(BO MTES - MCTRCT du 27 décembre 2022)
NOR : TREL2235200A
Vus
Le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires,
Vu la directive 92/43/CEE du Conseil du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages ;
Vu le code de l’environnement et notamment ses articles L. 411-1 et suivants, R. 411-1 à R. 411-14, et R. 411-31 à R. 411-36 ;
Vu le décret n° 2018-786 du 12 septembre 2018 relatif à certaines attributions du préfet coordonnateur du plan national d'actions sur le loup ;
Vu le décret du 24 octobre 2018 portant nomination du préfet de la région Occitanie, préfet de la Haute-Garonne (hors classe) - M. GUYOT (Etienne) ;
Vu le décret du 26 septembre 2022 portant nomination du préfet de la région Bourgogne- Franche-Comté, préfet de la Côte-d'Or (hors classe) - M. ROBINE (Franck) ;
Vu l’arrêté du 11 septembre 1992 relatif aux règles générales de fonctionnement et aux caractéristiques des installations des établissements qui pratiquent des soins sur les animaux de la faune sauvage ;
Vu l’arrêté du 9 juillet 1999 modifié fixant la liste des espèces de vertébrés protégées menacées d’extinction en France et dont l’aire de répartition excède le territoire d’un département ;
Vu l’arrêté du 19 février 2007 modifié fixant les conditions de demande et d'instruction des dérogations définies au 4° de l'article L. 411-2 du code de l'environnement portant sur des espèces de faune et de flore sauvages protégées ;
Vu l’arrêté du 23 avril 2007 modifié fixant la liste des mammifères terrestres protégés sur l’ensemble du territoire et les modalités de leur protection ;
Vu l’arrêté du 9 avril 2010 modifié interdisant sur le territoire métropolitain l’introduction dans le milieu naturel de spécimens vivants de certaines espèces d’animaux vertébrés protégées en application des articles L. 411-1 et L. 411-2 du code de l’environnement ;
Vu l’arrêté du 11 juillet 2019 portant dérogation à la protection stricte des espèces (délivré à l’OFB dans le cadre du réseau de surveillance SAGIR) ;
Vu la demande de dérogation aux interdictions de capture, transport, détention de spécimens d’Ours brun et de Lynx boréal sauvages en difficulté ou de spécimens captifs échappés de leur enclos en appui au détenteur, et de transport en vue du relâcher des spécimens sauvages ayant bénéficié de soins, ainsi que la demande d’autorisation d’introduction dans le milieu naturel de spécimens de loups, d’ours et de lynx, ayant fait l’objet de soins après leur capture dans le milieu naturel, du 15 avril 2022, déposées par l’OFB auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires ;
Vu le Plan d’actions Ours brun 2018-2028 ;
Vu le Plan national d’actions 2018-2023 sur le loup et les activités d’élevage ;
Vu le Plan national d’actions en faveur du lynx boréal (Lynx lynx) 2022-2026 ;
Vu l’avis du Conseil national de la protection de la nature du 5 juillet 2022 ;
Vu les observations formulées lors de la consultation du public réalisée du 9 au 23 octobre 2022, en application de l’article L. 123-19-2 du code de l’environnement,
Considérants
Considérant que les opérations prévues dans le présent arrêté délivré à l’OFB s’inscrivent dans un intérêt de protection et de conservation des espèces lynx boréal (Lynx lynx) ours brun (Ursus arctos) et loup gris (Canis lupus), participent à la restauration et au maintien de celles-ci dans un état de conservation favorable et ont vocation à intervenir, en dernier ressort, pour les spécimens sauvages en difficulté dont la survie est supposée menacée du fait de leur incapacité à se déplacer sur de longues distances ou de leur incapacité momentanée à pourvoir à leur survie dans le milieu naturel ; que, de ce fait, il n’existe pas de solution alternative satisfaisante ;
Considérant que sont mises en œuvre sur l’ensemble des aires de répartition respectives du loup, de l’ours et du lynx, actuellement observées sur le territoire national, différentes mesures propres à garantir la conservation et la protection de ces espèces, la sécurité publique et des biens ainsi que la protection des intérêts agricoles et qu’un suivi individuel de chaque spécimen relâché de ces trois espèces sera réalisé ;
