(JO n° 163 du 16 juillet 2011)
NOR : AGRG1113140P
Monsieur le Président de la République,
La présente ordonnance est prise sur la base du 3° du I de l'article 11 de la loi n° 2010-874 du 27 juillet 2010 de modernisation de l'agriculture et de la pêche, qui habilite le Gouvernement à prendre par voie d'ordonnance les dispositions législatives nécessaires afin de : « 3° Mettre en conformité avec le droit de l'Union européenne les dispositions du [...] code [rural et de la pêche maritime] relatives à la protection des végétaux en ce qui concerne notamment les conditions de leur mise sur le marché et d'utilisation des produits phytopharmaceutiques. »
Plusieurs textes (le « paquet pesticides ») ont été adoptés en octobre et novembre 2009, dans le cadre de l'Union européenne, afin de réduire les risques pour la santé publique et l'environnement des produits phytopharmaceutiques tout en assurant une protection des cultures efficace :
- le règlement (CE) n° 1107/2009 du 21 octobre 2009 relatif à la mise sur le marché et l'évaluation des produits phytopharmaceutiques, entré en application le 14 juin 2011 ;
- la directive 2009/127/CE du 21 octobre 2009 concernant les machines destinées à l'application des pesticides ;
- la directive 2009/128/CE du 21 octobre 2009 instaurant un cadre communautaire d'action pour parvenir à une utilisation des pesticides compatible avec le développement durable ;
- le règlement (CE) n° 1185/2009 du 25 novembre 2009 relatif aux statistiques sur les pesticides.
La présente ordonnance vise à assurer, d'une part, la transposition de la directive 2009/128/CE et, d'autre part, l'adaptation du droit national au regard des dispositions d'application immédiate fixées par le règlement (CE) n° 1107/2009.
Le règlement (CE) n° 1107/2009 remplace la directive 91/414/CEE du Conseil du 15 juillet 1991 concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques. Il vise à un niveau plus élevé de protection de la santé humaine et animale et de l'environnement tout en préservant la compétitivité de l'agriculture communautaire, en réduisant les distorsions de concurrence à travers une plus large harmonisation des réglementations entre les Etats membres de l'Union européenne.
Le règlement permet, en effet, de simplifier l'application du texte et d'assurer une cohérence de la réglementation applicable dans ce domaine dans tous les Etats membres de l'Union européenne par la définition de règles uniformes.
Le règlement apporte notamment :
- une différenciation des substances phytopharmaceutiques (substances à faible risque, substances de bases, substances dont on envisage la substitution...) et la fixation de durées d'autorisation de mise sur le marché variables suivant la catégorie des substances considérées ;
- un élargissement des dispositions réglementaires aux phytoprotecteurs, synergistes, coformulants et adjuvants ;
- un système d'autorisation des produits phytopharmaceutiques par les Etats membres basé sur des évaluations zonales des produits phytopharmaceutiques avec le découpage de l'Union européenne en trois zones (la France est dans la zone sud) et le principe de la reconnaissance mutuelle entre Etats membres des autorisations de mise sur le marché délivrées.
Dans ce cadre, le rôle de l'Autorité européenne de sécurité des aliments (AESA) est central et renforcé.
La directive 2009/128/CE fixe des objectifs de réduction des risques liés à l'utilisation des pesticides qui incluent à la fois les produits phytopharmaceutiques et les biocides. Elle a pour objectif de créer un cadre juridique communautaire commun visant à une utilisation durable des pesticides.
La directive ne concerne dans un premier temps que les produits phytopharmaceutiques mais, à terme, elle pourra viser également les produits biocides.
La directive fixe l'obligation aux Etats membres :
- de mettre en place des plans d'action nationaux fixant des objectifs quantitatifs, des cibles, des mesures, des calendriers et des indicateurs en vue de réduire les risques et les effets de l'utilisation des pesticides sur la santé humaine et l'environnement et à encourager le développement et l'introduction de la lutte intégrée contre les ennemis des cultures et de méthodes ou de techniques de substitution en vue de réduire la dépendance à l'égard de l'utilisation des pesticides (Ecophyto 2018 constitue le plan d'action français) ;
- d'améliorer l'efficacité et la qualité des matériels d'application des produits phytopharmaceutiques ;
- de mettre en place des systèmes de formation tant initiale que continue à l'intention des distributeurs, conseillers et utilisateurs professionnels de pesticides ainsi que des systèmes de certification ;
- d'améliorer l'information du public sur les répercussions globales de l'utilisation des pesticides ;
- de développer des méthodes de lutte intégrée et alternatives aux produits chimiques.
