(Circulaire.legifrance.gouv.fr)
NOR : TREL2328462J
Le ministre de l’intérieur et des outre-mer,
Le garde des Sceaux, ministre de la justice,
Le ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire,
Le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires,
La secrétaire d’État auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée de la biodiversité,
à
Pour attribution :
Mesdames et Messieurs les préfets de région
Mesdames et Messieurs les préfets de département
Mesdames et Messieurs les procureurs généraux près les cours d’appel
Madame la procureure de la République près le tribunal supérieur d'appel
Mesdames et Messieurs les procureurs de la République près les tribunaux judiciaires
Mesdames et Messieurs les directeurs d’établissements publics de parcs nationaux
Monsieur le directeur général de l’Office français de la biodiversité
Pour information :
Secrétariat général du Gouvernement
Secrétariat général à la planification écologique
Secrétariat général du MTECT
Secrétariat général du Ministère de l’intérieur et des outre-mer
Secrétariat général de la Mer
Premiers présidents des cours d'appel
Président du tribunal supérieur d’appel
Présidents des tribunaux judiciaires
Référence |
NOR : TREL2328462J |
émetteur |
Ministères de l’intérieur et des outre-mer, de la justice, de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire et de la transition écologique et de la cohésion des territoires |
Objet |
Stratégie des contrôles en matière de police de l’eau et de la nature |
Commande |
Pour action |
Action à réaliser |
Déploiement de la stratégie |
Echéance |
01/01/24 |
Contact utile |
casp-pol.deb.dgaln@developpement-durable.gouv.fr |
Nombre de pages et annexes |
13 pages – deux annexes |
Résumé : Cette instruction précise le périmètre des contrôles de l’eau et de la nature et clarifie lachaîne d’action des contrôleurs, depuis le cadrage national des priorités de contrôle jusqu’à sa déclinaison dans le plan de contrôle départemental. |
Catégorie : A titre exceptionnel, mesures d'organisation des services signées personnellement par le ministre |
Domaine : écologie, environnement |
Type : Instruction du gouvernement et Instruction aux services déconcentrés
Oui ☒ Non ☐ Oui ☒ Non ☐
|
Mots clés (liste fermée) : Energie, environnement |
Autres mots clés (libres) : eau, nature, police, contrôle |
Textes de référence : Décret n° 2023-876 du 13 septembre 2023 relatif à la coordination en matière de politique de l’eau et de la nature et de lutte contre les atteintes environnementales Instruction du Gouvernement du 16 septembre 2023 relative à la coordination en matière de politique de l’eau et de la nature et de lutte contre les atteintes environnementales Circulaire du Premier ministre du 31 juillet 2015 sur les contrôles agricoles |
Circulaire abrogée : Note technique du 22 août 2017 relative à l’organisation et à la pratique du contrôle par les services et établissements chargés de mission de police de l’eau et de la nature (TREL1713301N) |
Date de mise en application : immédiate |
Opposabilité concomitante : Oui ☐ Non ☒
La « circulaire » est rendue opposable à la date indiquée sur le BO du pôle ministériel à l’onglet Documents opposables. |
Pièce(s) annexe(s) : 2 annexes Annexe 1 - Guide pratique - les contrôles en police de l’eau et de la nature Annexe 2 – Glossaire |
N° d’homologation Cerfa : […] |
Publication : circulaires.legifrance.gouv.fr ☒ Bulletin Officiel ☒ |
La stratégie nationale de contrôles du 4 mars 2020 visait à donner les priorités nationales de contrôle en matière de polices de l’eau, de la nature et de l’environnement marin. Ces priorités sont déclinées dans les plans de contrôle départementaux préparés par les missions interservices de l’eau et de la nature (MISEN) et dans les plans de façade et de bassin pour l’environnement marin établis par les directions interrégionales de la mer (DIRM) ou les directions de la mer (DM), sur la base d’enjeux territoriaux et en tenant compte des documents de planification disponibles.
Après trois années de mise en œuvre, un travail de révision a été mené pour en clarifier le périmètre et préciser la chaîne d’action, depuis le cadrage national des priorités de contrôle jusqu’à sa déclinaison dans le plan de contrôle départemental.
La présente instruction pourra s’appuyer sur la mise en place, par le décret n° 2023-876 du 13 septembre 2023, de comités opérationnels de lutte contre la délinquance environnementale (COLDEN) dans chaque département. Ce décret, qui a également officialisé l’existence des MISEN, est accompagné d’une instruction du Gouvernement en date du 16 septembre 2023. Ces textes visent à favoriser l’échange d’informations et leur exploitation par les autorités administratives et judiciaires, à améliorer l’articulation et la coordination de leurs actions afin d’assurer la cohérence des suites apportées et de garantir que toute atteinte ou manquement constaté bénéficie d’un traitement adapté.
La présente instruction affirme la nécessité de faire connaître la stratégie de contrôle qu’elle définit, portée par les préfets dans les départements auprès des principaux acteurs socio-économiques concernés, des élus et plus largement du grand public. Cette communication contribuera à la prévention des troubles, comme à l’acceptation des contrôles. De même, son bilan devra faire l’objet d’une campagne annuelle de communication auprès des médias.
Ce cadre de contrôle rénové est explicité dans la présente instruction, qui clarifie le périmètre de la stratégie de contrôles en matière de polices de l’eau et de la nature (I), précise la chaîne d’action depuis l’impulsion gouvernementale jusqu’au bilan annuel des résultats obtenus (II) et définit le cadre de travail pour améliorer les conditions du contrôle pour les contrôleurs et les contrôlés (III).
I. Périmètre de la stratégie de contrôles en matière de police de l’eau et de la nature
La présente instruction concerne la planification des contrôles sur les politiques et territoires prioritaires pour la préservation de l’eau et de la nature, assurés par les agents de des directions départementales des territoires et de la mer (DDT(M)), des directions départementales de l'emploi, du travail, des solidarités et de la protection des populations (DD(ETS)PP), des directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DREAL), des directions de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DEAL), de l’Office français pour la biodiversité (OFB), des parcs nationaux, de l’Office National des Forêts (ONF) ou encore des gestionnaires d’espaces protégés, qu’ils donnent lieu à des suites administratives ou judiciaires.
Elle se matérialise par l’élaboration, dans le cadre de la MISEN, présidée par le préfet de département, en Métropole comme en Outre-mer, d’un plan annuel de contrôle départemental inter-services, auquel est associé le procureur de la République en raison de l’articulation nécessaire entre les actions de polices administrative et judiciaire. Cette instance a également pour mission de coordonner la mise en œuvre de ce plan.
La planification des contrôles eau et nature s’inscrit ainsi en complémentarité avec les enquêtes judiciaires menées sous la direction du procureur de la République, portant sur la recherche ou la constatation d’infractions en matière environnementale dans les thématiques précises qu’il a pu déterminer dans le cadre de la mise en œuvre de la politique pénale qu’il a arrêtée. Cette dernière, pour tenir compte au plus près des phénomènes, comportements et atteintes observés dans le ressort, est notamment établie à l’aide des informations, incluant les bilans des contrôles, partagées lors des réunions de la MISEN et du COLDEN par les différentes autorités.
Ces enquêtes judiciaires peuvent être diligentées, outre par les services de la police ou la gendarmerie nationale, par les fonctionnaires et agents des administrations et services publics dotés de pouvoirs de police judiciaire en application des articles 28 et suivants du code de procédure pénale, notamment par les agents de l’OFB, des DDT(M) et des DD(ETS)PP. Le procureur de la République, en vertu du principe d’opportunité des poursuites, apprécie les suites à donner au terme de l’enquête.
Enfin, les actions de contrôle réalisées par les forces de sécurité intérieure dans le cadre de leurs pouvoirs de police administrative, au titre de la lutte contre les atteintes à l’environnement, sont complémentaires des contrôles planifiés « eau et nature » réalisés par les agents chargés des contrôles.
La présente stratégie s’articule avec d’autres politiques de contrôle selon les modalités détaillées cidessous.
I.1 Articulation avec les contrôles des installations classées pour la protection de l’environnement
Le contrôle des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) fait l’objet d’une stratégie propre, fixée par l’instruction ministérielle du 27 janvier 20231, et le plan pluriannuel de contrôle des installations classées du 24 novembre 2016 destinés à être exécutés par les UD D(R)EAL et les DD(ETS)PP sous coordination régionale des DREAL. Avec la présente stratégie de contrôles en matière de police de l’eau et de la nature, elle constitue le cadre de référence pour les contrôles de l’environnement.
1 Instruction ministérielle du 27 janvier 2023 portant orientations stratégiques pluriannuelles de l’inspection des installations classées (2023-2027).
Les contrôles prévus dans les ICPE sur des thématiques concernant principalement la protection de l’eau et de la nature sont intégrés, après programmation au niveau régional assurée par la DREAL, au plan de contrôle départemental de l’eau et de la nature élaboré par la MISEN.
Les bilans de ces contrôles sont partagés en MISEN.
I.2 Articulation avec les contrôles de la sécurité des ouvrages hydrauliques
La politique de sécurité des ouvrages hydrauliques s’inscrit dans la politique globale de prévention des risques. La sécurité des ouvrages hydrauliques repose en premier lieu sur leur bonne conception, sur la compétence de leurs responsables (propriétaires, exploitants ou concessionnaires) et sur les moyens qu’ils mettent en œuvre pour assurer leur gestion ou leur exploitation en toutes circonstances.
