circulation des migrateurs. Elles peuvent concerner tant des mesures structurelles (construction de passe à poisson, etc.) que de gestion (ouverture régulière des vannes, etc.)
1.3. Limites de validité des anciens classements
Les obligations des anciens classements sont encore valides jusquà la date de publication de la liste établie au titre du 1° de larticle L. 214-17-I ou jusquà 5 ans après la publication de la liste établie au titre du 2° de larticle L. 214-17-I. Elles disparaissent au plus tard le 1er janvier 2014 par la suppression du cinquième alinéa de la loi du 16 octobre 1919 et par labrogation de larticle L. 432-6 du code de lenvironnement. Larticle 6 du décret n° 2007-1760 prévoit explicitement la suppression des listes issues de la loi de 1919 et de larticle L. 432-6 au plus tard le 1er janvier 2014 par abrogation des articles R. 432-3 et D. 432-4 et de leurs annexes.
1.4. Sanctions
Larticle L. 216-7 du code de lenvironnement punit dune amende délictuelle de 12 000 euros damende le non respect des dispositions du 2° du I du L. 214-17, cest-à-dire le non-respect des dispositions relatives à la continuité écologique (nota : la qualification et le montant sont les mêmes que lancien article L. 432-8 abrogé par la LEMA).
Le II de larticle L. 214-17 prévoit que les dispositions actuelles (le cinquième alinéa de larticle 2 de la loi du 16 octobre 1919 relative à lutilisation de lénergie hydraulique et larticle L. 432-6 du présent code) demeurent applicables jusquà ce que les obligations nouvelles y soient substituées, dans le délai et les conditions prévus pour létablissement des listes. A lexpiration du délai précité, et au plus tard le 1er janvier 2014, le cinquième alinéa de larticle 2 de la loi du 16 octobre 1919 précitée est supprimé et larticle L. 432-6 précité est abrogé. "
Les dispositions de larticle L. 432-6 sont ainsi assimilées à celles du 2° du I du L. 214-17 en lattente de la publication des nouvelles listes et au plus tard le 1er janvier 2014. Le non-respect de lactuel L. 432-6 est ainsi passible des peines délictuelles prévues à larticle L. 216-7.
En application de larticle L. 216-14, lautorité administrative pourra transiger sur la poursuite de linfraction pénale et proposer ainsi au procureur des suites adaptées en fonction des circonstances de lespèce.
2. La procédure de classement
2.1. La procédure
Larticle R. 214-107 du code de lenvironnement adosse les classements au contenu du SDAGE.
Les listes doivent notamment être établies en tenant compte des objectifs détat et de potentiel fixés par le SDAGE. En effet, la continuité écologique à léchelle de plusieurs masses deau, voire de plusieurs sous-bassins, contribue à la capacité dun cours deau à atteindre le bon état. Il est donc cohérent de lier la stratégie et les propositions de classement avec les objectifs détat ou de potentiel fixés par le SDAGE (bon état/potentiel 2015, bon état/potentiel 2021, bon état/potentiel 2027 ou autre).
Larticle R. 214-110 du code de lenvironnement fixe la procédure à suivre pour établir les listes. Cette dernière repose sur une double approche territoriale entre le niveau des départements et celui du bassin. Elle permet ainsi à la fois de conduire les concertations locales au plus près du terrain tout en garantissant une cohérence de bassin, les listes étant arrêtées au final par le préfet coordonnateur de bassin.
Les préfets de département veilleront ainsi à consulter outre les fédérations de pêche et les associations de protection de lenvironnement, les représentants des autres usagers de leau comme par exemple les producteurs dhydroélectricité, les gestionnaires des voies navigables, les associations de propriétaires riverains ou la chambre départementale dagriculture.
A ce stade, il est également utile de rappeler que les Comités de gestion des poissons migrateurs (COGEPOMI) de chaque bassin donnent leurs avis sur le projet de SDAGE et concourent ainsi à la mise en cohérence des orientations de classement à léchelle du bassin.
La publication des listes avant le 1er janvier 2014 est impérative et entraîne labrogation immédiate des " anciens " classements (voir point 2.2 ci-après). Les délais impartis laissent néanmoins le temps de la concertation.