Considérant, d’une part, que l’OFB est missionné par le ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires pour effectuer le suivi des espèces protégées et, parmi elles, les grands prédateurs que sont le lynx boréal, le loup gris et l’ours brun, qui concentrent des enjeux de conservation et sociétaux de par leur interaction forte avec les activités humaines et que, d’autre part, pour répondre aux besoins liés à ces thématiques, l’OFB déploie des moyens sur l’ensemble du territoire, que ce soit au niveau national, régional ou départemental ;
Considérant que chacune des 3 espèces est concernée par un Plan national d’actions (PNA) ou par un Plan d’actions (PA), auxquels l’OFB contribue en portant certaines actions et en animant des réseaux de partenaires spécifiques à ces espèces ;
Considérant, d’une part, que l’OFB est amené à porter secours à des individus sauvages de ces espèces signalées en difficulté dans le milieu naturel et que, d’autre part, au vu de son statut d’établissement public et de son expérience en matière d’intervention sur les grands prédateurs terrestres, l’OFB peut également être sollicité par l’État pour intervenir en appui aux détenteurs d’individus captifs échappés d’établissements habilités à détenir des spécimens de ces espèces :
Considérant que la dérogation ne nuit pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces Lynx boréal et Ours brun dans leur aire de répartition naturelle respective ;
Considérant que des travaux sont réalisés dans le cadre des plans d’actions précités, dont la mise en place d’un groupe de travail ayant pour mission de faire des propositions en matière, notamment, d’épidémiosurveillance des lynx vivants, de gestion du risque sanitaire et de gestion des lynx en détresse, dont les résultats pourront motiver, à court ou moyen terme, l’évolution des prescriptions du présent arrêté,
Arrête :
Article 1er : Identité du bénéficiaire
Le bénéficiaire du présent arrêté est l’Office français de la biodiversité (OFB), représenté par son Directeur général et dont le siège se situe 12, cours Lumière, 94300 Vincennes. Le bénéficiaire est désigné ci-après « l’OFB ».
Article 2 : Nature des opérations autorisées
L’OFB est autorisé à procéder :
1. à la capture, sur le territoire métropolitain,
a. de spécimens de lynx de moins de 10 mois considérés en difficulté conformément aux critères définis à l’article 3.1.2.1 du présent arrêté,
b. de spécimens de lynx de tous âges en difficulté temporaire dès lors que les critères définis à l’article 3.1.2 du présent arrêté sont remplis,
c. de spécimens de jeunes ours considérés en difficulté conformément aux critères définis à l’article 3.1.2 du présent arrêté,
d. de spécimens d’ours de tous âges en difficulté temporaire dès lors que les critères définis à l’article 3.1.2 du présent arrêté sont remplis,
e. en appui au détenteur, et à la demande des services de l’Etat, de spécimens de lynx boréal (Lynx lynx) et d’ours brun (Ursus arctos) maintenus en captivité permanente dans des établissements habilités à les détenir et qui se sont échappés.
2. au transport, si nécessaire, sur le territoire métropolitain :
a. des spécimens de lynx et d’ours mentionnés aux a, b, c et d du 1, depuis le lieu de capture jusqu’au Centre de soins adapté en vue d’apporter les soins nécessaires à leur réinsertion ultérieure dans le milieu naturel. En cas de nécessité, depuis le lieu de capture jusqu’à un établissement de soins vétérinaires pour la réalisation des soins urgents et stabilisation de l’animal avant transfert vers le Centre de soins adapté,
b. de ces mêmes spécimens, depuis le Centre de soins choisi jusqu’au site de relâcher retenu,
c. des spécimens de lynx et d’ours mentionnés au e du 1, depuis le lieu de capture jusqu’à l’établissement duquel ils se sont échappés ou jusqu’à un autre établissement autorisé.