Compte tenu de la complexité des ouvrages hydrauliques et donc de la forte technicité requise pour leur contrôle, des compétences techniques sont regroupées au niveau des DREAL. L’organisation du contrôle de la sécurité des ouvrages hydrauliques est définie par une note ministérielle en date du 11 juillet 2016, en particulier l’articulation avec les actions des services de police de l’eau et du contrôle des concessions. Les actions prioritaires pour la période 2022 – 2024 ont été fixées par la feuille de route « risques naturels » transmise aux préfets par une circulaire ministérielle du 17 février 2022. Les modalités du contrôle de la sécurité des ouvrages hydrauliques sont précisées par un référentiel professionnel.
Les contrôles prévus dans le cadre de la sécurité des ouvrages hydrauliques autorisés sont intégrés, après programmation au niveau régional assurée par la DREAL, au plan de contrôle départemental de l’eau et de la nature coordonné par MISEN et arrêté par le préfet de département.
Les bilans de ces contrôles sont partagés en MISEN.
I.3 Articulation avec les contrôles de la conditionnalité des aides de la Politique agricole commune (PAC)
Les contrôles conditionnalité de la Politique agricole commune, mis en œuvre en application du règlement (UE) 2021/2116 du 2 décembre 2021, comportent deux volets, le contrôle des bonnes conditions agricoles et environnementales (BCAE) et le contrôle des exigences relatives au respect de certaines dispositions réglementaires (ERMG). La liste de chacune de ces normes et exigences est définie par le règlement (UE) n° 2021/2115 du 2 décembre 2021, en son annexe III.
La mise en œuvre de ces contrôles est encadrée par des dispositions européennes et nationales (taux de contrôle et points de contrôles notamment) et fait l'objet d'une organisation propre (sélection des contrôles), auditée régulièrement par les services de la Commission européenne et qui respecte les principes de coordination des contrôles en exploitation agricole, définis par la Circulaire du Premier Ministre du 31 juillet 2015 relative à la coordination des contrôles dans les exploitations agricoles.
Les normes relatives aux BCAE relèvent de la réglementation PAC et vont au-delà de la réglementation sectorielle ; elles ne relèvent pas, en conséquence, du champ de cette instruction.
Le contrôle des exigences relatives aux ERMG est en revanche articulé avec la politique de contrôle de la réglementation environnementale qu’il complète sur certains points de contrôle. Dans le champ des contrôles « eau et nature » réalisés par les agents en charge des contrôles visés à l’article L. 170-1 du code de l’environnement, les moyens de contrôle de la PAC sont ainsi mobilisés pour vérifier le respect par le bénéficiaire des aides PAC de certains points de contrôle de la réglementation environnementale, tels que définis par arrêté du ministre en charge de l'agriculture au titre de l’ERMG 1 relative à la directive « politique communautaire dans le domaine de l’eau », l’ERMG 2 relative à la directive 91/976/CEE « protection des eaux contre la pollution par les nitrates », l’ERMG 3 relative à la directive 2009/147/CE « conservation des oiseaux sauvages » et l’ERMG 4 relative à la directive 92/43/CEE « conservation des habitats naturels et de la faune et flore sauvage ».
A ce stade des travaux interministériels, les contrôles ERMG 1, 3 et 4 au titre de la PAC s'ajoutent aux contrôles de la politique européenne dans le domaine de l’eau et de la conservation des oiseaux sauvages et des habitats qui sont effectués, en dehors du champ de la PAC, selon les priorités détaillées dans l’inventaire des contrôles prioritaires (voir point III.1).
Pour l’ERMG2, « protection des eaux contre la pollution par les nitrates », le périmètre du contrôle sectoriel retenu dans l’inventaire des contrôles est identique à celui défini pour la conditionnalité de la PAC.
De façon générale, pour la mise en œuvre des suites prévues sur les différents contrôles s’inscrivant dans le cadre de la présente stratégie, les non-conformités détectées sont transmises à l’autorité administrative et à l’autorité judiciaire en cas d’infraction pénale. Les non-conformités détectées en dehors des contrôles conditionnalité de la PAC seront transmises au service d’économie agricole de la DDT(M) qui examinera alors si l’anomalie relevée est le fait d’un bénéficiaire de la PAC et correspond sans ambiguïté à un non-respect d’un point de contrôle conformément à l’arrêté du 17 mars 2023, relatif à la mise en œuvre de la conditionnalité, conditions nécessaires à la mise en œuvre de réfactions sur les aides PAC.
I.4 Articulation avec les contrôles de l’environnement marin
En mer, le cadre de l’action de l’État et la mise en œuvre de la directive cadre « stratégie pour le milieu marin » appellent à des modalités ajustées de pilotage et de coordination des polices concourant à l’atteintes des objectifs des politiques environnementales. Des plans de surveillance et de contrôle de l’environnement marin (PSCEM) sont définis par façades et bassins maritimes, en application de l’instruction du Gouvernement du 13 mars 2015 et de l’instruction interministérielle du 4 novembre 2016. Ces instructions définissent le cadre national d’action du contrôle de l’environnement marin.
Les priorités de contrôle établies dans les PSCEM s’ajoutent aux priorités du plan de contrôle « eau et nature » arrêtées par le préfet de département, qui ont vocation à être mises en œuvre y compris sur l’estran.
Pour favoriser la collaboration des administrations et faciliter l’animation des PSCEM à l’échelle locale, la mise en place d’une instance de pilotage départementale dédiée est préconisée, en veillant à son articulation avec la MISEN. Afin d’assurer la bonne complémentarité et continuité des actions de contrôle, la DDTM/DML est partie prenante des deux instances et fait le lien entre le niveau départemental et celui de la façade. Le préfet de département veille par ailleurs à associer le préfet maritime ou son représentant aux travaux d’élaboration du projet de plan de contrôle départemental pilotés par la MISEN.
Le dispositif en place pour le contrôle de l’environnement marin bénéficie de l’appui et du concours du centre d’appui au contrôle de l’environnement marin (CACEM) dans les limites de ses attributions, conformément à l’arrêté du 13 mars 2023.
I.5 Maîtrise de la pression de contrôle
Afin de disposer d’une pression de contrôle proportionnée aux enjeux, les préfets de département s’attacheront à ce que l’exercice du contrôle en police de l’eau et de la nature soit pleinement coordonné entre les différents services concernés (services déconcentrés de l’État, services territoriaux des établissements publics, forces de sécurité intérieure, gestionnaires d’espaces naturels protégés, etc.) et tienne compte des éventuels taux minimaux de contrôle fixé par la règlementation (par exemple pour les contrôles conditionnalité de la PAC).
A ce titre, il convient ainsi d’associer à l’élaboration du plan de contrôle le correspondant départemental chargé de coordonner les contrôles dans les exploitations agricoles, en application de la circulaire du Premier ministre du 31 juillet 2015 sur les contrôles agricoles.
II. Chaîne d’action de la police de l’eau et de la nature
II.1 Des priorités nationales partagées et assumées
Un comité stratégique national des contrôles de l’environnement dans le domaine de l’eau et de la nature est instauré. Il réunit au deuxième trimestre de l’année les directions d’administration centrale chargées des politiques concernées et contribuant aux contrôles, l’Office français de la biodiversité, le commandement pour l’environnement et la santé (CESAN) de la gendarmerie nationale et des représentants des services déconcentrés chargés des contrôles.
Il assure le suivi et l’évaluation de la présente instruction.
Il lui incombe de valider les nouvelles priorités de contrôle qui seraient identifiées par les services et les modalités de leur mise en œuvre pour compléter l’inventaire des contrôles pour la protection de l’eau et de la nature (voir point III.1).
Il dresse le bilan de l’action de contrôle de l’année écoulée et donne les orientations pour améliorer l’action de contrôle sur le terrain.
Il assure le suivi des démarches interministérielles sur la formation, l’animation et l’outillage des contrôleurs.
Il s’assure de la déclinaison du chantier prioritaire du Gouvernement « renforcer la lutte contre les atteintes à l’environnement ».
Il retient chaque année quatre à cinq thématiques en lien avec les politiques prioritaires du Gouvernement qui sont mises en exergue à des fins de pédagogie sur l’objectif des contrôles et leurs résultats.
II.2 Un plan de contrôle départemental de l’eau et de la nature élaboré par la MISEN sur la base des priorités nationales et des enjeux et moyens territoriaux.
Conformément aux articles 1er et 3 du décret du 13 septembre 2023, un plan de contrôle départemental annuel de l’eau et de la nature, élaboré dans le cadre de la MISEN, détermine les contrôles qui seront mis en œuvre dans les champs de l’eau et de la nature par l’ensemble des services concernés. La mise en œuvre de ce plan est sans préjudice de la mise en œuvre des contrôles conditionnalité des aides de la PAC encadrée par des dispositions européennes et nationales et faisant l’objet d’une organisation propre et qui respecte les principes de coordination des contrôles en exploitation agricole (circulaire du Premier ministre du 31 juillet 2015 précitée).