Pour les listes du 1° et du 2°, dans un souci de clarté sur la nature des obligations auxquelles les ouvrages sont soumis, larrêté de classement (ou les arrêtés si le classement est prononcé par sous-bassin) devra mentionner par cours deau (ou section) les espèces cibles ainsi que les objectifs recherchés en matière de transit sédimentaire.
Enfin, des mises à jour des listes sont envisageables, puisque larticle R. 214-107 laisse cette possibilité ouverte.
Cette approche permet un phasage dans le temps des classements, notamment dans une logique de faisabilité financière de " mise aux normes " des ouvrages existants ou dans une logique de restauration de laval vers lamont.
2.2. Larticulation avec les SDAGE et le calendrier
La circulaire DCE 2007/21 du 11 avril 2007 relative à lélaboration, au contenu et à la portée des programmes de mesure précise que les arrêtés de classement constituent des mesures réglementaires à répertorier dans le programme de mesures du SDAGE.
Cette circulaire précise également le contenu minimal du SDAGE dès leur approbation en 2009, afin de préparer les classements futurs :
la première identification des réservoirs biologiques sur la base des éléments existants ;
les principes pour une identification complémentaire de nouveaux réservoirs biologiques ;
les grandes orientations méthodologiques pour le classement des cours deau afin dassurer la cohérence avec les objectifs environnementaux des schémas ;
linscription comme mesure dans les programmes pluriannuels de mesures de lengagement à publier les listes de cours deau classés au plus tard le 1er janvier 2014, date impérative dans la mesure où les classements actuels seront abrogés ;
si possible, les premières propositions de listes de cours deau à classer au titre de larticle L. 214-17.
Cas particulier de languille.
Lapplication du règlement européen 1100/2007 demande une mise en cohérence accélérée des classements avec les orientations des plans de gestions " anguille ", qui engageront la France à partir de 2009. Cest pourquoi la date limite du 1er janvier 2014 pour classer les cours deau au titre de larticle L. 214-17 du code de lenvironnement devra être anticipée dans le cas de figure suivant.
Les plans de gestion " anguille " doivent notamment dégager des priorités territoriales dactions pour la " mise aux normes " de franchissabilité des ouvrages existants.
Si ces priorités territoriales concernent des bassins ou des sous-bassins qui ne sont pas couverts par les classements actuels au titre de languille, il sera alors nécessaire de procéder avant le 31 décembre 2010 aux classements desdits bassins ou sous-bassins au titre des listes de larticle L. 214-17 du code de lenvironnement.
2.3. Etude préalable de limpact
Larticle L. 214-17-II demande une étude préalable aux classements de leur impact sur les différents usages de leau mentionnés à larticle L. 211-1. Larticle R. 214-110, sans définir le contenu détaillé de cette étude de limpact qui doit sadapter aux caractéristiques de chaque bassin, demande la production dune analyse des coûts et des avantages économiques et environnementaux, en distinguant les marchands et non marchands.
Il sagit en fait déclairer la décision par une méthode permettant danalyser les effets du classement sur les différents usages de leau.
Pour cette analyse, le scénario de référence à partir duquel dégager les coûts et avantages est celui de la situation actuelle en considérant les rivières classées au titre de la loi de 1919 ou de larticle L. 432.6 du code de lenvironnement. Ce choix du scénario de référence a deux avantages :
il neutralise dans lanalyse le poids des investissements déjà réalisés dans le passé (comme les équipements existants en passes à poissons) ;
il permet de récupérer les éléments issus de lanalyse du potentiel hydroélectrique figurant dans le SDAGE, qui utilise le même scénario de référence.
Le niveau de détail et de précision de lanalyse doit être proportionné aux enjeux, à la taille du bassin ou sous bassin considéré. Lanalyse devra sefforcer de faire ressortir les éléments monétarisables disponibles mais pourra également comporter des éléments purement qualitatifs. Elle pourra par exemple considérer les catégories suivantes de coûts et avantages (sans que la liste soit limitative) :
surcoûts de fonctionnement et dinvestissement sur les ouvrages, y compris les pertes de production ;
surcoûts des externalités CO2 ;
bénéfices marchands liés à lamélioration des ressources piscicoles et aux usages récréatifs des cours deau (kayak, pêche...) ;
bénéfices non marchands.