3. à l’introduction dans le milieu naturel des spécimens de lynx, d’ours et de loups ayant fait l’objet de soins après leur capture dans le milieu naturel et pour lesquels la décision de relâcher a été prise et un site adapté retenu, conformément aux dispositions prévues à l’article 4.2 du présent arrêté.
L’ensemble de ces opérations est effectué conformément aux modalités énoncées dans le dossier de demande de l’OFB ainsi qu’aux prescriptions complémentaires fixées par le présent arrêté et ses annexes (ces prescriptions complémentaires prévalent en cas de contradiction).
Dans le cas d’animaux moribonds, conformément aux dispositions des articles 2 et 3 de l’arrêté du 11 juillet 2019 susvisé, l’OFB peut procéder à leur euthanasie sur place avec l’appui d’un vétérinaire si nécessaire, avant leur transmission pour autopsie au réseau SAGIR. Les spécimens retrouvés morts sont également pris en charge par l’OFB au titre des articles 2 et 3 de l’arrêté du 11 juillet 2019 précité.
Les dispositions du présent arrêté s’appliquent sans préjudice du respect par l’OFB :
- de la réglementation relative à l’expérimentation animale et des prescriptions réglementaires en vigueur relatives aux actes vétérinaires et à l’exercice de la médecine vétérinaire sur le territoire national ;
- des obligations découlant de la Convention de Washington du 3 mars 1973 et du Règlement (CE) n°865/2006 de la Commission du 4 mai 2006 modifié, portant modalités d’application du Règlement (CE) n°338/97 du Conseil du 9 décembre 1996 relatif à la protection des espèces de faune et de flore sauvages par le contrôle de leur commerce.
Article 3 : Modalités de capture et de transport
3-1 : spécimens d’ours et de lynx en difficulté
La non intervention est la règle et l’intervention demeure l’exception, en respectant le cas échéant un principe de proportionnalité. Les moyens déployés raisonnablement sont adaptés à chaque cas. Il n’y aura pas d’acharnement ni pour la tentative de capture, ni dans les soins prodigués.
3-1.1 : information des services de l’Etat
Les services de l’État (DEB/Direction de l’eau et de la biodiversité du ministère en charge de la protection de la nature, Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement – DREAL -, Direction départementale des territoires - DDT - et préfets, territorialement compétents, la DREAL et le préfet coordonnateurs concernés par le spécimen de l’espèce considérée) sont informés sans délai de la décision de capture d’un individu par le directeur général de l’OFB ou son délégué. Il en va de même pour chaque étape, de la décision de capture aux opérations de relâcher des spécimens.
3-1.2 : critères et validation de la capture
Un animal en difficulté est un animal dont la survie est supposée menacée du fait de son incapacité à se déplacer ou fuir sur de longues distances ou de son incapacité momentanée à pourvoir à sa survie dans le milieu naturel (article premier de l’arrêté du 11 septembre 1992 relatif aux règles générales de fonctionnement et aux caractéristiques des installations des établissements qui pratiquent des soins sur les animaux de la faune sauvage). Il peut s’agir d’un jeune ours ou lynx non émancipé, isolé et non autonome ou d’un individu ours ou lynx blessé, entravé dans ses déplacements ou atteint d’une pathologie incapacitante.
Au regard de la spécificité de la biologie de l'espèce lynx – cycle de reproduction et période de dispersion – la qualification de l’état d’un jeune spécimen dit « en difficulté » repose sur des critères plus précis que pour l’ours.
3.1.2.1 Pour les jeunes lynx de moins de 10 mois en difficulté :
Les huit critères permettant de qualifier les jeunes lynx en difficulté sont les suivants :
1. observation diurne ou nocturne d'un (ou plusieurs) jeune(s) isolé(s) sur le même site durant 48 h ;
2. absence durable de spécimen adulte à proximité (au moins 48 h) ;
3. animal visiblement amaigri (côtes saillantes, pointes des hanches et des fesses saillantes) ;
4. proximité des habitations ou des exploitations agricoles ;
5. recherche de nourriture de type aliments pour chiens ou chats ;
6. tentative de capture de petits animaux domestiques (lapins, chats) ;
7. distance de fuite réduite : l’animal se laisse approcher à moins de 5 mètres avant de fuir en dernier recours ;
8. animal prostré, apathique, désorienté ou présentant des troubles cliniques sévères.