Il met notamment en exergue les points de contrôle à articuler entre installations, ouvrages, travaux et activités ayant une incidence sur l’eau et les milieux aquatiques (IOTA) et ICPE. A ce titre, il intègre les contrôles prévus par la DREAL dans les ICPE lorsqu’ils ont une dimension majoritaire de protection de l’eau et de la nature. Il ne traite pas des autres contrôles du champ des ICPE ou des risques industriels (déchets, risques accidentels, équipements sous pression, etc.).
Ce projet de plan de contrôle est préparé par la MISEN en lien avec le niveau régional lorsque celui-ci exerce une coordination de certains de ces points de contrôle. Le ou les procureurs de la République compétents sur le département, en qualité de membres associés de la MISEN, participent à l’élaboration du projet de plan afin de veiller à une bonne articulation avec le développement de l’action judiciaire et la mise en œuvre de la réponse pénale en la matière sur le ressort.
Les enjeux prioritaires en matière de protection de l’eau et de la nature dans le département sont identifiés par la MISEN sur la base des documents de planification approuvés au niveau du bassin et de la région, ainsi que de leurs déclinaisons dans des outils plus opérationnels (plan d’action opérationnel territorialisé, feuille de route biodiversité, etc.). La réalisation d’une cartographie partagée des enjeux est fortement conseillée, s’appuyant sur les outils de connaissance mis à disposition par tous les services comme par exemple le plan d’action opérationnel territorialisé ou les diagnostics territoriaux développés par l’Office français de la biodiversité.
Les priorités de contrôle qui doivent être déclinées sur tout le territoire national, ci-après dénommées « priorités nationales de contrôles », sont définies dans un inventaire présenté au point III.1 ci-après. Il est demandé à la MISEN de définir les moyens consacrés à chacune d’entre elles en les proportionnant aux enjeux qu’elle a préalablement identifiés dans le département et en les ciblant sur les territoires ou sur les actes prioritaires en cohérence avec les orientations nationales.
Lorsque les enjeux concernent des territoires supra-départementaux, la politique de contrôle sera utilement coordonnée entre départements en organisant des inter-MISEN sous coordination régionale ou des réunions conjointes de MISEN. Il n’est plus demandé aux DREAL de décliner la stratégie nationale de contrôle de l’eau et de la nature au niveau régional.
Afin de mettre en œuvre le plan départemental de contrôle, il est attendu que les agents des DDT(M) et DD(ETS)PP consacrent en moyenne 20 % de leur temps aux contrôles terrain des actes administratifs qu’ils instruisent.
Ce plan de contrôle annuel est arrêté au plus tard au premier trimestre et validé à l’occasion de la réunion annuelle conjointe des membres permanents de la MISEN et du COLDEN prévue à l’article 3 du décret n° 2023-876 du 13 septembre 2023. Il pourra en tant que de besoin être ajusté pour faire face à des circonstances exceptionnelles, telles que des restrictions accrues en période de sécheresse, qui appellent un redéploiement des priorités de contrôles.
Le plan de contrôle ainsi défini est saisi dans l’outil LICORNE, qui permet d’en assurer le suivi et le rapportage, à l’exception des contrôles des ICPE, qui font l’objet d’un rapportage dans l’outil GUNenv, ainsi que des contrôles des ouvrages hydrauliques qui font l’objet d’un rapportage dans l’outil SIOUH.
Les bilans de ces contrôles sont partagés en MISEN. Le COLDEN doit également être l’occasion d’évoquer ces bilans afin d’attirer l’attention du procureur de la République sur la recrudescence, la baisse ou l’avènement de certains phénomènes ou comportements, et lui permettre ainsi de disposer de toutes les informations pour déterminer sa politique pénale et envisager ses orientations.
II.3 Action concertée des instances administratives et judiciaires : le rôle dévolu aux comités opérationnels de lutte contre la délinquance environnementale (COLDEN) et à la réunion annuelle des membres permanents des MISEN et COLDEN
Les missions, composition et organisation du COLDEN sont fixées par l’article 2 du décret du 13 septembre 2023, que vient détailler l’instruction du Gouvernement du 16 septembre 2023.
Le procureur de la République disposant de l’opportunité des poursuites, le COLDEN vise à coordonner l’action judiciaire avec l’action administrative ainsi que les réponses pénales et administratives qui ont vocation à être apportées aux atteintes à l’environnement constatées dans le ressort. Il a notamment vocation à permettre aux procureurs de la République d’exposer les axes de leur politique pénale, mise en œuvre lors des opérations de police judiciaire menées sous son autorité. Il doit permettre de favoriser les échanges d’informations sur les procédures administratives et judiciaires programmées, engagées ou clôturées.
À ce titre, les opérations déterminées en vertu du plan de contrôle inter-services doivent pouvoir être abordées à l’occasion du COLDEN, pour assurer une articulation efficiente et cohérente avec la réalisation des opérations de police judiciaire et les suites, administratives ou judiciaires, susceptibles d’être données par chacune des autorités.
Comme le prévoit l’instruction du Gouvernement du 16 septembre 2023, les réunions du COLDEN doivent par ailleurs permettre aux procureurs de la République d’orienter les contrôles de police administrative sur des atteintes environnementales qui auraient été révélées au gré de l’activité judiciaire et, incidemment, d’orienter le plan de contrôle élaboré en MISEN.
Il convient de rappeler que le périmètre des sujets abordés en COLDEN est susceptible d’être plus large que celui du plan de contrôle départemental de l’eau de la nature. En effet, en vertu de l’article 2 du décret du 13 septembre 2023 le domaine de compétence du COLDEN s’étend à toutes les thématiques couvertes par le code de l’environnement ainsi qu’à l’ensemble des thématiques connexes, dès lors que les atteintes concernées présentent un lien manifeste avec la protection de l’environnement.
L’article 4 du décret du 13 septembre 2023 prévoit que les membres permanents des MISEN et COLDEN se réunissent lors d’une réunion annuelle.
Outre la validation du plan de contrôle élaboré en MISEN, cette réunion permet de dresser un état des lieux des atteintes à l’environnement, ainsi qu’un bilan des suites apportées aux procédures administratives et judiciaires au cours de l’année. Elle définit les axes prioritaires dans les actions de lutte contre les atteintes environnementales et doit ainsi permettre une articulation optimale entre la planification des contrôles préparée en MISEN et la mise en œuvre de la politique pénale fixée par le ministère public.
II.4 Une communication articulée entre autorités administratives et judiciaires à des fins pédagogiques et préventives
La communication et la pédagogie sur la politique de contrôle contribuent à leur acceptabilité par les personnes visées par ces contrôles et à une meilleure compréhension des enjeux de préservation des ressources naturelles.
Il est attendu qu’y soit portée une attention très particulière, localement, comme nationalement.
Au plan local, il est demandé aux autorités administratives de présenter aux représentants des collectivités territoriales, des industriels, des agriculteurs, des fédérations de chasse et de pêche et des associations environnementales les grandes orientations du plan de contrôle.
Un plan de communication doit être établi à l'attention de catégories de personnes susceptibles de faire l'objet de contrôles particuliers, mais aussi à l’attention du grand public. Les actions de communication feront l’objet d’échanges en amont avec le parquet dès lors qu’un contrôle est susceptible d’avoir des suites judiciaires.
Le plan de communication pourra utilement prévoir des actions :
En amont des contrôles : les objectifs du plan de contrôle de l’eau et de la nature seront portés à la connaissance des publics contrôlés. Les conseils et ressources informatives concernant la réglementation environnementale, ainsi que les effectifs mobilisés dans les principaux services et unités de police, peuvent être mis en avant dans un souci de prévention des situations non conformes.
Pendant les contrôles : il peut être intéressant d'informer la presse (voire de l'inviter) lors d'opérations particulières (hors contrôles de conditionnalité des aides de la PAC), si possible mises en œuvre sur le terrain en présence de l’autorité administrative locale.
Il conviendra néanmoins de veiller à ce que la présence de la presse soit circonscrite aux opérations de contrôle administratif. En effet, la présence d'un journaliste au cours d'un contrôle effectué par des fonctionnaires dans le cadre d’une opération de police judiciaire constitue une irrégularité qui est de nature à entraîner la nullité de la procédure, en ce qu’elle méconnait le principe du secret de l’enquête.
Ainsi, si les contrôles menés dans le cadre administratif, en présence de journalistes, donnent lieu à l’ouverture d’une procédure d’enquête judiciaire, ces derniers ne peuvent assister aux actes d’enquête diligentés, tels que les perquisitions, les contrôles effectués dans un local, les auditions, etc.
Il est particulièrement utile de communiquer sur la réalisation de contrôles lorsque des dispositions exceptionnelles sont arrêtées, par exemple l'application de restrictions en période de sécheresse. Les opérations d'envergure, notamment celles qui associent plusieurs services, peuvent préalablement être signalées aux administrations centrales, afin que soit étudiée la possibilité d'en assurer une publicité au niveau national.
À la suite des contrôles : L’article 4 du décret du 13 septembre 2023 précité prévoit que la réunion annuelle conjointe des membres de la MISEN et du COLDEN a pour objectif de communiquer de manière adaptée sur les actions menées. Ainsi, dans le cadre de cette réunion annuelle conjointe, les préfets de département et les représentants du parquet sont invités à tenir, au moins une fois par an, une communication publique visant à expliquer les enjeux et présenter le bilan de ces contrôles et de leurs suites, en relation avec l’évolution de l’état des ressources naturelles, lesquels seront également présentés aux parties prenantes intéressées dans le cadre des instances de gouvernance et commissions administratives territoriales.