Lanalyse coûts/avantages et plus généralement létude de limpact ne sont quun des éléments du processus de décision qui doit également considérer les effets du classement (ou du non classement) sur latteinte des objectifs environnementaux fixés par le SDAGE. Enfin, si létude de limpact ne concerne quun sous-bassin, il sera également utile de resituer ses conclusions à léchelle plus grande du bassin.
Le périmètre géographique de létude de limpact devra être en adéquation avec le périmètre de classement. Il est ainsi recommandé dans la mesure du possible déviter de classer par " petits " sous-bassins mais de procéder aux classements par grandes unités hydrographiques.
3. Les réservoirs biologiques
3.1. Rôle des réservoirs biologiques
La majeure partie des cours deau est touchée à des degrés divers, dune part, par des rejets et, dautre part, par de nombreux équipements qui ralentissent lécoulement des eaux et perturbent les échanges amont-aval en segmentant ces cours deau. Ceci a pour conséquence damoindrir les capacités dauto-épuration des cours deau, notamment en raison de la régression ou de la disparition de la faune et de la flore aquatiques. Le risque encouru est de ne pas arriver à respecter les objectifs de la directive-cadre sur leau, puisque lévaluation de létat écologique repose principalement sur des indicateurs biologiques de faune et de flore aquatiques.
Dans ce contexte, il est ainsi nécessaire de pouvoir identifier à léchelle dun bassin versant ou dun sous bassin, certains secteurs à partir desquels les autres tronçons perturbés de cours deau vont pouvoir être " ensemencés " en espèces piscicoles et participer ainsi au respect du bon état écologique. Ces secteurs dénommés réservoirs biologiques, quil sagisse dun cours deau, dun tronçon de cours deau ou dune annexe hydraulique, vont jouer en quelque sorte le rôle de pépinière, de " fournisseur " despèces susceptibles de coloniser une zone appauvrie du fait daménagements et dusages divers.
Larticle R. 214-108 définit ainsi les réservoirs biologiques comme " les cours deau, parties de cours deau ou canaux qui jouent le rôle de réservoir biologique au sens du 1° du I de larticle L. 214-17 sont ceux qui comprennent une ou plusieurs zones de reproduction ou dhabitat des espèces de phytoplanctons, de macrophytes et de phytobenthos, de faune benthique invertébrée ou dichtyofaune, et permettent leur répartition dans un ou plusieurs cours deau du bassin versant. "
Le réservoir biologique na ainsi de sens que si la libre circulation des espèces est (ou peut être) assurée en son sein et entre lui-même et les autres milieux aquatiques dont il permet de soutenir les éléments biologiques. Cette continuité doit être considérée à la fois sous langle longitudinal (relations amont-aval) et latéral (annexes fluviales, espace de liberté des cours deau). Cest pourquoi les réservoirs biologiques sont une des bases du classement des cours deau au titre du 1° de larticle L. 214-17-I et quils peuvent également être mis en continuité avec dautres secteurs du bassin grâce aux classements au titre du 2°.
3.2. Les communautés à considérer
Larticle R. 214-108 indique les communautés biologiques à considérer pour la définition des réservoirs biologiques, à savoir le phytoplancton, les macrophytes et phytobenthos, la faune benthique invertébrée et lichtyofaune. Cette liste fait référence directe à lannexe V de la DCE (éléments de qualité pour la définition du bon état écologique).
Elle exclut explicitement la prise en compte directe des mammifères, des amphibiens et des oiseaux dans lidentification des réservoirs biologiques (ce qui nexclut pas les milieux abritant ces groupes lorsquils contribuent au maintien des communautés biologiques de lannexe V de la DCE).
3.3. Les critères et méthodes didentification
Les réservoirs biologiques sont des aires où les espèces animales et végétales des communautés définissant le bon état écologique (cf. ci-dessus) peuvent y trouver et accéder à lensemble des habitats naturels nécessaires à laccomplissement des principales phases de leur cycle biologique : reproduction, abri-repos, croissance, alimentation.