Ils sont regroupés en trois familles :
1° la première (critères 1 et 2) est relative à l’observation de l’animal en tant que sujet « vu seul » ;
2° la deuxième (critères 3 à 6) concerne un état de dénutrition et les changements de comportements qui en découlent (amaigrissement, recherche d’alimentation à proximité des habitations humaines) ;
3° la troisième (critères 7 et 8) concerne les conséquences de l’état d’amaigrissement et d’épuisement physique (animal qui hésite à mobiliser le peu de réserves lui restant pour fuir avant qu’une distance très courte le sépare de l’observateur ou animal restant prostré).
Afin de parvenir à une approche équilibrée des risques, d’une part celui d’intervenir trop vite et de capturer un sujet jugé à tort en difficulté, d’autre part celui de ne pas intervenir assez vite et de mettre en danger de mort un animal déjà dénutri, la qualification de l’état de difficulté se fait sur la base de l’observation d’au moins deux critères appartenant à au moins deux familles.
3-1.3: période autorisée
Les spécimens d’ours de tous âges et les spécimens de lynx en difficulté ayant dépassé l’âge de dix mois peuvent être pris en charge tout au long de l’année.
Compte tenu de la biologie de l’espèce du lynx boréal mentionnée au 3.1.2.1 du présent arrêté, les captures ne peuvent avoir lieu qu’entre le 1er juillet et le 1er mars pour les jeunes lynx de moins de dix mois en difficulté.
3-1.4 : opération technique de capture
L’OFB informe sans délai les services de l’Etat, conformément aux dispositions de l’article 3.1.1 du présent arrêté.
Les modalités de capture sont adaptées aux cas rencontrés. Toute méthode de capture mécanique non blessante et chimique peut être envisagée. Selon l’espèce, une capture manuelle peut être envisagée sur des juvéniles ou des animaux très affaiblis. Des animaux blessés mais vigoureux et faciles à approcher peuvent être capturés à l’aide d’un lanceur hypodermique pour les anesthésier.
Des méthodes de piégeage diverses peuvent être utilisées selon les cas rencontrés : piège au sol de type piège à mâchoires non blessant et piège à lacet, piège de type nasse, cage-piège, etc. Les dispositifs sont visités a minima une fois par jour au regard des circonstances locales, l’objectif étant de pouvoir intervenir le plus rapidement possible en cas de capture d’un animal. Des dispositifs électroniques de surveillance sont par ailleurs déployés pour faciliter le suivi des dispositifs de capture.
3-1.5 : évaluation du spécimen
L’OFB procède à l’évaluation du spécimen et sollicite, si nécessaire, un appui vétérinaire pour l’évaluation de l’état de santé, la capture et la sédation des spécimens, ainsi que pour les soins éventuellement prodigués sur place. La Préfecture et la DDT(M), voire la Direction départementale de la protection des populations (DDPP) ou la Direction départementale de l’emploi, du travail, des solidarités et de la protection des populations (DDETSPP), territorialement compétentes sont contactées selon les situations rencontrées. En parallèle, la ou les DREAL concernées et éventuellement la DREAL coordinatrice, ainsi que les préfets Bourgogne Franche-Comté et Occitanie, préfets coordonnateurs, sont informés sans délai.
En fonction de l'état de santé de l'animal, le spécimen capturé peut être :
1. soit relâché immédiatement après les soins apportés sur place sur le lieu même de capture ; l’animal ne sera ni transporté, ni détenu ;
2. soit transporté vers un centre de soins adapté ou un cabinet vétérinaire pour stabilisation avant transfert au centre de soins.
Dans le cas mentionné au point 2 ci-dessus, à la suite des soins nécessaires qui lui sont apportés, l’introduction et le relâcher de cet animal dans le milieu naturel ne peuvent avoir lieu que dans le respect des principes établis à l’article 4 du présent arrêté.