Cette communication pourra notamment indiquer la part de contrôles non conformes sur le nombre total de contrôles réalisés et les suites données aux contrôles non conformes, le taux de retour à une situation conforme après contrôle lorsque cela est possible et signifiant, ainsi que quelques illustrations qualitatives et anonymisées de mesures et/ou sanctions dissuasives intervenues durant l’année sur les enjeux territoriaux prioritaires, et quelques exemples pédagogiques illustrant les résultats obtenus en termes de réduction des pressions pesant sur les ressources naturelles.
Cette communication devra dans tous les cas être effectuée dans le respect des dispositions de l’article 11 du code de procédure pénale.
II.5 La nécessité de l’évaluation pour s’assurer de l’efficience des contrôles
La systématisation des bilans annuels, au niveau départemental et national, doit permettre de s’assurer de l’efficience des moyens consentis qui se mesure par le retour à la conformité administrative ou à l’état initial.
Les principales non-conformités seront utilement partagées avec les représentants des parties prenantes afin de leur permettre de faire évoluer les pratiques.
Comme évoqué plus haut, les réunions du COLDEN doivent notamment constituer des moments d’échanges pouvant permettre d’attirer l’attention du ministère public sur la sensibilité de certaines atteintes ou l’avènement de nouveaux phénomènes ou comportements, afin que toutes conséquences soient prises sur le plan judiciaire.
A l’occasion du bilan national en comité stratégique, un préfet et un procureur seront invités à témoigner des réussites et des difficultés rencontrées dans leur département.
En outre, le bilan annuel des contrôles et des résultats obtenus sera valorisé pour nourrir un dialogue entre les directions départementales, les DREAL au titre de leurs missions départementales et les ministères pilotes, notamment pour permettre de comprendre les freins aux contrôles ou aux remises en état lorsque des résultats insuffisants seront constatés.
III. Un cadre de travail amélioré au bénéfice conjoint des contrôleurs et des contrôlés
III.1 Un inventaire national des contrôles eau/nature mis à jour à fréquence annuelle
Un inventaire des contrôles planifiables prioritaires en matière d’eau et de nature accessible en ligne sur le site intranet de la DGALN et sur une plate-forme collaborative d’État décrit les politiques publiques auxquelles ils concourent, les territoires ou actes cibles et les modalités de mise en œuvre attendues.
Il a vocation à servir de référence pour l’élaboration puis la mise en œuvre des plans de contrôle départementaux par l’ensemble des agents qui interviennent dans les champs de l’eau et de la nature, qu’ils s’agissent des agents des opérateurs de l’État, des services déconcentrés ou des forces de l’ordre.
A cette fin, les fiches qui composent cet inventaire sont validées en comité stratégique national interministériel.
Cet inventaire ne vise pas des contrôles qui par définition ne sont pas planifiables, car réalisés sur signalement ou à l’occasion d’autres missions sur le territoire. Ainsi, les contrôles liés aux pollutions ponctuelles ou à des constats de non-respect de l’interdiction de l’engrillagement des espaces naturels, s’ils ne figurent pas à cet inventaire, ne sont pas pour autant oubliés du plan de charge des agents.
Les modes d’organisation de certains contrôles sont actuellement en cours de refonte, ce qui justifie qu’ils n’aient pas été inclus dans l’inventaire pour 2024, comme par exemple les contrôles liés au règlement sur le bois de l’Union européenne.
Enfin, certains contrôles qui doivent concourir à de nouvelles priorités comme la lutte contre la pollution lumineuse ont vocation à être documentés dans des versions ultérieures de l’inventaire. Il s’agit donc d’un référentiel vivant qui sera mis à jour à pas de temps annuel.
Avec les priorités de contrôles définies dans le plan pluriannuel de contrôle du 24 novembre 2016 pour les installations classées et les actions nationales des ICPE définies chaque année par voie d’instruction, ainsi que les priorités du plan de surveillance et de contrôle de l’environnement marin (PSCEM), cet inventaire complète un corpus de référence pour la mise en œuvre des contrôles des polices de l’environnement, quels que soient les milieux.
III.2 Des formations interministérielles à encourager et une animation de réseau à dynamiser
La mobilisation de gendarmes et policiers spécialement formés à la lutte contre les atteintes à l’environnement et la mise en place des COLDEN dans chaque département nécessitent l’animation et la formation de ces professionnels de la police judiciaire aux enjeux des politiques publiques de protection de l’eau et de la nature. Les agents des ministères chargés de l’écologie et de l’agriculture pourront utilement participer à ces opérations de formation.
Parallèlement, les services chargés de la formation des agents des corps de contrôle des services déconcentrés (DDT-M, DD(ETS)PP) pourront solliciter les agents des ministères de l’intérieur ainsi que les procureurs de la République, ou les magistrats référents environnement au sein des parquets, afin de bénéficier de formations en matière de droit pénal et de procédure pénale.
L’offre de formation proposée aux agents des corps de contrôles sera enrichie sur le savoir être et la gestion des conflits.
Les plans de formation seront adaptés pour favoriser l’ouverture interministérielle.
Une réunion annuelle des acteurs du contrôle « eau et nature » sera organisée à l’initiative de la DGALN avec le concours des ministères de la justice, de l’intérieur et de l’agriculture, afin de favoriser une dynamique de réseau sur tout le territoire.
La DGALN continuera à s’appuyer sur le réseau des animateurs régionaux de la police de l’eau et la nature pour mener à bien son rôle de coordination.
III.3 Sécuriser la mise en œuvre des contrôles, pour le contrôleur comme pour le contrôlé
La protection des agents chargés des missions de contrôle est une priorité des signataires de la présente stratégie, qui rappellent la nécessité d’afficher un soutien clair aux agents lorsqu’ils sont victimes d’intimidation ou de violences, verbale ou physique, dans l’exercice de leurs missions.
Afin de faciliter le déroulement de ces missions, un guide pratique sur le déroulement des contrôles est mis à disposition en annexe 1. Ce guide explicite les obligations réciproques des contrôleurs et contrôlés pour les contrôles avec suites administratives ou judiciaires. Il pourra être décliné au niveau local et pourra utilement être partagé dans le cadre des réunions de présentation des priorités de contrôles aux représentants des contrôlés.
Enfin, il est demandé aux chefs de service de s’assurer de la constitution de binôme pour la mise en œuvre des contrôles sensibles par les services déconcentrés.
Fait le 2 janvier 2024
Le ministre de l’intérieur et des outre-mer,
Gérald DARMANIN
Le garde des sceaux, ministre de la justice,
Éric DUPOND-MORETTI
Le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire,
Marc FESNEAU
Le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires,
Christophe BÉCHU
La secrétaire d'État auprés du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. chargée de la biodiversité,
Sarah EL HAIRY
Annexe 1 - Guide pratique - les contrôles en police de l’eau et de la nature
Ce guide s’applique aux missions de police portant sur le respect de la réglementation dans le domaine de l’eau et de la nature, qu’elles soient de nature administrative ou judiciaire. Ce guide ne concerne pas les contrôles liés aux aides versées aux exploitants agricoles dans le cadre de la PAC.
Pour ces derniers, chaque corps de contrôle intervenant dans le contrôle de la conditionnalité applique le guide de contrôle établi à cet effet, par domaine ou sous-domaine de la conditionnalité.
Ce guide a une vocation pédagogique ; il rappelle les modalités du déroulement d’un contrôle administratif et d’une opération de police judiciaire et précise les droits et les devoirs des agents chargés de ces opérations : agents des services déconcentrés s’agissant de la police administrative, et s’agissant d’opérations de police judiciaire, les inspecteurs de l’environnement définis à l’article L. 172-1 du code de l’environnement, les gardes du littoral et les agents de réserve naturelle (commissionnés et assermentés).
Il n’a pas vocation à se substituer aux notes de service ou instructions applicables dans les établissements publics au sein desquels les agents dotés de prérogatives de police exercent leurs missions.
Introduction
Pourquoi une police de l’eau et de la nature ?
Toute activité humaine a un impact sur les ressources naturelles, qu’il s’agisse de la faune, de la flore, de l’eau, de l’air, du sol ou des sous-sols, pour assurer des fonctions vitales comme respirer, boire, se nourrir, mais également pour fournir tous les produits (biens de consommation, bâtiments, infrastructures…) et services (transport, communication…) que nos modes de vie modernes requièrent. Or, aujourd’hui, certains besoins de nos sociétés engendrent un niveau de pression sur les ressources naturelles supérieur à leurs capacités de renouvellement. Nous devons donc poursuivre la réduction de ces impacts sur notre environnement.
La mise en œuvre des politiques publiques environnementales passe, au-delà des actions d’information, de sensibilisation et d’incitation toujours nécessaires, par une police de l’environnement efficace, à la fois au plan administratif et judiciaire, contrôlant l’application du droit de l’environnement par les particuliers, les collectivités locales et les acteurs socio- économiques et assurant un rôle de prévention des atteintes à l’environnement.
Au niveau européen, la France a l’obligation de sanctionner les atteintes à l’environnement. Par ailleurs, plusieurs directives et règlements nous assignent des obligations de contrôle et de rapportage de ces activités de contrôle.
