(JO n° 295 du 21 décembre 2018)


NOR : TREL1818384D

Publics concernés : particuliers, organismes professionnels, associations, collectivités territoriales et services déconcentrés de l'Etat.

Objet : mise en œuvre de la protection des biotopes et des habitats naturels.

Entrée en vigueur : le décret entre en vigueur le lendemain de sa publication, à l'exception des dispositions de l'article 1er qui entrent en vigueur le 1er juin 2019 .

Notice : parmi les outils de préservation du patrimoine naturel, les arrêtés préfectoraux de protection de biotopes déjà en vigueur visent les milieux de vie des espèces protégées. Ce décret, pris en application des articles L. 411-1 et L. 411-2 du code de l'environnement, issus de l'article 124 de la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement, étend d'une part le champ d'application pour les biotopes à des milieux d'origine artificielle, et d'autre part prolonge ce dispositif pour donner la possibilité aux préfets de prendre des arrêtés de protection pour des habitats naturels en tant que tels, sans qu'il soit besoin d'établir qu'ils constituent par ailleurs un habitat d'espèces protégées.

Références : le code de l'environnement peut être consulté, dans sa rédaction issue du présent décret, sur le site Légifrance (https://www.legifrance.gouv.fr).

Vus

Le Premier ministre,

Sur le rapport du ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire,

Vu le code de l'environnement, notamment ses articles L. 411-1 et L. 411-2, R. 411-15 et suivants, R. 415-1, R. 341-19, R. 512-39-1 et R. 644-1 ;

Vu le code général des collectivités territoriales, notamment son article R. 4421-3 ;

Vu le code minier, notamment son article L. 163-2 ;

Vu le code pénal, notamment son article R. 610-1 ;

Vu le code rural et de la pêche maritime, notamment son article R. 911-3 ;

Vu les observations formulées lors de la consultation du public réalisée du 23 août au 19 septembre 2018, en application de l'article L. 123-19-1 du code de l'environnement ;

Vu la décision du Conseil d'Etat statuant au contentieux (section du contentieux, 6e chambre) n° 407695 du 9 mai 2018 ;

Le Conseil d'Etat (section des travaux publics) entendu,

Décrète :

Article 1er du décret du 19 décembre 2018

La sous-section 3 de la section 1 du chapitre Ier du titre Ier du livre IV de la partie réglementaire du code de l'environnement est remplacée par les dispositions suivantes :

« Sous-section 3

« Mesures de protection de biotopes

« Art. R. 411-15. I. Pour l'application de la partie réglementaire du code de l'environnement, on entend par biotope l'habitat nécessaire à l'alimentation, la reproduction, le repos ou la survie de spécimens d'une espèce figurant sur l'une des listes prévues à l'article R. 411-1.

« II. Peuvent être fixées par arrêté pris dans les conditions prévues au III les mesures tendant à favoriser la protection ou la conservation des biotopes tels que :

« 1° Mares, marécages, marais, haies, bosquets, landes, dunes, pelouses, récifs coralliens, mangroves, ou toutes autres formations naturelles, peu exploitées par l'homme ;

« 2° Bâtiments, ouvrages, mines et carrières dans les conditions définies ci-après, ou tous autres sites bâtis ou artificiels, à l'exception des habitations et des bâtiments à usage professionnel.

« Cet arrêté ne peut être prescrit :
« - pour les mines, qu'après intervention de la déclaration de l'arrêt des travaux mentionnée à l'article L. 163-2 du code minier ou, à défaut, au terme de la validité du titre minier ;
« - pour les carrières, qu'après la notification prévue à l'article R. 512-39-1.

« Il tient compte de l'intérêt du maintien des activités existantes dans la mesure où elles sont compatibles avec les objectifs de protection du biotope concerné.

« III. L'arrêté mentionné au II est pris :

« - par le préfet de département compétent lorsque la protection concerne des espaces terrestres ;
« - par le représentant de l'Etat en mer lorsque la protection concerne des espaces maritimes.

« Lorsque les mesures prises en mer concernent le domaine public maritime, l'arrêté est cosigné par le préfet de département compétent.