3-1.6 : transport vers un cabinet vétérinaire ou vers un centre de soins adapté
Si l’état de l’animal nécessite qu’il soit soigné dans un cabinet vétérinaire ou un centre de soins adapté, il est transporté vers un de ces lieux dans des conditions adaptées à sa sécurité et à celle des personnes en charge du transport (agents, soigneurs, vétérinaires…).
L’animal est transporté dans des conditions adaptées à son bien-être (dimensions et type de la cage adaptés) et à la réduction de tout stress additionnel (limitation du nombre de personnes présentes, limitation du temps de trajet au strict nécessaire, isolation visuelle de l’animal, etc.).
3-2 : spécimens d’ours et de lynx échappés
Un animal échappé est, dans le cas de la présente dérogation, un spécimen de lynx boréal (Lynx lynx) ou un spécimen d’ours brun (Ursus arctos) qui est maintenu en captivité permanente dans un établissement autorisé à le détenir et qui s’est échappé.
3-2.1 : décision de capture
L’OFB intervient sur ce type de missions à la demande de l’État et en appui aux propriétaires des animaux qui ne peuvent, par leurs seuls moyens, parvenir à maîtriser la situation. L’ensemble des frais engagés reste à la charge du détenteur.
3-2.2 : opération technique de capture
Les conditions définies au 3.1.4 du présent arrêté sont appliquées.
La DDPP ou DDETSPP dont le territoire de compétence englobe l’établissement duquel le ou les spécimens se sont échappés, veille, avec le concours éventuel de l’OFB, à ce que les causes à l’origine de la fuite soient identifiées et que les carences et insuffisances soient résolues afin que les animaux ne puissent s’échapper de nouveau.
3-2.3 : opération de transport
Les conditions définies au 3.1.6 du présent arrêté sont appliquées pour le transport du spécimen vers l’établissement duquel l’animal s’est échappé ou vers un autre établissement autorisé.
3-3 : compte-rendu de capture et de transport
Chaque opération de sauvetage d’un spécimen ou de capture d’un spécimen échappé fait l’objet d’un compte-rendu détaillé avec noms des participants, date, photographies ou vidéo, description de l’état de détresse de l’animal avec bilan vétérinaire le cas échéant, explications techniques de la capture, description précise des soins apportés et du transport vers le centre de soins ou l’établissement duquel l’animal s’est échappé ou vers un autre établissement autorisé, ou du relâcher sur place pour les animaux en difficulté et incluant les éléments mentionnés à l’annexe 1 du présent arrêté. Il est transmis par l’OFB à la DEB dans les 15 jours qui suivent chaque opération de sauvetage ou de capture d’un animal échappé.
Un compte-rendu du transport pour les animaux échappés, et du transport et du relâcher pour les animaux en difficulté, clôturent le dossier si telle est l’issue de l’opération de sauvetage.
Article 4 : Modalités d’introduction et de relâcher dans le milieu naturel
En raison de la diversité des espèces et des cas qui peuvent être traités, la durée de séjour du spécimen en centre de soins est fonction de l’évolution de son état de santé et s’étend jusqu’à son rétablissement. L’équipe de soigneurs, le(s) vétérinaire(s) et les biologistes de l’espèce, évaluent le terme envisagé de la captivité.
4-1. : Période d’introduction et de relâcher dans le milieu naturel
L’introduction ou le relâcher dans le milieu naturel est réalisé :
- au plus tôt pour les spécimens mentionnés aux b, c et d du 1 de l’article 2 du présent arrêté.
- l’année suivant la capture pour les spécimens de lynx âgés de moins de 10 mois mentionnés à l’article 2-1-a du présent arrêté une fois qu’ils sont aptes à subvenir à leurs propres besoins alimentaires et au plus tard le 15 mai.