La police de l’eau et de la nature intervient notamment dans le domaine de l’eau, des impacts environnementaux sur les milieux marins, des espaces protégés, des espèces protégées, de la protection des habitats et patrimoines naturels, de la chasse et de la pêche en eau douce, ainsi que dans d’autres domaines pour lesquels ses agents sont habilités, tels que l’usage des produits phytopharmaceutiques ou la pêche maritime.
Dans quel cadre s’inscrit son action ?
La police de l’environnement s’appuie en France sur deux dispositifs complémentaires.
Afin d’accomplir leurs missions, les agents en charge de la police de l’environnement disposent en effet de pouvoirs de police comportant deux aspects, soit des prérogatives de police administrative soit des prérogatives de police judiciaire.
• S’agissant des prérogatives de police administrative, elles sont exercées lors des contrôles administratifs qui ont pour objet de vérifier que les activités soumises à un régime administratif sont menées avec le titre requis et dans le respect des prescriptions édictées. Les missions de police administrative sont réalisées par les agents des services déconcentrés de l’État et des établissements publics, sous l’autorité des préfets. Les « agents chargés du contrôle » sont missionnés par leur autorité hiérarchique et n’ont pas besoin d’être commissionnés ni assermentés pour réaliser cette mission.
• S’agissant des prérogatives de police judiciaire, elles sont exercées par les agents qui recherchent et constatent les infractions prévues par la loi et identifient les auteurs. Les missions de police judiciaire sont réalisées, outre les services de la police et de la gendarmerie nationale, par les inspecteurs de l’environnement (agents des services déconcentrés de l’État et des établissements publics) ainsi que par les gardes du littoral et les agents de réserve naturelle notamment. Ces agents sont commissionnés et assermentés. La police judiciaire est placée sous l’autorité du procureur de la République, qui seul décide des suites données aux infractions constatées.
L’articulation intelligente et pragmatique de ces deux dispositifs, entre prévention et répression, est un déterminant essentiel de leur efficacité. Préalablement à chaque intervention, l’agent ou sa hiérarchie doit être en capacité de déterminer le cadre, administratif ou judiciaire, dans lequel il intervient. Lors d’une opération de contrôle administratif, si l’agent de contrôle identifie une infraction pénale et qu’il est commissionné et assermenté, il devra établir un procès-verbal distinct actant de l’ouverture d’une procédure judiciaire.
La police de l’environnement est mise en œuvre par les agents des services déconcentrés de l’État (dans les DDT(M), les DREAL et les DD(ETS)PP) et des établissements publics (notamment, l’OFB et les Parcs nationaux), aux compétences hautement spécialisées. Ils inscrivent leur action dans un cadre clairement défini, qui leur confère des prérogatives adaptées, garantissant d’une part des contrôles proportionnés aux enjeux, le respect des libertés individuelles et l’information des personnes contrôlées, et assurant d’autre part la validité des procédures judiciaires et le respect des droits procéduraux des personnes mises en causes.
Le plan de contrôle « eau et nature »
Les priorités nationales, déclinées et croisées avec les enjeux locaux, sont inscrites dans un plan de contrôle inter-services départemental. Établi par les services de l’État, avec les établissements publics, les autres services de contrôle et en concertation avec le Procureur de la République du ressort, le plan de contrôle est validé par les membres de la réunion annuelle conjointe entre la MISEN et le COLDEN.
Ce document oriente les contrôles prioritairement sur les territoires et les thématiques à forts enjeux environnementaux. Ces enjeux résultent d’une analyse fine des vulnérabilités (zones d’alimentation en eau potable, rivières fortement dégradées, zones humides ou autres zones naturelles menacées, espèces menacées d’extinction, etc.).
Le plan de contrôle est décliné par chaque service en programme de contrôles. Les préfets de département assurent une communication adaptée lors de l’élaboration du plan de contrôle pour en faire partager les enjeux et lors de son bilan.
Les services de l’État et des établissements publics :
• veillent, lors de la réalisation du contrôle, à ce que les éléments contrôlés correspondent effectivement aux principaux impacts des activités sur les ressources ;
• s’efforcent de mettre en perspective et d’expliquer les enjeux qui motivent cette politique lors des contrôles et s’assurent, à chaque fois qu’une non-conformité (ou une infraction) est relevée, que les suites administratives et/ou judiciaires concourent à la faire cesser, c’est-à-dire à réduire le niveau de pression sur les ressources naturelles.
La majorité des contrôles dans le cadre administratif s’exercent en application du plan de contrôles.
Cependant les services de l’État et des établissements publics au titre des pouvoirs de police judiciaire qui sont conférés à leurs agents, peuvent aussi être amenés à diligenter des investigations destinées à caractériser des infractions dans le cadre d’une enquête judiciaire. En tout état de cause, ces actions de police pourront être priorisées ou adaptées dans le cadre des comités opérationnels de lutte contre la délinquance environnementale (COLDEN) en fonction des objectifs de politique pénale poursuivis par l’autorité judiciaire.
1. Déroulement du contrôle administratif
1.1 Information préalable de la personne faisant l’objet d’un contrôle
On distingue le contrôle des prescriptions administratives individuelles, ciblé sur une installation ou une activité particulière et le contrôle d’usage, qui est la recherche sur un territoire déterminé d’éventuels manquements à la réglementation. Dans ce deuxième cas, l’identité des personnes qui feront l’objet d’un contrôle n’est pas connue a priori.
Certains contrôles en police administrative peuvent être précédés d’un préavis, dans la mesure où cela ne nuit pas à l’efficacité du contrôle. Dans les cas où la personne contrôlée est prévenue du contrôle, elle est informée de l’objet de celui- ci, de la date et de l’heure prévue du contrôle, du service chargé du contrôle et des documents qu’elle doit tenir à disposition.
Lors de la programmation des contrôles, et en lien avec le coordinateur des contrôles désigné dans chaque département en application de la circulaire du Premier Ministre du 31 juillet 2015 relative à la coordination des contrôles dans les exploitations agricoles, les services chargés du contrôle s’efforcent de prendre en compte la date du dernier contrôle au titre de la police de l’environnement dont l’opérateur contrôlé a fait l’objet.
Les services chargés du contrôle sont par ailleurs amenés à revenir sur des installations précédemment contrôlées afin de vérifier le respect de mises en demeure, de mesures conservatoires ou l’absence de réitération d’une non-conformité.
1.2 Dialogue avec la personne contrôlée et investigations
Au moment de la prise de contact avec la personne contrôlée, les contrôleurs déclinent leur identité et se présentent avec courtoisie, dans un souci constant du respect d’autrui.
Les contrôleurs exposent avec pédagogie le déroulement du contrôle et la réglementation correspondante. La personne contrôlée est dans l’obligation d’accepter le contrôle. Elle se comporte vis-à-vis des contrôleurs avec le respect dû à un agent chargé de missions de contrôle et dépositaire de l’autorité publique.
Les investigations des contrôleurs se limitent au périmètre de leurs missions. S’ils constatent des manquements de nature administrative en dehors de ce périmètre, ils les signalent au service de contrôle compétent.
S’ils constatent une infraction pénale, ils donnent avis sans délai au procureur de la République afin de se voir confirmer l’ouverture d’une enquête judiciaire et leur saisine pour la poursuite des investigations. A défaut, les renseignements, procès-verbaux et actes qui y sont relatifs sont transmis dans les meilleurs délais au procureur de la République.
Les contrôleurs informent la personne contrôlée de la nature des constats enregistrés et s’assurent du respect des procédures contradictoires.
Le contrôleur se limite à la recherche et au constat des non conformités qu’il explique à la personne contrôlée. Il n’est pas de son ressort de décider des suites qui y seront données, par le préfet ou dans quelques cas particuliers, une autre autorité administrative compétente (directeur de l’établissement public du parc national, président du Conseil régional dans le cas de réserves naturelles régionales, etc.).
Néanmoins, le contrôleur peut informer, à sa demande, la personne contrôlée des étapes ultérieures raisonnablement envisageables (mise en demeure, amende administrative, astreinte administrative, consignation de fonds, etc.) relevant de la compétence du préfet. Si des infractions pénales ont été constatées, la personne mise en cause en est également informée.
1.3 Droits et devoirs
1.3.1 Les devoirs et les pouvoirs du contrôleur
Les devoirs du contrôleur
Les agents chargés de contrôles respectent les libertés fondamentales du citoyen, et en particulier la protection du domicile. À ce titre, les lieux et les horaires de contrôles ainsi que les règles d’accès aux locaux sont encadrées (cf. ci-dessous).
Lors d’un contrôle administratif et si cela est matériellement possible, le contrôleur recherche le dialogue avec le contrôlé, et en particulier, il :
• se présente à la personne contrôlée ;
• indique la réglementation visée et le cadre procédural de son intervention ;
• recueille les observations du contrôlé ;
• répond aux questions sur la réglementation et sur la suite potentielle des procédures.
Les pouvoirs d’investigation du contrôleur
L’agent de contrôle dispose de pouvoirs adaptés pour mener à bien ses missions.
En contrôle administratif, ces pouvoirs sont limités à la communication et saisie de documents ou de données et au recueil de déclaration, sur place ou sur convocation.
Les agents de contrôle ont accès aux lieux qu’ils ont à contrôler selon des modalités distinctes en police administrative et en police judiciaire.
