(JO n° 64 du 15 mars 2025)
NOR : TECP2425601D
Publics concernés : producteurs et utilisateurs d'eaux usées traitées, exploitants des installations classées pour la protection de l'environnement et des installations nucléaires de base, services de l'Etat.
Objet : ce décret permet l'utilisation d'eaux impropres à la consommation humaine pour certains usages domestiques, en remplacement de l'eau potable, lorsque la qualité de ces eaux n'a aucune influence, directe ou indirecte, sur la santé des usagers. Pour les installations classées pour la protection de l'environnement et pour les installations nucléaires de base, il précise qu'un arrêté détermine les critères de qualité et les conditions techniques à satisfaire lorsque ces eaux sont utilisées pour les usages domestiques mentionnés (lavage du linge, des sols intérieurs, évacuation des excreta, alimentation de fontaines décoratives, nettoyage des surfaces extérieures, arrosage des jardins potagers et des espaces verts). Cet arrêté détaille également les utilisations d'eaux impropres à la consommation humaine qui peuvent être librement mises en œuvre et celles dont les critères de qualité et les conditions techniques sont préalablement fixées. Le décret prévoit également des modifications des dispositions du code de l'environnement relatives à l'utilisation d'eaux de pluie et d'eaux usées traitées pouvant être utilisées pour des usages non domestiques afin de clarifier son champ d'application.
Entrée en vigueur : le texte entre en vigueur le lendemain de sa publication.
Application : le présent décret est pris en application de l'article L. 1322-14 du code de la santé publique et de l'article L. 211-9 du code de l'environnement.
Vus
Le Premier ministre,
Sur le rapport de la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche,
Vu le règlement (CE) n° 1069/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 établissant des règles sanitaires applicables aux sous-produits animaux et produits dérivés non destinés à la consommation humaine et abrogeant le règlement (CE) n° 1774/2002 (règlement relatif aux sous-produits animaux) ;
Vu le code de l'environnement, notamment le chapitre Ier du titre Ier de son livre II ainsi que les chapitres Ier et II du titre Ier et le chapitre III du titre IX de son livre V ;
Vu le code de la santé publique, notamment ses articles L. 1321-1, L. 1322-14 ainsi que les chapitres Ier et II bis du titre II du livre III de sa première partie réglementaire ;
Vu l'avis du Haut Conseil de la santé publique en date du 26 avril 2023 ;
Vu l'avis de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail en date du 28 juillet 2023 ;
Vu l'avis de la mission interministérielle de l'eau en date du 15 novembre 2023 ;
Vu les observations formulées lors de la consultation du public réalisée du 26 décembre 2023 au 26 janvier 2024, en application de l'article L. 123-19-1 du code de l'environnement ;
Le Conseil d'Etat (section des travaux publics) entendu,
Décrète :
Article 1er du décret du 14 mars 2025
La section 8 du chapitre Ier du titre Ier du livre II du code de l'environnement est ainsi modifiée :
1° Les articles R. 211-123 à R. 211-127 sont remplacés par les dispositions suivantes :
« Art. R. 211-123. La présente section est applicable aux eaux de pluie et aux eaux usées traitées pouvant être utilisées pour des usages non domestiques en application de l'article L. 211-9.
« Pour l'application de la présente section, on entend par :
« 1° “ Usages non domestiques ” : tous les usages autres que ceux qui sont mentionnés à l'article R. 1321-1-1 du code de la santé publique ;
« 2° “ Eaux de pluie ” : les eaux issues des précipitations atmosphériques collectées à l'aval de surfaces inaccessibles aux personnes, en dehors des opérations d'entretien et de maintenance ;
« 3° “ Eaux usées traitées ” : les eaux issues d'installations mentionnées :
« a) A la rubrique 2.1.1.0 de la nomenclature annexée à l'article R. 214-1 dont la charge brute de pollution organique est supérieure à 1,2 kilogramme de demande biologique en oxygène sur cinq jours (DBO5) par jour et dont les niveaux de traitement fixés par l'arrêté d'autorisation ou par des prescriptions particulières encadrant le fonctionnement de l'installation sont respectés ;
« b) Dans la nomenclature annexée à l'article R. 511-9.