4-2. : Choix et validation du site
La proximité du lieu de capture est privilégiée. Pour les trois espèces, le choix du site est également dicté par des critères socio-écologiques favorables tels qu’un milieu écologique correspondant aux besoins de l’espèce et favorisant la conservation de ses populations, ou encore un milieu qui réduit les interactions potentielles avec les activités humaines. Sont ainsi pris en considération les risques de dommages aux exploitations agricoles. Sont aussi pris en considération les risques pour l’animal (risques de collisions routières et ferroviaires). Les espaces permettant de restreindre les interactions avec les activités humaines sont privilégiés, de sorte à éviter de prolonger le risque d’une imprégnation à l’Homme au-delà de la période de captivité de l’animal. Ces critères sont détaillés pour chacune des trois espèces dans le tableau ci- dessous.
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Enjeux de conservation
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Facteurs écologiques
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Interaction avec les activités humaines
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Risques d’imprégnation
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Risques pour l’animal
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Interactions intraspécifiques
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Ours
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Privilégier les échanges entre noyaux de population
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Identification préalable de biotopes favorables
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Identification de secteurs avec une faible activité de pastoralisme ovin ou caprin, exclusion des secteurs à foyers de dommages
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Identification de secteurs éloignés des activités humaines (habitations et secteurs touristiques)
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Privilégier les zones éloignées des infrastructures terrestres de transport
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Éviter les secteurs à forte densité (notamment en cas de relâcher de juvéniles vis-à-vis des mâles adultes)
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Loup
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Privilégier l’aire de présence permanente de la population
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Identification préalable de milieux offrant une forte densité d’ongulés sauvages
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Identification de secteurs avec une faible activité de pastoralisme ovin ou caprin, exclusion des secteurs à foyers de dommages
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Identification de secteurs éloignés des activités humaines (habitations et secteurs touristiques)
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Privilégier les zones éloignées des infrastructures terrestres de transport
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Éviter les territoires de meutes
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Lynx
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En fonction des cas, et lorsque cela est possible dans la zone de capture, privilégier la périphérie de la zone de présence régulière de l’espèce
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Identification préalable de biotopes favorables présentant de fortes densités de chevreuils
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Exclusion des secteurs à foyers de dommages
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Identification de secteurs éloignés des activités humaines (habitations et secteurs touristiques)
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Privilégier les zones éloignées des infrastructures terrestres de transport
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Sans objet
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Parmi les sites favorables, la priorité est donnée aux propriétés de l’État telles que les territoires domaniaux, puis aux terrains communaux pour lesquels le maire est favorable au relâcher, et enfin aux propriétés privées après accord du propriétaire. Le relâcher concerne toutes les périodes de l’année, en fonction de l’état de santé de l’animal et des opportunités.
L’OFB, en concertation avec la DDT(M) territorialement compétente, et éventuellement le centre d’accueil, identifie un ou plusieurs sites possibles de relâcher et convient d’une période ou d’une date. Le bénéficiaire recueille ensuite l’avis de la DREAL concernée, ainsi que celui de la DREAL coordinatrice, avant de soumettre pour validation le projet de relâcher, accompagné de ces avis, à la DEB.
4-3 : Information des services
Après validation officielle du site d’introduction dans le milieu naturel, le préfet (DDT) territorialement compétent informe le maire de la commune.
Afin de garantir la sécurité sur le site et le bon déroulement des opérations, le préfet (DDT) territorialement compétent informe le maire de la commune du site d’introduction dans le milieu naturel ainsi que la brigade territoriale autonome de la gendarmerie nationale territorialement compétente.
4-4 : Equipement des animaux avant l’introduction ou le relâcher dans le milieu naturel
Tous les spécimens capturés sont équipés d’un transpondeur permettant de les identifier individuellement
Tout animal relâché est systématiquement équipé d’un système de géolocalisation amovible. Un suivi attentif des animaux relâchés pour lesquels des incertitudes existent sur leurs aptitudes à vivre de façon autonome en milieu naturel est réalisé. L’OFB peut assurer le suivi des animaux ainsi relâchés. Ce dispositif permet éventuellement la réversibilité de l’action (recapture d’un animal qui ne parvient pas à se réadapter à son environnement) en cas de besoin.