« Lorsque les mesures concernent la pêche maritime, l'arrêté est cosigné par le préfet de région compétent en application de l'article R. 911-3 du code rural et de la pêche maritime.

« Cet arrêté précise le caractère temporaire ou permanent des mesures qu'il édicte et, le cas échéant, les périodes de l'année où elles sont applicables.

« Art. R. 411-16. I. L'arrêté préfectoral mentionné au III de l'article R. 411-15 est pris après avis du conseil scientifique régional du patrimoine naturel, de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites et des communes sur le territoire desquelles le biotope protégé est situé.

« L'avis de la chambre départementale d'agriculture, de l'Office national des forêts, de la délégation régionale du centre national de la propriété forestière, du comité régional des pêches et des élevages marins et du comité régional de la conchyliculture est également recueilli lorsque les mesures définies par cet arrêté affectent les intérêts dont ils ont la charge.

« A défaut de réponse dans les trois mois suivant la saisine, les avis sollicités au titre des alinéas précédents sont réputés favorables.

« L'accord de l'autorité militaire compétente est requis lorsque l'arrêté concerne des emprises relevant du ministère de la défense, lorsque les mesures de protection prévues par l'arrêté sont susceptibles d'entraîner des contraintes pour le survol du territoire ou lorsque l'arrêté concerne des espaces marins ou le domaine public maritime.

« II. Cet arrêté est, à la diligence du ou des préfets :

« 1° Affiché dans chacune des communes concernées ;

« 2° Publié au Recueil des actes administratifs et mis en ligne sur le site internet de la préfecture ;

« 3° Mentionné dans deux journaux régionaux ou locaux diffusés dans l'ensemble du ou des départements concernés ;

« 4° Notifié aux propriétaires concernés.

« Lorsque l'identité ou l'adresse d'un propriétaire est inconnue, la notification prévue au 4° est valablement faite au maire qui assure l'affichage de l'arrêté et sa communication à l'occupant des lieux si celui-ci est identifiable.

« Art. R. 411-17. Le ou les préfets peuvent interdire, dans les mêmes conditions, les actions pouvant porter atteinte d'une manière indistincte à l'équilibre biologique ou à la fonctionnalité des milieux et notamment l'écobuage, le brûlage des chaumes, le brûlage ou le broyage des végétaux sur pied, la destruction des talus et des haies, l'épandage de produits antiparasitaires. »

Article 2 du décret du 19 décembre 2018

A la section 1 du chapitre Ier du titre Ier du livre IV de la partie réglementaire du code de l'environnement :

La sous-section 6 : « Réglementation particulière aux produits antiparasitaires et assimilés » devient la sous-section 7 ;

La sous-section 7 : « Prise de vues ou de son » devient la sous-section 8 ;

3° Après la sous-section 5, il est inséré une sous-section 6 ainsi rédigée :

« Sous-section 6

« Mesures de protection des habitats naturels

« Art. R. 411-17-7.I. La liste des habitats naturels pouvant faire l'objet des interdictions définies au 3° du I de l'article L. 411-1 est établie par arrêté du ministre chargé de la protection de la nature.

« II. En vue de protéger les habitats naturels figurant sur la liste visée au I, le ou les représentants de l'Etat territorialement compétents peuvent prendre toutes mesures de nature à empêcher leur destruction, leur altération ou leur dégradation. Ces mesures sont prises par arrêté :
« - du préfet de département compétent lorsque la protection concerne des espaces terrestres ;
« - du représentant de l'Etat en mer lorsque la protection concerne des espaces maritimes ;

« Lorsque les mesures prises en mer concernent le domaine public maritime, l'arrêté est cosigné par le préfet de département compétent.

« Lorsque les mesures concernent la pêche maritime, l'arrêté est cosigné par le préfet de région compétent en application de l'article R. 911-3 du code rural et de la pêche maritime.

« Cet arrêté tient compte de l'intérêt du maintien des activités existantes. Le cas échéant, il prévoit à cet effet des mesures permettant de rendre ces activités compatibles avec les objectifs de protection du ou des habitats naturels concernés.

« III. L'arrêté mentionné au II précise le caractère temporaire ou permanent des mesures qu'il édicte, et le cas échéant, les périodes de l'année où elles sont applicables.

