(Texte non paru au Journal officiel)


Le directeur de la prévention des pollutions et des risques ; le directeur de l’eau à Mesdames et Messieurs les préfets de région ; Monsieur le préfet de police de Paris ; Madame et Messieurs les préfets de département ; Madame et Messieurs les directeurs régionaux de l’industrie, de la recherche et de l’environnement ; Messieurs les directeurs des agences de l’eau ; Mesdames et Messieurs les directeurs régionaux de l’environnement.

L’objet de la présente circulaire est, d’une part, de mettre en place dans chaque région une action de recherche des rejets dans l’eau par les installations classées de substances polluantes, notamment les substances prioritaires de la directive 2000/60/CE du 23 octobre 2000 établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l’eau et les substances classées dangereuses pour l’environnement, et, d’autre part, de prendre, le cas échéant, les dispositions nécessaires pour faire réduire ces rejets.

1. Cadre général de l’action

L’adoption récente de la directive 2000/60/CE du 23 octobre 2000 établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l’eau (JOCE du 22 décembre 2000) rappelle et renforce les orientations communautaires relatives au bon état des écosystèmes aquatiques.

En particulier, l’article 16 de cette directive vise à renforcer la protection de l’environnement aquatique par des mesures spécifiques conçues pour réduire progressivement les rejets, émissions et pertes de substances prioritaires, et l’arrêt ou la suppression progressive (sur au plus vingt ans) des rejets, émissions et pertes de substances dangereuses prioritaires. Il définit la procédure à suivre pour établir les listes de substances prioritaires et de substances dangereuses prioritaires. Cette procédure a abouti à la décision du 7 juin 2001 du Parlement européen et du Conseil établissant la liste des substances prioritaires dans le domaine de l’eau (liste de 33 substances, cf. annexe I). Par ailleurs, l’article 5 de cette directive prévoit d’étudier par district hydrogéographique les incidences de l’activité humaine sur l’état des eaux de surface.

Cette directive remplace et abroge à terme la directive 76/464/CEE du 4 mai 1976 concernant la pollution causée par certaines substances dangereuses déversées dans le milieu aquatique de la Communauté d’éliminer les pollutions causées par certaines substances toxiques, persistantes et bioaccumulables, en leur appliquant des valeurs limites compatibles avec les objectifs de qualité des milieux récepteurs. La liste I de cette directive qui définissait les substances concernées (liste de 132 substances) est remplacée par la liste des 33 substances prioritaires. La directive 76/464/CEE reprend également les objectifs de la directive du Conseil 80/68/CEE du 17 décembre 1979 concernant la protection des eaux souterraines contre la pollution causée par certaines substances dangereuses qui interdit les rejets de ces mêmes substances dans les eaux souterraines.

La présente action vise de façon générale la recherche de substances polluantes, notamment celles de la liste des 33 substances prioritaires.

2. Objectifs nationaux

La connaissance des pollutions des milieux est assurée sous la responsabilité de la direction de l’eau par le réseau national de bassin (RNB) et par les réseaux complémentaires. Il importe, en application de la directive 2000/60/CE, de recueillir les données permettant de mettre en relation cette connaissance de l’état du milieu avec les rejets des sources ponctuelles ou diffuses.

Parmi les sources de rejet de substances dangereuses, les sources ponctuelles constituent chacune un cas particulier qui relève le plus souvent de la réglementation des installations classées. La connaissance actuelle des sources de rejet de substances dangereuses est insuffisante car, outre les installations produisant ou utilisant ces substances qui sont connues et suivies à ce titre, d’autres installations sont susceptibles de rejeter de telles substances ou activités dans le milieu aquatique à l’état de traces.

Des actions régionales ont été menées dans ce sens depuis 1990. Elles ont permis de mettre en évidence la présence de micropolluants dans des secteurs insoupçonnés ou dans des entreprises n’utilisant pas ces produits en tant que tels, certaines de ces substances se trouvant dans des préparations prêtes à l’emploi ou dans les matières premières. Elles ont permis également de détecter des fuites de substances ordinairement confinées telles que le PCB. Des mesures ont déjà été prises pour imposer par voie réglementaire une réduction des rejets les plus préoccupants (amélioration de l’efficacité du traitement, modification éventuelle du procédé, etc.), ainsi qu’une augmentation de la fréquence des contrôles par un organisme extérieur. Dans certains cas, ces mesures ont également conduit à la définition de nouvelles exigences de surveillance des rejets et de l’environnement par l’exploitant.