De manière pragmatique, pour permettre une première identification des réservoirs biologiques à inscrire dans les SDAGE en 2009, il sagira essentiellement de mobiliser lensemble des connaissances et des expertises existantes.
Il conviendra de limiter le champ des investigations complémentaires aux situations qui le nécessitent véritablement.
Aussi, la démarche didentification proposée consiste en quatre étapes successives :
étape 1 : identification des aires " candidates " sur la base des connaissances et expertises existantes ;
étape 2 : identification des " besoins " en réservoirs biologiques par bassin, sous-bassin ;
étape 3 : évaluation de la satisfaction de ces besoins par ces aires candidates ;
étape 4 : première identification des réservoirs biologiques à partir des aires candidates.
Les étapes 1 et 2 sont indépendantes et peuvent donc être menées en parallèle.
Etape 1 : identification des aires candidates sur la base des connaissances existantes :
Un certain nombre daires ont déjà une richesse biologique reconnue, soit au titre dinventaires scientifiques, soit parce quelles bénéficient de divers statuts de protection.
Il sagit, à partir de ce socle de connaissances, dextraire des aires " candidates " à lidentification dans les SDAGE comme réservoirs biologiques.
Ces aires candidates devront être connues pour abriter tout ou partie des communautés biologiques au sens de lannexe V de la DCE. Elles ne devront pas obligatoirement correspondre aux limites dune masse deau.
On cherchera les aires potentiellement candidates parmi :
les sites de référence représentatifs de la situation de très bon état au sens de la DCE ;
les ZNIEFF en lien direct avec les milieux aquatiques ;
les zones remarquables du bassin déjà connues et identifiées dans le SDAGE ou par les travaux du COGEPOMI ;
les frayères et les zones de croissance remarquables connues dans les schémas départementaux de vocation piscicole ou les plans départementaux de gestion piscicole ;
les zones humides connues ;
les espaces naturels sensibles désignés pour les milieux aquatiques ;
les espaces protégés pour abriter des habitats et des espèces aquatiques (arrêté de protection de biotope, réserve naturelle...) ;
les sites Natura 2000 en lien direct avec les milieux aquatiques (pSIC, SIC ou ZSC suivant leur stade de désignation).
Il conviendra en outre de sassurer de la connexion effective temporaire ou permanente, de ces aires candidates avec le réseau hydrographique, notamment pour ce qui concerne les zones humides et les sites Natura 2000.
Ce premier inventaire peut savérer cependant en décalage avec la qualité réelle de ces zones, certaines ayant pu être modifiées depuis quelles ont été inventoriées ou protégées. Il est donc nécessaire de pouvoir valider par un processus simple que ces aires sont bien aptes à court et moyen terme à jouer le rôle de réservoirs biologiques.
Pour ce faire, il est nécessaire de ne retenir comme aires " candidates " que celles comprises dans une ou plusieurs masses deau pour lesquelles le risque de non-atteinte du bon état (RNABE) en 2015 a été reconnu comme faible (état des lieux des bassins actualisé pour la préparation des SDAGE). Pour les petits cours deau, en labsence dévaluation RNABE, on ne considère en première approximation que les masses deau dont lobjectif est le bon état 2015.
Cette première étape conduit à sélectionner un jeu daires candidates.
Etape 2 : identification des " besoins " en réservoirs biologiques par bassin et sous-bassin :
Par bassin et sous-bassin, lensemble des types de masse deau devra être couvert car il est nécessaire de se rapporter à la diversité des besoins biologiques à cette échelle en lien avec les différentes conditions de références (différentes hydro-éco-régions [HER] et classes de taille).
Un deuxième niveau didentification des besoins devra être apporté par une analyse fonctionnelle permettant de localiser au sein du réseau hydrographique les zones où doivent être positionnés des réservoirs biologiques. Pour jouer leur rôle dessaimeur despèces, il est en effet indispensable que les réservoirs soient en continuité écologique avec le reste du réseau hydrographique.
Lidentification des grandes " coupures " dans la continuité écologique au sein du réseau hydrographique (obstacles importants, zones dassec prononcées, structure du réseau hydrographique...) sera à la base de cette analyse.