« Sont exclues des eaux mentionnées aux a et b du 3° du présent article les eaux usées issues d'une installation de traitement reliée à un établissement de collecte, d'entreposage, de manipulation après collecte ou de transformation des sous-produits animaux de catégories 1 ou 2, au sens du règlement (CE) n° 1069/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 établissant des règles sanitaires applicables aux sous-produits animaux et produits dérivés non destinés à la consommation humaine et abrogeant le règlement (CE) n° 1774/2002 et soumis à la réglementation des installations classées pour la protection de l'environnement au titre des rubriques 2730, 2731 ou 3650, ou directement issues de cet établissement, à moins que ces eaux usées aient été préalablement traitées thermiquement à 133° C pendant vingt minutes sous une pression de trois bars.
« Art. R. 211-124. La présente section n'est pas applicable aux utilisations d'eau pour les usages ou dans les lieux suivants, régies par les dispositions qui leurs sont propres :
« 1° Les usages domestiques, régis par la section 3 du chapitre II bis du titre II du livre III de la première partie du code de la santé publique ;
« 2° Les usages dans les entreprises alimentaires, régis par la section 2 du chapitre II bis du titre II du livre III de la première partie du même code ;
« 3° Les usages dans une installation relevant de la rubrique 2.1.1.0 de la nomenclature définie à l'article R. 214-1, réglementés par l'arrêté préfectoral encadrant le fonctionnement de cette installation ;
« 4° Dans une installation relevant de la nomenclature annexée à l'article R. 511-9, les usages domestiques régis par l'article R. 512-100, et les autres usages réglementés, le cas échéant, par arrêté du ministre chargé des installations classées en application de l'article L. 512-5, du III de l'article L. 512-7 ou de l'article L. 512-10, ou par l'arrêté préfectoral encadrant le fonctionnement de cette installation ;
« 5° Dans une installation mentionnée à l'article L. 593-2, les usages domestiques régis par l'article R. 593-37-1, et les autres usages réglementés, le cas échéant, par arrêté du ministre chargé de la sûreté nucléaire en application de l'article L. 593-4, ou par une décision de l'Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection prise en application des articles L. 593-10, L. 593-29 ou du 3° de l'article L. 593-31 ;
« 6° Les utilisations d'eaux douces issues du milieu naturel, encadrées par un arrêté préfectoral pris sur le fondement de la nomenclature définie à l'article R. 214-1.
« Art. R. 211-125. L'utilisation des eaux usées traitées mentionnées au 3° de l'article R. 211-123 n'est pas permise sur le fondement de la présente section, à l'intérieur des :
« 1° Locaux à usage d'habitation ;
« 2° Etablissements recevant du public sensible, au sens du a du 10° de l'article R. 1322-90 du code de la santé publique, ainsi qu'à l'intérieur des écoles maternelles et élémentaires ;
« 3° Autres établissements recevant du public, pendant les heures d'ouverture au public.
« Art. R. 211-126. L'utilisation des eaux usées traitées peut être autorisée sur le fondement de la présente section, selon la procédure définie à sa sous-section 2.
« Lorsqu'il est envisagé d'utiliser des eaux usées traitées à des fins agronomiques ou agricoles, seule l'utilisation des eaux usées mentionnées au a du 3° de l'article R. 211-123 est permise.
« Art. R. 211-127. L'utilisation des eaux de pluie est permise sur le fondement de la présente section, sans être subordonnée à une autorisation. » ;
2° Après l'article R. 211-137, il est inséré un article R. 211-138 ainsi rédigé :
« Art. R. 211-138. Pour l'application de la présente sous-section aux installations, services et organismes relevant de l'autorité du ministre de la défense ou placés sous sa tutelle, le ministre de la défense exerce les pouvoirs et attributions confiés au préfet de département, à l'agence régionale de santé et au directeur général de l'agence régionale de santé.