L’accroissement des connaissances et l’expérience qui en ont été retirés, tant sur le plan de la conduite technique des opérations d’identification des rejets présentant un risque pour l’environnement aquatique que sur le plan des priorités, permettent aujourd’hui de généraliser la démarche et d’accroître son efficacité.

Au niveau national, l’objectif est, sur une durée de cinq ans, de rechercher les rejets de substances dangereuses pour environ 5 000 établissements, et lorsqu’un rejet présentant un risque pour l’environnement aquatique aura ainsi été identifié, de faire prendre les mesures nécessaires.

Un comité national sera constitué. Il sera animé par la direction de la prévention des pollutions et des risques et sera composé de représentants de la direction de l’eau, de l’inspection des installations classées, des agences de l’eau, des organisations patronales et des associations de protection de l’environnement.

Ce comité coordonnera les programmes régionaux, en particulier en définissant le cahier des charges technique des opérations à mener à l’échelon régional (appelé ci-après " cahier des charges technique "), en réalisant une synthèse nationale des résultats de ces opérations et en assurant des échanges d’information entre les comités de pilotage régionaux.

Les travaux de ce comité national seront coordonnés avec les travaux des groupes de travail créés par la direction de l’eau pour le suivi de la mise en œuvre de la directive 2000/60/CE.

3. Programmation régionale

Nous vous demandons de définir au niveau régional une liste d’établissements sur lesquels réaliser l’opération. Ensuite, il conviendra que les exploitants concernés réalisent l’opération à conduire pour leur établissement, en liaison avec l’inspection des installations classées et l’agence de l’eau, et conformément au cahier des charges technique.

Nous vous demandons donc de constituer dès maintenant un comité de pilotage régional animé par l’inspection des installations classées et réunissant l’ensemble des parties intéressées : agence(s) de l’eau, direction régionale de l’environnement, organisations patronales et associations de protection de l’environnement, etc. Les organisations patronales doivent constituer un relais particulièrement efficace avec les exploitants. Vous pourrez faire appel utilement aux associations pour l’usage de l’eau lorsqu’elles existent. Vous pourrez également associer les chambres de commerce et d’industrie ou le conseil régional.

Ce comité aura pour mission en 2002 de définir un programme pluriannuel d’action, c’est-à-dire la période de déroulement et le volume des opérations, ainsi que l’ensemble des établissements concernés pour chaque année. Il s’appuiera pour cela sur une liste d’établissements préalablement préparée par l’inspection des installations classées ainsi que sur les établissements situés sur certains bassins-versants identifiés par les services de police de l’eau et les agences de l’eau, notamment les zones protégées selon la directive 2000/60/CE. Les paramètres à prendre en compte pour le choix d’un établissement donné sont notamment les paramètres listés à l’annexe II. Ce programme tiendra compte des actions analogues qui ont pu être menées pendant les années précédentes. Il conviendra également d’assurer la cohérence du programme pluriannuel avec les autres actions qui seront menées pour la mise en œuvre de la directive 2000/60/CE.

Les années suivantes seront consacrées d’une part à réaliser les opérations elles-mêmes, d’autre part à exploiter les résultats et à en tirer les conséquences. Le déroulement de ces travaux sera présenté périodiquement au comité de pilotage régional.

Le comité de pilotage régional pourra réviser le programme pluriannuel d’action afin de prendre en compte le retour d’expérience.

4. Organisation et financement des opérations

Il sera demandé à chaque exploitant concerné de mener une étude des rejets de substances dangereuses par son établissement, en se conformant au cahier des charges technique. S’il ne dispose pas de l’expertise nécessaire, l’exploitant fera intervenir un ou plusieurs prestataires extérieurs disposant de cette expertise. Cette étude comprendra un audit permettant de définir les points de prélèvement et de s’assurer que ces prélèvements sont réalisés pendant une période pertinente de l’activité industrielle.

Cette étude sera menée de préférence dans le cadre d’une participation volontaire des exploitants, ou, le cas échéant, en faisant exercice du pouvoir de police des installations classées.

L’exploitant bénéficiera d’une aide financière apportée par son agence de l’eau, selon des modalités définies par celle-ci en partenariat avec les représentants des exploitants concernés, et en tenant compte de la façon dont l’exploitant se propose de mettre en œuvre l’opération.

En particulier, les organisations patronales du comité de pilotage régional seront des relais utiles pour assurer la promotion de l’action auprès des exploitants et notamment les informer sur les modalités retenues pour l’octroi des aides. Elles pourront également fournir une aide technique aux exploitants sur le choix de prestataires.