L'ordonnance révise principalement les chapitres III et IV du titre V du livre II de la partie législative du code rural et de la pêche maritime en vue, d'une part, de supprimer les dispositions contradictoires ou redondantes avec le règlement (CE) n° 1107/2009 ou de préciser les dispositions du règlement dès lors que cela est prévu et, d'autre part, de détailler les mesures mises en place pour atteindre les objectifs de la directive 2009/128/CE.
Le chapitre III relatif à la mise sur le marché et l'utilisation des produits phytopharmaceutiques comporte dix-huit articles dont certains assurent la transposition de la directive 2009/128/CE.
Par souci de clarification, l'ensemble des dispositions applicables aux détenteurs d'autorisation de mise sur le marché ou liées directement aux produits phytopharmaceutiques (précautions d'utilisation, plan national pour une utilisation durable des produits phytopharmaceutiques, élimination de ces produits) ont été réunies dans ce chapitre.
Sa réécriture permet la suppression de toutes les dispositions redondantes ou contradictoires avec des dispositions prévues par le règlement (CE) n° 1107/2009, d'application directe, et de mettre en œuvre les dispositions laissées au libre choix des Etats membres.
Ainsi, dans le chapitre III, ont été supprimés ou toilettés à droit constant certains articles ou parties d'articles pour adaptation à la directive et au règlement susvisés.
Par contre, les articles L. 253-3, L. 253-4 et L. 253-6 introduisent des dispositions nouvelles :
- l'article L. 253-3 du code rural et de la pêche maritime relatif au mécanisme d'arbitrage pour le partage des études et essais sur les animaux vertébrés ;
- l'article L. 253-4 qui simplifie la procédure de mise à jour des étiquetages résultant de toute modification liée à une évolution ou adaptation au progrès technique de la réglementation des substances et préparations dangereuses ;
- l'article L. 253-6 du code rural et de la pêche maritime relatif au plan national pour une utilisation durable des produits phytopharmaceutiques.
Le chapitre IV relatif aux conditions de mise en vente, la vente, la distribution à titre gratuit, l'application et le conseil à l'utilisation des produits phytopharmaceutiques n'introduit que de légères modifications par rapport à l'existant. Il est relatif aux conditions de mise en vente, la vente, la distribution à titre gratuit, l'application et le conseil à l'utilisation des produits phytopharmaceutiques. Ce chapitre contient les dispositions relatives à l'agrément des entreprises et la certification individuelle des personnes.
Une partie de la transposition de la directive 2009/128/CE a été opérée par le biais de la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement (loi Grenelle II). Des modifications sont ici introduites pour compléter et achever la transposition de la directive 2009/128/CE :
- extension de l'obligation de détention d'un certificat de qualification professionnelle pour les personnes distribuant des produits phytopharmaceutiques à d'autres personnes qu'aux utilisateurs finaux de ces produits ;
- possibilité de solliciter un agrément provisoire, pour les entreprises débutant leur activité, leur permettant une mise en œuvre progressive du dispositif ;
- amélioration de l'information de la clientèle sur la qualification des personnes exerçant une activité de vente, d'application ou de conseil, par l'apposition de leur numéro d'agrément sur les documents commerciaux notamment ;
- extension de la possibilité d'une certification dite « multisites » aux personnes morales regroupant des entreprises d'entités juridiques différentes.
Le chapitre VI relatif à l'inspection des matériels d'application de produits phytopharmaceutiques est modifié pour préciser, conformément aux exigences de la directive 2009/128/CE précitée, que les utilisateurs professionnels de matériel d'application doivent procéder à des contrôles et étalonnages réguliers de celui-ci.
Les dispositions transitoires de l'ordonnance permettent de prévoir les modalités selon lesquelles seront délivrées les autorisations de mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques pendant une période transitoire organisée par l'article 80 du règlement (CE) n° 1107/2009 du 21 octobre 2009, au cours de laquelle certaines dispositions de la directive 91/414/CEE du 15 juillet 1991 ou des dispositions prises pour son application continueront de s'appliquer.
Tel est l'objet de la présente ordonnance que nous avons l'honneur de soumettre à votre approbation.
Veuillez agréer, Monsieur le Président, l'assurance de notre profond respect.