Dans le cas d’un contrôle administratif, conformément aux dispositions des articles L.171-1 et L.171-2 du code de l’environnement (CE), les agents de contrôle peuvent accéder aux lieux dans lesquels s’exercent ou sont susceptibles de s’exercer des activités réglementées par le droit de l’environnement.
Ils ont accès aux parcelles agricoles ouforestières, même lorsque celles-ci sont clôturées.
Ils peuvent accéder aux locaux et espaces clos accueillant des installations, ouvrages et activités réglementés entre 8 et 20 heures et en dehors de ces heures, lorsque l’activité réglementée est en cours ou lorsqu’ils sont ouverts au public.
L’accès aux locaux à usage d’habitation n’est possible qu’avec l’assentiment de la personne contrôlée, recueilli par écrit. En cas de refus, l’agent de contrôle devra, pour accéder à ces locaux, obtenir une ordonnance du juge des libertés et de la détention (cas du contrôle en police administrative ou dans l’exercice du droit de suite).
La tenue du contrôleur
Les agents habilités à mener des contrôles administratifs ne portent pas de tenue ou de signes distinctifs s’ils relèvent des services de l’État (DDT-M, DD(ETS)PP, DREAL, DEAL, DRAAF).
Les agents de contrôle, également commissionnés et assermentés et affectés à l’Office français pour la biodiversité ou dans les établissements publics des parcs nationaux sont tenus de porter un uniforme, la plaque émaillée ou l’écusson de leur établissement d’affectation ainsi que la plaque de police et les insignes de leur grade. Ces agents sont astreints au port d’armement fourni le cas échéant par leur établissement dans le cadre de l’exercice de leurs missions de police.
1.3.2 Les droits et devoirs de la personne contrôlée
Devoirs de la personne contrôlée
La personne contrôlée est tenue de décliner son identité et de laisser libre accès aux lieux où doit se réaliser le contrôle, sous réserve du respect des horaires, hormis dans le cas particulier des domiciles ou locaux à usage d’habitation.
La personne contrôlée doit tenir à disposition des contrôleurs les informations, données et pièces justificatives utiles et nécessaires et faciliter le déroulement du contrôle (accès aux installations, regroupement des animaux, accès aux logiciels informatiques, etc.).
Dans le cadre d’un contrôle administratif inopiné, un délai de 24 heures est laissé au contrôlé s’il ne dispose pas dans l’immédiat des documents et pièces justificatives demandés par le contrôleur (exemple : parcelle éloignée du siège d’exploitation, point de prélèvement d’eau éloigné…)2.
Lorsqu’elle a été préalablement avertie du contrôle, la personne contrôlée se rend disponible à l’heure et au lieu prévu, avec les documents nécessaires à la réalisation du contrôle.
Opposition au contrôle administratif
Si les contrôleurs ne peuvent conduire normalement leur mission (refus de communiquer des documents, entrave au bon déroulement, manque de respect de la personne contrôlée…), ceux-ci quittent le lieu du contrôle. De façon générale, si le comportement de la personne contrôlée conduit le contrôleur à ne pas effectuer le contrôle ou à l’interrompre, le refus de contrôle est constaté par un procès-verbal d’obstacle aux fonctions, ce fait étant constitutif d’un délit (article L. 173-4 du CE (voir infra)).
Au-delà du délit d’obstacle aux fonctions, si d’autres infractions sont commises à l’encontre de l’intégrité de la personne du contrôleur et selon leur gravité, il conviendra de saisir, éventuellement immédiatement, les services de police ou gendarmerie territorialement compétents et d’aviser le procureur de la République.
Droits de la personne contrôlée
En cas de contrôle administratif ayant conduit à relever un manquement administratif, la personne contrôlée peut faire part de ses observations dans un délai raisonnable, généralement fixé à quinze jours maximum suivant l’envoi du rapport de manquement administratif.
Lorsqu’aucune non-conformité est relevée, le service de contrôle informe par écrit la personne contrôlée qu’il n’a pas été identifié de non-conformité pour les points contrôlés. En cas de mise en demeure, ainsi que de mesures et sanctions de police administrative, la personne contrôlée peut exercer son droit de recours (recours gracieux, recours hiérarchique, recours contentieux), selon les dispositions en vigueur.
Respect des libertés individuelles dans l’accès aux locaux
L’accès à certains locaux professionnels et aux locaux à usage d’habitation est strictement encadré. En particulier, la personne contrôlée peut refuser que le contrôleur accède à son domicile, et exiger qu’il soit muni d’une ordonnance du juge des libertés et de la détention (article L.171-2 du code de l’environnement).
2 Cette situation n’est pas applicable dans les cas d’activités mobiles (transports...) ou dans le cas où la réglementation requiert que la personne contrôlée ait le document administratif lors de la pratique de l’activité (permis...)
1.4 Suites du contrôle
Lorsqu’aucune non-conformité est relevée, le service de contrôle informe par écrit la personne contrôlée qu’il n’a pas été identifié de non-conformité pour les points contrôlés.
Lorsqu’une non-conformité est relevée, un rapport de manquement administratif est établi à l’issue du contrôle. Il est transmis à la personne contrôlée qui peut faire part de ses observations, généralement sous quinzaine, ainsi qu’au service déconcentré de l’État en charge des suites à donner.
Si le manquement administratif est confirmé, l’intéressé sera mis en demeure de se mettre en conformité avec la réglementation dans un délai déterminé. En cas de refus d’obtempérer, il s’expose à des sanctions administratives et/ou à des poursuites judiciaires.
2. Déroulement des opérations de police judiciaire (ne concerne pas les personnels de l’OFB qui disposent de leur propre instruction interne).
2.1 Information préalable du mis en cause
Il n’y a pas d’information préalable.
2.2 Dialogue avec le mis en cause et investigations
Au moment de la prise de contact avec le mis en cause, les agents déclinent leur identité et se présentent avec courtoisie, dans un souci constant du respect d’autrui. Ils présentent leur carte de commissionnement.
Les agents exposent avec pédagogie le déroulement des opérations et la réglementation correspondante (audition libre et opérations de constatation et de recherche en vertu des articles L. 172-4 et L.172-5 du CE).
Les investigations des agents se limitent au périmètre de leurs prérogatives judiciaires. S’ils constatent des infractions en dehors du cadre de leur saisine initiale, ils les signalent immédiatement au procureur de la République et au service de police compétent.
Les agents informent le mis en cause de la nature des infractions constatées et veillent au respect du contradictoire. Le respect du contradictoire ne permet pas de remettre ou de mettre à la disposition de la personne mise en cause des pièces de la procédure.
L’agent se limite à la recherche et au constat des infractions qu’il explique à la personne mise en cause. Il n’est pas de son ressort de décider des suites qui y seront données par le procureur de la République.
Néanmoins, l’agent peut informer, à sa demande, le mis en cause des risques encourus pour les infractions constatées et des étapes ultérieures envisageables dans le déroulement de l’enquête en vertu de la politique pénale communiquée par le procureur de la République (PV, traitement par le parquet, classement sans suite, transaction pénale, alternatives aux poursuites, poursuites, etc.).
2.3 Droits et devoirs
2.3.1 Les devoirs et les pouvoirs des agents
Les devoirs des agents
Les agents respectent les libertés fondamentales du mis en cause et en particulier la protection du domicile. À ce titre, les lieux et les horaires de contrôles ainsi que les règles d’accès aux locaux sont encadrées.
Les agents exerçant des pouvoirs de police judiciaire respectent strictement les dispositions de procédure pénale du code de procédure pénale et du code de l’environnement, tout particulièrement celles relatives aux droits de la personne mise en cause, au premier rang desquelles figurent la présomption d’innocence et le droit au respect de la vie privée.
Les pouvoirs d’investigation des agents
Les inspecteurs de l’environnement disposent de prérogatives de police judiciaire (art. L. 172-4 et suivants du CE) qu’ils ne peuvent exercer de manière concomitante avec les pouvoirs de police administrative qui leur sont également reconnus (articles L. 171-1 et suivants du CE).
− Les opérations de recherche et de constatation (art. L. 172-5 et L.172-6 du CE)
Le premier régime prévu par l’article L. 172-5 du CE, est celui de la recherche et de la constatation des infractions en quelque lieu qu’elles soient commises. Les inspecteurs de l’environnement sont tenus d’aviser le procureur de la République, qui peut s’y opposer, avant d’accéder aux locaux professionnels (uniquement entre 6 heures et 21 heures, sauf locaux ouverts au public ou activité professionnelle en cours) ou aux véhicules, navires et aéronefs professionnels dédiés aux animaux ou végétaux. Les visites des locaux à usage d’habitation ne peuvent être commencées qu’après 6 heures et avant 21 heures, et uniquement avec l’assentiment de l’occupant. A défaut de cet assentiment, l’assistance de l’officier de police judiciaire (OPJ) est exigée et les règles du code de procédure pénale s’appliquent.
Le second régime prévu par l’article L. 172-6 du CE est relatif au droit de suite : les inspecteurs de l’environnement peuvent suivre dans tous les lieux où ils ont été transportés les animaux, végétaux ou minéraux prélevés en violation du code de l’environnement. Lorsqu’il s’agit de locaux à usage d’habitation, est requis l’assentiment de l’occupant ou, à défaut, l’autorisation du juge des libertés et de la détention (en pratique, les inspecteurs de l’environnement solliciteront le procureur de la République qui requerra le juge des libertés et de la détention).