4-5 : Modalités d’introduction ou de relâcher du spécimen dans le milieu naturel
Afin de garantir la quiétude de l'opération et son bon déroulé, outre les représentants de la gendarmerie nationale éventuellement présents pour sécuriser l’opération, 15 personnes au maximum peuvent être présentes lors du relâcher, dont au moins :
- 1 à 2 représentants des services de l’État;
- 1 vétérinaire mandaté par l’OFB,
- dans le cas d’un relâcher ou d’une introduction du spécimen sur un terrain privé : 1 personne (maximum) représentant le propriétaire du terrain.
4-6 : Communication
Sous réserve que le spécimen ait parcouru une distance suffisante au regard du site de relâcher ou d’introduction dans le milieu naturel, et une semaine au plus tard après la date d’introduction ou de relâcher dans le milieu naturel, un communiqué de presse préparé en liaison avec l’OFB est diffusé par les services de l’État.
En vue d’assurer la quiétude du spécimen relâché ou introduit dans le milieu naturel, le communiqué de presse ne mentionne que le canton du lieu de relâcher.
L’OFB communique sur l’opération de manière simultanée au communiqué de presse susmentionné.
4-7 : Suivi des introductions ou relâchers dans le milieu naturel
Afin de s’assurer de la bonne adaptation du spécimen introduit ou relâcher dans le milieu naturel, de son émancipation ou de son comportement reproducteur, les données de suivi des spécimens équipés sont transmises chaque semaine pendant le premier mois suivant la remise de l’animal dans le milieu naturel, puis à la fin de chaque mois, à la DDT et à la DREAL territorialement compétentes au regard du site de relâcher ou d’introduction.
Au regard notamment de l’analyse de ces données, si les éléments de suivi mettent en évidence des difficultés d’adaptation du spécimen dans le milieu naturel, au terme d’une évaluation réalisée par l’OFB, une décision de recapture peut être prise. Dans ce cas, l’information prévue à l’article 3-1-1 du présent arrêté est mise en œuvre.
Article 5 : Comptes rendus d’activités et rapport final
Au plus tard le 30 octobre de l’année n, l’OFB communique à la DEB et, respectivement, pour le loup, l’ours et le lynx, aux DREAL Auvergne-Rhône-Alpes, Occitanie et Bourgogne-Franche- Comté, un bilan annuel couvrant la période allant du 1er août de l’année n-1 au 31 juillet de l’année n et incluant :
- l’ensemble des comptes rendus prévus à l’article 3.3 du présent arrêté ;
- un rapport de suivi de chaque individu relâché ou introduit dans le milieu naturel au cours de la période considérée;
- les données brutes collectées par le système de géolocalisation amovible de tous les spécimens suivis au cours de la période considérée sous un format numérique compatible avec leur exploitation par un système d’information géographie.
Les DREAL Auvergne-Rhône-Alpes, Occitanie et Bourgogne-Franche-Comté communiquent ces rapports annuels et données aux DREAL territorialement compétentes au regard des sites de capture, de relâcher ou d’introduction dans le milieu naturel, utilisés au cours de la période considérée.
Le bilan des opérations réalisées par l’OFB s’inscrivant dans le cadre de l’application du présent arrêté au cours de l’année n est présenté lors de la première réunion de l’année n+1 du comité départemental « grands prédateurs » concerné.
Au terme mentionné à l’article 6 du présent arrêté, l’OFB établit un rapport de synthèse relatif à sa mise en œuvre. Ce rapport est adressé à la DEB et respectivement, pour le loup, l’ours et le lynx, aux DREAL Auvergne-Rhône-Alpes, Occitanie et Bourgogne-Franche-Comté, au plus tard le 31 décembre 2027.
Article 6 : Durée de validité du présent arrêté
Le présent arrêté est valable pour une durée de 5 ans à compter de sa date de signature.
En cas de demande de renouvellement, celle-ci est formulée auprès des services compétents au moins huit mois avant l’échéance du présent arrêté.