Un troisième niveau didentification concernera les portions de bassins dégradés pour lesquelles le SDAGE et le programme de mesures associé prévoient un effort particulier de restauration. Le fait dy positionner des réservoirs biologiques doit aider cette " reconquête ".
Les trois niveaux danalyse (couverture typologique, et positionnement optimal des réservoirs au sein du réseau hydrographique, secteurs dégradés à restaurer) doivent conduire à lidentification spatialisée des besoins. On entend par " spatialisé " une évaluation de la répartition et du nombre de réservoirs nécessaire par sous-bassin, ce nombre étant décliné par types à couvrir, avec des indications plus précises lorsque cest nécessaire (par exemple, répartition de ces effectifs en amont et en aval dun grand barrage).
Etape 3 : évaluation de la satisfaction des besoins par les aires candidates :
Lanalyse spatiale croisée de la présence daires candidates avec les besoins en réservoirs biologiques conduit logiquement à lévaluation de la satisfaction des besoins. Deux cas pourront se présenter :
des bassins ou sous-bassins pour lesquels les besoins ne sont pas satisfaits (en tout ou partie). Il conviendra alors de prévoir des investigations complémentaires en connaissances pour combler ces manques ;
des bassins ou sous-bassins pour lesquels les besoins sont a priori satisfaits. Pour les cas où certains bassins ou sous-bassins sont " surservis ", une sélection des réservoirs est envisageable.
Etape 4 : première identification des réservoirs biologiques à faire figurer dans les SDAGE :
A lissue de létape 3, une " pré-identification " des réservoirs biologiques est ainsi possible.
La question de léchelle didentification finale se pose également. Pour les réservoirs situés dans les petites masses deau, il est proposé didentifier la masse deau en tant que telle comme réservoir.
Pour les réservoirs situés dans un tronçon dune masse deau, leur délimitation plus précise se fera à partir de visites de terrain et de dires dexperts. Cette dernière tâche peut savérer extrêmement consommatrice de temps.
Cest pourquoi, il est proposé dinclure les réservoirs " pré-identifiés " dans la maquette des SDAGE (fin 2007) et dutiliser la période de consultation (2008) pour effectuer les indispensables affinements des délimitations. Ce travail pourra tenir compte des observations recueillies durant cette phase de consultation.
3.4. Réservoirs biologiques et SDAGE
Le SDAGE devra au final comporter deux types dinformation :
la première identification des réservoirs biologiques, telle quelle résulte de létape 4 ;
pour les manques identifiés à lissue de létape 3, lindication des dispositions et mesures nécessaires en matière de connaissances pour combler les besoins non satisfaits pendant la durée du plan de
gestion 2009-2015 (sous-bassins à satisfaire en priorité), ainsi que les éléments de méthode pour le faire.
Parmi les principes qui sous-tendront létablissement des listes de larticle L. 214-17 du code de lenvironnement, le SDAGE devra également affirmer la nécessité de maintenir ou de restaurer la continuité entre les réservoirs biologiques et les portions de bassins quils doivent ensemencer.
4. Modalités pratiques pour les propositions de classements
La nouvelle approche de la LEMA conduit logiquement à une refonte des classements existants, qui peut conduire à des modifications importantes. Pour la première génération des " nouveaux classements ", la base de travail prioritaire doit être le toilettage des classements existants. Ce travail accompli, la proposition de nouveaux classements de nouveaux cours deau pourra être envisagé.
4.1. Toilettage des classements existants
Les classements existants font lobjet dun réexamen critique selon 3 critères principaux.
1) Vérifier que les critères de la LEMA sont bien remplis pour les classements existants.
Cette validation seffectue en gardant à lesprit quil ny a pas de correspondance automatique entre les rivières réservées de la loi de 1919 et la liste du 1° de larticle L. 214-17-I (cours deau en très bon état écologique, jouant un rôle de réservoir biologique ou nécessitant une protection complète des poissons migrateurs amphihalins), ou entre les rivières classées au titre de larticle L. 432-6 et la liste du 2° de larticle L. 214-17-I (cours deau où il est nécessaire dassurer le transport suffisant des sédiments et la circulation des poissons migrateurs amphihalins ou non).