− Vérification d’identité (art. L. 172-7 du CE et 78-3 du code de procédure pénale [CPP])
Les inspecteurs de l’environnement ont le pouvoir de vérifier l’identité de toute personne susceptible d’avoir commis une infraction rentrant dans leur champ de compétence. Si la personne refuse ou ne peut justifier de son identité, l’agent contacte sans délai l’OPJ territorialement compétent, qui peut alors ordonner soit de relâcher la personne, soit de la retenir sur place le temps que celui-ci arrive, soit de la conduire devant lui.
Pendant le temps nécessaire à l’information et à la décision de l’OPJ, l’individu soupçonné de l’infraction est tenu de demeurer à la disposition de l’agent de constatation.
Cette prérogative s’exerce sans préjudice des dispositions de l’article 73 du CPP, qui autorisent toute personne à appréhender l’auteur d’un crime flagrant ou d’un délit flagrant puni d’une peine d’emprisonnement et à le conduire devant l’OPJ le plus proche. Les inspecteurs de l’environnement peuvent interpeller la personne qui se soustrait à la vérification d’identité, le refus de se tenir à leur disposition étant constitutif du délit d’obstacle aux fonctions.
− Auditions (art. L. 172-8 du CE et 61-1 du CPP)
Les inspecteurs de l’environnement peuvent entendre toute personne susceptible d’apporter des éléments utiles à la constatation des infractions. La personne mise en cause est entendue sous le régime de l’audition libre.
− Réquisitions et saisies de documents (art. L. 172-11 du CE)
Les inspecteurs de l’environnement ont la faculté de demander la communication et de procéder à la saisie de tous les documents qui sont relatifs à l’objet du contrôle, quel que soit le support. Les organismes publics sont également tenus de leur adresser tout document nécessaire à l’accomplissement de leur mission. En outre, ils peuvent procéder à toutes réquisitions utiles sur le fondement des articles 77-1, 77-1-1 et 77-1-2 du CPP (opérateur téléphonique, établissement bancaire, interprète notamment).
− Saisies d’objets et de véhicules (art. L. 172-12 du CE)
Les inspecteurs de l’environnement peuvent procéder à la saisie de l’objet ou du produit direct ou indirect de l’infraction (animaux, végétaux, armes, engins, numéraires) ainsi qu’à la saisie de tous les véhicules utilisés pour commettre l’infraction, se rendre sur les lieux de commission de l’infraction ou s’en éloigner, ou transporter l’objet de l’infraction.
− Prélèvement pour analyse ou essai (art. L. 172-14 du CE)
Il existe un régime spécifique, en matière environnementale, concernant les conditions de réalisation des prélèvements et analyses. Les prélèvements d’échantillons en vue d’analyse peuvent ainsi être réalisés directement par les inspecteurs de l’environnement ou par un tiers requis par eux. Les échantillons sont prélevés au moins en double exemplaire, placés sous scellés et remis à un laboratoire pour analyse.
− Sort à donner aux animaux, végétaux et autres biens saisis (art. L. 172-13 du CE, 99-1 et 41-5 du CPP)
Ces dispositions définissent les conditions de destruction, placement et remise dans le milieu naturel des animaux, végétaux et autres biens saisis. Les inspecteurs de l’environnement peuvent ainsi procéder à la destruction des animaux et végétaux morts ou non viables et, sur autorisation du procureur de la République, au placement de ceux qui sont viables dans un lieu de dépôt prévu à cet effet. Lorsque leur conservation n’est plus nécessaire à la manifestation de la vérité, ils peuvent procéder à la remise dans le milieu naturel des animaux non domestiques ou non apprivoisés et des végétaux non cultivés, à la destruction des animaux susceptibles d’occasionner des dégâts ou, le cas échéant, à l’application des dispositions de l’article 99-1 du CPP. Dans tous les autres cas, ils peuvent procéder à la destruction des biens saisis mentionnés au quatrième alinéa de l’article 41-5 du CPP.
− Consignation judiciaire (art. L.172-15 du CE)
La consignation, autorisée par le juge de la liberté et de la détention à la requête du procureur de la République, permet le placement sous-main de justice, pour une durée maximale de 15 jours (renouvelable), d’objets ou dispositifs suspectés d’être non conformes aux dispositions du code de l’environnement.
Ceux-ci sont laissés sous la garde de leur détenteur, le temps que des investigations complémentaires soient réalisées.
La tenue des agents
Les agents habilités à mener des opérations judiciaires ne portent pas de tenue ou de signes distinctifs s’ils relèvent des services de l’État (DDT-M, DD(ETS)PP, DREAL, DEAL, DRAAF). Ils doivent cependant être munis de leur carte de commissionnement. Les agents commissionnés et assermentés, affectés à l’Office français pour la biodiversité et dans les établissements publics des parcs nationaux sont tenus de porter un uniforme, la plaque émaillée ou l’écusson de leur établissement d’affectation ainsi que la plaque de police et les insignes de leur grade. Ces agents sont astreints au port d’armement fourni le cas échéant par leur établissement dans le cadre de l’exercice de leur mission de contrôle.
2.3.2 Les droits de la personne entendue dans le cadre des opérations judiciaires
Les agents peuvent recueillir, sur convocation ou sur place, les déclarations de toute personne susceptible d’apporter des éléments utiles à leurs constatations. Ces déclarations sont consignées dans un procès-verbal que les personnes entendues lisent et signent, après y avoir fait consigner leurs observations si elles le souhaitent (article L.172-8 du CE).
La personne soupçonnée d’avoir commis une infraction doit être entendue dans le cadre d’une audition libre (article L.172-8 du CE, deuxième alinéa). Elle bénéficie des droits prévus par l’article 61-1 du code de procédure pénale. Elle est ainsi informée de la qualification, de la date et du lieu présumés de l’infraction qu’elle est soupçonnée d’avoir commise ou tentée de commettre. En outre, elle est informée de ses droits de quitter à tout moment les locaux où elle est entendue, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire et d’être assistée d’un avocat (dans le cas où l’infraction est un délit puni d’une peine d’emprisonnement).
Le cas échéant, elle est informée du droit d’être assistée par un interprète.
La personne soupçonnée d’avoir commis une infraction bénéficie du principe de la présomption d’innocence, tant que sa culpabilité n'a pas été établie. À ce titre, l’agent doit réunir tous les éléments utiles à la manifestation de la vérité, que ceux-ci tendent vers la culpabilité ou l’innocence de personne contrôlée.
2.3.3 Le délit d’obstacle aux fonctions
Outre les qualifications de droit commun susceptibles le cas échéant d’être retenues (rébellion, outrage, violence, menace), l’article L. 173-4 du CE punit le fait de faire obstacle aux missions tant administratives que judiciaires des inspecteurs de l’environnement des peines de six mois d’emprisonnement et 15 000 euros d’amende.
L’article L. 172-8 du même code précise qu’est constitutif de cette infraction le fait, sans motif légitime, de ne pas déférer à la convocation à une audition libre.
Suites des opérations de police judiciaire
Les procès-verbaux sont adressés dans les cinq jours qui suivent leur clôture au procureur de la République. Une copie du procès-verbal est transmise, dans le même délai, à l'autorité administrative compétente. Sauf instruction contraire du procureur de la République, une copie du procès-verbal de constatation de l'infraction est également transmise au contrevenant, lorsqu'il est connu, dans un délai de cinq jours au moins et de dix jours au plus suivant la transmission du procès-verbal de constatation d'infraction au procureur de la République. Sur autorisation du procureur de la République, les nom et prénoms des personnes apparaissant dans les copies de ce procès-verbal, à l'exception de ceux du contrevenant, peuvent être cancellés lorsque ces mentions sont susceptibles de mettre en danger la vie ou l'intégrité physique de ces personnes ou celles de leurs proches (art. L172-16 du CE).
Le procureur de la République décide des suites données au procès-verbal, en fonction de la gravité des faits, de leurs circonstances de commission et de la personnalité de la personne mise en cause.
Depuis la loi du 23 mars 2019, les inspecteurs de l’environnement peuvent, à la demande du procureur de la République, procéder à la mise en œuvre d’alternatives aux poursuites (articles 28-3 et 41 -1 du CPP). Ils peuvent se voir confier la délivrance des convocations devant le délégué du procureur dans le cadre des alternatives aux poursuites (en vue d’une composition pénale, par exemple) et peuvent également remettre les convocations devant le tribunal dans le cadre des poursuites (comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité par exemple).
L’autorité préfectorale peut, tant que l’action publique n’a pas été mise en mouvement, transiger avec les personnes physiques et morales sur la poursuite des contraventions et délits prévus par le code de l’environnement, à l’exception des délits punis de plus de deux ans d’emprisonnement. La transaction comporte une amende (son montant ne peut excéder le tiers du montant de l’amende encourue) et, le cas échéant, des mesures de réparation ou de mise en conformité. Elle est homologuée par le procureur de la République (art. L. 173-12 du CE).