« Un arrêté du ministre de la défense précise les modalités spécifiques d'application de la présente section aux installations, services et organismes relevant de son autorité ou placés sous sa tutelle. »
Article 2 du décret du 14 mars 2025
Les titres Ier et IX du livre V du même code sont ainsi modifiés :
1° La sous-section 2 de la section 4 du chapitre II du titre Ier est ainsi rétablie :
« Sous-section 2
« Dispositions particulières
« Paragraphe 1
« Conditions d'utilisation d'eaux impropres à la consommation humaine
« Art. R. 512-100. I. L'utilisation des eaux impropres à la consommation humaine, définies comme des eaux ne relevant pas de l'article R. 1321-1 du code de la santé publique, est permise, sur le fondement de l'article L. 1322-14 du même code, au sein d'une installation classée pour la protection de l'environnement, lorsque la qualité de ces eaux n'a aucune influence, directe ou indirecte, sur la santé de l'usager et que les intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du présent code sont protégés, pour les usages domestiques suivants :
« 1° Le lavage du linge ;
« 2° Le lavage des sols intérieurs ;
« 3° L'évacuation des excreta ;
« 4° L'alimentation de fontaines décoratives non destinées à la consommation humaine ;
« 5° Le nettoyage des surfaces extérieures ;
« 6° L'arrosage des jardins potagers ;
« 7° L'arrosage des espaces verts à l'échelle des bâtiments.
« II. Le présent article n'est pas applicable :
« 1° Aux usages mentionnés à l'article R. 1322-77 du code de la santé publique au sein des entreprises du secteur alimentaire, régies par les dispositions de la section 2 du chapitre II bis du titre II du livre III de la première partie de ce code ;
« 2° Aux installations classées pour la protection de l'environnement situées au sein d'un établissement recevant du public sensible, au sens du a du 10° de l'article R. 1322-90 du code de la santé publique, lorsque ce public sensible est susceptible d'être exposé aux eaux impropres à la consommation humaine, la procédure applicable étant alors celle fixée par la sous-section 6 de la section 3 du chapitre II bis du titre II du livre III de la première partie de ce code.
« III. Un arrêté conjoint du ministre chargé des installations classées et du ministre chargé de la santé précise les critères de qualité des eaux impropres à la consommation humaine selon leurs usages, les conditions techniques d'utilisation de ces eaux et les cas dans lesquels un arrêté préfectoral est nécessaire avant toute utilisation de ces eaux dans une installation classée.
« Dans les cas où un arrêté préfectoral est nécessaire et lorsque le public est susceptible d'être exposé à ces eaux impropres à la consommation humaine, le préfet peut solliciter l'avis de l'agence régionale de santé. L'avis est rendu dans un délai de deux mois à compter de la saisine par le préfet. Au-delà de ce délai, l'avis est réputé favorable. » ;
2° La section 5 du chapitre III du titre IX est ainsi modifiée :
a) Après l'article R. 593-37, il est inséré un article R. 593-37-1 ainsi rédigé :
« Art. R. 593-37-1. I. L'utilisation des eaux impropres à la consommation humaine, définies comme des eaux ne relevant pas de l'article R. 1321-1 du code de la santé publique, est possible, sur le fondement de l'article L. 1322-14 du même code, au sein d'une installation nucléaire de base, lorsque la qualité de ces eaux n'a aucune influence, directe ou indirecte, sur la santé de l'usager et que les intérêts mentionnés à l'article L. 593-1 du présent code sont protégés, pour les usages domestiques mentionnés au I de l'article R. 512-100 du présent code.
« II. Un arrêté conjoint du ministre chargé de la sûreté nucléaire et du ministre chargé de la santé précise les critères de qualité des eaux impropres à la consommation humaine selon les usages, les conditions techniques d'utilisation de ces eaux et les cas dans lesquels une décision de l'Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection est nécessaire avant toute utilisation de ces eaux dans une installation nucléaire de base. » ;
b) Après le 8° du IV de l'article R. 593-38, il est inséré un 9° ainsi rédigé :
« 9° Les critères de qualité des eaux selon les usages et les conditions techniques à satisfaire pour l'utilisation d'eaux impropres à la consommation humaine dans les cas prévus par l'arrêté mentionné au II de l'article R. 593-37-1, ou pour adapter les dispositions de cet arrêté aux circonstances locales. »
Article 3 du décret du 14 mars 2025
La ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles, le ministre de l'économie, des finances et la souveraineté industrielle et numérique, le ministre des armées, la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche, et le ministre auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie et de l'énergie, sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.
Fait le 14 mars 2025.
François Bayrou
Par le Premier ministre :
La ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche,
Agnès Pannier-Runacher
La ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles,
Catherine Vautrin
Le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique,
Éric Lombard
Le ministre des armées,
Sébastien Lecornu
Le ministre auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie et de l'énergie,
Marc Ferracci