En dautres termes, il faudra, dune part, vérifier que les rivières actuellement réservées au titre de la loi de 1919 sont soit en très bon état écologique, soit des axes à migrateurs, soit des réservoirs biologiques identifiés dans le SDAGE, dautre part, confronter la situation des rivières classées au titre du L. 432-6 avec les nouveaux critères de la liste 2°.
Il sera également nécessaire de confronter la situation des rivières réservées de la loi de 1919 avec les critères du 2° du L. 214-17 comme la situation des rivières classées au titre du L. 432-6 avec les critères du 1° du L. 214-17.
2) Mettre en cohérence sur des bases hydrographique et technique.
Lorsque des incohérences manifestes existent, il sagit de les éliminer par des propositions de retraits ou dajouts de cours deau.
3) Vérifier le gain écologique pour les cours deau pressentis pour la liste du 2°.
Le gain écologique (maintien ou restauration) doit être vérifié au regard du diagnostic de la continuité des habitats. Si ce gain est faible ou inexistant, le déclassement doit être la suite logique.
Ce toilettage doit se conclure par des propositions de maintien, de retrait ou dajout (dans ce dernier cas pour mise en cohérence hydrographique) de cours deau ou de tronçons de cours deau.
4.2. Propositions complémentaires
Le toilettage des classements existants étant réalisé, il pourra être envisagé dy ajouter de nouveaux cours deau répondant aux critères de la LEMA, lorsque le classement contribue de manière avérée à latteinte des objectifs de bon état (bon potentiel) sur le bassin considéré.
Notamment, pourront être ajoutés :
des cours deau ou sections de cours deau qui sont en très bon état écologique afin de contribuer au principe de non-détérioration de la DCE (liste du 1°) ;
des réservoirs biologiques (liste du 1°) ;
des secteurs de cours deau sur lesquels il apparaît nécessaire de rétablir la continuité écologique (biologique ou transport solide) (liste du 2°) ou qui permettent dassurer la continuité avec les réservoirs biologiques (listes du 1° et du 2°) ;
les axes à migrateurs identifiés dans les orientations fondamentales du SDAGE (listes du 1° et du 2°).
4.3. Proposition de classement de cours deau au titre des deux listes
Le classement dun même cours deau (ou section) au titre de la liste du 1° et de celle du 2° de larticle L. 214-17-I est possible. En effet, les conséquences emportées par ces classements pour les ouvrages nouveaux et existants sont complémentaires.
Il est rappelé que les obligations résultant du 2° de larticle L. 214-17 sappliquent, à lissue dun délai de 5 ans après la publication des listes, aux ouvrages existants régulièrement installés.
En particulier, pour un ouvrage existant sur les cours deau classés sur la liste du 1°, le double classement permet de le rendre franchissable aux espèces et de gérer le transit sédimentaire dans les 5 ans, sans devoir attendre le délai de renouvellement de son acte dautorisation ou de concession.
5. Dispositions transitoires dans lattente des nouvelles listes
Deux cas sont à distinguer.
5.1. Les cours deau anciennement classés par décret avec une liste despèces publiée
Les obligations en matière de franchissement des espèces piscicoles sont maintenues. Il ny a donc pas de délais supplémentaires prévus pour que les personnes, en infraction avec ces dispositions, se mettent en conformité.
Si les cours deau qui étaient classés au titre de lancienne législation sont maintenus au titre des nouveaux classements de larticle L. 214-17-I-2°, le délai de 5 ans ne court que pour les obligations nouvelles liées à la loi, cest-à-dire pour les nouvelles obligations en matière de transport solide.
5.2. Les cours deau anciennement classés par décret mais pour lesquels aucune liste despèces na été publiée
Il ny a alors pas dobligations pour les ouvrages existants. Si ces cours deau sont maintenus dans les nouvelles listes, le délai de 5 ans pour les ouvrages existants est alors pleinement applicable.
La publication de listes despèces sur ces cours deau classés par décret nest pas envisagée dans la mesure où la base légale est abrogée au plus tard le 1er janvier 2014.