Annexe 2 – Glossaire
L’application de la stratégie nationale en matière de police de l’eau et de la nature (SNCPEN) repose sur l’intervention de différentes structures, services déconcentrés de l’État, établissements publics, collectivités territoriales, etc. A ce titre, il est apparu essentiel d’établir un vocabulaire commun afin de faciliter la communication entre ces équipes et pour favoriser la continuité de l’action de police, notamment l’articulation entre ses composantes administrative et judiciaire.
Principales références utilisées pour l’élaboration de ce glossaire :
- MTECT/DEB (2022) Guide méthodologique sur la Mise en œuvre des contrôles en police administrative et judiciaire de l’environnement dans les domaines de l’eau et de la nature ;
- OFB (2021) Instruction n° 2021-DG-04 du 27 août 2021 relative à l’exercice de la police administrative ;
- OFB (2020) Instruction n° 2020-DG-05 Instruction relative à l’exercice de la police judiciaire ;
- MEDDE/CGEDD-MJ/IGSJ-MI/IGA-MAAF/CGAAER (2015) Rapport CGEDD n° 008923-01, IGSJ n° 38/14, IGA n° 014121-13071-01, CGAAER n° 13106 Évaluation de la police de l’environnement ;
- MTES/CGEDD (2018) Rapport n° 012364-01 Exercice de la police de l’eau et de la nature dans les services déconcentrés et les opérateurs de l’État.
Sur la SNCPEN comme outil des politiques publiques de l’eau et de la nature :
○ Stratégie : Ensemble d'actions coordonnées en vue d'atteindre un but précis. Son but est d'atteindre le ou les objectifs fixés par la politique en utilisant au mieux les moyens à disposition. Elle se distingue de la tactique, en ce sens qu'elle concerne des objectifs à moyen ou à long terme. La stratégie se base typiquement sur un inventaire des actions existantes (d’où le besoin de rapportage), son analyse en lien avec les éventuels besoins de positionnement à préciser puis l’identification d’orientations (ex. priorités SNCPEN) à décliner de façon opérationnelle (ex. plans de contrôles « eau et nature » ou plans de contrôle de façade).
○ Indicateur : Un indicateur est un outil d'évaluation et d'aide à la décision, élaboré à partir d'un élément mesurable (indicateur quantitatif) ou appréciable (indicateur qualitatif) permettant de considérer l'évolution d'un processus ou d’une action par rapport à une référence. L’inventaire des contrôles prévu dans la SNCPEN distingue notamment des indicateurs de moyens et des indicateurs de résultat.
Les indicateurs de moyens rendent compte des actions réalisées pour assurer la bonne mise en œuvre de la police de l’eau et de la nature sans pour autant rendre compte des résultats obtenus pour la protection de l’environnement. Ces indicateurs mesurent la réalisation des objectifs de contrôles fixés en matière de police administrative (nombres de contrôles réalisés, suites réservées à ces contrôles, etc.) ou reflètent la mise en place des conditions nécessaires pour mener des actions de police administrative efficaces (pourcentage des départements disposant d’un plan de contrôle interservices eau et nature, pourcentage de départements dotés d’un protocole d’accord entre le préfet, le parquet et l’OFB, etc.).
Les indicateurs de résultat (sous-catégorie des indicateurs dits de performance) expriment la réalisation d’une action par rapport à un objectif fixé. Dans le cadre de la police de l’eau et de la nature, aucun indicateur de ce type n’a été défini à ce jour bien que de tels indicateurs existent pour la gestion de l’environnement (ex. état de l’environnement, par exemple la qualité d’une masse d’eau) dès lors qu’il parait difficile de quantifier les bénéfices des actions de contrôle et des actions judiciaires sur l’environnement.
Sur l’action de police ciblée par la SNCPEN :
○ Police de l’eau et de la nature : La police de l’eau et de la nature est un ensemble de mesures de polices administrative et judiciaire visant à garantir le respect de la réglementation en vigueur dans ces champs. Cette réglementation a pour objectif une gestion équilibrée et durable de la ressource et des milieux en vue d’atteindre les objectifs fixés dans le cadre de la mise en œuvre des directives européennes et les orientations nationales et notamment du bon état des eaux et du bon état de conservation de la biodiversité. Cet objectif dépasse les espaces ruraux, car il concerne également l’eau et la nature en ville. Aussi, la police de l’eau et de la nature porte sur l’ensemble des milieux et des territoires.
○ Police administrative : la police administrative intervient pour éviter (ou interdire) un possible trouble à l’ordre public et pour assurer la bonne mise en œuvre de la réglementation. Son action vise particulièrement à vérifier que les opérations soumises à un régime administratif respectent les prescriptions qui les encadrent. Les actions de police administrative dans les domaines de l’eau et de la nature s’inscrivent toujours dans la lettre de commande annuelle ou pluriannuelle de l’autorité administrative déclinant le ou les plans de contrôle thématiques définis à l’échelle locale, en adéquation avec la stratégie nationale de contrôle. La police administrative donne la possibilité à l’autorité administrative de mettre en œuvre un certain nombre de mesures dans le but d’obtenir un retour à une situation de normalité. Il s’agit donc d’une police préventive.
L’autorité compétente est celle qui est désignée par le code de l’environnement pour édicter la décision publique précisant les prescriptions applicables. Selon les cas, il peut s’agir du :
- Préfet de département (par exemple : autorisation ou déclaration au titre de la loi sur l’eau, dérogation au régime de protection d’espèces protégées) ;
- Directeur de l’établissement public (par exemple : autorisation de travaux dans un cœur de Parc National) ;
- Maire (par exemple : réglementation locale pour la publicité, déchets) ;
- Président du Conseil régional (par exemple : autorisation de travaux dans une réserve naturelle régionale).
Les agents chargés de réaliser des missions de police administrative sont missionnés par leur autorité hiérarchique ou fonctionnelle et n’ont pas besoin d’être commissionnés ni assermentés pour réaliser des missions de police administrative dans les domaines de l’eau ou de la nature.
○ Police judiciaire : la police judiciaire intervient pour réprimer un trouble à l’ordre public. Son action vise à constater les infractions à la loi pénale, en rassembler les preuves et en rechercher les auteurs.
L’action de police judiciaire démarre quand un agent chargé de missions de police judiciaire recherche ou constate une infraction, ou est saisi dans le respect des règles procédurales et s’achève, pour ce qui concerne cet agent, à l’accomplissement des instructions qui lui auront été données et à la transmission du procès-verbal et des pièces attenantes au procureur de la République. Les infractions au code de l’environnement et aux textes pris pour son application sont recherchées et constatées, sous l’autorité du procureur de la République par :
- les officiers de police judiciaire, les agents de police judiciaire et adjoints intervenant dans le cadre du code de procédure pénale ;
- les fonctionnaires et agents spécialement habilités par la loi, dans les conditions et limites définies par elle et, lorsqu’elle l’a prévu, commissionnés par l’autorité administrative et assermentés.
○ Suite administrative : cette expression se réfère à l’action corrective engagée par l’autorité administrative et ses représentants en cas de non-conformité mise en évidence suite à un contrôle. Elle débute obligatoirement par la notification de la non-conformité à l’entité contrôlée, accompagnée d’un rapport de manquement administratif.
○ Suite judiciaire : cette expression se réfère à la réponse pénale donnée par le procureur de la République au terme de la procédure d’enquête judiciaire menée sous son autorité. Le procureur de la République, au regard de la gravité des faits, de leurs circonstances de commission, de la personnalité du mis en cause, et des axes de politique pénale définis, décide s’il est opportun d’engager les poursuites (renvoi devant le tribunal ou saisine du juge d’instruction notamment), de mettre en œuvre une procédure alternative aux poursuites, ou de classer sans suite la procédure.
○ Agent de contrôle : désigne un agent missionné par l’autorité administrative afin d’apporter son concours à l’exercice de la police administrative.
○ Inspecteur de l’environnement : Les inspecteurs de l’environnement sont des agents de l’État ou de ses établissements publics, qui, indépendamment de leurs corps d’appartenance, sont commissionnés par l’autorité administrative et assermentés par l’autorité judiciaire pour exercer certaines missions de police judiciaire dont les champs de compétence sont définis par l'article L. 172-1 du code de l'environnement. Cette appellation est donc strictement liée à l’exercice de la police judiciaire et inclut à la fois les inspecteurs de l’environnement de la spécialité « eau et nature » et ceux de la spécialité « installations classées pour la protection de l’environnement ».
○ Infraction : Ce terme se réfère à un comportement interdit par la loi pénale et sanctionné par une peine prévue par celle-ci. On distingue trois catégories d’infractions, dont la nature détermine la sanction qui lui est applicable : la contravention, le délit et le crime.
o Conformité : état d’une installation, d’un ouvrage, de travaux ou d’une activité qui respecte la réglementation générale ou particulière (régime d’autorisation, déclaration) qui s’applique à elle.
○ Suites : Il s’agit de mesures de police ou des sanctions qui peuvent être de nature administrative ou judiciaire. Les contrôles révélant la non-conformité à des prescriptions techniques doivent obligatoirement déboucher sur des suites administratives, voire sur des suites judiciaires en cas d’infraction pénale constatée par un agent doté de compétences judiciaires, tel un inspecteur de l’environnement. Les suites administratives (mesures de police ou sanctions administratives) sont à l’initiative de l’autorité administrative, tandis que les suites judiciaires (poursuites judiciaires, alternatives aux poursuites ou classement sans suite) sont décidées par le procureur de la République.