En tant que de besoin, l’autorité administrative peut prescrire toute modification des dispositions du présent arrêté pour tenir compte des évolutions dans les circonstances de faits portées à sa connaissance notamment par le groupe de travail sur le lynx en matière d’épidémiosurveillance des lynx vivants, de gestion du risque sanitaire et de gestion des lynx en détresse.
L’OFB qui, d’une part, contribue aux PNA et PA de chacune des 3 espèces en portant certaines actions et en animant des réseaux de partenaires spécifiques à ces espèces et qui, d’autre part, est amené à porter secours à des individus sauvages de ces espèces signalés en difficulté dans le milieu naturel, ou qui œuvre en appui aux détenteurs d’individus captifs échappés pour capturer ces spécimens, peut proposer les évolutions nécessaires au présent arrêté afin d’améliorer les opérations de sauvetage, ou de capture des spécimens échappés, de lynx et d’ours, et des opérations de relâcher et d’introduction dans le milieu naturel de spécimen de lynx, d’ours et de loups, en difficulté capturés pour bénéficier de soins.
Article 7 : Mesures de contrôle
La mise en œuvre des dispositions du présent arrêté peut faire l’objet de contrôles par les agents chargés de constater les infractions mentionnées à l’article L. 415-3 du code de l’environnement.
Article 8 : Sanctions
Le non-respect des dispositions du présent arrêté est puni des sanctions définies à l’article L. 415-3 du code de l’environnement.
Article 9 : Droits de recours et informations des tiers
Les droits des tiers sont et demeurent expressément réservés.
La présente décision peut faire l’objet d’un recours dans les deux mois qui suivent sa publication ou sa notification :
- par la voie d’un recours administratif. L’absence de réponse dans le délai de deux mois fait naître une décision implicite de rejet, qui peut elle-même faire l’objet d’un recours devant le tribunal administratif compétent,
- par la voie d’un recours contentieux devant le tribunal administratif compétent, qui peut s’exercer par l'application informatique « télérecours citoyens » accessible via le site internet www.telerecours.fr.
Article 10 : Exécution
Le présent arrêté est notifié à l’OFB. Le Directeur de l’eau et de la biodiversité est chargé de l’application du présent arrêté, qui sera publié au Bulletin officiel du ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires et au recueil des actes administratifs de la préfecture de chaque département concerné.
Fait le 14 décembre 2022
Pour le ministre et par délégation :
Le directeur-adjoint auprès du directeur de l’eau et de la biodiversité,
Pierre-Edouard GUILLAIN
Annexe 1 : Informations devant figurer dans un compte-rendu de capture
- Rappel des observations préalables et faits ayant déterminé une décision de capture d’un animal en difficulté et des faits ayant déterminé la demande de capture par l’Etat d’un animal captif échappé
- Décision de capture : processus de décision
- Dérogation de capture et transport : dates de demande et d’autorisation, prescriptions
- Dispositions adoptées pour la capture : mode de piégeage, déroulement des opérations (organismes et personnes présents, date, horaire, actions conduites, précautions, difficultés…), information (maire, agriculteurs, habitants…)
- Décision de relâcher ou de transport vers un vétérinaire ou un centre de soins: processus de décision,
- Transport vers le centre de soins : mode de transport, type de cage, précautions prises, numéro d’immatriculation du véhicule, transporteur pour un véhicule n’appartenant pas à l’OFB
- Évaluation physiologique et sanitaire après capture : personne l’ayant réalisée et constat (mensurations, état sanitaire, comportement…)
- Examens vétérinaires et soins : nom du vétérinaire, examens effectués dont les évaluations cardiaque et oculaire, observations (parasites externes, pathogènes, maladies, traitements administrés, nom des principes actifs et des médicaments, posologie), périodicité des contrôles
- Images des flancs droit et gauche (perpendiculaire et membres tendus) pour un lynx,
- Prélèvements biologiques pour identification génétique
- Numéro de la puce pour les animaux qui en seront équipés et nom éventuellement donné à l’animal capturé