« IV. L'arrêté mentionné au II est pris après avis du conseil scientifique régional du patrimoine naturel, de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites et des communes sur le territoire desquelles l'habitat naturel est situé.

« L'avis de la chambre départementale d'agriculture, de l'Office national des forêts, de la délégation régionale du centre national de la propriété forestière, du comité régional des pêches et des élevages marins, du comité régional de la conchyliculture est également recueilli lorsque les mesures définies par cet arrêté affectent les intérêts dont ils ont la charge.

« A défaut de réponse dans les trois mois suivant la saisine, les avis sollicités au titre des alinéas précédents sont réputés favorables.

« L'accord de l'autorité militaire compétente est requis lorsque cet arrêté concerne des emprises relevant du ministère de la défense, lorsque les mesures de protection prévues par l'arrêté sont susceptibles d'entraîner des contraintes pour le survol du territoire ou lorsque l'arrêté concerne des espaces marins ou le domaine public maritime.

« V. L'arrêté mentionné au II est, à la diligence du ou des préfets :

« 1° Affiché dans chacune des communes concernées ;

« 2° Publié au Recueil des actes administratifs et mis en ligne sur le site internet de la préfecture ;

« 3° Mentionné dans deux journaux régionaux ou locaux diffusés dans l'ensemble du ou des départements concernés ;

« 4° Notifié aux propriétaires concernés.

« Lorsque l'identité ou l'adresse d'un propriétaire est inconnue, la notification prévue au 4° est valablement faite au maire qui assure l'affichage de l'arrêté et sa communication à l'occupant des lieux, si celui-ci est identifiable.

« Art. R. 411-17-8. Sans préjudice de l'application d'autres réglementations et notamment celle prévue aux articles L. 414-4 et R. 414-19 et suivants, des dérogations peuvent être accordées en application du 4° de l'article L. 411-2. Les demandes de dérogation sont instruites selon la procédure ci-après :

« I. Après avis du conseil scientifique régional du patrimoine naturel réputé favorable à défaut de réponse dans un délai de trois mois après la saisine, les dérogations sont délivrées par le ou les préfets ayant pris l'arrêté mentionné au II de l'article R. 411-17-7. L'arrêté peut soumettre le bénéficiaire d'une dérogation à la tenue d'un registre dans lequel il indique les actions concrètes mises en œuvre en application de celle-ci.

« Le silence gardé pendant plus de quatre mois par l'autorité administrative sur une demande de dérogation vaut décision de rejet.

« II. L'arrêté précise les conditions d'exécution de l'opération concernée.

« III. Si les conditions fixées par l'arrêté ne sont pas respectées, le ou les préfets peuvent, par arrêté, suspendre ou retirer la dérogation accordée. La décision de suspension ou de retrait est notifiée au bénéficiaire de la dérogation qui est préalablement entendu.

« IV. Un arrêté du ministre chargé de l'environnement fixe les modalités de présentation et la procédure d'instruction des demandes de dérogations. »

Article 3 du décret du 19 décembre 2018

A la fin du 3° de l'article R. 415-1 du code de l'environnement, sont ajoutés les mots suivants : « et R. 411-17-7 à R. 411-17-8 ».

Article 4 du décret du 19 décembre 2018

I. Le I de l'article R. 644-1 du code de l'environnement est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, les dispositions « à R. 411-17 et R. 411-18 » sont supprimées ;

2° Après le premier alinéa, il est ajouté un alinéa ainsi rédigé : « Les articles R. 411-15 à R. 411-21 sont applicables dans les Terres australes et antarctiques françaises dans leur rédaction résultant du décret n° 2018-1180 du 19 décembre 2018. »

II. Au chapitre IV du titre IV du livre VI de la partie réglementaire du code de l'environnement, il est ajouté un article R. 644-11 ainsi rédigé :

« I. Pour l'application du premier alinéa du I de l'article R. 411-16 et du premier alinéa du IV de l'article R. 411-17-7 :

« 1° Lorsque le biotope ou l'habitat naturel protégé est situé sur le territoire de l'île Saint-Paul, de l'île Amsterdam, de l'archipel Crozet, de l'archipel Kerguelen ou de la terre Adélie, les mots : « conseil scientifique régional du patrimoine naturel, de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites et des communes sur le territoire desquelles le biotope protégé est situé » sont remplacés par les mots : « conseil national de la protection de la nature et du comité de l'environnement polaire » ;

« 2° Lorsque le biotope ou l'habitat naturel protégé est situé sur le territoire des îles Bassas da India, Europa, Glorieuses, Juan da Nova ou Tromelin, les mots : « conseil scientifique régional du patrimoine naturel, de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites et des communes sur le territoire desquelles le biotope protégé est situé » sont remplacés par les mots : « conseil national de la protection de la nature ».