5. Exploitation des résultats

L’opération une fois menée pour son établissement, l’exploitant transmettra à l’inspection des installations classées le rapport d’opération conformément au cahier des charges technique. L’ensemble des rapports ainsi remis conduira - de manière simple grâce à l’utilisation de supports informatiques définis au niveau national - à l’établissement annuel d’un tableau de bord régional identifiant les établissements présentant un rejet à risque pour l’environnement aquatique.

Le comité de pilotage régional fera un bilan annuel des résultats et l’inspection des installations classées s’appuiera notamment sur le tableau de bord régional pour prendre des mesures correctives réglementaires, établissement par établissement, compte tenu de l’analyse qui aura été faite de l’origine des substances et des possibilités de réduction. Ces mesures pourront consister à imposer à l’exploitant une réduction des rejets les plus préoccupants en améliorant l’efficacité du traitement des effluents ou en modifiant son procédé, qui se traduira par un abaissement des valeurs limites d’émissions de l’arrêté préfectoral d’autorisation. Elles pourront également consister en un renforcement de la surveillance des rejets, qu’il s’agisse de la surveillance réalisée sous la responsabilité de l’exploitant ou des mesures réalisées sous le contrôle de l’inspection.

Le comité national réalisera un compte-rendu des résultats de l’action nationale, en particulier pour en tirer les enseignements pour les secteurs d’activité listés à l’annexe III.

Dans le cadre de la mise en œuvre de la directive 2000/60/CE, ces résultats contribueront en premier lieu à l’identification des pressions anthropogéniques auxquelles les masses d’eau de surface sont soumises (art. 5, et annexe II, 1.4 de la directive 2000/60/CE) dont l’échéance est fixée à décembre 2004. En deuxième lieu, ils fourniront des éléments pour définir les programmes de surveillance de l’état des eaux qui sont prévus à l’article 8 de la directive 2000/60/CE et doivent être opérationnels en décembre 2006.

A cette fin, nous vous demanderons de nous transmettre annuellement chacun des tableaux de bord régionaux à des fins de consolidation et de suivi de l’action au niveau national.

Nous vous demandons de nous tenir informés de la constitution du comité de pilotage régional sous le double timbre de la direction de la prévention des pollutions et des risques et de la direction de l’eau.

Nous adresserons à ce comité les éléments techniques nécessaires à la réalisation de la présente action nationale, en particulier le cahier des charges technique.

Le directeur de la prévention des pollutions et des risques,

délégué aux risques majeurs,

P. Vesseron

Le directeur de l’eau,

B. Baudot

Annexe I : Liste des substances prioritaires dans le domaine de l'eau (*)

  Numéro CAS (i) Numéro UE (ii) Nom de la substance prioritaire Identifiée en tant que substance dangereuse prioritaire
(1) 15972-60-8 240-110-8 Alachlore  
(2) 120-12-7 204-371-1 Anthracène X (***)
(3) 1912-24-9 217-617-8 Atrazine X (***)
(4) 71-43-2 200-753-7 Benzène  
(5) SO SO Diphényléthers bromés (**) X (****)
(6) 7440-43-9 231-152-8 Cadmium et ses composés X
(7) 85535-84-8 287-476-5 C10-13-Chloroalcanes(**) X
(8) 470-90-6 207-432-0 Chlorfenvinphos  
(9) 2921-88-2 220-864-4 Chlorpyriphos X (***)
(10) 107-06-2 203-458-1 1,2-dichloroéthane  
(11) 75-09-2 200-838-9 Dichlorométhane  
(12) 117-81-7 204-211-0 Di (2-éthylhexyl) phtalate (DEHP) X (***)
(13) 330-54-1 206-354-4 Diuron X (***)
(14) 115-29-7 204-079-4 Endosulfan X (***)
959-98-8 SO (alpha-endosulfan)  
(15) 206-44-0 205-912-4 Fluoroanthène (*****)  
(16) 118-74-1 204-273-9 Hexachlorobenzène X
(17) 87-68-3 201-765-5 Hexachlorobutadiène X
(18) 608-73-1 210-158-9 Hexachlorocyclohexane X
58-89-9 200-401-2 (gamma-isomère, Lindane)  
(19) 34123-59-6 251-835-4 Isoproturon X (***)
(20) 7439-92-1 231-100-4 Plomb et ses composés X (***)
(21) 7439-97-6 231-106-7 Mercure et ses composés X
(22) 91-20-3 202-049-5 Naphthalène X (***)
(23) 7440-02-0 231-111-4 Nickel et ses composés  
(24) 25154-52-3 246-672-0 Nonylphénols X
104-40-5 203-199-4 (4-[para]-nonylphénol)  
(25) 1806-26-4 217-302-5 Octylphénols X (***)
140-66-9 SO (para-tert-octylphénol)  
(26) 608-93-5 210-172-5 Pentachlorobenzène X
(27) 87-86-5 201-778-6 Pentachlorophénol X (***)
(28) SO SO Hydrocarbures aromatiques polycycliques X
50-32-8 200-028-5 (Benzo[a]pyrène)  
205-99-2 205-911-9 (Benzo[b]fluoranthène)  
191-24-2 205-883-8 (Benzo[g, h, i]perylène)  
207-08-9 205-916-6 (Benzo[k]fluoranthène)  
193-39-5 205-893-2 (Indeno[1, 2, 3-cd]pyrène)  
(29) 122-34-9 204-535-2 Simazine X (***)
(30) 688-73-3 211-704-4 Composés du tributylétain X
36643-28-4 SO (Tributylétain-cation)  
(31) 12002-48-1 234-413-4 Trichlorobenzènes X (***)
120-82-1 204-428-0 (1,2,4-Trichlorobenzène)  
(32) 67-66-3 200-663-8 Trichlorométhane (Chloroforme)  
(33) 1582-09-8 216-428-8 Trifluraline X (***)
(i) CAS : Chemical Abstract Services.