« II. Les consultations prévues au deuxième alinéa du I de l'article R. 411-16 et au deuxième alinéa du IV de l'article R. 411-17-7 ne sont pas requises. »

Article 5 du décret du 19 décembre 2018

Après l'article R. 654-5 du code de l'environnement, il est inséré un article R. 654-5-1 ainsi rédigé :

« Art. R. 654-5-1. I. Pour l'application à Mayotte du deuxième alinéa du I de l'article R. 411-16, les mots : “ de la délégation régionale du centre national de la propriété forestière ” sont supprimés.

« II. Pour l'application à Mayotte du deuxième alinéa du IV de l'article R. 411-17-7, les mots : “ de la délégation régionale du centre national de la propriété forestière ” sont supprimés. »

Article 6 du décret du 19 décembre 2018

I. A l'article R. 661-1 du code de l'environnement, il est ajouté un 6° ainsi rédigé :

« 6° Les mots : “Conseil scientifique régional du patrimoine naturel” sont remplacés par les mots : “Conseil scientifique territorial du patrimoine naturel”. »

II. Après l'article R. 661-8 du code de l'environnement, il est inséré un article R. 661-8-1 ainsi rédigé :

« Art. R. 661-8-1. I. Pour l'application à Saint-Martin du deuxième alinéa du I de l'article R. 411-16, les mots : “de la délégation régionale du centre national de la propriété forestière” sont supprimés.

« II. Pour l'application à Saint-Martin du deuxième alinéa du IV de l'article R. 411-17-7, les mots : “de la délégation régionale du centre national de la propriété forestière” sont supprimés. »

Article 7 du décret du 19 décembre 2018

Au titre VII du livre VI de la partie réglementaire du code de l'environnement, il est ajouté un article R. 671-2 ainsi rédigé :

« Art. R. 671-2. I. Pour l'application à Saint-Pierre-et-Miquelon de l'article R. 411-16, le deuxième alinéa du I est ainsi rédigé : “ l'avis de la chambre d'agriculture, de commerce, d'industrie, de métiers et de l'artisanat est également recueilli lorsque les mesures définies par cet arrêté affectent les intérêts dont elle a la charge ” ;

« II. Pour l'application à Saint-Pierre-et-Miquelon de l'article R. 411-17-7, le deuxième alinéa du IV est ainsi rédigé : “ l'avis de la chambre d'agriculture, de commerce, d'industrie, de métiers et de l'artisanat est également recueilli lorsque les mesures définies par cet arrêté affectent les intérêts dont elle a la charge ” ».

Article 8 du décret du 19 décembre 2018

L'article R. 341-19 du code de l'environnement est ainsi modifié : au dernier alinéa, après le mot : « protection » sont insérés les mots : « de biotopes, d'habitats naturels ou ».

Article 9 du décret du 19 décembre 2018

L'article R. 4421-3 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié : au dernier alinéa, après le mot : « protection » sont insérés les mots : « de biotopes, d'habitats naturels ou ».

Article 10 du décret du 19 décembre 2018

Les dispositions de l'article 1er entrent en vigueur le premier jour du sixième mois suivant celui de la publication du présent décret au Journal officiel de la République française.

Article 11 du décret du 19 décembre 2018

Le ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire, la garde des sceaux, ministre de la justice, et la ministre des outre-mer sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.

Fait le 19 décembre 2018.

Edouard Philippe

Par le Premier ministre :

Le ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire,
François de Rugy

La garde des sceaux, ministre de la justice,
Nicole Belloubet

La ministre des outre-mer,
Annick Girardin