(ii) Numéro UE : inventaire européen des produits chimiques commercialisés (EINECS) ou liste européenne des substances chimiques notifiées (ELINCS).

SO : sans objet.

(*) Lorsqu’un groupe de subtances est retenu, un représentant typique de ce groupe est indiqué à titre de paramètre indicatif (entre parenthèses et sans numéro). Les contrôles sont ciblés sur ces subtances types, sans exclure la possibilité de rajouter d’autres représentants, si nécessaire.

(**) Ces groupes de subtances englobent généralement un très grand nombre de composés. Pour le moment, il n’est pas possible de fournir des paramètres indicatifs appropriés.

(***) Cette substance prioritaire est soumise à révision pour sa possible identification comme " substance dangereuse prioritaire ". La Commission adresse au Parlement européen et au Conseil une proposition en vue de la classification définitive de cette substance, au plus tard 12 mois après l’adoption de la liste. Cette révision n’affecte pas le calendrier prévu à l’article 16 de la directive 2000/60/CE pour les propositions de la Commission relatives aux contrôles.

(****) Uniquement pentabromodiphényléther (numéro CAS 32534-81-9).

(*****) Le fluoranthène figure dans la liste en tant qu’indicateur d’autres hydrocarbures aromatiques polycycliques plus dangereux.

Annexe II : Paramètres à considérer pour la sélection des établissements

Présence constatée de substances polluantes dans le milieu.

Sensibilité du milieu récepteur, en fonction de son débit, de sa vocation...

Milieu récepteur signalé par un SDAGE.

Secteur géographique faisant l’objet d’une opération concertée (SAGE, contrat de rivière).

Présence constatée de substances polluantes dans les rejets.

Présence de substances polluantes dans les rejets d’établissements exerçant une activité similaire.

Présence supposée de substances polluantes et absence de données sur les rejets de l’établissement.

Diversité des substances dangereuses présentes dans l’établissement.

Absence de traitement de dépollution des effluents aqueux.

Annexe III : Secteurs d'activité faisant l'objet d'un compte-rendu national

ACTIVITÉS RUBRIQUES de la nomenclature des installations classées
Traitement et stockage des déchets 167, 322
Industrie pétrolière 1431
Industries agroalimentaires (produits d’origine végétale) 2220, 2225, 2226, 2251, 2252, 2253
Traitement des textiles 2330
Traitement des cuirs et peaux 2350, 2351, 2360
Papeterie et pâte à papier 2430, 2440
Verrerie, cristallerie 2530, 2531
Métallurgie (en particulier l’électrométallurgie et l’industrie des métaux non ferreux) 2545, 2546, 2550
Traitement de surface, revêtement de surface 2565, 2940
Fabrication de peintures, de pigments, de colorants, de plastiques 2640, 2660
Industrie pharmaceutique et phytosanitaire 2685
Stations d’épuration 2750, 2752
Chimie et parachimie  

 

 

 

Cahier des charges technique des opérations de prélèvements et d’analyses des rejets de substances dangereuses dans l’eau

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